AG/EF/3321

Deuxième commission: des délégations déplorent la volatilité des cours des produits de base, issue d’une spéculation qui mine le développement des pays pauvres

28/10/2011
Assemblée généraleAG/EF/3321
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Deuxième Commission

27e séance – matin


DEUXIÈME COMMISSION: DES DÉLÉGATIONS DÉPLORENT LA VOLATILITÉ DES COURS DES PRODUITS DE BASE,

 ISSUE D’UNE SPÉCULATION QUI MINE LE DÉVELOPPEMENT DES PAYS PAUVRES


La Commission économique et financière (Deuxième Commission) a terminé ce matin, l’examen du point de son ordre du jour relatif aux questions de politique macroéconomique, dont notamment le thème du commerce international et du développement, et celui des produits de base.  Le débat relatif à ces questions avait été entamé hier matin.  Des délégations avaient alors rappelé la place prépondérante du commerce, en tant que source de revenus pouvant être mobilisés pour le financement du développement, dans le cadre de la promotion d’un développement durable profitant à tous les pays et peuples.  Elles avaient également invité la communauté internationale à conclure, dans les délais les plus brefs, le Cycle de négociations commerciales de Doha, dit « Cycle du développement », dont les pourparlers sont dans l’impasse du fait de blocages sur la question du commerce et de l’accès aux marchés des produits agricoles.


Au cours des débats d’aujourd’hui, des délégations ont soutenu que la volatilité des prix des produits de base, due à la spéculation dont ils sont l’objet sur les marchés internationaux, est un obstacle sérieux pour le développement des pays qui en sont dépendants.  Le rapport 2009 de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), relatif à la crise alimentaire, stipule que les prix des denrées alimentaires, pour l’année 2008, ont connu une augmentation de 50 à 200%.  Cette augmentation a poussé 110 millions de personnes dans la pauvreté, et en a plongé 44 millions d’autres dans un état de sous-alimentation chronique tout en provoquant des troubles sociaux et parfois politiques dans les pays affectés. 


Dans le même cadre, le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) fait savoir qu’il existe une corrélation positive entre la dépendance d’un pays et de son économie envers des produits agricoles de base et la pauvreté de sa population, telle qu’elle est mesurée par l’Indice de développement humain (IDH).  Il apparaît donc que la fluctuation des prix de produits de base est une plaie pour le développement économique des pays en développement qui les exportent, car elle entraîne des fluctuations incontrôlables dans leurs recettes d’exportation, et par conséquent a un impact majeur sur leur capacité de budgétisation et d’investissement public.  Ces fluctuations entraînent en effet des mouvements imprévisibles dans le revenu intérieur, l’épargne et les recettes publiques (souvent largement tributaires des taxes collectées dans le secteur des exportations) et, par conséquent, créent une incertitude dans tous ces domaines.  Ainsi, la volatilité des prix de produits de base entraîne une instabilité macroéconomique, qui nuit non seulement au développement économique, mais aussi aux équilibres sociaux.   


Abordant la question de la volatilité des cours des produits de base, le représentant du Mozambique a souligné que la baisse sensible des prix à l’exportation qui touche son pays affecte également la balance des paiements du Mozambique dont la dépendance envers quelques produits clefs rend l’économie très vulnérable.  La représentante du Mexique a expliqué que la part des stocks de maïs achetée par des sociétés cotées en bourse ne cesse d’augmenter, et constitue aujourd’hui 30% du total des transactions effectuées sur cette denrée.  Elle a invité la communauté internationale à établir des mesures pour faire face à la spéculation qui en découle, et elle a, dans ce contexte, invité les Nations Unies à s’impliquer dans l’amélioration des systèmes commerciaux. 


Le représentant du Fonds commun pour les produits de base a, pour sa part estimé que la dépendance et la vulnérabilité des pays dont l’économie est soutenue par les produits de base, apparaît comme un aveu d’échec à mettre en place des alternatives durables pour diversifier leur économie.  


La Deuxième Commission se réunira en séance publique lundi, le 31 octobre 2011 à 10 heures, et entamera l’examen du point de son ordre du jour consacré au développement durable.  La Commission entendra, à cette occasion, un discours du Président de la soixante-sixièmesession de l’Assemblée générale, M. Nassir Abdulaziz Al-Nasser, du Qatar.


