CS/10241

Le Procureur de la CPI annonce au Conseil de sécurité son intention de lancer des mandats d’arrêt contre trois personnalités clefs en Libye

04/05/2011
Conseil de sécuritéCS/10241
Département de l’information • Service des informations et des accréditations • New York

Conseil de sécurité

6528e séance – matin


LE PROCUREUR DE LA CPI ANNONCE AU CONSEIL DE SÉCURITÉ SON INTENTION DE LANCER

DES MANDATS D’ARRÊT CONTRE TROIS PERSONNALITÉS CLEFS EN LIBYE


Plusieurs membres du Conseil de sécurité exigent du Bureau du Procureur que la Cour

pénale internationale mène ses investigations en Libye de manière juste et impartiale


Le Conseil de sécurité a entendu, ce matin, un exposé du Procureur de la Cour pénale internationale (CPI), M. Luis Moreno-Ocampo.  Dans sa présentation, M. Moreno-Ocampo a annoncé son intention de lancer des mandats d’arrêt à l’encontre des « trois personnes qui semblent porter la plus lourde responsabilité pour les crimes contre l’humanité commis en Libye depuis le 15 février 2011 ». 


Le Conseil de sécurité avait saisi la CPI de la situation en Libye après l’adoption à l’unanimité, le 26 février dernier, de sa résolution 1970 (2011) dont les termes imposent d’autre part une série de sanctions à l’encontre du gouvernement du Colonel Mouammar Al-Qadhafi.


« Les preuves réunies par le Bureau du Procureur de la CPI confirment les craintes exprimées dans la résolution 1970 », a indiqué aujourd’hui M. Moreno-Ocampo en présentant au Conseil son premier rapport d’enquête.  « Elles établissent des raisons légitimes de croire que des attaques systématiques et généralisées sont et continuent d’être perpétrées contre la population de la Libye, y compris des meurtres et des persécutions pouvant être considérés comme des crimes contre l’humanité ».


Le Procureur a notamment fait état de tirs systématiques effectués par les forces de sécurité, sur des manifestants pacifiques, ainsi que d’arrestations, d’actes de tortures, de meurtres et de disparitions forcées commis à Tripoli, Al Zawiyah, Zintan, ainsi que dans la région des montagnes de Nafousa.  Il a également évoqué l’usage d’armes à sous-munition et d’autres formes de systèmes d’artillerie lourde contre des zones urbaines peuplées, notamment à Misrata.


M. Moreno-Ocampo a de plus signalé que les nouvelles autorités de Benghazi auraient pour leur part arrêté un grand nombre de ressortissants de pays d’Afrique subsaharienne accusés à tort d’être des mercenaires ou des combattants.  À Benghazi et dans d’autres villes contrôlées par la rébellion, des foules en colère ont tué de manière aveugle des dizaines d’Africains d’origine subsaharienne.


Le Procureur a précisé que depuis le début de la crise le conflit avait provoqué des milliers de morts, dont 500 à 700 pendant le seul mois de février, mais qu’il était difficile d’en déterminer le nombre exact, car de nombreux cadavres avaient été ramassés dans les rues ou retirés des hôpitaux.  Le fait pour une personne de porter des traces de blessures était dorénavant considéré comme une preuve d’opposition au régime par les services de sécurité.  Nombre de blessés, par peur de représailles évitent à présent de se rendre dans les hôpitaux pour se faire soigner, a indiqué M. Luis Moreno-Ocampo.


À l’issue de cette présentation du Procureur de la CPI, les membres du Conseil de sécurité ont unanimement condamné les crimes commis en Libye et ont appelé à une résolution rapide et durable du conflit.


« À l’heure où le Moyen-Orient est soulevé par une vague d’expression démocratique, il est important pour la communauté internationale d’adresser un message clair sur la primauté du droit et la lutte contre l’impunité », a notamment déclaré le représentant de la France.  Il a notamment estimé que quelles que soient les décisions que prendront les juges de la CPI, il faudra que le Conseil, de manière « unie et déterminée », les soutiennent.  Il ne peut y avoir aucune solidarité politique ou autre avec ceux qui ordonnent le genre d’actes commis en Libye », a-t-il ajouté.


