DH/5099

L’Instance permanente réclame un changement de nom, un mécanisme de plaintes et la reconnaissance des indicateurs culturels comme pilier du développement durable

18/05/2012
Conseil économique et socialDH/5099
Département de l’information • Service des informations et des accréditations • New York

Instance permanente sur les questions autochtones

Onzième session

15e séance – après-midi


L’INSTANCE PERMANENTE RÉCLAME UN CHANGEMENT DE NOM, UN MÉCANISME DE PLAINTES ET LA RECONNAISSANCE

DES INDICATEURS CULTURELS COMME PILIER DU DÉVELOPPEMENT DURABLE


Au terme de deux semaines de travaux sur le thème principal de la « Doctrine de la découverte » et marquées par le cinquième anniversaire de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, l’Instance permanente sur ces questions a conclu aujourd’hui sa session 2012 en adoptant une série de neuf recommandations relatives, entre autres, à un changement de nom, à la création d’un mécanisme de dépôt de plaintes et à la reconnaissance des indicateurs culturels comme quatrième pilier du développement durable.


Arguant que son nom date d’avant l’adoption de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, l’Instance permanente sur les questions autochtones a, dans une de ses recommandations, demandé au Conseil économique et social (ECOSOC) que son nom soit remplacé par « Instance permanente sur les droits des peuples autochtones ».


Elle a aussi souscrit à la recommandation de créer un mécanisme international facultatif destiné à recevoir et examiner des communications des peuples autochtones, notamment leurs plaintes en lien avec des violations de leurs droits aux terres, territoires et ressources qu’ils possèdent et occupent traditionnellement ou qu’ils ont utilisés ou acquis.  


L’Instance permanente a en outre recommandé à la Conférence Rio+20, prévue dans la ville brésilienne du 20 au 21 juin 2012, d’approuver les indicateurs culturels comme quatrième « pilier » du développement durable aux côtés de la croissance économique, du développement humain et de la protection de l’environnement.


Toujours à l’adresse des États Membres, l’Instance permanente a recommandé que ce soient les peuples autochtones eux-mêmes qui conduisent les processus de révision constitutionnelle pour renforcer les dispositions relatives aux droits de l’homme, au multiculturalisme et au pluralisme juridique.


Se tournant vers l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI), elle l’a priée de charger un expert autochtone de procéder à un examen technique des projets de texte sur les savoirs traditionnels, les ressources génétiques et les expressions de la culture traditionnelle et a confié elle-même à un de ses membres, le soin d’entreprendre une étude des difficultés rencontrées en la matière par l’Afrique. 


L’Instance a aussi recommandé que les États s’engagent à assurer la souveraineté et la sécurité alimentaires, conformément au principe du consentement préalable donné librement et en connaissance de cause, et à élaborer des normes, des méthodologies et des indicateurs culturels pour évaluer les progrès.  Elle a aussi recommandé à l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) de nouer des partenariats avec les peuples autochtones en vue de l’application des « Directives volontaires sur la gouvernance responsable des biens fonciers, des pêches et des forêts dans le contexte de la sécurité alimentaire nationale ». 


L’Instance permanente a accueilli favorablement l’invitation du Gouvernement mexicain à se faire représenter au sommet du G-20, au mois de juin 2012.


Dans sa déclaration de clôture, le Président de l’Instance permanente, le Grand Chef Edward Jones, a rappelé que cette onzième session avait pour objectif de débattre de la « Doctrine de la découverte » qui, en définitive, avait mis en place des siècles de domination et continue de justifier le contrôle de la vie, des territoires et des ressources des peuples autochtones.  Dans une de ses recommandations, l’Instance permanente souligne en effet que les États n’ont plus le droit de faire preuve de positivisme juridique dans l’interprétation de lois qui ont été adoptées à une époque où des principes tels que le terra nullius avaient cours.  Le droit international relatif aux droits de l’homme, tranche-t-elle, exige des États, qu’ils réparent les torts causés par le passé par ces doctrines, en réformant les lois et les politiques, en restituant les terres spoliées et en appliquant d’autres formes de réparation des violations des droits de propriété.


Après avoir dit que le défi était désormais d’entrer dans une nouvelle ère où les effets de la « Doctrine de la découverte » n’affecteront plus la vie des peuples autochtones, le Grand Chef Edward John a donné la parole au Président du Parlement Sami de Norvège et aux jeunes autochtones du Guatemala qui ont clôturé la session par un chant sacré du peuple sami et une invocation maya rappelant « la force de notre esprit qui nous prépare à une ère de grands changements ».


