AG/10725

ASSEMBLÉE GÉNÉRALE: POUR AIDER LES PAYS LES PLUS VULNÉRABLES AU RÉCHAUFFEMENT DE LA PLANÈTE, LE PRÉSIDENT DES MALDIVES PLAIDE POUR UNE « JUSTICE CLIMATIQUE »

08/07/2008
Assemblée généraleAG/10725
Département de l’information • Service des informations et des accréditations • New York

Assemblée générale

Soixante-deuxième session

Séance de suivi sur les changements climatiques

et les pays les plus vulnérables - matin


ASSEMBLÉE GÉNÉRALE: POUR AIDER LES PAYS LES PLUS VULNÉRABLES AU RÉCHAUFFEMENT DE LA PLANÈTE, LE PRÉSIDENT DES MALDIVES PLAIDE POUR UNE « JUSTICE CLIMATIQUE »


Face à la situation « injuste » de nombreux pays dans le monde qui sont les plus vulnérables aux effets du réchauffement de la planète alors qu’ils n’en sont pas responsables, le Président des Maldives a plaidé ce matin pour « une justice climatique » fondée sur un nouveau droit universel: celui de vivre dans un environnement sûr, sécurisé et durable. 


M. Maumoon Abdul Gayoom s’exprimait en duplex depuis sa capitale, dans le cadre d’une séance de suivi du débat de haut niveau que l’Assemblée générale a tenu en février dernier.  Intitulée « Les changements climatiques et les pays les plus vulnérables – L’impératif d’intervenir », cette séance de suivi a permis au Président de l’Assemblée générale, à la Vice-Secrétaire générale de l’ONU, au Haut Représentant pour les pays les moins avancés (PMA), les pays en développement sans littoral et les petits États insulaires en développement » et au Coprésident du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) de dresser l’état des lieux de la lutte contre les changements climatiques.


Le Président des Maldives a invité les États Membres à regarder autour d’eux et à imaginer que dans un avenir pas si lointain, les 38 sièges occupés aujourd’hui par les petits États insulaires en développement (PEID) ne seront plus là à moins que l’Assemblée générale ne travaille ensemble pour transformer un débat caractérisé par des promesses non tenues en une discussion fondée sur des mesures concrètes. 


Les plus récentes évaluations du GIEC suggèrent qu’en 2100, en l’absence d’action véritable, le niveau des mers et des océans pourrait s’élever de 60 centimètres.  D’ici à  2020, les PEID, qui souffrent déjà d’une contamination accrue des sols et de l’eau potable provoquée par l’infiltration des eaux salées, pourraient voir la multiplication des ouragans, l’accélération de l’érosion de leurs côtes et la destruction des infrastructures dont dépendent leurs communautés.


En Afrique, en Amérique latine, en Amérique du Nord et en Europe, de nombreux pays connaîtront probablement une perte de pluviométrie de 10 à 30% dans les régions arides, semi-arides et tropicales.  D’ici à 2020, rien qu’en Afrique, 75 à 250 millions de personnes seront confrontées à de graves problèmes d’accès à l’eau. 


En 2010, a prévenu le Président de l’Assemblée générale, Srgjan Kerim, la communauté internationale devrait se préparer à l’arrivée d’une cinquantaine de millions de « migrants climatiques », certains experts évoquant le chiffre de 200 millions d’ici à 2050. 


Dans un tel contexte, le Président des Maldives s’est dit convaincu de l’importance qu’il y a à proclamer un nouveau droit à un environnement durable que les États auraient l’obligation de respecter, de protéger et de lutter contre ses violations.


Ces propositions ont été saluées par les délégations, dont celles d’Antigua-et-Barbuda qui, au nom du Groupe des 77 et de la Chine, a pris la parole lors de la discussion interactive.  Les panélistes ont particulièrement souligné l’importance qu’il y a à assurer le succès de la Conférence de Copenhague, qui prévue en décembre 2009, est chargée de négocier le successeur du Protocole de Kyoto sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre.


