AG/11080

Les migrations internationales, une chance pour le développement, estiment les participants à un dialogue informel de l’Assemblée générale

19/05/2011
Assemblée généraleAG/11080
Département de l’information • Service des informations et des accréditations • New York

Assemblée générale

Soixante-cinquième session

Débat thématique informel

matin & après-midi


LES MIGRATIONS INTERNATIONALES, UNE CHANCE POUR LE DÉVELOPPEMENT, ESTIMENT

LES PARTICIPANTS À UN DIALOGUE INFORMEL DE L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE


« Il faut se garder d’adopter des politiques protectionnistes

et isolationnistes », affirme le Président de l’Assemblée générale


Dans la société mondialisée du vingt et unième siècle, la migration internationale, estimée à 214 millions de personnes en 2010, au lieu d’être synonyme d’anxiété et de repli sur soi, gagnerait à être considérée comme une chance de plus dans la réalisation du développement, ont estimé aujourd’hui les participants au débat thématique informel de l’Assemblée générale sur les « migrations internationales et le développement ».


« Depuis le premier Dialogue de haut niveau sur les migrations tenu en 2006, un appel avait été lancé pour le renforcement de la coopération internationale afin de maximiser les effets positifs des migrations », a déclaré, à l’ouverture, le Président de l’Assemblée générale, M. Joseph Deiss.  « Nous devons nous garder d’adopter des politiques protectionnistes et isolationnistes », a-t-il déclaré, car, a-t-il ajouté, « l’Histoire a démontré que ce genre de politique coûte cher à ceux qui les adoptent ».


Il a également noté, à l’issue de la journée de débat, que plusieurs États et conférenciers avaient estimé que l’Assemblée générale était l’enceinte idéale pour débattre des questions des migrations internationales. 


La migration est « une bonne chose pour le développement » et essentielle pour la coopération internationale, mais, a ajouté M. Deiss, un certain nombre de pays n’en sont pas encore convaincus et les gouvernements doivent clairement dire s’ils sont pour ou contre.


L’Assemblée générale avait décidé, en 2008, l’organisation d’un tel débat, dans le dessein d’élargir le Dialogue de haut niveau sur les migrations internationales qui se tiendra en 2013.


Ce Dialogue de haut niveau constituera une occasion importante pour l’amélioration de la coopération mondiale, a auguré le Secrétaire général de l’ONU, M. Ban Ki-moon.  D’ici là, le Forum mondial sur les migrations internationales et le développement, présidée cette année par la Suisse, aura produit un rapport d’évaluation sur les enseignements tirés et la voie à suivre, a-t-il précisé.


M. Ban a noté que cet échange avait lieu alors que « des changements historiques s’opèrent dans le monde arabe suscitant des espoirs immenses mais qui montrent aussi combien il est malaisé de protéger les migrants lorsqu’une crise frappe ».


« Des milliers de personnes fuient la violence en Libye.  Elles traversent le désert, s’embarquent sur les mers, risquent leurs vies en quête de sécurité », a affirmé le Secrétaire général.  « De nombreux pays riches, les pays avoisinants et les pays d’origine ont tous des responsabilités partagées. »


Le dialogue informel s’articulait autour de deux tables rondes, l’une sur la « contribution des migrants au développement » et l’autre intitulée « Améliorer la coopération internationale en matière de migrations et de développement ».


DÉBAT THÉMATIQUE INFORMEL SUR LE THÈME « MIGRATIONS INTERNATIONALES ET DÉVELOPPEMENT »


Déclarations liminaires


M. JOSEPH DEISS, Président de la soixante-cinquième session de l’Assemblée générale des Nations Unies, a souhaité que les discussions au cours de cette journée permettent d’apporter une contribution remarquable au débat de haut niveau sur les migrations internationales et le développement, qui doit se tenir au cours de la session de l’Assemblée générale de 2013.  Il a noté que le nombre de migrants internationaux était estimé à 214 millions pour l’année 2010, et que ce chiffre ne cessait de croître.  Le Président a rappelé que depuis le premier Dialogue de haut niveau sur les migrations tenu en 2006, un appel avait été lancé pour le renforcement de la coopération internationale afin de maximiser les effets positifs des migrations.  Les domaines spécifiques méritent une attention particulière à cet effet, a relevé M. Deiss.  Il a ainsi cité, entre autres, la collaboration entre pays d’origine et pays de destination, des facilités et des programmes multilatéraux qui ont conduit à des financements de 240 millions de dollars pour promouvoir le potentiel des migrations internationales. 


