FEM/1561

CEDAW: LES EXPERTS SOULIGNENT LA PERSISTANCE DES STÉRÉOTYPES SEXOSPÉCIFIQUES À SAINTE-LUCIE

23 mai 2006
Conseil economique et socialFEM/1561
Department of Public Information • News and Media Division • New York

Comité pour l’élimination de la

discrimination à l’égard des femmes

729e & 730e séances – matin & après-midi


CEDAW: LES EXPERTS SOULIGNENT LA PERSISTANCE DES

STÉRÉOTYPES SEXOSPÉCIFIQUES À SAINTE-LUCIE


Les experts du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes (CEDAW) ont constaté aujourd’hui, avec l’exemple de Sainte-Lucie, les difficultés que rencontre un petit État insulaire en développement, disposant de ressources limitées et confronté à la persistance des stéréotypes sexospécifiques, pour améliorer la situation des femmes. 


Les autorités de cette île des Caraïbes, qui a ratifié en 1982 la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, s’efforcent de créer un État juste et équitable pour tous les citoyens, a assuré, en présentant les rapports périodiques combinés de son pays*,Mme Lera Pascal, Directrice du Département des relations entre les sexes au Ministère de la santé, des services sociaux, des affaires familiales et des relations entre les sexes de Sainte-Lucie. 


Les auteurs de ces rapports soulignent en effet un renouvellement et un renforcement, avec les années, de l’engagement en faveur de l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes à Sainte-Lucie.  Il reste que de nombreux obstacles subsistent, en particulier ceux qui résultent du manque de ressources humaines et financières.  La Chef de la délégation de Sainte-Lucie s’est ainsi dite préoccupée par la faible quantité de ressources octroyées à son propre Département, service modeste actuellement hébergé dans les locaux du Ministère de la santé. 


Autre handicap relevé par les experts, celui de la persistance dans l’île des stéréotypes sexospécifiques, notamment en matière d’éducation, de santé, de tourisme, d’emploi ou de participation à la vie publique et politique.  Une attitude proactive est nécessaire dans ces domaines, a souligné l’experte du Portugal, encourageant Sainte-Lucie à s’y engager.  Il faut veiller à ce que les femmes ne soient pas considérées comme des objets sexuels et lutter contre les stéréotypes en la matière, a assuré pour sa part l’experte de la Jamaïque, affirmant que les moteurs du tourisme dans les Caraïbes étaient le soleil, la mer et le sexe.  


Afin d’améliorer la représentation des femmes au niveau parlementaire, l’experte de l’Algérie a préconisé des mesures spéciales, comme l’établissement de quotas.  La première femme élue à Sainte-Lucie l’a été en 1979 et fut longtemps « une voix dans le désert », a expliqué Mme Pascal, convenant qu’aujourd’hui encore le nombre des candidates demeurait trop restreint.  Selon elle, dans un environnement hostile où les hommes s’estiment marginalisés, l’instauration de quotas pose problème, mais une réforme est en cours pour augmenter la représentation proportionnelle, laquelle, a-t-elle précisé, permettrait aux femmes d’être mieux représentées au sein des partis politiques, et donc plus facilement élues au Parlement. 


La délégation de Sainte-Lucie et les experts se sont également penchés sur les moyens mis en œuvre dans le cadre de la lutte contre la pandémie du VIH/sida.  L’experte du Ghana s’est ainsi interrogée sur les campagnes visant, dans un pays très catholique, à sensibiliser la population au VIH/sida et à aider les personnes séropositives.  À Sainte-Lucie, les gens sont libres d’utiliser les méthodes de contraception qu’ils souhaitent, a répondu la délégation, ajoutant que la transmission consciente du virus avait été qualifiée de crime dans le nouveau Code pénal en vigueur. 


Le Comité poursuivra ses travaux demain, mercredi 24 mai, à 10 heures, avec l’examen du rapport sur la situation des femmes en Malaisie. 