Les coûts d’atténuation et d’adaptation aux effets des changements climatiques seront extrêmement élevés, a prévenu le Président de l’Assemblée, en donnant un chiffre estimé à 2% du PNB mondial.  Mais les pertes économiques résultant de l’inaction pourraient atteindre jusqu’à 1 000 milliards de dollars d’ici à 2040.  « Ces chiffres ne sont pas de simples statistiques: ils sont tout simplement effrayants », a-t-il alerté.


Des décisions politiques doivent être prises de manière concertée au plus haut niveau, a préconisé le Coprésident du GIEC, pour lequel les priorités devraient être le renforcement des capacités d’adaptation et le transfert des technologies; la formulation d’une réponse en synergie avec d’autres problématiques, comme celle du renforcement de la productivité agricole; le développement des énergies éolienne et solaire et le dessalement des eaux; l’expansion des réseaux de transports publics et enfin le changement radical des modes de production et de consommation.


Si des mesures d’adaptation doivent être rapidement intégrées aux plans de développement nationaux, elles ne pourront être financées par les ressources existantes, a averti la Vice-Secrétaire générale.  Elle a ainsi expliqué que le coût de la lutte contre les changements climatiques, qui représente des dizaines de milliards de dollars par an, ne fait que s’ajouter à celui de l’assistance nécessaire à la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD).  Il est donc impératif que les donateurs internationaux redoublent d’efforts pour consentir ce financement additionnel, a encouragé Asha-Rose Migiro.


Car, a conclu le Président de l’Assemblée générale, que ferons-nous quand les gens se battront non plus pour des idées ou leur identité nationale, mais pour l’eau?  Que ferons-nous quand des populations quitteront massivement leur pays non plus pour fuir les persécutions politiques mais une catastrophe naturelle?  Si nous voulons atteindre les OMD, il nous faut reconnaître que changements climatiques et aide au développement ne sont que deux aspects d’un seul et même défi: la réalisation du développement durable.


SÉANCE DE SUIVI DU DÉBAT THÉMATIQUE DE HAUT NIVEAU SUR LES CHANGEMENTS CLIMATIQUES


Les changements climatiques et les pays les plus vulnérables – L’impératif d’intervenir


Déclarations


M. SRGJAN KERIM, Président de l’Assemblée générale, a commencé son intervention en indiquant que sur les 12 dernières années, 11 avaient été classées parmi les plus chaudes depuis le début de l’enregistrement des températures en 1850.  Les plus récentes évaluations du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat suggèrent qu’en 2100, en l’absence d’action véritable, le niveau des mers et des océans pourrait monter de 60 centimètres et les températures augmenter de 4ºC. 


Lorsque j’ai assisté à la première réunion annuelle du Forum humanitaire mondial, j’ai été frappé, a déclaré M. Kerim, par l’alarmisme des déclarations faites par des orateurs du monde entier, qu’ils proviennent des Caraïbes, du Bangladesh, de Micronésie ou du Nigéria, et qui tous témoignaient de l’impact qu’avaient déjà les changements climatiques sur leurs vies quotidiennes.  Pour ramener les émissions de gaz à effet de serre à des niveaux acceptables, il est devenu indispensable de les réduire de plus de 50% d’ici à 2050, ce qui aura pour effet de limiter la hausse des températures de 2 degrés.  Atteindre un tel objectif exigera des changements économiques sans précédent, a prévenu le Président.


M. Kerim a expliqué que les changements climatiques constituent un défi de développement durable et qu’il fallait donner aux pays pauvres davantage de moyens pour les aider à relever ce défi.  Les pays en développement sont en effet considérés comme plus vulnérables aux effets des changements climatiques que les pays développés.  C’est tout particulièrement vrai de la plupart des pays africains, des pays asiatiques situés en bordure des deltas et des petits États insulaires.  Leur extrême vulnérabilité et leur faible capacité d’adaptation, a expliqué le Président, sont liées à des facteurs tels que leur forte dépendance à l’égard des ressources naturelles, une capacité financière et institutionnelle à s’adapter, un faible revenu par habitant, une pauvreté endémique et un manque de protection sociale et économique.