QUESTIONS DE POLITIQUE MACROÉCONOMIQUE


Suite du débat général


M. AHMAD NASEEM WARRAICH (Pakistan) a noté qu’en ces temps de crise économique mondiale, il serait dommage de ne pas utiliser le potentiel énorme du commerce comme un levier de croissance et de développement.  Le représentant a évoqué les tendances au protectionnisme qui ont marqué les débuts de la crise économique internationale, et il a invité les États à se détourner de cette pratique en cette période où l’économie mondiale est toujours dans la tourmente.  Il a estimé que l’absence d’accord en ce qui concerne la conclusion du Cycle de négociations commerciales de Doha mine le développement des pays pauvres, et constitue un obstacle majeur à la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD).  Il a ajouté que « tout échec à la conclusion de ce Cycle de négociations va, non seulement affaiblir l’OMC et le multilatéralisme, mais également déstabiliser le système commercial international ».  Le représentant a ensuite noté que la volatilité des prix des produits de base, si elle n’est pas maîtrisée, peut avoir des impacts négatifs sur le développement.


M. RABEE JAWHARA (République arabe syrienne) a tenu à s’exprimer sur la question des sanctions économiques unilatérales prises par certains États à l’encontre d’autres États.  Il est brièvement revenu sur le fait que la Syrie a adopté de nombreuses mesures économiques pour passer d’une économie dirigiste à un système économique ouvert, multilatéral et non discriminatoire.  Il a plaidé en faveur de l’adhésion de tous les pays en développement à l’Organisation mondiale du commerce (OMC) et pour que soient levées au plus tôt les barrières posées à cette intégration.  Le représentant a ensuite exposé les sanctions économiques dont souffre la Syrie, indiquant que son pays a adressé une lettre au Président de l’Assemblée et au Secrétaire général des Nations Unies pour évoquer les mesures unilatérales prises par les États-Unis, l’Union européenne ou encore l’Australie à son encontre. 


Ces mesures ont ciblé les secteurs économiques, commerciaux, financiers et bancaires de la Syrie, a révélé le représentant.  Cela affecte directement le niveau de vie du citoyen syrien et sa prospérité, a-t-il souligné.  Il a estimé que ces mesures unilatérales de sanctions violent toute éthique et sont contraires au respect de la Charte des Nations Unies, notamment en ce qui concerne le respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale des États.  Il a jugé que de telles mesures ont, par ailleurs, un impact dangereux sur la manière dont est perçu le système international.  Elles vont à l’encontre du principe d’un système international ouvert, transparent et équitable, et sont au contraire un moyen arbitraire d’exercer des pressions politiques qui porte atteinte au respect de la politique intérieure des États.  Le représentant a par conséquent indiqué que son pays « dénonce avec la dernière vigueur devant la Deuxième Commission ces mesures illégales ».  Il a demandé que soit immédiatement mis un terme à ce genre d’actions et que certains pays cessent d’inciter d’autres États à imposer des mesures similaires à son pays.


Mgr FRANCIS ASSISI CHULLIKATT,Observateur permanent du Saint-Siège auprès des Nations Unies, s’est réjoui de constater qu’à l’instar de sa délégation, qui, lors de la Conférence de Doha pour l’évaluation de la mise en œuvre des engagements du Consensus de Monterrey sur le financement du développement, en 2008, avait fait un plaidoyer en faveur d’un système commercial plus juste et équitable, la plupart des pays en développement n’ont eu de cesse de réclamer une conclusion positive du Cycle de négociations commerciales de Doha.  L’Observateur du Saint-Siège s’est ensuite dit être étonné que deux ans après le Sommet du G-20 à Pittsburgh, en Pennsylvanie, les promesses faites par les pays riches n’aient pas été suivies d’effets, et que, pire, les perspectives de réforme en matière commerciale semblent plus éloignées que jamais.