* Rapport publié sous la cote CEDAW/C/LCA/1-6


EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 18 DE LA CONVENTION SUR L’ÉLIMINATION DE TOUTES LES FORMES DE DISCRIMINATION À L’ÉGARD DES FEMMES


Rapport initial, deuxième, troisième, quatrième, cinquième et sixième rapports périodiques de Sainte-Lucie (CEDAW/C/LCA/1-6)


Le rapport, qui couvre la période de 1982 à 2002, est composé de deux parties.  La première partie présente la toile de fond du pays et le cadre juridique, administratif et constitutionnel qui régit l’application des dispositions de la Convention.  La deuxième partie fournit des renseignements spécifiques concernant l’application des différents articles de la Convention.  La majeure partie des données provient de rapports de recensements et d’enquêtes, de rapports sur la main d’œuvre, de rapports sur la situation économique et sociale et du Recueil annuel de statistiques du Ministère de l’éducation.  Sainte-Lucie a également conduit des consultations avec des particuliers et des organisations des secteurs public et privé.


Le Gouvernement saint-lucien a ratifié la Convention en 1982, laquelle est entrée en vigueur le 7 novembre 1982.  Toutefois, ce n’est qu’avec la création du Bureau des affaires féminines au sein du Ministère du développement communautaire, de la jeunesse, des sports et des affaires sociales en 1986 que le pays a commencé à s’intéresser au processus de ratification et s’est engagé à observer les dispositions de la Convention.


Le Ministère des affaires féminines constitue le principal organisme chargé de promouvoir le développement complet et le progrès des femmes.  Les programmes du Ministère visent les objectifs suivants: améliorer la qualité de vie des femmes; veiller à ce que la participation des femmes aboutisse à des résultats égaux; améliorer les relations entre les sexes; améliorer les services consultatifs techniques fournis aux organismes de l’État et du secteur privé; sensibiliser le public aux questions relatives à l’égalité entre les sexes et à la contribution des femmes au développement national; répondre aux besoins et aux préoccupations des femmes en fournissant une assistance technique aux organisations non gouvernementales en vue de renforcer leur capacité à traiter de ces questions.


Les auteurs du rapport soulignent un renouvellement et un renforcement, avec les années, de l’engagement en faveur de l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes à Sainte-Lucie.  À l’issue des élections générales de 1997, qui a porté au pouvoir un nouveau Gouvernement travailliste, le Gouvernement a manifesté son engagement en faveur de la cause des femmes en leur garantissant l’égalité dans le cadre de son manifeste politique « Un contrat de foi ».  Par ce manifeste, le Gouvernement s’est efforcé notamment de garantir aux femmes l’égalité des chances en matière d’emploi et l’égalité de rémunération, de promouvoir les organisations féminines en vue de les associer formellement à la prise des décisions nationales, de mettre à jour la législation concernant le harcèlement sexuel des femmes au lieu de travail, de garantir l’accès des services de santé appropriés et abordables, d´éliminer toutes les barrières qui empêchent les femmes de participer à la prise de décisions à tous les niveaux, de veiller à ce que toutes les femmes aient accès à l’éducation et à la formation.



