360e séance - matin
AG/PAL/1290

Deux personnalités de la presse exposent la situation difficile prévalant à Jérusalem-Est devant le Comité des droits inaliénables du peuple palestinien

« Aucun État palestinien ne sera possible sans Jérusalem-Est comme capitale », ont estimé aujourd’hui MM. Ziad Abuzayyad et Hillel Schenker, corédacteurs en chef de la publication « Palestine-Israël Journal », en présentant au Comité pour l’exercice des droits inaliénables du peuple palestinien les difficultés nées de la situation qu’impose Israël à Jérusalem-Est.  La séance de travail tenue ce matin par le Comité a également été l’occasion de rappeler les discussions qui ont été menées par le Comité à Quito, en Équateur, le mois dernier au cours de la réunion internationale des Nations Unies sur la question de Palestine et de la réunion pour l’appui de la société civile à la paix israélo-palestinienne.  Le Comité a aussi annoncé la tenue d’une réunion qui se tiendra à Ankara, en Turquie, au mois de mai, et dont les délégations étaient saisies du programme et de l’ordre du jour.

Recensant les obstacles posés aux Palestiniens et au processus de paix par Israël depuis l’annexion de Jérusalem-Est en 1967, M. Abuzayyad, qui est un ancien membre du Conseil législatif palestinien et ancien Ministre de l’Autorité palestinienne pour les affaires de Jérusalem, a expliqué que la puissance occupante essaie par tous les moyens de réduire le nombre d’Arabes et d’augmenter le nombre de Juifs résidant dans cette partie de la ville.  Israël a mis en œuvre cette politique en commençant par annuler les permis de résidence de la population arabe et en menant une politique d’épuration ethnique à son égard, a accusé M. Abuzayyad.  « Un total de 14 000 Palestiniens ont été chassés de la ville », a-t-il précisé.

M. Abuzayyad a aussi dénoncé la construction de logements par Israël à Jérusalem-Est, ainsi que la mise en œuvre de son plan de modification des structures de la ville, qui exclut les quartiers arabes du développement urbain.  Israël utilise le mur de ségrégation pour exclure les populations arabes de la ville et tente de modifier le statut de la mosquée d’Omar (Haram al-Charif), a-t-il ajouté.

Parmi les mesures israéliennes destinées à l’exclusion des Palestiniens, le journaliste a remarqué que 54% de la ville ne sont pas couverts par le plan d’urbanisme ou sont placés en « zone verte », ce qui voue à l’échec toute demande de permis de construire.  « Seulement un tiers des demandes de construction déposées par des Palestiniens sont accordées », a-t-il observé.

Alors qu’il n’y avait aucun juif en 1967 à Jérusalem-Est, près de 55 000 logements leur sont aujourd’hui attribués, a poursuivi M. Abuzayyad.  Il a remarqué que l’objectif d’Israël est de créer un quartier juif faisant le tour de la ville, pour ainsi empêcher toute liaison directe entre Jérusalem-Est et la Cisjordanie.

L’ancien Ministre de l’Autorité Palestinienne a également signalé que les Israéliens donnent des noms juifs aux quartiers arabes, afin de créer la confusion et tromper leur propre population.  Un autre objectif d’Israël est de fragmenter les quartiers arabes pour les isoler, a-t-il indiqué.  Il a aussi dénoncé la politique de création de parcs nationaux, menée par Israël pour s’approprier les zones en jachère.

Le journaliste et ancien homme politique a ensuite parlé du projet israélien du « Grand Jérusalem », qui a commencé par la construction d’un réseau d’autoroutes et par l’extension du mur, afin d’annexer trois colonies juives à Jérusalem.  « Cela n’a pas été reconnu par la justice comme une forme d’apartheid, mais un jour viendra où on n’hésitera pas à utiliser ce terme », a-t-il prédit.