MgrChullikatt a observé que les difficultés économiques qui touchent les pays développés ne devraient pas être un prétexte pour que ceux-ci cessent d’être solidaires des pays les plus pauvres.  Il a exhorté les pays industrialisés à consentir à plus de sacrifices, et à faire preuve de courage politique en vue d’œuvrer à la promotion du commerce équitable.  Le secteur agricole, a-t-il ajouté, demeure celui offrant beaucoup de perspectives de développement pour nombre de pays en développement.  Les pays riches devraient donc agir afin de garantir une meilleure protection et de meilleurs débouchés aux agriculteurs des pays pauvres.  « Les potentiels bénéfices pour les pays en développement seraient substantiels si des progrès étaient enregistrés, notamment en terme d’accroissement de l’accès de leurs produits aux marchés agricoles des pays du Nord», a-t-il déclaré.


Mme SARAH LUNA (Mexique) a relevé que la croissance des échanges commerciaux conduit également à l’accroissement des fluctuations des prix des produits de base.  Elle a indiqué que sur le marché mondial, la part des stocks de maïs achetée par des sociétés cotées en bourse ne cesse d’augmenter, et constitue aujourd’hui 30% du total des transactions effectuées sur cette denrée.  Elle a invité la communauté internationale à établir des mesures pour faire face à la spéculation qui en découle, et elle a, dans ce contexte, invité les Nations Unies à s’impliquer dans l’amélioration des systèmes commerciaux.  Elle a également estimé que la conclusion du Cycle de négociations commerciales de Doha devrait permettre d’apporter des solutions aux dérèglements et déséquilibres en cours dans les échanges commerciaux.  La représentante a rappelé que le commerce est un élément central du développement, et elle a exhorté la communauté internationale à prendre en considération les dimensions sociale et écologique dans les discussions qui auront lieu dans l’avenir sur le système commercial multilatéral.  Elle a souhaité que le nouveau système qui en sortira puisse tenir compte, à la fois des intérêts des pays riches et de ceux des pays en développement.


M. ANTÓNIO GUMENDE (Mozambique) a souligné que la crise financière mondiale a touché le Mozambique de diverses manières, et notamment en ce qui concerne le commerce international.  Il a parlé de la baisse sensible des prix à l’exportation qui affecte son pays et de la difficulté à obtenir des devises.  Tout ceci a affecté la balance des paiements du Mozambique dont la dépendance envers quelques produits clefs rend l’économie très vulnérable, a souligné le représentant.  Ce dernier a précisé que son pays s’efforce de mettre en place des mesures économiques pour faire face à la situation actuelle.  Il a ensuite parlé des nombreux défis que le Mozambique doit relever, notamment celui concernant la recherche d’un meilleur accès aux marchés internationaux pour pouvoir dégager des recettes à l’exportation et ainsi stimuler sa croissance. 


Dans ce contexte, a dit le représentant, le Mozambique exprime son soutien à toutes les mesures et initiatives qui favoriseront un accès amélioré des produits des pays en développement aux marchés mondiaux.  Il a souligné l’importance de l’aide au commerce pour renforcer les capacités d’exportation des pays les moins avancés (PMA), ce qui les aiderait à accroître leur éventail de produits commercialisables et les aiderait à diversifier leur économie.  Le représentant a aussi déploré la stagnation des négociations du Cycle de Doha et a dit qu’il plaçait beaucoup d’espoirs dans les discussions qui auront lieu lors de la huitièmeConférence de l’OMC, prévue en décembre, à Genève (Suisse).  Il a fait valoir que les pays en développement ont besoin d’aide pour acquérir les capacités qui leur permettraient d’adapter leurs économies aux circonstances actuelles, et a estimé que le commerce international doit servir les objectifs du développement. 