Présentation de l’État partie


Mme LERA PASCAL, Directrice du Département des relations entre les sexes au Ministère de la santé, des services sociaux, des affaires familiales et des relations entre les sexes de Sainte-Lucie, s’exprimant en premier lieu sur la question de l’éducation, a souligné que le Gouvernement de Sainte-Lucie atteindrait au début de l’année scolaire 2006-2007 le but de l’éducation secondaire universelle.  Autrement dit, a-t-elle précisé, tout enfant en âge d’aller à l’école secondaire sera assuré d’obtenir une place.  Elle a également mis l’accent sur les meilleurs résultats obtenus par les filles que par les garçons, à tous les niveaux du système éducatif.  Elle a ajouté que les inscriptions de femmes étaient plus nombreuses que celles des hommes au sein des institutions tertiaires.  S’agissant de l’emploi, elle a indiqué qu’une loi sur l’égalité des chances et de traitement était entrée en vigueur en 2000 afin de protéger les travailleurs des pratiques discriminatoires sur les lieux du travail.  En vertu de cette loi, est considéré comme un crime tout harcèlement sexuel pratiqué par un employeur ou toute personne ayant autorité.  Les effets de la mondialisation et des nouveaux régimes d’échange ont un impact négatif sur l’industrie bananière, a-t-elle poursuivi, précisant que les femmes, nombreuses dans ce secteur, avaient subi un coût sévère.  De nombreuses femmes, qui ont quitté le secteur bananier, ont trouvé du travail dans le secteur du tourisme, a-t-elle dit, citant également les secteurs des technologies de l’information et de la communication en expansion.


Mme Pascal a en outre fait état de la réforme du secteur de la santé, fondée sur l’institutionnalisation des soins de santé universels.  Tous les services de soins sont fournis gratuitement, a-t-elle déclaré, indiquant que les coûts sont compensés grâce à une taxation spéciale.  Les femmes sont les principales utilisatrices de soins de santé primaires, en particulier ceux liés à la santé maternelle et des enfants.  Elle a en outre affirmé que la féminisation de la pandémie du VIH/sida préoccupait fortement le Gouvernement.  La détermination du Gouvernement est telle que le Premier Ministre lui-même préside le Comité national contre le VIH/sida, a-t-elle assuré.  Elle a noté que la santé génésique était comprise comme l’un des huit domaines prioritaires du Plan stratégique du Ministère de la santé pour la période 2005-2010. 


Le Gouvernement reconnaît qu’une gestion efficace du problème grave des violences contre les femmes exigeait une démarche stratégique à plusieurs niveaux, y compris en intégrant la société civile et les organisations religieuses, a affirmé en outre Mme Pascal, constatant une différence de statut accordé aux hommes et aux femmes, le sexe masculin étant associé au contrôle, au pouvoir et à la direction, le sexe féminin étant, lui, associé à la subordination.  Un centre d’appui des femmes a été créé en 2001 pour accueillir les femmes victimes de violences conjugales et leurs enfants, a-t-elle expliqué.  Celui-ci offre un environnement agréable et sûr et des conseils sont prodigués afin d’aider les personnes concernés à reconstruire leur vie. 


Mme Pascal a par ailleurs souligné que les autorités de Sainte-Lucie étaient conscientes de la vulnérabilité de leur pays, en raison notamment d’une économie touristique avec des flux de migration extensifs, au phénomène de la traite des personnes et demeuraient vigilantes pour l’éviter.  Sainte-Lucie est un petit pays en développement, disposant de ressources limitées, a-t-elle conclu, ajoutant que les autorités s’efforçaient de créer un État juste et équitable pour tous les citoyens.



Dialogue avec les experts


Concernant les Articles 1 et 2 de la Convention, qui portent sur la discrimination à l’égard des femmes et l’obligation d’éliminer cette discrimination, CORNELIS FLINTERMAN, expert des Pays-Bas,a demandé si l’intervention judiciaire était nécessaire pour les cas de discrimination indirecte et ce qui avait été fait pour sensibiliser les magistrats et les parlementaires à cette question.  Quand Sainte-Lucie va-t-elle ratifier le Protocole facultatif? a-t-il aussi demandé, à l’instar de HANNA BEATE SCHÖPP-SCHILLING, experte de l’Allemagne.  Cette dernière s’est en outre demandée si les recommandations du CEDAW avaient été transmises aux ONG et quels autres ministères avaient participé à l’élaboration des rapports.  MARY SHANTI DAIRIAM, experte de la Malaisie, a rappelé que toutes les lois de Sainte-Lucie devaient être conformes à la Constitution qui garantit l’égalité.  Qu’est-ce qui a été fait concrètement pour évaluer le respect de ce principe d’égalité sur le plan juridique et quel est le calendrier pour des réformes concrètes? a-t-elle demandé. 


