CS/11065

Le Représentant spécial pour l’Iraq prévient des difficultés qui restent à surmonter dans la phase de transition du pays vers la démocratie

16/07/2013
Conseil de sécuritéCS/11065
Département de l’information • Service des informations et des accréditations • New York

LE REPRÉSENTANT SPÉCIAL POUR L’IRAQ PRÉVIENT DES DIFFICULTÉS QUI RESTENT À SURMONTER

 DANS LA PHASE DE TRANSITION DU PAYS VERS LA DÉMOCRATIE


« L’Iraq peut soit poursuivre dans la voie de la démocratie, soit s’engager

 dans une voie dangereuse, marquée par l’impasse politique et la violence », souligne M. Martin Kobler


Dix ans après la chute de l’ancien régime et moins de deux ans après le retrait des forces américaines de l’Iraq, le pays se trouve dans une phase cruciale de transition vers la démocratie et la prospérité, a souligné le Représentant spécial du Secrétaire général pour l’Iraq, M. Martin Kobler, qui présentait, cet après-midi, devant le Conseil de sécurité, le rapport* du Secrétaire général sur la Mission d’assistance des Nations Unies pour l’Iraq (MANUI).


Le Représentant spécial s’est dit très préoccupé par les évènements qui ont marqué ces quatre derniers mois en Iraq, période la plus sanglante depuis cinq ans avec près de 3 000 morts et plus de 7 000 blessés.  Les auteurs de ces violences profitent de l’impasse politique actuelle dans le pays et du conflit syrien, a-t-il expliqué.


Sept mois après les premières manifestations de Ramadi, les manifestants continuent à occuper des autoroutes internationales et des places publiques dans les gouvernorats de l’ouest de l’Iraq, a-t-il indiqué.  Le Gouvernement iraquien estime qu’il a déployé tous les efforts possibles pour répondre à leurs demandes, notamment en libérant 8 000 détenus et en levant des saisies de biens.  En outre, le Conseil des ministres a approuvé des amendements aux lois controversées, mais le Parlement ne s’est pas encore prononcé.


M. Kobler a indiqué que, dans l’exercice de son mandat pour la promotion de la réconciliation nationale, il avait mené des consultations avec les dirigeants, les autorités religieuses et les représentants des principaux partis du pays.  Le Gouvernement iraquien a accepté le mécanisme de vérification proposé par la MANUI en ce qui concerne la libération des prisonniers.  La Mission a en outre élaboré une série de principes sur lesquels doit s’appuyer le dialogue: unité et intégrité du territoire iraquien; rejet de toute forme de violence; élimination de toute forme d’incitation au sectarisme; respect de la Constitution en tant que loi suprême; et respect des droits fondamentaux et des droits de l’homme.


Les dirigeants et représentants doivent mettre fin à l’impasse actuelle en adoptant les amendements législatifs pertinents, a-t-il insisté, en demandant également aux manifestants de s’engager sans attendre dans un dialogue constructif.


Rappelant ensuite les incidents du 23 avril 2013, lorsque les Forces de sécurité iraquiennes se sont affrontées aux manifestants dans la ville de Hawija, il a indiqué que, selon les enquêteurs de la MANUI, les forces iraquiennes avaient recouru de manière excessive à la force face à des manifestants en majorité non armés.  Il a rappelé que cet incident avait fait 45 victimes et 110 blessés.  Après la vague de contestations sanglantes qui s’en est suivie dans tout le pays, M. Kobler avait demandé au Gouvernement iraquien de mener une enquête indépendante, a-t-il dit, en signalant qu’un certain nombre de groupes armés avaient été réactivés.


Sur le front électoral, M. Kobler s’est félicité de la bonne participation de la population aux scrutins organisés à Anbâr et à Ninive, et ce, en dépit des menaces et des attaques.  Ce sont les premières élections que les Iraquiens ont réussi à organiser seuls, a-t-il remarqué.


Le Représentant spécial s’est également félicité de l’amélioration des relations arabes-kurdes, en citant notamment des visites réciproques des leaders kurdes et iraquiens.  Il a renouvelé l’offre de la MANUI de prêter son assistance à ce stade, notamment pour résoudre la question des frontières intérieures.  Tout en se disant encouragé par la décision d’organiser des élections parlementaires et provinciales dans la région du Kurdistan le 21 septembre 2013, il s’est dit préoccupé par la décision du Parlement de la région du Kurdistan de reporter les élections présidentielles à 2015.


M. Kobler a ensuite salué la détermination des Gouvernements de l’Iraq et du Koweït à achever le projet d’entretien des bornes frontière entre les deux pays.  Il a aussi indiqué que l’Iraq avait reçu les fonds mis en réserve auprès de l’ONU pour indemniser les particuliers iraquiens dont les biens étaient demeurés sur le territoire koweïtien à la suite de la démarcation de la frontière internationale entre les deux pays.