Dans ce contexte, les Nations Unies ont prévenu que d’ici à 2010, la communauté internationale devrait se préparer à l’arrivée d’une cinquantaine de millions de « migrants climatiques », certains experts évoquant le chiffre de 200 millions d’ici à 2050.  D’ici à 2020, dans certains pays, les récoltes pourraient diminuer de 50%.  En outre, la montée du niveau des mers devrait multiplier les ouragans, précipiter l’érosion et menacer des infrastructures dont dépendent les communautés insulaires.  Pour certains pays, la montée du niveau des mers pourrait aller jusqu’à menacer leur existence en tant que nation. 


Que ferons-nous lorsque les gens se battront non plus pour des idées ou leur identité nationale, mais pour l’eau? a lancé Srgjan Kerim.  Que ferons-nous lorsque des populations quitteront massivement leur pays, non plus pour fuir les persécutions politiques, mais une catastrophe écologique?  Si nous voulons atteindre les Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD), il nous faut reconnaître que changements climatiques et aide au développement sont deux aspects d’un seul et même défi: la réalisation du développement durable.


Relever un tel défi sera extrêmement coûteux, a prévenu le Président, en donnant un chiffre estimé à 2% du PNB mondial.  Mais sans action véritable, les pertes économiques résultant de conditions météorologiques extrêmes et des catastrophes naturelles atteindront jusqu’à 1 000 milliards de dollars d’ici à 2040.  Ces chiffres ne sont pas de simples statistiques: ils sont tout simplement effrayants, a-t-il déclaré.


Si nous devons hâter l’adoption d’un instrument pour succéder au Protocole de Kyoto en 2012, la communauté internationale doit mettre en œuvre avant tout les accords existants pour réduire les émissions de gaz à effet de serre.  Le Président de l’Assemblée générale a soutenu l’appel du Secrétaire général en faveur de l’opérationnalisation d’un Fonds d’adaptation bien financé d’ici la fin 2008.  Il a salué le G-8 pour son engagement à appuyer l’intégration des mesures d’adaptation dans les stratégies nationales de développement.  Mais les fonds promis ne suffiront pas, a averti M. Kerim, puisque la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques estime que près de 86% des flux financiers nécessaires proviendront d’investisseurs privés.  Cependant, au-delà du rôle des États et du secteur privé, la responsabilité individuelle des citoyens doit s’exercer pour parvenir à un changement de mode de vie, a-t-il souligné.


Appelant enfin à forger un consensus dans la lutte contre les changements climatiques, le Président a estimé qu’il fallait pour cela créer des mécanismes de transferts de technologies vers les pays en développement; s’assurer que les ressources financières suffisantes parviennent aux plus démunis; partager les meilleures pratiques avec les pays vulnérables et améliorer les système d’alerte rapide des catastrophes naturelles.  Il a attiré l’attention sur le projet de résolution présenté par le Groupe des États insulaires en développement du Pacifique, qui lancera un signal important au monde sur les menaces que font peser les changements climatiques sur la paix et la sécurité internationales.


Mme ASHA-ROSE MIGIRO, Vice-Secrétaire générale des Nations Unies, a rappelé qu’il n’y avait désormais aucun doute quant au fait que l’activité humaine était principalement responsable des changements climatiques.  En l’absence d’action véritable, a prévenu le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), le monde fera face à une situation catastrophique.  Selon le rapport sur le développement humain des Nations Unies, environ un habitant de pays en développement sur 19 peut s’attendre à ressentir l’impact d’une catastrophe climatique, comparé à un sur 1 500 dans les pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).  Et tandis que les populations des pays riches peuvent s’adapter sans trop d’effort, celles des plus pauvres en ont rarement les moyens, a relevé Mme Migiro.  Ainsi, la fréquence des cycles de sècheresse en Afrique signifie que les femmes doivent parcourir de plus grandes distances pour aller chercher de l’eau, parfois 10 à 15 kilomètres par jour.  Ce temps perdu les empêche d’accomplir des tâches toutes aussi vitales, les épuisent physiquement et les expose à de graves risques de sécurité.  Ces déplacements sont aussi la raison pour laquelle les enfants, en particulier les filles, ne sont pas scolarisées.