Mme GEORGES TAYLOR-ALEXANDER,Procureur général adjoint de Sainte-Lucie, a affirmé que la Constitution garantissait le principe d’égalité et que l’on s’attendait à ce qu’elle s’applique automatiquement, précisant cependant que la juridiction compétente pouvait être saisie pour analyser si la Constitution était respectée.  Le pouvoir judiciaire s’efforce d’établir un équilibre entre le droit national et les dispositions de droit international, a–t-elle déclaré, ajoutant qu’il y avait eu une sensibilisation du domaine judiciaire comme des autres secteurs publics.  Mme Pascal a ajouté que la signature du Protocole facultatif n’avait pas encore été abordée en profondeur et n’était par conséquent pas envisagée cette année.  Pour l’élaboration du rapport, un large spectre de contributeurs a été sollicité, a-t-elle assuré, et plusieurs ministères y ont contribué, ce qui explique aussi les retards pris dans sa présentation devant le Comité.  Enfin, Mme Taylor-Alexander a affirmé que Sainte-Lucie venait de terminer l’examen de toutes ses lois sur une base ad hoc afin d’établir leur conformité avec les dispositions de la Convention. 


HUGUETTE BOKPE GNACADJA, experte du Bénin, a demandé sur quoi reposait l’équilibre entre les lois nationales et les dispositions de la Constitution de Sainte-Lucie qui sont parfois en conflit. 


À cette question,Mme Taylor-Alexander a réaffirmé qu’en cas de conflit entre différentes dispositions légales, la loi entrée en vigueur le plus récemment l’emporte.  En outre, elle a indiqué qu’un nouveau Code pénal, entré en vigueur au début de 2006, impose des peines plus lourdes aux auteurs de violences commises à l’encontre des femmes. 


S’agissant de l’Article 3 de la Convention, qui porte sur le plein développement et les progrès des femmes, MAGALYS AROCHA DOMINGUEZ, experte de Cuba, a souhaité obtenir des renseignements supplémentaires sur les ressources humaines et financières de la Division des relations entre les sexes, service modeste actuellement hébergé dans les locaux du Ministère de la santé, et sur ses attributions.  ZOU XIAOQIAO, experte de la Chine, a demandé des informations sur la composition du Comité consultatif sur l’égalité entre les sexes, crée en 1997, ainsi que sur les recommandations qu’il a formulées.  VICTORIA POPESCU, experte de la Roumanie, a demandé s’il existait une stratégie nationale et un plan d’action national en faveur des femmes et quels en sont les objectifs prioritaires. 


Mme Pascal s’est dite préoccupée par la faible quantité de ressources octroyées à son Département, le service, qui a commencé avec cinq employés, n’en ayant plus que deux.  Nous devons recevoir des ressources et avoir la capacité de faire ce que nous devons faire, a-t-elle déclaré, mettant l’accent sur la nécessité de renforcer les effectifs, notamment en disposant de chercheurs, afin de mettre en œuvre le plan national d’action.  Si la Division ne reçoit pas de ressources supplémentaires, la question de la parité et de la promotion de la femme devrait être considérée par tous les ministères, a-t-elle dit, plaidant toutefois en faveur du maintien de son Département. 


Concernant l’Article 4, PRAMILA PATTEN, experte de Maurice, a demandé dans quels cas des mesures temporaires spéciales allaient être adoptées dans le but d’instaurer l’égalité de fait.  Il faut distinguer les mesures spéciales et les mesures liées à des politiques sociales, a-t-elle rappelé. 


Mme Taylor-Alexander a confirmé qu’aucune mesure temporaire n’avait été adoptée par Sainte-Lucie et que la lutte contre la discrimination relevait d’une politique globale. 