M. ALI MCHUMO, Fonds commun pour les produits de base, a rappelé que le Fonds commun pour les produits de base avait été créé afin de réguler les transactions commerciales portant sur les produits de base, notamment en stabilisant les cours et les prix de ces produits, ce qui permettrait de générer de substantielles rentrées financières pour les pays en développement dont l’économie en est étroitement dépendante.  M. Mchumo a salué les récentes décisions prises par le G-20, qui vont dans le sens de la promotion de la transparence des marchés pour permettre la stabilisation des prix des produits alimentaires.  Le représentant a indiqué ensuite que les pays qui dépendent des produits de base ne devraient pas hésiter à tirer profit des opportunités grandissantes sur le marché de ces produits.  Il a estimé que la dépendance et la vulnérabilité des pays dont l’économie est soutenue par les produits de base, apparaît comme un aveu de l’échec de la communauté internationale à aider ces pays à mettre en place des alternatives durables de diversification de leurs économies.  M. Mchumo a également affirmé que les mesures d’assistance internationale en faveur du secteur des produits de base, n’ont pas beaucoup évolué ces 20 dernières années.  Et ce laxisme, a-t-il expliqué, pourrait justifier les problèmes que connaissent les pays dont l’économie dépend essentiellement de ces produits.  Il a suggéré un certain nombre de solutions pour dynamiser le secteur des produits de base.  Ceci pourrait être fait en renforçant la place des technologies de pointe dans l’agriculture par exemple, ou en prenant des mesures pour réduire la vulnérabilité des agriculteurs face aux fluctuations du marché, a-t-il indiqué.


Mme AMBER BARTH, Organisation internationale du Travail (OIT), a indiqué que la libéralisation des marchés permet de libérer les pays des contraintes qui se posent à eux quand leurs économies demeurent purement locales.  Cette libéralisation contribue également à la diffusion des progrès techniques et permet aux pays d’améliorer les modes et niveaux de vie de leurs populations, a estimé Mme Barth.  Elle a aussi fait valoir qu’un commerce international ouvert et libéralisé aura pour conséquence de déclencher des restructurations économiques, via la fermeture de certaines entreprises qui ne peuvent soutenir la concurrence dans leurs secteurs d’activité, mais que cela aura un impact positif à plus long terme sur l’emploi, en générant des restructurations en faveur de la création de sociétés travaillant dans des domaines capables de générer des produits et des emplois à plus forte valeur ajoutée et à revenus plus élevés. 


Il est toutefois nécessaire que ces évolutions du marché de l’emploi s’accompagnent de politiques sociales adaptées pour pouvoir redistribuer équitablement les fruits de ce type de développement économique, a souligné Mme Barth.  La représentante de l’OIT s’est aussi exprimée sur la question du développement par l’investissement des revenus tirés du commerce, qui intéresse les PMA, soulignant à quel point il est important de favoriser une meilleure intégration de ces pays dans le commerce mondial.  Elle a toutefois mis en garde contre un modèle unique de politique commerciale, estimant qu’il revient aux gouvernements des PMA de décider eux-mêmes du contenu de leurs politiques économiques en fonction de leur niveau de développement, de leurs réalités nationales, et de la taille de leur marché.  Concernant ces questions, elle a estimé que conclure rapidement le Cycle de Doha permettrait d’envoyer un signal positif aux pays en développement.


M. RALF BREDEL, Organisation des Nations Unies sur le développement industriel (ONUDI), a relevé que la crise économique actuelle, dont l’une des manifestations est la volatilité des prix des matières premières, révèle le besoin qu’ont les pays en développement de diversifier leurs exportations.  Il a ajouté que les expériences passées laissent croire que les exportations de produits manufacturés offrent des possibilités plus solides et plus durables de croissance économique, contrairement à l’exportation de produits de base.  Il a estimé que garantir des tarifs préférentiels aux pays en développement ne suffit pas, et il a suggéré à ces pays de faire les efforts nécessaires pour assurer la compétitivité de leurs produits sur le marché international, dans un environnement devenu extrêmement concurrentiel. 


M. Bredel a ensuite soutenu que les pays en développement devraient aussi se connecter aux marchés mondiaux grâce à des systèmes de transport et de douane efficaces, et par l’emploi de systèmes et de stratégies de marketing adéquats.  M. Bredel a également indiqué que l’édition 2010 du rapport intitulé « Guide des ressources interinstitutions des Nations Unies sur le renforcement des capacités commerciales » vient d’être publiée.  Il a précisé que ce rapport a, pour la première fois, abordé la question des programmes de coopération commerciale mis en place par les pays riches au bénéfice des pays en développement.   


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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