Ces tendances inquiétantes soulignent l’urgente nécessité d’entreprendre une action sous peine de voir se défaire les progrès accomplis en matière de développement, a assuré la Vice-Secrétaire générale.  Ce risque préoccupant soulève l’inévitable question de l’équité et de la justice.  En effet, la quasi-totalité des gaz à effet de serre sont émis par le monde industrialisé et, dans une moindre mesure, par les pays à revenu intermédiaire et les économies émergentes, tandis que leur impact se fait principalement ressentir sur les pays les plus pauvres et les populations les plus vulnérables.  Mme Migiro a prévenu que l’échec de la communauté internationale à relever le défi des changements climatiques condamnerait 40% de la population mondiale –soit 2,6 milliards de personnes– à un avenir sans perspectives.


Face à celles des migrations massives et d’une insécurité grandissante liées, la communauté internationale porte la responsabilité de prêter une assistance technologique et financière aux pays les plus vulnérables.  Cette assistance devrait mettre l’accent sur le renforcement des capacités d’adaptation et la minimisation de la vulnérabilité des sociétés les plus pauvres.  Ce double objectif de développement devrait être intégré dans les plans de développement nationaux, a préconisé la Vice-Secrétaire générale.


Toutefois, l’intégration ne signifie pas que les mesures d’adaptation puissent être prises dans la limite des ressources existantes, a-t-elle souligné.  Elle a ainsi expliqué que le coût de la lutte contre les changements climatiques, qui représente des dizaines de milliards de dollars par an, s’ajoute à celui de l’assistance nécessaire à la réalisation des OMD.  Il est donc impératif que les donateurs internationaux redoublent d’efforts pour consentir ce financement additionnel, a conclu Mme Migiro.


M. MAUMOON ABDUL GAYOOM, Président de la République des Maldives, qui s’exprimait par vidéoconférence, a invité les délégations présentes à regarder autour d’elles afin qu’elles constatent que, très certainement, la grande majorité des 38 petits États insulaires étaient présents.  Maintenant, a-t-il ajouté, imaginons dans un avenir pas si éloigné une enceinte de l’Assemblée générale où ces petits États insulaires ne seraient plus présents.  Leurs noms ont disparu; leurs sièges sont vides.  Un tel avenir n’est pas seulement possible, il est tout à fait probable à moins que tous les pays représentés dans cette assemblée œuvrent de concert à transformer le débat sur les changements climatiques pour qu’à partir d’un processus caractérisé par des promesses non tenues, il se mue en une dynamique basée sur des mesures concrètes permettant de sauver ces peuples et ces communautés qui sont les plus vulnérables au réchauffement planétaire, a affirmé le Président des Maldives.


Les petits États insulaires sont en effet en première ligne, a-t-il ajouté.  Nos côtes sont en état de siège, nos plages s’érodent déjà, nos récifs coralliens meurent, a-t-il rappelé.  Après avoir évoqué les témoignages de cinq habitants de ces États insulaires présentés lors d’une récente réunion de l’ONU à Genève, le Président Abdul Gayoom a souligné le lien essentiel entre vulnérabilité et justice climatique.  Si la géographie est à l’origine de la vulnérabilité, elle n’est pas la seule manière de comprendre et de mesurer cette vulnérabilité, a-t-il dit.


Pour le Président des Maldives, tout aussi importante est la capacité des collectivités concernées à répondre aux changements climatiques.  Pourtant, les petits États insulaires n’ont qu’une capacité limitée à réagir, alors que dans le même temps ils ne contribuent que de façon marginale aux changements climatiques.  Notre voix n’est pas très bien entendue dans les forums internationaux alors que nous sommes les premiers à savoir ce qu’il faut faire, a dénoncé le Président.  Les capacités financières, humaines et techniques limitées réduisent la capacité des petits États insulaires à s’adapter aux réalités quotidiennes des changements climatiques, a-t-il rappelé.