Rappelant que les effets de la crise économique mondiale se faisaient encore sentir dans certains pays, il a regretté que cette situation crée encore un climat xénophobe dans des pays de destination, ceci ayant un impact négatif sur les mouvements migratoires.  « Nous devons nous garder d’adopter des politiques protectionnistes et isolationnistes », a-t-il déclaré, car, a-t-il ajouté, l’Histoire a démontré que ce genre de politique coûte cher à ceux qui les adoptent. 


M. BAN KI-MOON, Secrétaire général des Nations Unies, a affirmé qu’il suivait étroitement, depuis plusieurs années déjà, cette question importante et, qu’à trois reprises, il avait participé au Forum mondial sur la migration et le développement (FMMD) à Bruxelles, Manila et Athènes.  Il a précisé qu’il ne se contentait pas de faire des discours publics, mais qu’il plaidait constamment en faveur des droits des migrants, en privé, lors de ses réunions avec les dirigeants internationaux car, a-t-il dit, ce problème mondial touche des personnes parfois vulnérables.


Alors qu’on se réunit, des changements historiques s’opèrent dans le monde arabe suscitant des espoirs immenses mais qui montrent aussi combien il est malaisé de protéger les migrants lorsqu’une crise frappe, a-t-il souligné.  Des milliers de personnes fuient la violence en Libye.  Elles traversent le désert, s’embarquent sur les mers, risquent leurs vies en quête de sécurité.  De nombreux pays riches, les pays avoisinants et les pays d’origine ont tous des responsabilités partagées.  Il a indiqué avoir, depuis le début de la crise, exhorté les gouvernements à garder les frontières ouvertes et à s’abstenir de restreindre la migration.


Le Secrétaire général a ensuite abordé le thème de la traite des personnes, dont la forme la « plus répréhensible est le commerce du sexe », surtout chez les femmes et les enfants, qui sont parmi les plus vulnérables sur terre.  Ils n’ont pas de papiers, pas de protection et aucun moyen de s’en sortir.  « Ils ont besoin de notre assistance », a-t-il souligné. 


La crise économique mondiale a exacerbé tous ces problèmes.  De plus en plus, des hommes politiques extrémistes ciblent les migrants et la migration pour détourner l’attention des problèmes nationaux.  Cela ne fait que générer davantage de discrimination, de peur et de problèmes, a expliqué M. Ban.


« Nous devons nous battre contre ces tendances de manière raisonnable et rationnelle », a affirmé le Secrétaire général, avant de rappeler que des communautés entières subsistaient presqu’entièrement des envois de fonds des migrants.  Sans ces flux, un pourcentage plus élevé de la population locale serait forcé à émigrer.  Ces fonds sous-tendent le développement.  Ils sont sources de stabilité et de cohésion sociale.


Naturellement, a-t-il encore dit, les pays en développement s’inquiètent à juste titre des conséquences de la « fuite des cerveaux » dans leurs propres sociétés, mais nous apprenons chaque fois davantage comment faire en sorte que la « migration marche pour tous ».   


Le Secrétaire général a enfin noté que les télécommunications et les technologies de l’information permettaient désormais aux migrants d’effectuer instantanément leurs transferts de fonds.  Il a affirmé que son Représentant spécial avait une proposition pour garantir des fonds prévisibles pour le Forum mondial sur la migration et le développement, et a exhorté les États Membres à la prendre en considération. 


Le dialogue de haut niveau, prévu en 2013, constituera une occasion importante pour l’amélioration de la coopération mondiale.  D’ici là, le Forum mondial aura produit un rapport d’évaluation sur les enseignements tirés et la voie à suivre. 


M. Ban a demandé à ceux qui, dans la salle, vivaient dans un pays où ils ne sont pas nés de lever la main, ce qu’a fait une bonne partie des participants.


Table ronde interactive 1: « La contribution des migrants au développement »


La mise en place de dispositifs de protection des migrants comme moyen d’ancrage du développement a été sollicitée par plusieurs panélistes à la table ronde interactive nº 1 sur le thème « La contribution des migrants au développement », présidée par leDirecteur général de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), M. WILLIAM SWING.


« Il serait grand temps que ce débat sur la migration sorte de l’informel pour occuper une place officielle au sein des Nations Unies et soit intégré à l’ordre du jour de l’Assemblée générale », a déclaré le Président du Comité pour la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leurs familles, M. ABDELHAMID EL JAMRI, lui-même issu de la migration marocaine.


Cet expert de la migration internationale et de sa gestion a incité à « passer à la vitesse supérieure dans la mise en place des dispositifs », de programmes permettant l’épanouissement des potentialités de la migration, et favorisant, entre autres, des dynamiques de coopération entre les organisations non gouvernementales (ONG) de migrants dans les pays d’origine et d’accueil.