En ce qui concerne le lieu saint de la mosquée Al-Aqsa, M. Ziad Abuzzayad a dénoncé la présence de plus en plus fréquente de prédicateurs juifs, qui viennent mener leurs activités sur l’esplanade des mosquées.  Indiquant qu’il fallait craindre une explosion de violence religieuse si cela continue, il a lancé un appel pour qu’Israël mette fin immédiatement à toute modification de la ville.  Il faut créer des institutions civiles, politiques et culturelles arabes à Jérusalem et permettre la création de passages dans le mur de séparation, a-t-il plaidé.

Pour compléter les explications de son confrère, M. Schenker, qui est aussi un membre fondateur du mouvement « la Paix maintenant », a souligné la petite taille de l’agglomération de Jérusalem-Est, sa pauvreté et le gros problème de chômage auquel sont confrontés les jeunes israéliens.  La plupart des Israéliens sont en faveur d’un régime international spécial pour Jérusalem, a-t-il indiqué, ceci à condition d’avoir accès à la partie ouest et à la vieille ville.  Il a appelé la communauté internationale et les institutions de l’ONU à jouer un rôle de tierce partie en dissuadant Israël de compromettre l’avenir de Jérusalem, avant d’inviter la communauté internationale à traiter aussi les aspects humanitaires de la situation.

M. Schenker a en outre signalé qu’un Forum pour la paix israélo-palestinienne rassemble des ONG israéliennes et palestiniennes et organise des conférences sur les sujets pertinents.  Il a souligné l’importance des liens existant entre ces organisations et les a invitées à les renforcer.

En réagissant à ces exposés, le représentant de l’Indonésie s’est demandé s’il y avait une lueur d’espoir.  « Les signaux que nous recevons ne sont pas positifs », a remarqué le Président du Comité, M. Abdou Salam Diallo du Sénégal, en rappelant les problèmes que posent la politique d’accaparement des terres par Israël et le projet de loi sur la judaïté de Jérusalem-Est.  Le Comité est en première ligne pour exiger l’arrêt de ces politiques, a-t-il souligné d’un ton ferme.

L’Observateur permanent de l’État de Palestine auprès des Nations Unies, M. Riyad Mansour, a estimé que « la communauté internationale se rapproche d’un point décisif, à condition qu’elle soit prête à faire un pas de plus ».  S’il devient évident que personne ne soutient Israël dans ses activités de colonisation, son gouvernement commencera peut-être à repenser ses stratégies, a-t-il expliqué.  L’exemple que montre l’Union européenne à travers les mesures qu’elle a prises sur la question doit inspirer les autres régions du monde, a renchéri M. Diallo, le Président du Comité.

En début de séance, M. Mansour avait dénoncé le fait que la puissance occupante avait failli à ses engagements pour ce qui est de la libération de prisonniers palestiniens.  Il a aussi déploré qu’« on cherche à priver la Palestine de son statut, acquis en novembre 2012 aux Nations Unies ».  Il a signalé que, le 2 avril dernier, des copies de tous les accords internationaux signés par la Palestine ont été déposées entre les mains du Secrétaire général, qui en est le dépositaire.  Trente jours après cette date, les conventions et traités entreront en vigueur, ce qui veut dire que le 2 mai, la Palestine deviendra partie à tous ces textes, a-t-il expliqué.  Nous avons un statut d’État et nous avons donc le droit d’adhérer aux conventions et traités de l’ONU, a-t-il argué.

M. Mansour a en outre salué le soutien constant apporté à la Palestine par les États de la région de l’Amérique latine.  Il a exprimé son appui au projet de réunir des députés du monde entier à New York à l’automne prochain afin qu’ils apportent leur concours à cette lutte contre l’occupation et soient là pour officialiser l’indépendance de la Palestine.  Il a également demandé aux pays qui soutiennent la Palestine de ne pas accepter l’importation des produits provenant des colonies israéliennes.  « Nous espérons que toutes les banques de votre région prendront des mesures pour ne pas traiter avec les colonies établies sur les terres palestiniennes », a-t-il lancé à l’adresse des pays d’Amérique latine et des Caraïbes.