Le représentant du Royaume-Uni a appelé tous les États Membres des Nations Unies, « parties au Statut de Rome ou non », à coopérer avec la CPI afin de traduire en justice les personnes responsables.


Pour leur part, les autorités libyennes ont été exhortées par le représentant de l’Allemagne à coopérer « rapidement et pleinement » avec la CPI et le Procureur, afin de leur donner la possibilité d’ouvrir « dans les plus brefs délais » une enquête sur le territoire libyen.


Nombre de délégations, dont celles de la Chine, de l’Inde et de la Fédération de Russie ont en outre insisté sur l’importance que la CPI agisse en toute impartialité et que son indépendance soit garantie.  Il est indispensable que la CPI examine de façon équilibrée l’ensemble des évènements survenus en Libye.  De son côté, le représentant du Nigéria a argué que les activités du Procureur devaient être menées de manière à ne pas remettre en cause, mais au contraire à soutenir les efforts politiques déployés en Libye.


Le représentant de la Fédération de Russie a par ailleurs observé que les activités des forces de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN) faisaient elles aussi des victimes civiles, et a estimé qu’elles devaient rigoureusement respecter les termes de la résolution 1973.  « Tout recours disproportionné à la force est inadmissible », a-t-il souligné, soutenu en cela par le représentant de l’Afrique du Sud.  Ce dernier a mis en garde les États membres du Conseil et autres impliqués dans des actions militaires en Libye contre toute interprétation erronée des termes de la résolution du Conseil.  Celle-ci, a-t-il rappelé, a autorisé l’établissement d’une zone d’exclusion aérienne et non le lancement d’actions militaires qui auraient d’autres buts.


LA SITUATION EN LIBYE


Déclarations


M. LUIS MORENO-OCAMPO, Procureur de la Cour pénale internationale (CPI), a indiqué que dans le cadre des enquêtes menées sur les crimes qui auraient été commis en Libye, le Bureau du Procureur avait dépêché plus de 15 missions dans 10 États différents.  Il a précisé qu’aucun entretien avec des témoins n’avait eu lieu en Libye, ceci afin d’assurer leur protection.  « Les preuves réunies confirment les craintes exprimées dans la résolution 1970, a indiqué le Procureur.  Elles établissent des raisons légitimes de croire que des attaques systématiques et généralisées sont et continuent d’être perpétrées contre la population libyenne, y compris des meurtres et des persécutions considérés comme des crimes contre l’humanité ».  Il a également indiqué que des informations pertinentes existaient sur le fait que des actes assimilables à des crimes de guerre aient été commis.


Le Procureur a notamment expliqué que les forces de sécurité « tiraient systématiquement » sur des manifestants pacifiques.  De plus, les évènements en Égypte et en Tunisie ont incité les autorités à se préparer à l’éventualité de manifestations en Libye, et des mercenaires ont commencé à être recrutés dès le mois de janvier, a estimé M. Moreno-Ocampo.


M. Moreno-Ocampo a indiqué que les incidents avaient commencé les 15 et 16 février, suite à l’arrestation de deux avocats qui réclamaient justice pour les 1 400 victimes du massacre de la prison Abu Salim, commis en 1996.  Le 17 février, des milliers de manifestants pacifiques se sont réunis à Benghazi, et les forces de sécurité auraient tiré à balles réelles sur la foule.  Le Procureur a précisé qu’entre 500 et 700 personnes auraient trouvé la mort pendant le seul mois de février, mais qu’il était difficile d’en déterminer le nombre exact, car nombre de corps avaient été retirés des rues et des hôpitaux.  Il a ajouté que le fait pour une personne de porter des traces de blessures était devenu « une preuve d’opposition au régime », ce qui serait un crime selon la juridiction libyenne, et qu’afin d’éviter d’être punis ou de risquer la mort, un grand nombre de blessés n’allaient pas dans des hôpitaux pour se faire soigner.