Dans la même optique, la Ministre du patrimoine naturel et culturel de l’Équateur, Mme MARIA FERNANDA ESPINOSA, une autre panéliste, a partagé l’expérience récente de son pays peuplé de 14,5 millions d’habitants, dont 3 millions travaillent et vivent à l’étranger.


Le pays qui a connu, dernièrement, deux grandes vagues de migration en raison d’une grave crise financière due à l’effondrement du système bancaire et à la sécheresse dans les régions du Sud, a voulu que la mobilité humaine fasse intégralement partie du texte constitutionnel issu du référendum de 2008.


L’Équateur a ainsi mis sur pied des dispositifs dans différents domaines, en particulier un Plan national de développement fondé sur les Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) et sur les traités internationaux.  Ce Plan garantit un emploi stable, décent et digne, aspire au renforcement de l’identité nationale et de la culture plurielle, comporte un programme d’aide à la famille « transnationale », et a doté le pays d’une banque des migrants offrant des crédits préférentiels et les épaulant dans la gestion judicieuse de leurs biens privés.


Dans la même perspective, en vertu de l’article 338 de la Constitution, l’État se doit aussi de motiver le retour des personnes et des biens, a affirmé la Ministre.  L’Équateur est devenu un pays d’accueil de migrants et a pris des dispositions législatives à cet égard.  « La migration est triste, elle sépare les familles, engendre souvent la traite des personnes ou suscite la discrimination et la xénophobie », a constaté Mme Espinosa.


Il serait pourtant judicieux de se pencher davantage sur les facettes positives de ce phénomène, et de s’employer à comprendre ces deux visages de la migration et à agir à partir des normes et des pactes intergouvernementaux, a estimé la responsable équatorienne, qui a aussi souhaité que ce thème fasse officiellement partie de l’ordre du jour des Nations Unies.  « Le débat doit se dérouler au sein des Nations Unies et de l’Assemblée générale », a-t-elle voulu, en appuyant le principe de responsabilité partagée et différenciée.


D’autre part, l’émigration de travailleurs hautement qualifiés demeure une source de préoccupations pour les pays en développement.  De nouveaux partenariats voient cependant le jour, tel celui présenté par une troisième panéliste, responsable de la société Caden, et Facilitateur du « Talent Mobility Project », du Forum économique mondial, M. GÖRAN HULTIN. 


Fondant son exposé sur l’expérience acquise dans l’implantation du service de travail intérimaire Manpower dans une centaine de pays, il a constaté, d’emblée, que partout dans le monde, il restait toujours difficile de remplir des postes vacants car les entreprises ne trouvaient pas les personnes qualifiées.  Il a mis en exergue la nécessité de mieux faciliter la migration, d’utiliser de bonnes pratiques, d’encourager la mobilité temporaire, voire d’envisager d’apporter le travail là où se trouvent les travailleurs qualifiés. 


Co fondateur de la Fondation africaine pour le développement (AFORD), M. CHUKWU-EMEKA CHIKEZIEa quant à lui abordé la question de la contribution de la diaspora au développement du pays d’origine.  Ce quatrième panéliste a examiné la contribution au développement de l’entreprenariat de la diaspora, le rôle de celle-ci dans le pays d’origine et d’accueil, les obstacles dans la promotion de l’entreprenariat et les mesures pour surmonter de tels obstacles. 


Au chapitre des obstacles, il a en particulier mis l’accent sur le manque d’information depuis les pays d’origine, celui de l’accès au capital nécessaire et le manque de « capital social », c’est-à-dire de « réseaux et de liens à activer pour être efficace au niveau commercial dans le pays d’origine ». 


En réalité, « de nombreux migrants veulent bien rentrer dans leur pays d’origine, mais ils ont peur de l’inconnu et de l’insuffisance de politique de soutien des retours volontaires », a observé M. JOHN CONNELL, professeur de géographie humaine à l’Université de Sydney (Australie).  Estimant que 3% de la population mondiale vit en dehors du pays où elle est née, il a souligné que la migration apparaissait comme une réponse au développement et a illustré ses dires en examinant la migration dans la profession médicale.


Au Sénégal, la perte du personnel médical a créé un problème épineux dans ce pays.  La réponse est venue par le biais d’une solidarité de fait de la diaspora, traduite par des envois d’ambulances et autres matériels médicaux de la France vers le Sénégal. 