SILVIA PIMENTEL, experte du Brésil, a demandé si des mesures étaient prises pour critiquer les stéréotypes sexospécifiques au niveau professionnel, afin de sensibiliser le grand public.  Elle s’est également interrogée sur les questions du châtiment corporel et des stéréotypes concernant la prostitution.  L’experte de Cuba a elle aussi demandé des informations plus détaillées sur les mesures prises pour surmonter les stéréotypes qui perdurent à Sainte-Lucie, notamment dans un but de promotion du tourisme, ainsi que sur les programmes de l’éducation nationale et de la santé en termes de politique familiale.  MARIA REGINA TAVARES DA SILVA, experte du Portugal, a estimé qu’une attitude proactive était nécessaire dans ces domaines et a encouragé Sainte-Lucie à s’y engager. 


Le Ministère de l’éducation, a indiqué Mme Pascal, a inclus dans les manuels de lecture une sensibilisation pour lutter contre les stéréotypes, semant les germes de cette lutte.  Mme Taylor-Alexander a rappelé la pratique encadrée en matière de châtiment corporel à Sainte-Lucie.  L’objectif est de l’éliminer progressivement, mais c’est une pratique qui perdure depuis longtemps, a-t-elle ajouté, avant d’assurer qu’en matière de prostitution, le nouveau Code pénal en vigueur dans le pays assurait une criminalisation des gains de cette activité.  La prostitution est illégale mais toute personne qui s’y livre ne sera pas victime de discrimination pour cette raison, a-t-elle conclu.  Mme Pascal a quant à elle souligné l’engagement de Sainte-Lucie dans une politique de planification familiale et estimé que les hommes et les femmes étaient impliqués à part égale dans le tourisme. 


Au sujet de l’Article 6 de la Convention, relatif à la traite et à l’exploitation des femmes, HEISOO SHIN, experte de la République de Corée, a regretté le manque d’explications sur ce sujet dans la présentation du rapport.  Il vaut mieux prévenir plutôt que d’essayer d’éliminer le phénomène une fois que celui-ci a prospéré, a-t-elle estimé.  L’expert des Pays-Bas a demandé quel était le statut de la Convention à Sainte-Lucie, et si ses dispositions ont été déjà invoquées par un tribunal.  Il s’est en outre interrogé sur les incidences de l’interdiction générale de la prostitution, tandis que celle-ci continue de prospérer. 


Mme Pascal a affirmé qu’avant 2003, la traite des personnes ne faisait même pas partie des habitants de Sainte-Lucie.  Elle a dit ignorer si le phénomène de la traite existait réellement.  La première enquête qui a été effectuée n’a pas révélé la présence d’un tel trafic sur le territoire du pays, a-t-elle précisé.  Elle a néanmoins confirmé qu’un plan d’action avait été mis en œuvre pour traiter de cette question.  Des personnels infirmiers ou les policiers ont été spécialement formés, a-t-elle ajouté.  Mme Taylor-Alexander a souligné que si le trafic des êtres humains ne faisait pas l’objet de dispositions spécifiques, le phénomène n’ayant pas été identifié, les dispositions du Code pénal seraient néanmoins en mesure de le traiter.  Elle a par ailleurs mis l’accent sur la nécessité d’aligner les dispositions du Code pénal sur les obligations découlant de la Convention.  Elle a ajouté n’avoir pas eu connaissance de cas où la Convention aurait été invoquée devant un tribunal. 