Le Procureur a également indiqué que des arrestations systématiques, des actes de tortures, des meurtres et des disparitions forcées avaient été signalés à Tripoli, Al Zawiyah, Zintan et dans la région des montagnes Nafousa.  De plus, les victimes de viol seraient arrêtées et soumises à des actes de harcèlement, a indiqué M. Moreno-Ocampo.  Il a indiqué que son Bureau faisait des enquêtes sur ces allégations.  M. Moreno-Ocampo a par ailleurs fait savoir que beaucoup de civils originaires d’Afrique subsaharienne étaient perçus à tort comme étant des mercenaires, et que des dizaines d’entre eux auraient été tués à Benghazi et dans d’autres lieux par des foules en colère.  De plus, les nouvelles autorités de Benghazi auraient arrêté de nombreux ressortissants de pays subsahariens sans que l’on sache pour autant s’il s’agissait de travailleurs migrants ou de combattants.


Au nombre des crimes de guerre qui auraient été commis en Libye, M. Moreno-Ocampo a par ailleurs évoqué l’usage d’armes à sous-munition et d’autres formes d’obus d’artillerie lourde dans des zones urbaines peuplées, et notamment à Misrata.  On indique également que des forces bloquent l’accès à l’aide humanitaire, a-t-il ajouté.  Il a aussi évoqué l’usage de civils comme boucliers humains, et la pratique de la torture contre certains prisonniers de guerre.  M. Moreno-Ocampo a ensuite indiqué que depuis ses débuts, le conflit en Libye avait provoqué des milliers de morts, et que les personnes déplacées comptaient 535 000 travailleurs migrants, réfugiés et demandeurs d’asile et 327 342 Libyens.


M. Moreno-Ocampo ensuite annoncé qu’il allait demander que des mandats d’arrêt soient lancés à l’encontre des « trois individus qui semblent porter la plus lourde responsabilité pour les crimes contre l’humanité commis en Libye depuis le 15 février 2011 ».  Il a ensuite engagé la communauté internationale à prendre, dès maintenant, des mesures pour appuyer les préparatifs de ces arrestations.


M. MARK LYALL GRANT (Royaume-Uni) s’est félicité des mesures prises par le Procureur de la CPI « pour mettre en œuvre les dispositions pertinentes de la résolution 1970 du Conseil de sécurité ».  Sur la base des éléments réunis par M. Moreno-Ocampo, il est possible d’affirmer que des crimes graves ont été commis contre la population libyenne sur instruction d’un groupe d’individus clefs du régime libyen, a estimé le représentant.  Nous avons notamment assisté à des attaques à la roquette dirigées contre des civils à Misrata et dans d’autres localités du pays, ainsi qu’à des recours aux violences sexuelles comme arme de guerre, a-t-il indiqué.  Les États Membres des Nations Unies, parties au Statut de Rome ou non, doivent s’acquitter de leurs obligations internationales et coopérer avec la Cour pénale internationale (CPI) pour faire traduire en justice les personnes responsables, a-t-il estimé.  Le représentant a évoqué en conclusion la situation en Syrie, qui ne cesse de se détériorer, « et où les responsables de crimes graves devront également être traduits en justice ».


M. PETER WITTIG (Allemagne) s’est félicité de ce que l’enquête sur la situation en Libye soit menée « non seulement avec fermeté, mais aussi avec la circonspection requise », notamment en matière de protection des témoins.  Les premiers progrès rapides enregistrés dans l’enquête et dont le Procureur a informé aujourd’hui le Conseil sont encourageants, a-t-il estimé.  La délégation allemande attache la plus grande importance à ce que justice soit rendue le plus rapidement possible aux victimes du conflit libyen, et à ce que les personnes portant une responsabilité particulière dans d’éventuels crimes contre l’humanité ou autres graves délits au sens du Statut de Rome soient contraintes de répondre de leurs actes, a dit M. Wittig.  Ceux qui continuent à commettre des crimes graves en Libye doivent savoir une chose: « le Conseil de sécurité des Nations Unies et la Cour pénale internationale, si nécessaire, ensemble ou séparément dans leur domaine de compétence, garantissent que les crimes de droit international ne resteront pas impunis! », a lancé le représentant.