Débat interactif


Le représentant de l’Argentine, s’exprimant au nom du Groupe des 77 et de la Chine, a relevé que les migrations pouvaient avoir un impact positif entre les communautés d’origine et celles de destination.  De ce fait, a-t-il estimé, il est important de s’intéresser aux défis relatifs aux migrations sur la base d’une responsabilité commune de toutes les nations.  Il a plaidé en faveur d’un partenariat fructueux et d’une compréhension commune, dans le but, a-t-il noté, de s’assurer que les migrations internationales puissent contribuer au développement des pays d’origine et d’accueil tout en minimisant les impacts négatifs du phénomène migratoire.


Le représentant a exhorté les États Membres à modifier leurs politiques afin de gérer les migrations internationales, légales ou illégales, dans une perspective équilibrée et en promouvant et respectant les droits de l’homme.  Il est inquiétant que les immigrés soient victimes d’exploitation et de discrimination, a-t-il regretté, ajoutant que les pays de destination devraient se garder de mettre en place des politiques de discrimination qui empêchent des regroupements familiaux et les transferts de fonds vers les pays d’origine.  Le Groupe des 77 et la Chine exhortent tous les pays à renforcer la protection des droits fondamentaux de tous les migrants et leur intégration dans les sociétés d’accueil, a-t-il affirmé.


Le Représentant du Costa Rica a affirmé que les migrations internationales et le développement représentaient un sujet transversal dans toute programmation des politiques actuelles aux niveaux national et international.  Son pays s’active pour que les citoyens d’un pays ne soient plus obligés d’aller chercher leurs moyens de subsistance ailleurs.  Le Costa Rica, a-t-il dit, compte 4,3 millions d’habitants, plus de 600 000 étrangers plus ou moins clandestins, et entre 250 000 et 350 000 en situation irrégulière.  Ce qui correspond quasiment à 20% de la population. 


Il a jugé qu’une « migration ordonnée et sûre contribuerait grandement au développement du pays », et a expliqué que la politique migratoire de son pays cherchait à être intégrale et à attirer les envois de fonds des migrants qui contribuent au développement du pays, tout en protégeant leurs droits et leur accès aux services sociaux de base.  C’est dans cet objectif que la nouvelle loi sur la migration a été adoptée en 2009.  Au plan international, le Costa Rica est derrière l’inclusion de la dimension migrations-développement dans tous les accords et traités de libre commerce qu’il a signés en particulier avec la Chine et Singapour, et dans l’Accord d’association Amérique centrale-Union européenne. 


Les Pays-Bas appuient le renforcement de la capacité de la diaspora des migrants, ainsi que la consultation et l’aide financière aux associations et représentants des migrants.  Deux programmes pour le retour temporaire des migrants bénéficient également d’un appui financier de l’État néerlandais, notamment en Éthiopie.  Ils soutiennent également le partenariat pour l’Afrique pour le retour des migrants, de l’Union européenne.  L’une des priorités est le renforcement du lien entre les envois de fonds et le développement, a souligné le représentant, pour qui de tels fonds relèvent du domaine privé et les gouvernements ne peuvent s’ingérer dans la manière dont ils sont dépensés.  Ils peuvent au contraire faciliter leur transfert et réduire les commissions bancaires, a-t-il encouragé.


Le représentant de l’Espagne a considéré que ce débat venait à point nommé en pleine crise économique et financière.  Il importe donc que la migration ne soit pas prise comme une menace mais comme un apport.  L’Espagne est un pays d’origine et d’accueil, qui compte 45 millions d’habitants, dont 5,750 millions d’étrangers, soit une augmentation de 2,2% de la population totale.  Le pays a développé une politique d’intégration visant à l’insertion et à la participation des migrants dans la vie socioéconomique, voire politique, du pays.  Des accords ont d’ailleurs été signés avec plusieurs nations d’Amérique latine pour permettre aux migrants issus de cette région de voter aux élections municipales.


La migration doit être le fruit d’un choix libre et d’une décision personnelle, a-t-il affirmé, en défendant également les programmes de retour volontaire dans leur pays sans perdre les droits acquis dans leur lieu de résidence.  Il a prôné ainsi une « migration circulaire » basée sur un dialogue franc et ouvert pour mieux appréhender la réalité et apporter des solutions fortes mais humaines à la fois.


Le représentant d’une organisation non gouvernementale axée sur la migration a critiqué le fait que l’accent dans le débat sur les migrations internationales et le développement soit trop mis sur l’envoi des fonds des migrants qui est un élément, certes, mais certainement pas le plus important.  Le lien entre migrations et développement a des causes fondamentales, en l’occurrence le déséquilibre dans les politiques bilatérales et internationales, la dégradation de l’environnement comme cause de migration.  Il a renvoyé aux remarques liminaires du Président de l’Assemblée générale concernant la responsabilité des États de permettre à leur population d’avoir un emploi digne et décent.  Ceux qui choisissent de partir ont le droit de rester dans le pays qui bénéficie du fruit de leur travail, a-t-il considéré, en appelant à l’adoption de lois et politiques nationales axées sur les traités internationaux.