Dans un autre texte en effet, l’Instance permanente recommande à l’ECOSOC que la Conférence mondiale sur les peuples autochtones ait lieu à New York en septembre 2014, durant la semaine précédant l’ouverture du débat général, de manière à encourager une participation au niveau des chefs d’État et de gouvernement.


L’ECOSOC devrait aussi approuver la recommandation de l’Instance permanente de tenir sa prochaine session, à New York, du 20 au 31 mai 2013 et de permettre à un groupe d’experts internationaux de débattre du thème « Jeunes autochtones: identité, défis et espoir ».


Recommandations de l’Instance permanente sur « La doctrine de la découverte: son impact durable sur les peuples autochtones et le droit à la réparation pour les conquêtes du passé (E/C.19/2012/L.2)


Dans ce texte, l’Instance permanente rappelle la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones que toutes les doctrines, politiques et pratiques qui invoquent ou prônent la supériorité de peuples ou d’individus en se fondant sur des différences d’ordre national, racial, religieux, ethnique ou culturel sont racistes, scientifiquement fausses, juridiquement sans valeur, moralement condamnables et socialement injustes.  Les États n’ont plus le droit de faire preuve de positivisme juridique dans l’interprétation de lois qui ont été adoptées à une époque où des principes tels que le terra nullius avaient cours.  Le droit international relatif aux droits de l’homme exige des États qu’ils réparent les torts causés par le passé par ces doctrines, en réformant les lois et les politiques, en restituant les terres spoliées et en appliquant d’autres formes de réparation des violations des droits de propriété, comme celles prévues aux articles 27 et 28 de la Déclaration des Nations Unies.


L’Instance permanente encourage le lancement de processus de réconciliation conformément aux principes de justice, de démocratie, de respect des droits de l’homme, d’égalité, de non-discrimination, de bonne gouvernance et de bonne foi.  Elle recommande que les États intègrent dans tous les programmes d’enseignement, la doctrine de la découverte et de l’expropriation, ainsi que ses manifestations contemporaines dans le droit foncier et les politiques d’expulsion.


L’Instance permanente souscrit à la recommandation de créer un mécanisme international facultatif destiné à recevoir et examiner des communications des peuples autochtones, notamment leurs plaintes en lien avec des violations de leurs droits aux terres, territoires et ressources qu’ils possèdent et occupent traditionnellement ou qu’ils ont utilisés ou acquis. 


S’agissant de l’Étude sur les constitutions nationales, l’Instance permanente appelle les États à y renforcer les dispositions relatives aux droits de l’homme, au multiculturalisme et au pluralisme juridique.  Elle recommande que ce soient les peuples autochtones eux-mêmes qui conduisent le processus de révision constitutionnelle dans les États Membres.


Pour ce qui est du Rapport sur les effets des changements dans l’utilisation des sols et sur l’aménagement du territoire des éleveurs de rennes autochtones, l’Instance permanente recommande que les organismes des Nations Unies et les États concernés par les éleveurs de rennes autochtones encouragent les programmes de formation et d’éducation destinés aux jeunes et aux communautés d’éleveurs de rennes, afin d’assurer la viabilité et l’adaptation à long terme des sociétés et cultures autochtones pastorales de l’Arctique et de sa région.


Recommandations de l’Instance permanente sur le Rapport sur la réunion du groupe d’experts internationaux consacrée au thème de la lutte contre la violence envers les femmes et les filles autochtones (article 22 de la « Déclaration ») (E/C.19/2012/L.3)


Dans ce texte, l’Instance permanente demande instamment au Conseil économique et social de recommander que son nom soit remplacé par « Instance permanente sur les droits des peuples autochtones ».


L’Instance se dit préoccupée par les violences incessantes commises à l’encontre des femmes et réaffirme ses recommandations antérieures concernant: la traite des êtres humains et l’exploitation sexuelle, la prostitution et les problèmes transfrontières, l’enlèvement ou l’assassinat de femmes aborigènes, les problèmes liés aux documents d’identité et aux certificats de naissance, la violence environnementale, les traumatismes intergénérationnels, le suicide des jeunes, la paix et la sécurité, la prévention et la résolution des conflits, les pratiques culturelles, comme les mutilations et ablations génitales féminines, le versement de dots et les mariages arrangés, le racisme et la discrimination, et la présentation de données ventilées.


L’Instance réaffirme la recommandation du rapport qui exhorte les États à procéder à des recensements nationaux et collecter des données relatifs aux indicateurs socioéconomiques et aux indicateurs de bien-être qui incluent des données ventilées sur les violences exercées sur les femmes et les filles autochtones.  L’Instance recommande que l’Entité des Nations Unies pour l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes (ONU-Femmes) et le Bureau de la cinquante septième session de la Commission de la condition de la femme invitent des femmes autochtones à participer à leurs travaux en tant qu’expertes.