La coopération de la communauté internationale avec la CPI est essentielle pour permettre de faire toute la lumière sur les graves délits qui auraient été commis en Libye.  L’Allemagne se félicite de l’excellente coopération que de nombreux États et organisations pratiquent déjà avec le Procureur, a relevé M. Wittig.  Néanmoins, a-t-il fait observer, la responsabilité première incombe aux autorités libyennes.  Aussi les a-t-il exhortées à coopérer rapidement et pleinement avec la CPI et avec son Procureur.  Les autorités libyennes sont tenues de donner au Procureur de la CPI la possibilité d’ouvrir dans les plus brefs délais une enquête sur le territoire libyen, a ajouté le représentant.


Extrêmement inquiet devant les souffrances qui continuent d’être infligées à la population civile en Libye, il a affirmé que les violations graves des droits de l’homme restaient à l’ordre du jour.  Le représentant de l’Allemagne a demandé instamment à toutes les parties au conflit de mettre un terme à ces crimes et de respecter les droits de l’homme et le droit international humanitaire.  Il a rappelé en conclusion que son pays avait débloqué, il y a quelques jours, 700 000 dollars pour soutenir financièrement le transport de biens humanitaires à Misrata, en sus des 1,4 million de dollars levés pour permettre l’évacuation par bateau de 1 600 migrants de Misrata.  Au total, a-t-il ajouté, l’Allemagne a déjà fourni plus de 10 millions de dollars d’aide humanitaire au profit de la population civile libyenne.


M. JOSÉ FILIPE MORAES CABRAL (Portugal) s’est dit gravement préoccupé par les indications selon lesquelles des crimes contre l’humanité et des actes de crimes de guerre seraient commis en Libye.  « Une résolution politique du conflit est urgente et il indispensable de parvenir à un cessez-le feu durable », a-t-il affirmé.  Il a également souligné l’importance de la justice, « en tant que valeur humaine ».  Le représentant a par ailleurs estimé que la communauté internationale avait un rôle important à jouer, notamment en matière de prévention de la violence.  Il a ensuite indiqué que sa délégation appuyait la poursuite des enquêtes du Procureur.  Il a aussi insisté sur l’importance d’assurer la protection des victimes et des témoins.  Le représentant du Portugal a par ailleurs dit espérer que la Commission d’enquête du Conseil des droits de l’homme soit bientôt en mesure de poursuivre ses travaux sur le terrain.


M. HARDEEP SINGH PURI (Inde) a rappelé que son pays n’était pas partie au Statut de Rome de la Cour pénale internationale.  Dans son explication de vote sur la résolution 1970 (2011), l’Inde avait clairement rappelé que seule une partie des États Membres des Nations Unies, mais aussi des membres du Conseil de sécurité, y étaient parties, a souligné le représentant.  Nous avons cependant voté en faveur de la résolution, après avoir été convaincus que l’adoption de cette résolution et la saisine de la CPI auraient un effet positif sur la situation sur le terrain, a-t-il rappelé.  Mais malheureusement, les violences à l’encontre des civils se poursuivent, a-t-il regretté.  Sur la base du rapport présenté aujourd’hui par le Procureur de la CPI, il est possible d’estimer que des crimes graves ont été commis en Libye, a relevé le représentant.  Le Procureur devra procéder à une investigation rigoureuse et ne pas se laisser influencer par d’autres considérations que celles qui ont réellement trait aux principes juridiques, a cependant prévenu le représentant de l’Inde.


M. NOËL NELSON MESSONE (Gabon) a salué la « concision et la qualité d’analyse » du rapport de Luis Moreno-Ocampo, Procureur de la CPI.  Il a fait part de l’engagement de sa délégation contre l’impunité sous toutes ses formes, ainsi qu’en faveur de la protection des victimes, entre autres considérations.  Il a appelé toutes les parties au conflit à un cessez-le-feu immédiat.  « Tous les moyens doivent être déployés pour trouver une issue au conflit », a-t-il ajouté.  Les efforts politiques actuellement en cours ne doivent pas influer sur l’exigence de justice face aux actes de crimes contre l’humanité qui auraient été commis, a-t-il estimé.  Il a ensuite engagé le Gouvernement de la Libye à coopérer avec les enquêtes en cours.  Il a également estimé que le Procureur devait disposer de tous les éléments nécessaires pour effectuer une enquête réellement impartiale.  Ma délégation encourage toutes les parties au conflit à coopérer dans ce sens, a ajouté le représentant du Gabon.