Réponses


Réagissant aux déclarations des intervenants au débat interactif, M. EL JAMRI a noté qu’on insistait beaucoup sur les transferts de fonds pour les optimiser.  Dans beaucoup de pays d’origine, les banques ne jouent pas réellement leur rôle car il s’agit de banques de dépôts, a-t-il dit.  La migration circulaire pose des problèmes en ce qui concerne les droits des migrants.  Après avoir cité de nouveaux phénomènes, comme celui vécu par le Maroc, qui s’inquiète de la traite des migrants en provenance de la région subsaharienne, il a souhaité que soit revue la carte des différents phénomènes qui existent pour insuffler plus de cohérence au système des Nations Unies.


Mme ESPINOSA a insisté sur la nécessité de mettre en œuvre des politiques publiques en matière de migration et a appuyé le concept de citoyenneté universelle et de l’égalité des droits dans un phénomène transnational.  Elle a exhorté les États à ratifier la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, qui ne reçoit pas suffisamment d’appui et reste incontournable dans ce domaine.  D’autre part, le retour doit absolument être organisé et il faudrait également accorder le droit à la participation politique dans les pays d’accueil.


M.HULTIN a recommandé de prendre en compte les systèmes de formation, ce qui permettrait d’avoir des normes communes sur la technologie et d’adapter les politiques aux différents niveaux de qualification des migrants.


M. CHIKEZIE a estimé que le message clef qui ressort du débat interactif était que les agences et associations de migrants devaient être prises en considération.  Il a invité à mettre sur la table des idées novatrices et constructives et a encouragé tant les États que les représentants de la diaspora à collaborer dans la mise en place de politiques favorables au développement.  Les jeunes sur le marché aujourd’hui n’ont plus suffisamment d’opportunités d’emploi. Il a proposé la convocation d’un sommet sur le thème de la diaspora et des partenariats possibles entre les différentes parties prenantes.


Table ronde interactive 2: « Améliorer la coopération internationale en matière de migrations et de développement »


Lors de la troisième table ronde sur le thème « Améliorer la coopération internationale en matière de migrations et de développement  », présidée par le Directeur du Programme sur les nouvelles questions de sécurité du Centre de politique de sécurité (Genève), M. KHALID KOSER, ont été examinés les modèles, les leçons tirées des accords régionaux et bilatéraux et les exemples optimaux de programmes et de coopération ciblés à cet effet.


M. Koser a encouragé les conférenciers à aider les États Membres à tenter de comprendre dans quelle mesure la coopération internationale pourrait mieux définir les liens entre les migrations internationales et le développement.


Cette tâche a été en partie remplie, sur une base volontaire, par le Forum mondial sur la migration et le développement dont le Président actuel, M. EDUARD GNESA, figurait parmi les conférenciers.  Mesurant la distance parcourue au cours des décennies écoulées, il a rappelé qu’à la Conférence internationale sur la population et le développement (CIPD) tenue en 1994 au Caire, les États « n’étaient pas encore prêts » pour un forum mondial sur les migrations internationales et le développement.


Aujourd’hui, ce débat est rendu possible en raison de sa « nature informelle et non contraignante », a-t-il commenté.  Fait inédit, le Forum mondial a permis d’amener des institutions clef de la coopération internationale à participer à une telle réflexion.  Ce Forum, qui a tenu sa quatrième réunion à Puerto Vallarta (Mexique), du 8 au 11 novembre 2010, constitue une plate-forme de communication sur les pratiques optimales ici et là, a expliqué M. Gnesa.


Il a permis des échanges d’information et de coopération dans 160 pays et a fourni des propositions concrètes pour aider à façonner le débat.  Il a également contribué à faire avancer l’examen du caractère multidimensionnel des migrations internationales et constitué un pas vers la promotion d’un débat sur les synergies possibles entre les pays d’origine, de transit et de destination.


Le Ministre de l’emploi des Émirats arabes unis, M. SAQR GHOBASH, a considéré fondamental de partager les avantages du travail des migrants grâce à une coopération bénéfique entre les pays d’origine et d’accueil.  Partant du constat que la mobilité de la force du travail à travers les frontières était une composante vitale pour l’économie mondiale, les Émirats arabes unis ont adopté un cadre législatif de régulation de l’emploi des migrants.