Avant de passer aux Articles 7, 8 et 9, relatifs respectivement à la vie politique et publique, à la représentation et la participation internationales et à la nationalité, GLENDA P. SIMMS,experte de la Jamaïque, a rappelé que les moteurs du tourisme dans les Caraïbes étaient le soleil, la mer et le sexe.  Nous devons veiller à ce que les femmes ne soient pas considérées comme des objets sexuels et lutter contre les stéréotypes en la matière, a–t-elle assuré.  Concernant la représentation des femmes au niveau politique, elle a estimé que les hommes étaient toujours à la tête du pays, et qu’ils n’étaient par conséquent pas marginalisés comme l’a déclaré Mme Taylor-Alexander.  L’experte de la Roumanie a demandé quelle avait été la contribution des femmes qui occupent des postes élevés à Sainte-Lucie et quelles dispositions avaient été prises pour un équilibre des responsabilités au foyer et une aide aux femmes pour mener conjointement leur vie familiale et professionnelle.  Pour sa part, MERIEM BELMIHOUB-ZERDANI, experte de l’Algérie, a estimé que des mesures spéciales, comme l’établissement de quotas, étaient nécessaires pour améliorer la représentation des femmes au niveau parlementaire.  Elle a demandé que Sainte-Lucie prenne en considération que ces dispositions sont celles de l’Article 4 de la Convention, adoptée sans réserve et dans son ensemble par le Gouvernement de Sainte-Lucie.  L’experte de la Chine a indiqué que les données sur la participation des femmes sur le plan international étaient périmées depuis longtemps, et l’experte du Portugal a évoqué une apathie de Sainte-Lucie sur cette question, appelant à motiver les femmes en créant les conditions sociales nécessaires à leur participation. 


Mme Pascal a indiqué que la première femme élue à Sainte-Lucie l’avait été en 1979 et qu’elle avait longtemps été « une voix dans le désert ».  Depuis, plusieurs femmes ont été élues, mais il reste encore beaucoup à faire, a-t-elle convenu, affirmant qu’il n’y avait toujours pas assez de candidates.  À cet égard, a-t-elle précisé, une campagne de promotion est en cours d’élaboration.  Dans un environnement hostile où les hommes estiment qu’ils sont marginalisés, l’instauration de quotas pose problème, a-t-elle poursuivi, mais une réforme est en cours pour augmenter la représentation proportionnelle qui permettrait aux femmes d’être mieux représentées au sein des partis politiques, et donc plus facilement élues au Parlement.  Mme Taylor-Alexander a rappelé que les déséquilibres au niveau judiciaire étaient combattus et affirmé que la réforme constitutionnelle permettrait d’aller plus loin sur cette question dans le domaine politique. 


Mme Taylor-Alexander a déclaré que les postes élevés pour les femmes ne se rapportaient pas uniquement au parti du Gouvernement mais aussi à ceux de l’opposition.  Dans les deux cas, les femmes ont une très forte présence, a-t-elle conclu. 


Concernant l’Article 9, relatif à la nationalité, FUMIKO SAIGA, experte du Japon, a estimé que les citoyennes de Sainte-Lucie sont victimes de discrimination puisque l’homme qu’elles épousent n’obtient pas la nationalité du pays, alors que l’inverse est possible.  Elle a demandé les délais qui étaient prévus pour régler cette question. 


Mme Taylor-Alexander a reconnu que l’amendement de la Constitution était un long processus.  Elle a cependant indiqué que la loi sur la nationalité est en cours de révision. 


Faisant référence à l’Article 10, relatif à l’éducation, l’experte de la Jamaïque a noté une surreprésentation féminine dans les domaines traditionnellement réservés aux filles et elle a demandé si des mesures étaient envisagées pour rééquilibrer cet état de fait et pour permettre aux jeunes filles enceintes de poursuivre leurs études.  Le taux d’abandon scolaire des garçons ne doit pas empêcher les progrès des filles en la matière, a-t-elle estimé.  L’experte du Japon a en outre demandé si le Gouvernement de Sainte-Lucie avait fait des recherches pour savoir ce que devenaient les enfants, et notamment les filles, qui abandonnent l’école. 