Mme MARIA LUIZA RIBEIRO VIOTTI (Brésil) a demandé que ceux qui contrôlent les forces militaires en présence en Libye s’abstiennent de commettre toute violence à l’encontre de la population libyenne.  En outre, a-t-elle ajouté, afin que la CPI puisse s’acquitter de son mandat, il est indispensable que les États parties au Statut de Rome coopèrent pleinement avec cette juridiction.


M. VITALY CHURKIN (Fédération de Russie) a indiqué que sa délégation était alarmée par le nombre croissant de victimes civiles et par la destruction des infrastructures civiles en Libye.  Il a tenu à attirer l’attention du Conseil sur le fait que les activités militaires menées par les forces de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN) faisaient également de nombreuses victimes civiles.  Le représentant de la Fédération de Russie a ensuite souligné que les frappes aériennes et autres activités militaires de la coalition de l’OTAN devaient rigoureusement respecter les termes de la résolution 1973.  « Tout recours disproportionné à la force en Libye est inadmissible », a-t-il souligné.


M. NÉSTOR OSORIO (Colombie) a rappelé que le maintien de la paix et de la sécurité internationales pouvait se superposer à la nécessité de faire traduire en justice les auteurs de crimes graves contre l’humanité.  C’est la raison pour laquelle le Conseil de sécurité a l’autorité de saisir la Cour pénale internationale lorsque ses membres estiment que des violations graves des droits de l’homme sont dirigées à l’encontre de populations civiles, a estimé le représentant.  Il a donc jugé que les activités menées par la CPI dans le cadre de la situation en Libye sont d’une importance capitale, et qu’elles se font dans le cadre de la pleine mise en œuvre de la résolution 1970 (2011).  Dans les informations présentées aujourd’hui par le Procureur, s’est félicité le représentant, il ressort que le Bureau du Procureur a fait preuve d’une diligence remarquable concernant l’application des dispositions pertinentes de ce texte.


M. LI BAODONG (Chine) a relevé que la crise en Libye ne semblait pas se calmer et que les efforts déployés pour y mettre un terme se trouvaient toujours dans l’impasse.  Le représentant a ensuite souligné que la Chine demande que les résolutions du Conseil de sécurité soient mises en œuvre de manière « stricte et complète ».  Il a ensuite lancé un appel au respect de l’intégrité territoriale de la Libye.  La Chine estime que le sort et l’avenir de la Libye doivent être décidés par la population libyenne elle-même et non par des facteurs extérieurs, a déclaré le représentant.  Il a par ailleurs estimé que le Conseil de sécurité devait notamment s’attacher à mettre en œuvre un mécanisme de contrôle pour un cessez-le-feu en Libye.  La CPI doit pour sa part examiner de façon juste et équilibrée l’ensemble des évènements qui se produisent en Libye, a ajouté le représentant de la Chine.


M. KIO SOLOMON AMIEYEOFORI (Nigéria) a rappelé que la lutte pour la justice et celle contre l’impunité étaient des valeurs importantes pour le Nigéria, qui est partie au Statut de Rome.  Il s’est félicité du rapport préliminaire du Procureur de la CPI sur la situation en Libye, qui fournit des bases suffisamment étayées pour justifier l’ouverture d’une enquête rigoureuse par son Bureau sur les crimes graves perpétrés contre les civils.  Pour le représentant, il est important que les activités du Procureur soient menées de manière à ne pas remettre en cause les efforts politiques déployés aujourd’hui en Libye, en particulier ceux de l’Envoyé spécial du Secrétaire général pour ce pays.  Ces efforts doivent recevoir tout le soutien possible, a préconisé le représentant du Nigéria.  Il sera cependant difficile de voir les intérêts de la Cour pénale internationale servis sans une pleine coopération internationale, a-t-il ajouté en conclusion.