Le Directeur exécutif du Fonds des Nations Unies pour l’enfance(UNICEF) et Président du Groupe mondial sur la migration ( GMG), M. ANTHONY LAKE, a affirmé que les femmes et les enfants comptaient pour près de la moitié des migrants internationaux, et que 16% des migrants avaient moins de 16 ans.  Relevant que le montant des fonds transférés par les migrants en 2010 était évalué à 325 milliards de dollars, il a notamment regretté que les migrations aient un coût social avec la dislocation des familles.  Il a évoqué les trafics dont étaient victimes les migrants, en général, et les femmes et enfants, en particulier. 


Aujourd’hui, a noté Le Directeur exécutif, 35 millions de jeunes ayant entre 10 et 24 ans vivent en dehors de leur pays d’origine et, les mineurs non accompagnés sont les plus exposés à l’exploitation sexuelle.  D’autres, a-t-il ajouté, naissent de parents immigrés et souffrent de l’exclusion scolaire et de privations de services sociaux. 


M. Lake a souligné que, dans le cadre de l’initiative conjointe Commission européenne-Nations Unies pour le développement et la migration, l’Unicef avait alloué 10 millions d’euros à 54 projets de développement des migrants dans 16 pays et a financé 14 projets en rapport avec les jeunes et la migration à hauteur de 80 millions de dollars.  Il a souhaité que tout cadre international de régulation des migrations ait une approche basée sur les droits de l’homme.


La spécialiste de la politique et la programmation du Bureau régional de l’Organisation internationale du Travail (OIT) pour l’Asie et le pacifique, Mme THETIS MANGAHAS, a indiqué qu’environ 25 millions d’Asiatiques s’étaient employés hors des frontières de leur pays.


Ceux-ci sont présents dans tous les secteurs et chaque fois plus de femmes et de jeunes rejoignent leurs rangs pour fuir le marasme économique ou l’instabilité politique et la volatilité dans leurs nations d’origine.  Elle a toutefois observé une nouvelle tendance selon laquelle parmi les trois millions d’Asiatiques qui partent à la recherche d’un emploi ailleurs, 43% demeurent dans la région de l’Asie et du Pacifique.  Cela est un signe non seulement du rapide développement économique de la région mais aussi de l’interdépendance économique croissante, a-t-elle dit.


Elle a réclamé une égalité dans la qualité du traitement des travailleurs du pays d’accueil et des travailleurs migrants.  Les recherches de l’OIT ont révélé que lorsque les pays ont pris la peine de sensibiliser l’opinion publique, les travailleurs, les syndicats et les entreprises, notamment, des progrès substantiels ont été réalisés. 


Les réseaux de criminalité transnationale organisée prennent aussi de plus en plus pour cible les aspirants à la migration qui sont des « victimes invisibles », a averti le Président fondateur du Département des études internationales du Mexique, M. RAFAEL FERNANDEZ DE CASTRO.  Il a exhorté à l’établissement d’un cadre clair pour résoudre les problèmes du « couloir migratoire le plus important des Amériques » entre l’Amérique centrale, le Mexique et les États-Unis.  Il a mis l’accent sur les coûts en vies humaines, soit plus de quatre mille Mexicains qui ont payé de leur vie le rêve américain.


L’ONU doit appeler à une conférence spécifique pour identifier les meilleures pratiques de par le monde dans le domaine de la protection des migrants, évaluer les mécanismes régionaux et les remplacer ou les supprimer, a-t-il déclaré.


Débat interactif


Le représentant du Mexique a mis l’accent sur le rôle majeur joué par les Nations Unies, car, les questions relatives aux migrations s’incrustent dans le débat général sur la mondialisation.  Sur le plan régional, il a suggéré la prise en compte des spécificités régionales.  Il a également évoqué les accords bilatéraux qui apparaissent comme une base importante de gestion de ce problème au niveau national.


Le représentant du Monténégro a indiqué que son gouvernement avait adopté une stratégie intégrée de gestion des migrations pour la période 2011-2016 qui attendait d’être adoptée en 2012.  Le représentant a souligné que les autorités de son pays allaient accorder davantage d’importance aux questions de migration.  Il s’agira de regarder de plus près le phénomène de migration illégale en renforçant la coopération avec les pays partenaires afin, à terme, de mettre sur pied un cadre légal conséquent sur les questions de migration.


Le représentant du Pakistan a affirmé que les migrations pouvaient lutter contre la pauvreté à travers les transferts de fonds.  Il a noté que la diaspora pakistanaise représentait près de 5,5 millions de personnes et que le pays comptait un peu plus de 3,2 millions d’étrangers installés sur son territoire.  Le représentant a également exhorté la communauté internationale à plus de solidarité afin de protéger les droits des travailleurs étrangers. 