En résumé, ce sont ceux qui contribuent le moins au réchauffement de la planète qui en souffrent le plus.  Nous n’avons que des outils nationaux et de politique étrangère limités pour atténuer efficacement les effets des changements climatiques.  Nous n’avons pas, a encore rappelé le Président, les capacités suffisantes pour nous protéger au travers de programmes d’adaptation.  Tous ces faits suggèrent, a estimé le Président, la nécessité de concrétiser le concept de justice climatique.  Au sein d’une communauté internationale basée sur le règne du droit, sur les valeurs universelles d’égalité, de droits de l’homme et de dignité, il est certainement injuste que de petites communautés souffrent des actions prises par d’autres pays plus riches sur lesquelles elles n’ont aucun contrôle et contre lesquelles elles ne peuvent se protéger.


M. Abdul Gayoom s’est demandé comment ces petites communautés vulnérables pouvaient bénéficier d’une justice climatique.  Il a dit sa conviction que la promotion d’une telle justice devait reposer sur une démarche fondée sur les droits face au réchauffement de la planète.  En particulier, il s’est dit convaincu que les Nations Unies devraient envisager d’adopter un nouveau droit universel, celui de vivre dans un environnement sûr, sécurisé et durable.  La proclamation d’un tel droit permettrait de mettre en avant la justice climatique.


La proclamation de droit et l’obligation faite à tous les États de le respecter, de le protéger et de lutter contre ses violations, permettraient aux États vulnérables d’invoquer les principes mêmes sur lesquels les Nations Unies ont été créées  En dernière analyse, l’avenir des Maldives et des autres pays vulnérables se trouve entre les mains « de nos frères et sœurs » de la famille des Nations Unies, a souligné le Président.  Les Maldives refusent, a-t-il insisté, de croire que les pays représentés dans cette enceinte, en particulier les pays riches et développés, laisseront les petits États Membres vulnérables des Nations Unies souffrir alors que les solutions aux changements climatiques semblent être à leur portée.  Le Président Maumoon Abdul Gayoom a conclu en déclarant qu’il refusait d’accepter un avenir où un siège de l’Assemblée générale serait inoccupé.


M. OGUNLADE DAVIDSON, Coprésident du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), a affirmé que les changements climatiques étaient avant tout un problème de réduction de la pauvreté.  Les pays vulnérables n’émettent en effet que 5% des gaz à effet de serre, alors qu’ils sont les premiers à pâtir de leurs conséquences.  Des preuves scientifiques irréfutables établissent désormais la réalité des changements climatiques, a-t-il poursuivi.  Ainsi, le niveau des mers et des océans a-t-il augmenté de 17 centimètres au cours du XXe siècle et les émissions de 70% entre 1970 et 2004.  Les régions les plus touchées par les effets des changements climatiques sont l’Arctique, les pays africains, certains pays asiatiques et les États insulaires; avec des impacts déjà quantifiables dans les domaines de l’agriculture et de la santé. 


Tous les pôles d’activité économique peuvent contribuer à une réduction significative de ces émissions, que ce soit les transports, l’industrie ou la construction, a assuré l’expert.  Mais pour cela, il faut que des décisions politiques soient prises de manière concertée au plus haut niveau.  Il faut en priorité mettre l’accent sur le développement des capacités d’adaptation, que ce soit au niveau institutionnel et organisationnel; adopter des stratégies d’adaptation; répondre aux défis des changements climatiques en synergie avec d’autres problématiques, comme celle du renforcement de la productivité agricole; privilégier les énergies éolienne et solaire; dessaler les eaux et donner la priorité aux transports publics.  Enfin, a ajouté M. Davidson, il est indispensable de changer de mode de vie.



Exposés avant la table ronde


Si par le passé, on ignorait que les changements climatiques avaient causé la disparition de plusieurs civilisations, ce n’est plus le cas aujourd’hui et nous n’avons donc aucune excuse pour rester passif, a dit le Modérateur de la table ronde, M. EUGENE LINDEN.


À son tour, M. REID BASHER de la Stratégie internationale contre les catastrophes a souligné que la prise en compte des phénomènes catastrophiques devait devenir prioritaire.  S’il existe un fossé au niveau du savoir, rien n’ayant été fait bien souvent jusque-là, des moyens existent néanmoins dans le domaine des alertes précoces, par exemple.  Le Plan d’action de Bali propose un certain nombre de choses et il existe plusieurs fonds d’adaptation.  Les plans d’adaptation nationaux sont une bonne façon de mettre l’accent sur les mesures à prendre, a-t-il souligné. 