L’Instance exhorte les organisations autochtones à utiliser plus efficacement les instruments de surveillance du respect des droits de l’homme existants et à leur envoyer des communications pour signaler toutes les formes de violences commises à l’encontre des femmes autochtones.


Recommandations de l’Instance permanente sur la concertation globale avec l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) ( E/C.19/2012/L.4)


Dans ce texte, l’Instance permanente prend acte des initiatives de l’OMPI visant à donner aux peuples autochtones la possibilité de contribuer à ses travaux.  Elle se félicite de la création par l’OMPI, du Fonds de contributions volontaires pour les communautés autochtones et locales accréditées et engage vivement les États Membres et les entités publiques et privées à contribuer à ce Fonds.


L’Instance permanente recommande que l’OMPI fasse participer à ses consultations des spécialistes du droit international des droits de l’homme afin de prendre leur avis, notamment, sur l’emploi des expressions « bénéficiaires » et « communautés » pour qualifier les peuples autochtones.  Elle demande que l’OMPI reconnaisse et respecte l’applicabilité de la Déclaration sur les droits des peuples autochtones. 


L’Instance permanente confie à Kanyinke Sena, qui siège en son sein, le soin d’entreprendre une étude des difficultés rencontrées par l’Afrique s’agissant de préserver les savoirs traditionnels, les ressources génétiques et le folklore, étude dont il lui présentera les résultats en 2014.  Elle prie en outre l’OMPI de charger un expert autochtone de procéder à un examen technique des projets de texte sur les savoirs traditionnels, les ressources génétiques et les expressions de la culture traditionnelle.


L’Instance permanente demande que l’OMPI et les États Membres prennent des mesures concrètes en vue d’établir des mécanismes visant à reconnaître le droit des peuples autochtones de préserver leur propriété intellectuelle, notamment leur patrimoine culturel, leurs savoirs traditionnels et leurs expressions culturelles traditionnelles ainsi que les manifestations de leurs sciences, techniques et cultures.


L’Instance permanente engage le Comité intergouvernemental de l’OMPI à nommer des représentants des peuples autochtones aux groupes des amis de la présidence et à la coprésidence des groupes de travail et groupes de rédaction qu’il pourrait créer.  Elle le prie en outre de nommer un autochtone coprésident du Comité plénier.


Projet de recommandations de l’Instance permanente relatives à la Conférence mondiale sur les peuples autochtones E/C.19/2012/L.5


Dans ce texte, l’Instance permanente plaide pour une participation égale, directe et véritable des peuples autochtones à tous les stades de la Conférence mondiale.  Elle réitère l’appel qu’elle a lancé à tous les États Membres pour qu’ils redoublent d’efforts en vue d’adopter les modalités de la Conférence mondiale avant la fin de cette session de l’Assemblée générale.


L’Instance permanente se félicite de l’invitation faite par les Gouvernements du Guatemala, du Guyana et du Mexique et de tous les autres États à discuter des préparatifs de la Conférence mondiale.  Elle se félicite des sept processus autochtones régionaux qui ont été lancés pour préparer la Conférence préparatoire mondiale sur les peuples autochtones qui se tiendra à Alta, en Norvège, en juin 2013.


L’Instance permanente recommande que l’Assemblée générale, à ses deux prochaines sessions, organise des séances thématiques de concertation afin de faciliter l’élaboration d’un document final concis et axé sur une action commune.  Elle décide elle-même d’organiser des travaux sur la Conférence mondiale dans le cadre de ses deux prochaines sessions.


Elle recommande que le Président de la soixante-neuvième session de l’Assemblée générale organise immédiatement après la Réunion de haut niveau de l’Assemblée et avant la tenue de la Conférence mondiale, une séance de concertation thématique d’une durée de deux jours.


L’Instance permanente estime que la Conférence mondiale sur les peuples autochtones, devrait avoir lieu à New York en septembre 2014, durant la semaine précédant l’ouverture du débat général, de manière à encourager une participation au plus haut niveau des États Membres.


Elle recommande que les organisations, fonds et programmes des Nations Unies élaborent pour la Conférence un rapport spécial sur la réalisation des droits des peuples autochtones, des objectifs de la deuxième Décennie internationale, des Objectifs du Millénaire pour le développement et du programme de développement de l’ONU au-delà de 2015.