Le représentant de la Chine a jugé important de considérer la cause première des migrations, à savoir le fossé entre les développements économique et social entre pays.  Il a suggéré l’intégration d’immigrés dans les pays d’accueil et a regretté que la crise économique mondiale ait conduit à un regain de xénophobie, de discrimination et d’intolérance à l’endroit des immigrés.  Le représentant a proposé une solution qui intègre la problématique des migrations dans le concept de développement. 


Le représentant du Maroc a noté que son pays était à la fois un site de départ, de transit et de destination des migrations.  Il a insisté sur la responsabilité partagée des États et la clarification des discours officiels.  Par exemple, a-t-il dit, il faut clarifier la position de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) au sujet des migrations.  Il a également soutenu que les droits des migrants n’étaient pas respectés alors que tout le monde semble les évoquer dans les instances internationales de débat.  Il a demandé que le débat sur les migrations passe du domaine informel au statut formel afin que les conclusions puissent être mises en œuvre de manière contraignante.


Le représentant de l’Afrique du Sud a estimé que les migrations pouvaient contribuer au développement des pays d’origine puisque la pauvreté semblait être la cause majeure des départs des populations africaines.  Se félicitant de l’augmentation des fonds transférés par les migrants, il a demandé la réduction des frais de transfert pour encourager ces flux de capitaux.


Le représentant des Philippines a rappelé le rôle de chef de file de son pays dans la défense des travailleurs migrants et des membres de leur famille.  La prochaine discussion du Bureau international du Travail (BIT) sur la Convention sur les droits des travailleurs domestiques doit aboutir à l’adoption de ce texte, a-t-il suggéré. 


Au lieu de se reposer sur les Nations Unies, a-t-il recommandé, il s’agirait plutôt d’adopter une approche plus réaliste sur les migrations internationales par le truchement d’accords bilatéraux et régionaux, en particulier pour la migration temporaire et circulaire.  « Des milliers de personnes continuent à se presser aux frontières ou ailleurs, au risque de leur vie », a-t-il dit.


La représentante de l’Algérie a relevé que, chaque année, plus de cinq millions de personnes franchissaient des frontières nationales pour aller vivre ailleurs.  Pays d’origine, de transit et de destination des migrations, l’Algérie, a indiqué la représentante, souscrit aux résolutions de l’Union africaine, stipulant que la solution durable au problème de migrations serait la mise en place de conditions de développement dans les pays d’origine.  Ella a regretté que le débat sur les migrations reste axé sur la sécurité, et elle a exhorté au respect des droits des migrants et de leur famille. 


La représentante du Secrétariat du Commonwealth a centré son intervention sur les initiatives pratiques que ce groupe pourrait entreprendre.  Les membres du Commonwealth, qui demandent la prise en compte des nouvelles tendances en matière de migrations internationales, représentent le cinquième des migrants à l’échelle mondiale.  Il prévoit l’élaboration d’un rapport du Commonwealth qui contiendra des propositions et des principes clairs qu’il faut utiliser dans les politiques de migration. 


Le rapport analyse les sources de la migration, les questions complexes et se concentre sur les effets sur la société de la perte d’un personnel hautement qualifié dans les petits États du Commonwealth.  Le côté positif est constitué par les envois de fonds des migrants.  La question qui se pose serait de consulter la diaspora pour encourager ses investissements dans les pays d’origine.  La simplification des politiques de migration, le renforcement des capacités, l’amélioration du niveau de vie et des opportunités d’emplois sont autant de propositions qui seront examinées par le rapport, a-t-elle indiqué.


M. JOHN BINGHAM, de la Commission internationale catholique pour les migrations ( CICM), a noté qu’il était difficile pour la société civile de collaborer avec les gouvernements sur le thème des migrations.  Il a souligné la nécessité d’évaluer la participation de la société civile dans le dialogue international consacré aux migrations, tout en appelant à la mise en place de comités conjoints gouvernements-société civile, afin de trouver des solutions durables aux problèmes relatifs à l’immigration.  « La coopération est la solution », a-t-il conclu.


Le représentant du Bangladesh a abordé la question du coût de la migration.  Les migrants investissent beaucoup d’efforts, d’argent et parfois leur vie.  Il faut prendre ce problème à bras le corps et la communauté internationale doit prendre des mesures d’urgence, a-t-il exhorté, en relevant que les migrants déplacés par les répercussions des changements climatiques sont totalement absents.


Son homologue de l’Inde a mis en relief le principe de responsabilité commune.  Il importe d’envisager la question des migrations et du développement sous l’angle économique.  Les envois de fonds ne sauraient être considérés comme une source de financement du développement pour atteindre les Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD).  Ils ne peuvent se substituer aux engagements au titre de l’aide internationale et de l’aide au développement.