Parmi les mesures pratiques, figurent les codes de construction, un système de zonage lié aux risques, les systèmes de protection contre les problèmes environnementaux et la protection des installations essentielles en les plaçant en hauteur, dans les étages, et non de plain-pied, par exemple.  Or, les ressources accordées à ces questions sont bien souvent insuffisantes, a constaté l’orateur qui a souligné que les investissements à cet égard devront être importants.


M. IAN NOBLE de la Banque mondiale a centré son exposé sur les architectures de financement pour l’adaptation.  Il a présenté un tableau répertoriant « le défi de l’adaptation ».  Il en ressort que les pays les moins avancés (PMA) et ceux en développement seront les plus touchés par les effets du changement climatique.  Il existe déjà des instruments pour financer l’adaptation dont le Fonds d’adaptation qui brasse énormément d’argent, a-t-il rappelé, en jugeant utile de se mettre d’accord sur les fonds nécessaires. 


Parmi les instruments envisagés, une taxe mondiale sur les émissions de carbone pourrait générer quelque 14 milliards de dollars, a-t-il estimé.  D’autres mécanismes de financement sont à l’étude.  Nous devons fournir aux pays un financement nécessaire permettant de mettre en œuvre les solutions indispensables, a-t-il souligné.  Les fonds pilotes concernent actuellement entre cinq et dix pays en fonction de critères de vulnérabilité.  Il s’agit de dons, des prêts étant aussi envisagés car les deux ne sont pas incompatibles, a-t-il noté.


M. VEERLE VANDEWEERD du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) a noté qu’il s’agissait d’une question qui allait devenir de plus en plus importante avec le temps.  Plus vite nous agirons et moins élevée sera l’addition, a-t-elle noté.  Les changements climatiques seront « un aller simple vers la pauvreté absolue » si l’on n’agit pas rapidement.  Mme Vandeweerd a estimé que l’aide publique au développement (APD) devait désormais prendre les changements climatiques en compte.  Il faut, entre autres choses, augmenter et coordonner l’utilisation des fonds. 


Un financement supplémentaire est en effet nécessaire car les conséquences seront essentiellement locales et c’est à ce niveau qu’il faudra intervenir pour aider les collectivités affectées.  En tout état de cause, des mesures doivent être prises aux niveaux local et national avec le soutien de la communauté internationale, a remarqué Mme Vandeweerd.  Le financement pour l’adaptation, s’il devra venir du secteur public, ne doit pas exclure le secteur privé.



Table ronde


Interrogée par le Modérateur sur ce qui pouvait être fait en matière d’adaptation, la représentante du PNUD a répondu que le plus urgent était de réussir la prochaine Conférence de Copenhague sur les négociations du successeur du Protocole de Kyoto.  Elle a rappelé que les économies de la plupart des pays devaient être transformées pour devenir plus viables et fonctionner avec des émissions réduites de gaz à effet de serre.  Ce ne sera pas chose aisée, a renchéri le représentant de la Banque mondiale, en ajoutant que la seule alternative c’est de devoir affronter un véritable cataclysme.


Le représentant du Japon a estimé que le G-8, qui se réunit actuellement dans son pays, était un grand succès.  L’objectif de parvenir à une réduction de moitié des gaz à effet de serre d’ici 2050 figure parmi les décisions prises, a-t-il rappelé.  Le G-8 a aussi souligné l’importance qu’il y a à répondre aux besoins des PMA et des pays pauvres, a-t-il noté.  Concernant le financement, le Fonds d’investissement du climat (Climate Investment Fund) sera alimenté, a indiqué l’orateur avant d’évoquer les actions menées par son pays notamment dans l’adaptation des pays africains.  Il a émis le souhait qu’une coopération Sud-Sud se mettra aussi en place.