L’Instance permanente a également fait des Recommandations sur ses travaux futures (E/C.19/2012/L.6), soumis au Conseil économique et social (ECOSOC) des Questions appelant une décision (E/C.19/2012/L.7) et adopté son projet de rapport (E/C.19/2012/L.8). 


Recommandations de l’Instance permanente aux États Membres (E/C.19/2012/L.9)


Dans ce texte, l’Instance permanente demande instamment aux États de lui présenter des rapports détaillés sur la mise en œuvre de la Déclaration et de les inclure dans les rapports périodiques qu’ils doivent présenter en vertu des traités relatifs aux droits de l’homme et au titre de l’examen périodique universel. 


Elle exhorte les États à promouvoir des modèles à suivre pour mettre en œuvre la Déclaration dans les secteurs sanitaire, social, juridique et autres secteurs de services, recommande que l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) revoie le rapport de sa Commission des déterminants sociaux de la santé et se préoccupe des déterminants culturels de la santé, comme la terre, la langue, les rites et l’identité, qui jouent un rôle essentiel dans l’état de santé et le bien-être des peuples autochtones.


Recommandations de l’Instance permanente sur le droit à l’alimentation et la souveraineté alimentaire (E/C.19/2012/L.19)


Dans ce texte, l’Instance permanente note que le droit des peuples autochtones à l’alimentation et à la souveraineté alimentaire est intimement lié à la reconnaissance collective des droits à la terre, aux territoires et aux ressources, ainsi qu’à la culture, aux valeurs et à l’organisation sociale.  


L’Instance invite les États à prendre des mesures positives pour aider les peuples autochtones à renforcer les systèmes alimentaires traditionnels, notamment en reconnaissant officiellement et en délimitant les territoires autochtones.  L’Instance recommande que les États s’engagent à assurer la souveraineté et la sécurité alimentaires, conformément au principe du consentement préalable donné librement et en connaissance de cause, et à élaborer des normes et méthodologies et des indicateurs culturels pour évaluer et traiter la souveraineté alimentaire.


L’Instance permanente accueille favorablement l’invitation que lui a adressée le Gouvernement mexicain afin de se faire représenter au sommet du Groupe des Vingt qui aura lieu en juin 2012, et décide de désigner Saul Vicente et Dalee Sambo Dorough, membres de l’Instance, pour participer au sommet.


L’Instance permanente se félicite de la récente adoption des directives volontaires sur la gouvernance responsable des biens fonciers, des pêches et des forêts dans le contexte de la sécurité alimentaire nationale, établies par l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO).  Elle recommande que la FAO noue des partenariats avec les peuples autochtones en vue de l’application de la politique et des directives.  L’Instance permanente recommande aux États Membres et aux organismes des Nations Unies d’associer les peuples autochtones aux activités prévues pour la célébration de l’Année internationale du quinoa.


La Conférence des Nations Unies sur le développement durable (Rio+20) devrait souscrire aux aspects culturels du développement durable.  L’Instance permanente recommande à la Conférence d’approuver les indicateurs culturels comme quatrième « pilier » en vue de l’élaboration des politiques de développement pour tous les peuples.


S’agissant de l’étude sur la culture itinérante et l’intégrité socioculturelle des peuples autochtones, l’Instance permanente recommande que les États reconnaissent officiellement la culture itinérante comme une occupation traditionnelle des peuples autochtones qui est intimement liée à leur identité et à leur intégrité sociales et culturelles et prennent des mesures efficaces pour mettre fin à tous les actes discriminatoire, notamment en délimitant les territoires et terres concernés et en les dotant de titres.


Pour ce qui est du débat d’une demi-journée sur l’Europe centrale et l’Europe orientale, la Fédération de Russie, l’Asie centrale et la Transcaucasie, l’Instance permanente engage les gouvernements des régions d’Europe centrale et d’Europe orientale, de la Fédération de Russie, d’Asie centrale et de la Transcaucasie à œuvrer de bonne foi avec les peuples autochtones en vue d’adopter sans réserve et d’appliquer intégralement la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.


L’Instance permanente recommande d’instituer davantage de mécanismes pour permettre aux peuples autochtones de participer à la prise de décisions concernant l’utilisation des terres et l’exploration et l’exploitation des ressources ainsi que l’accès à des conseils juridiques gratuits relatifs aux questions de développement.


L’Instance permanente invite les États de la région à favoriser le développement de l’administration autonome des peuples autochtones, la mise en valeur de leurs potentialités inhérentes et de leurs ressources humaines, la formation de parlements suivant l’exemple du peuple sami, ainsi qu’une représentation décente des peuples autochtones peu nombreux dans les organes des pouvoirs législatif et exécutif à tous les niveaux.


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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