La Guyane a noté l’intensification de la corrélation entre les migrations et le développement.  Ces deux dimensions se renforcent mutuellement.  Le Forum mondial sur les migrations et le développement, coopération certainement louable, ne peut toutefois pas constituer un moyen.  Il a en revanche appelé à une approche structurée au niveau international qu’il attend lors du débat prévu en 2013.  


Le représentant du Bénin a affirmé que plus de deux millions de Béninois vivaient à travers le monde, et que son pays accueillait de nombreux étrangers.  Il a affirmé que le Bénin s’était engagé à mettre en place des accords bilatéraux signés avec des pays comme la France.  Il a également souhaité que les transferts des fonds des migrants puissent être facilités afin que les populations locales bénéficient de la contribution de cette contribution importante.


Le représentant de la Suisse a décrit les expériences de son gouvernement qui, pour aider à l’étude de la corrélation entre migrations internationales et développement, a établi un Programme mondial sur les migrations et le développement, au sein de son agence pour le développement.  Un tel programme vise en particulier à mettre en exergue les aspects positifs de la migration.  La Suisse a également engagé des dialogues bilatéraux et des programmes visant à l’amélioration de la protection des migrants, mais aussi des partenariats en vue d’accroître l’efficacité des envois de fonds des migrants vers les pays d’origine. 


La Suisse étudie également les meilleures pratiques visant à encourager la diaspora à participer davantage dans le développement du pays d’origine.  La Suisse préside le Forum mondial sur les migrations et le développement, un autre moyen original de traiter de cette question, a affirmé son représentant.


La représentante des États-Unis a signalé qu’un migrant sur cinq habitait dans son pays aujourd’hui.  Par le nombre d’entrées, c’est le pays le plus accueillant au monde, a-t-elle dit.  L’immigration a joué un rôle important dans tous les domaines.  La politique de migration a eu des effets bénéfiques à l’étranger, notamment dans les périodes difficiles comme on le constate actuellement dans certaines régions du monde.  Les envois de fonds ne remplacent pas l’aide au développement, a-t-elle ajouté.


Le représentant d’El Salvador a estimé que l’Assemblée générale était le lieu par excellence pour traiter de la migration et du développement.  Il a souligné la nécessité pour l’ONU d’aborder en détail et de manière globale et holistique le rôle des pays développés dans ce phénomène.


Réponses


Répondant aux Philippines, M. GHOBASH a appelé également de ses vœux un dialogue mondial pour traiter de la ramification de la problématique des migrations internationales.  M. GNESA a rappelé que toutes les capitales avaient reçu un questionnaire sur l’avenir du Forum mondial sur les migrations et le développement. 


En réaction aux interventions des Philippines et de l’Inde, M. LAKE a déclaré que le système des Nations Unies encouragerait les discussions.  Dans un monde rationnel, les travailleurs migrants hautement qualifiés seraient plus que bienvenus mais nous sommes dans un monde politique.  Il s’agira de procéder à une analyse démontrant les bénéfices d’une migration qualifiée. 


En guise de conclusion, le Représentant spécial du Secrétaire général des Nations Unies sur les migrations internationales et le développement, M. PETER SUTHERLAND, déclaré que de grands défis restaient à relever et que le temps était venu d’élargir les contributions pour animer le débat international sur les migrations.  « Il y a un grand éléphant dans la salle », a-t-il lancé, avant d’ajouter: « Les paroles c’est bien, mais il faut des contributions financières afin d’animer le Forum mondial ». 


Le Forum n’est qu’un petit pas vers les actions à mener, a souligné M. Sutherland.  Rappelant que de nombreux migrants s’étaient noyés récemment en Méditerranée, parfois à quelques mètres de bateaux qui auraient pu les sauver, il a réclamé davantage de solidarité.  Il a précisé que « les migrations ne concernent pas seulement le niveau de richesse et de pauvreté, mais aussi la vision de la société dans laquelle nous voulons vivre ».  


Dans une brève synthèse de la journée, le Président de l’Assemblée générale, M. JOSEPH DEISS, a relevé que la migration était une question d’envergure mondiale et que de nombreux participants au dialogue informel étaient d’avis que l’Assemblée générale constituait l’enceinte idéale pour en débattre.


L’élaboration et la mise en œuvre de meilleures politiques de migration ne sont pas uniquement l’apanage de la coopération mais s’inscrivent dans le contexte du principe de « coresponsabilité », a-t-il dit.  Par ailleurs, la migration est, selon lui, « une bonne chose pour le développement » et essentielle pour la coopération internationale, mais, a ajouté M. Deiss, un certain nombre de pays n’en sont pas encore convaincus et les gouvernements doivent clairement dire s’ils sont pour ou contre.


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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