M. DOCTOR MASHABANE (Afrique du Sud) a indiqué que sa délégation était préoccupée par les crimes commis à l’encontre des populations civiles et par les violations des droits qui surviennent dans le cadre du conflit en Libye.  Le représentant a encouragé le Procureur à n’ignorer aucun acte afin de renforcer les dossiers qu’il établit contre tous les responsables de violences.  Des crimes peuvent avoir été commis par les deux camps et l’ont certainement été, a-t-il commenté.  Tournant ensuite son attention sur la résolution 1973, il a estimé que toutes mesures militaires prises par quelque partie que ce soit, et qui iraient au-delà des termes du paragraphe opératoire 6 de la résolution, instituant une zone d’exclusion aérienne au dessus de la Libye, ne respectent pas le texte et en sont une violation.


Mme SUSAN RICE (États-Unis) a déclaré que les dernières informations disponibles « établissent clairement que le régime libyen poursuit ses attaques contre les civils ».  Elle a déclaré que le Gouvernement des États-Unis se félicitait de la réaction rapide du Bureau du Procureur qui a décidé d’émettre, dans les semaines à venir, un mandat d’arrêt international contre certaines personnalités clefs du régime libyen et d’ouvrir une enquête sur plusieurs affaires différentes.  La représentante a rappelé que les États-Unis continueront de discuter avec les autres membres du Conseil des moyens de résoudre la crise, notamment par l’entremise de l’Envoyé spécial du Secrétaire général en Libye.  Par son oppression brutale, le Colonel Al-Qadhafia démontré qu’il n’avait que faire d’une Libye pacifique, a estimé la représentante.


M. NAWAF SALAM (Liban) a rappelé que le 22 février 2011, le Conseil de la Ligue des États arabes avait condamné les actes perpétrés à l’encontre des civils libyens.  Il s’est dit gravement préoccupé par la détérioration de la situation en Libye, ainsi que par le comportement du régime, qui est « discrédité et délégitimé », à Misrata notamment.  Il s’est félicité de la méthode de travail appliquée par le Procureur de la CPI afin de veiller à la protection des témoins.  Le représentant a également souligné l’importance de traduire en justice les auteurs de crimes « immondes » commis en Libye.  « Ma délégation espère que le travail de la CPI permettra de mettre fin à l’ère de la culture de l’impunité », a-t-il ajouté.


M. IVAN BARBALIĆ (Bosnie-Herzégovine) a indiqué que le rapport du Procureur établissait de manière très claire les graves violations du droit international humanitaire et des droits de l’homme commises en Libye.  Il s’est déclaré convaincu que rendre justice et lutter contre l’impunité constituent des conditions préalables pour la réconciliation, la paix durable et la stabilité en Libye.  Le représentant a réaffirmé en conclusion l’engagement de son pays en faveur des principes et des idées défendues par la Cour pénale internationale (CPI).


M. GÉRARD ARAUD (France) a déclaré que lorsqu’un gouvernement se retourne contre ses propres populations civiles au lieu de les protéger; lorsque les atrocités commises « sont telles qu’elles heurtent la conscience même de l’humanité », lorsque la stabilité de toute une région est affectée, « la communauté internationale a la responsabilité d’intervenir et de protéger les civils ».  « C’est ce que nous avons fait en Libye », a-t-il dit. 


Il a relevé que le rapport du Procureur de la CPI confirmait les craintes exprimées par le Conseil, et que les attaques des Forces de sécurité libyennes contre les manifestants agissant de manière pacifique avaient été « systématiques et généralisées ».  De toute évidence, a-t-il ajouté, à Misrata et ailleurs, ce ne sont pas des objectifs militaires qui sont les cibles privilégiées, mais la population civile que l’on tente de briser en utilisant les méthodes les plus indignes.  À l’heure où le Moyen-Orient est soulevé par une vague d’expression démocratique, a-t-il estimé, il importe pour la communauté internationale d’adresser un message clair sur la primauté du droit et la lutte contre l’impunité.


Faisant par ailleurs remarquer que les premiers mandats d’arrêt seraient prochainement demandés aux juges de la CPI, le représentant de la France a estimé qu’il était encore temps « pour ceux qui se sont fourvoyés dans la campagne criminelle menée contre des civils innocents de s’en dissocier ».  « Il ne peut y avoir aucune solidarité politique ou autre avec ceux qui ordonnent de tels actes », a-t-il ajouté.  Le représentant de la France a par ailleurs estimé que quelles que soient les décisions que prendront les juges, il faudra que le Conseil, « uni et déterminé », les soutiennent.


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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