Concernant les répercussions de la crise syrienne en Iraq, il a signalé que, au 7 juillet, 160 000 réfugiés syriens étaient enregistrés en Iraq, dont la majorité dans la région du Kurdistan.  Il a précisé que 30% de ces réfugiés vivent dans des camps, tandis que le reste se retrouve dans des conditions souvent précaires.  Il a salué les gouvernements de l’Iraq et de la région du Kurdistan pour ce qu’ils ont déjà fait en faveur des réfugiés syriens, tout en leur demandant de fournir davantage de ressources au camp de réfugiés de Domiz.


S’agissant de la situation en matière de droits de l’homme, M. Kobler s’est dit alarmé par le fait que des dizaines d’Iraquiens aient été assassinés de sang froid en plein mois sacré du Ramadan.  Un enfant sur trois, a-t-il ajouté, est privé des services de base et des droits fondamentaux.  Les minorités, comme les Yézidis et les « Noirs iraquiens », sont aussi la cible de violence, notamment de meurtres et d’enlèvements.


Il a également parlé des mauvais traitements et de la torture dans les prisons auxquelles la MANUI n’a d’ailleurs pas pu avoir accès.  S’agissant de la peine de mort, il a assuré qu’aucune exécution judiciaire n’avait eu lieu depuis celles d’avril dernier.  Il a réitéré son appel à appliquer un moratoire sur la peine de mort en Iraq.


En ce qui concerne le camp Ashraf, M. Kobler a expliqué que la majorité de ses résidents avaient été relogés dans le camp Hurriya depuis 2011, tandis que 135 ont été relogés dans des pays sûrs.  Il s’est dit préoccupé par la sécurité des résidents du camp Hurriya après les tirs de missiles dont il a été la cible les 9 février et 15 juin 2013, qui ont fait 10 morts et 71 blessés.  Il a rappelé avoir demandé au Gouvernement iraquien, le seul responsable de la sécurité dans le camp, de remplir cette obligation en prenant des mesures supplémentaires de protection, une demande qui est restée sans réponse.  Il a aussi demandé aux gouvernements d’autres pays de suivre l’exemple de l’Albanie et de l’Allemagne qui ont accueilli des résidents de ce camp.


M. Kobler s’est inquiété des allégations de violations des droits de l’homme dans le camp par les dirigeants du camp eux-mêmes.  Il a prié ces dirigeants de respecter les droits des résidents et notamment leur droit à la libre circulation totale dans le camp et à l’extérieur, ainsi qu’un accès sans entrave aux communications Internet et téléphoniques.


« Les Iraquiens jouissent de libertés nouvellement acquises », a constaté le Représentant spécial, dont le mandat s’achève à la fin de ce mois. 


Pour l’avenir, il a souhaité que la Constitution iraquienne soit pleinement appliquée et que les ressources du pays soient utilisées de manière efficace et distribuées de manière équitable.  L’Iraq, a-t-il rappelé, est le troisième plus grand exportateur de pétrole au monde.  Il a aussi appelé à protéger l’environnement et s’est félicité, à cet égard, du lancement du programme régional de lutte contre les tempêtes de sable par le Programme des Nations Unies pour l’environnement.


Il a également attiré l’attention sur l’insécurité dont souffrent, en particulier, les Iraquiennes et sur le sort des enfants traumatisés par des décennies de conflit.  Enfin, M. Kobler a appelé la communauté internationale à accorder une plus grande attention à la région afin d’élaborer une vision d’ensemble pour elle.


Intervenant au cours de cette séance, le représentant de l’Iraq, M. Mohamed Ali Alhakim, a exprimé le souhait de son gouvernement de voir proroger le mandat de la MANUI d’une année supplémentaire.  Il a estimé que la MANUI avait joué un rôle positif en Iraq en permettant de rapprocher les positions et en contribuant au succès des élections dans les gouvernorats.  Il a émis l’espoir que l’Iraq continuera de bénéficier de l’appui de la Mission sur le plan logistique et de l’envoi d’observateurs chargés d’assurer la transparence des élections législatives de l’an prochain.  Ces élections devront marquer une nouvelle étape sur la voie de la démocratie et d’un transfert pacifique du pouvoir, a-t-il estimé.


M. Alhakim a aussi expliqué que son gouvernement et celui du Koweït avaient été en mesure de régler les questions en suspens depuis très longtemps, notamment en ce qui concerne les disparitions des ressortissants koweitiens ou d’autres nationalités.  L’Iraq poursuit les recherches concernant les disparus, a-t-il assuré.


S’agissant des manifestations, il a réaffirmé le droit pour tout Iraquien d’exprimer son opinion et de le faire dans le calme.  M. Alhakim a également abordé les questions relatives au camp Hurriya et condamné le bombardement récent par des milices.  Après avoir rappelé la nécessité de protéger les résidents du camp, de leur fournir une aide humanitaire et des soins de santé, il a salué la décision du Gouvernement de l’Albanie d’accueillir 170 personnes venant de ce camp, ainsi que l’offre de l’Allemagne visant à accueillir 100 autres résidents. 


Sur le plan des droits de l’homme, il a précisé que son pays avait levé ses réserves à l’égard du paragraphe 9 de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (CEDAW) afin de donner aux enfants nés de mère iraquienne le droit à la nationalité iraquienne.


* S/2013/408


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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