Passant à la situation politique, M. Mansour a regretté que la partie israélienne ait décidé de faire barrage à ce processus.  Il a estimé que si la partie israélienne continue de se comporter comme elle le fait, notamment avec l’implantation de colonies à Jérusalem et la poursuite des expulsions menées contre les Palestiniens, elle perdra sa capacité et toute crédibilité de convaincre même son propre peuple.  D’autre part, a prévenu M. Mansour, il incombe à la communauté internationale de passer à la vitesse supérieure pour demander des comptes à Israël.

M. Mansour a également fait part de la satisfaction de sa délégation concernant la tenue de la Réunion internationale des Nations Unies sur la question de la Palestine et de la Réunion des Nations Unies pour l’appui de la société civile à la paix israélo-palestinienne, qui se sont tenues à Quito, en Équateur, du 25 au 26 mars 2014.  Il a indiqué avoir tenu, à cette occasion, des réunions bilatérales, notamment avec les autorités équatoriennes, et discuté avec elles de questions telles que la mise en place éventuelle d’une ambassade palestinienne à Quito et d’une ambassade équatorienne en Palestine.

M. Christopher Grima, de Malte, en sa qualité de Rapporteur du Comité, a présenté le rapport des travaux de ces réunions en se félicitant du haut niveau de participation et notamment de l’intervention de 16 panélistes au cours des débats, dont deux Israéliens et deux Palestiniens.  Il a fait part du message que le Secrétaire général a adressé à ces réunions, par la voix de son Sous-Secrétaire général aux affaires politiques, M. Oscar Fernandez-Taranco.  Le Secrétaire général a ainsi exprimé ses préoccupations, notamment du fait de l’augmentation rapide des activités de colonisation menées par Israël et du projet de loi visant à imposer la souveraineté israélienne sur les sites d’Haram al-Charif.

À Quito, le Président du Comité a souligné la responsabilité de la communauté internationale, et notamment des pays d’Amérique latine et des Caraïbes, de prendre des mesures pour mettre Israël en face de ses responsabilités en ce qui concerne les territoires occupés.  Trois séances plénières ont eu lieu, et ont été l’occasion d’entendre des experts, et notamment des journalistes, qui ont fourni aux participants des informations recueillies sur le terrain.  Enfin, la Journée de la société civile a permis des échanges de vues portant notamment sur les questions relatives au boycott à imposer aux produits israéliens provenant des terres occupées et à des sanctions, a indiqué M. Grima.

Aujourd’hui, à New York, le Comité a approuvé le programme provisoire de la réunion internationale sur la question de Jérusalem, qui se tiendra en mai 2014 à Ankara, en Turquie, et qui sera organisée conjointement par l’Organisation de la coopération islamique et le Gouvernement turc.  Cette réunion sera l’occasion d’aborder la question du statut de Jérusalem sous les angles religieux et juridique.  Le représentant de la Turquie a précisé que la date exacte de la réunion serait fournie dans deux ou trois jours.

Enfin, dans le cadre de l’Année internationale de la solidarité avec le peuple palestinien, le Président du Comité a lancé ce matin un appel aux États Membres et observateurs afin qu’ils mettent en place des comités nationaux pour mener des actions de solidarité avec les Palestiniens au niveau national.  L’Observateur permanent de l’État de Palestine, M. Riyad Mansour, a apprécié que cette Année internationale permette une mobilisation en faveur de la cause palestinienne aux quatre coins du monde.  Il s’agit de préparer la société civile, les parlementaires, les universitaires et tous ceux qui nous apportent leur soutien, à contribuer à une solution juste à ce conflit, en mettant fin à une occupation qui dure depuis 1967, a-t-il expliqué.

 

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