Le représentant de la France, qui s’exprimait au nom de l’Union européenne (UE), a indiqué que l’Union était très attachée à ce que les PMA reçoivent la plus grande attention, tout en s’associant à la remarque du Japon sur la coopération Sud-Sud.  L’UE est attachée à ce que la Conférence de Copenhague aboutisse à un accord ambitieux en 2009.  L’UE elle-même s’est engagée à parvenir à 20% de réduction des gaz à effet de serre au minimum.  Par ailleurs, l’UE souhaite renforcer son dialogue et sa coopération avec les pays les plus vulnérables au travers d’actions concrètes.  Elle entend œuvrer à la création d’une Alliance mondiale contre les changements climatiques, afin que ceux-ci soient intégrés dans les efforts de réduction de la pauvreté, a conclu le représentant. 


Le représentant d’Antigua et Barbuda, qui s’exprimait au nom du Groupe des 77 et de la Chine, a souligné l’urgence d’agir.  Avons-nous agi de façon suffisamment urgente, s’est-il interrogé, en évoquant la réunion de Bali et les deux réunions qui avaient suivi et qui n’avaient même pas permis de se mettre d’accord sur un programme de deux ans.  Il a émis l’espoir que le Sommet du G-8 permette enfin d’éliminer les entraves et les obstacles, tout en rappelant que l’adaptation aurait un coût.  Mais ce n’est pas aux plus vulnérables, aux plus touchés d’assumer un coût dont ils ne sont pas responsables.  C’est une question de justice, comme l’a dit le Président des Maldives, a-t-il dit.  Les Nations Unies doivent répondre à une question difficile, celle de l’iniquité, liée à la richesse et au mode de consommation des pays développés.  Or, nous ne sommes pas encore entrés dans le débat sur la réduction de cette inégalité.


La représentante du Bangladesh, qui s’exprimait au nom des PMA, a reconnu que les effets des changements climatiques étaient complexes et nombreux, en citant l’élévation du niveau de la mer, la fonte des glaciers ou encore la crise alimentaire, autant d’effets qui ont réduit à néant certains des progrès accomplis en matière de développement.  La notion de justice climatique mise en avant par le Président des Maldives pourrait être un point de départ lorsque l’on parle d’équité, a-t-elle reconnu. Qui est le responsable de la situation actuelle est aussi la question qui est posée, a souligné l’oratrice.  Celle-ci a constaté que la voix des PMA n’était pas souvent entendue, ceux-ci n’ayant généralement pas voix au chapitre.  Il est important de s’asseoir à la table des négociations en sachant ce que nous voulons, a-t-elle souligné.  Elle a noté que bien souvent les financements prévus étaient à court terme, pour faire face à des situations d’urgence. 


La représentante du Bangladesh a évoqué le cas de son pays menacé par la submersion de 18% de son territoire, ce qui concernerait environ 10% de la population.  Il faut inverser la tendance.  Certes, nous disons qu’il faut agir tout de suite mais sur ces questions, il aurait déjà fallu agir hier, a-t-elle conclu.


Concernant la coopération Sud-Sud évoquée par le Japon et par la France, le représentant de la Banque mondiale a répondu que cette question touchait aussi à celle de l’équité.  Il y a un besoin urgent de nouvelles ressources, a-t-il dit, mais aussi de compensations pour les dégâts causés.


La représentante de Tonga s’est demandé comment les PMA pourraient faire face à l’insécurité alimentaire.  Elle a remarqué que c’était les groupes les plus vulnérables de la société qui étaient touchés.  Elle a enfin évoqué le débat en cours à l’Assemblée générale sur une résolution demandant au Conseil de sécurité de se pencher sur la menace à la paix et la sécurité posée par le réchauffement climatique.


Le représentant des Philippines a constaté que l’état des connaissances était très avancé et que les moyens à mettre en œuvre l’étaient aussi. Il est donc plus que temps d’agir, a-t-il dit en rappelant les positions déjà exprimées par son pays.  La 62e session doit inciter à l’action.  Il faut prendre des mesures concrètes en prenant garde de ne pas simplement jongler avec des concepts théoriques.  Il a demandé à la Banque mondiale quand elle pourrait mettre ses ressources à la disposition des pays devant faire face à l’adaptation.


La représentante de l’Organisation mondiale des migrations (OMI) a rappelé que le nombre de personnes qui pourraient être obligées de se déplacer ou migrer d’ici 2050 variait de 25 millions à un milliard.  Cet écart important souligne les besoins en recherche à la fois factuelle et orientée sur l’élaboration de politiques pertinentes.  Elle a évoqué par ailleurs le fait que les changements climatiques auraient des conséquences plus lourdes sur les femmes, surtout en milieu rural.  Les femmes et les enfants ont 14 fois plus de risques de mourir dans une catastrophe que les hommes, a-t-elle déclaré.  Il est donc nécessaire, a-t-elle dit, de doter les communautés, et les femmes en particulier, du savoir et des outils disponibles pour se préparer à faire face aux pires effets des changements climatiques.


Le représentant de la Chine a rappelé que son pays comptait des zones vulnérables à l’instar d’autres États en développement.  La Chine considère que la communauté internationale doit prendre des mesures à plusieurs niveaux, notamment dans le sillage du Protocole de Kyoto.  Les pays vulnérables doivent intégrer l’adaptation dans leur politique de développement, a-t-il remarqué. 


Le représentant de l’Inde a souligné l’impératif d’intervenir.  Nous ne pouvons plus nous permettre d’attendre en laissant le financement de l’adaptation aux seuls mécanismes du marché, a-t-il dit.  Il a mis en garde contre le risque de faire jouer la conditionnalité même si l’on assure qu’il n’en est pas question.  La coopération Sud-Sud serait plus pertinente concernant la technologie et l’expérience acquise, selon lui.  Mais ladite coopération devrait être plutôt triangulaire en y incluant les pays développés, a-t-il remarqué.


La représentante de l’Indonésie a constaté que pour de nombreux pays les changements climatiques constituaient une crise existentielle.  Elle a appelé à ce que le fonds d’adaptation soit opérationnel le plus tôt possible.  L’oratrice a indiqué que son pays élaborait des stratégies d’adaptation avec l’aide du PNUD.


Le représentant de l’Égypte a évoqué la montée des eaux dans le delta du Nil qui menaçait des espèces.  Nous avons identifié nos besoins et nous pensons qu’il est temps de passer à la mise en œuvre, a-t-il souligné lui aussi.


Parmi les réponses des orateurs, le représentant de la Banque mondiale a répondu aux Philippines que son institution devrait commencer à débloquer les fonds au premier semestre 2009.  Il a rappelé que la Banque mondiale agissait d’ores et déjà sur cette question.  Nous sommes prêts, a-t-il conclu, en admettant lui aussi qu’il n’y avait plus de temps à perdre.  La représentante du PNUD a estimé que si la Conférence de Copenhague ne réussissait pas le secteur privé serait peu enclin à jouer son rôle.


Conclusion


CHEIKH SIDI DIARRA, Haut Représentant pour les pays les moins avancés, les pays en développement sans littoral et les petits États insulaires en développement, a conclu la réunion en notant qu’il y avait accord sur le fait que l’action devait être collective.  Il a noté qu’il y avait aussi consensus quant à l’augmentation des aléas climatiques et qu’une augmentation de quatre degrés entraînerait la disparition d’au moins quatre archipels du Pacifique.  De nombreux pays risquent de perdre jusqu’à 20% de leur ressource en eau simplement à cause d’une évaporation accrue.  Il y a là un défi que nous nous devons relever et la communauté internationale peut le faire si elle s’en donne la peine, a-t-il dit.  M. Sidi Diarra a repris à son compte le concept de « justice climatique » mis en avant par le Président des Maldives.


Il faut maintenant prendre le problème des changements climatiques de front, a-t-il ajouté, la notion de l’adaptation étant fondamentale.  Il est essentiel que la gestion des risques soit ajoutée à la planification et que des systèmes d’alerte avancée soient mis en place.  Il y a beaucoup à faire mais pour que les pays vulnérables puissent agir, il faut que les ressources nécessaires soient mises à leur disposition, a-t-il souligné.  En conclusion, Cheikh Sidi Diarra a rappelé les paroles du Secrétaire général de l’ONU selon lesquelles les changements climatiques devaient être le premier point de l’ordre du jour international.


On peut et on doit sortir de ce cercle vicieux, a conclu le Modérateur.


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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