Mme Pascal a assuré que chaque enfant de Sainte-Lucie aura une place dans une école secondaire à partir de septembre.  Aucune pression n’est exercée sur les enfants concernant les études qu’ils souhaitent poursuivre, on ne peut pas non plus les forcer à aller contre leur choix, a-t-elle ajouté, rappelant que les bourses sont basées uniquement sur le mérite, sans distinction de sexe.  Concernant la grossesse des étudiantes, il n’y a aucune règle leur interdisant de continuer leurs études, les parents envoient de plus en plus leurs filles à l’école, même enceintes.  Les établissements se doivent d’ailleurs de les y accueillir. 


Au sujet de l’Article 11, relatif à l’emploi, l’experte de l’Allemagne a demandé si le harcèlement sexuel constituait une violation et figurait dans le Code du travail ou un autre code, et quelle était la forme d’assistance judiciaire dont pouvaient bénéficier les femmes victimes de harcèlement sexuel.  L’experte de Maurice a demandé des renseignements sur le taux de syndicalisation des femmes.  Elle a également souhaité des informations sur les éventuelles sanctions prises dans les cas de violations du droit du travail, en particulier pour les femmes enceintes, et connaître la situation des femmes autochtones. 


Mme Taylor-Alexander a mis l’accent sur la législation nationale qui permet la poursuite devant les tribunaux de la discrimination directe et indirecte, au titre du Code du travail et du Code pénal de 2004.  Elle a également indiqué qu’aucune plainte pour harcèlement sexuel n’avait pour l’instant été enregistrée.  Elle a ajouté qu’un commissaire du travail avait pour fonction d’examiner les violations du Code du travail, en particulier les dispositions portant sur l’égalité des chances dans l’emploi.  Elle a également noté qu’il n’existait pas à Sainte-Lucie de catégories séparées d’autochtones. 


Concernant l’Article 12, relatif aux questions de santé, DORCAS COKER-APPIAH, experte du Ghana, s’est interrogée sur les campagnes menées, dans un pays profondément religieux comme Sainte-Lucie, afin de sensibiliser la population au VIH/sida et d’aider les personnes séropositives.  Elle a en outre demandé si la réforme du Code pénal, qui prévoyait de constituer en délit la transmission du virus, avait été entérinée et s’est interrogée sur la politique des autorités concernant la divulgation ou non de cet état de santé.  Des préoccupations reprises par SALMA KHAN, experte du Bangladesh, qui a noté que la femme était profondément désavantagée pour bénéficier du traitement de cette maladie, tout comme pour celui du col de l’utérus.  Elle s’est interrogée sur la politique de Sainte-Lucie relative à l’avortement.  L’experte du Brésil a demandé quelles étaient les mesures que le Gouvernement avaient prises pour assurer un avortement dans le cas où celui-ci est autorisé par la loi, s’inquiétant notamment des risques importants causés par une loi restrictive sur cette question.  L’experte de la Malaisie a noté des taux plus élevés de mortalité chez les femmes atteintes de certaines maladies comme le diabète, et demandé comment le Gouvernement prévoyait d’améliorer l’accès des femmes aux soins obstétriques et des jeunes au service de planification dans le cadre de la réforme de la santé en cours. 


Répondant à ces questions, Mme Pascal a rappelé que l’Église catholique avait sa position quant à l’utilisation des préservatifs.  À Sainte-Lucie, les gens sont libres d’utiliser les méthodes de contraception qu’ils souhaitent, a-t-elle indiqué, ajoutant que le Gouvernement avait engagé une campagne très sérieuse contre le VIH/sida, et notamment en faveur de l’accès gratuit aux médicaments rétroviraux, sans divulgation de statut.  Elle a assuré qu’une réflexion était en cours pour améliorer les services de planification destinés aux jeunes filles et adolescentes.  MmeTaylor-Alexander a en outre confirmé que la transmission consciente du virus avait été élevée en crime dans le nouveau Code pénal en vigueur à Sainte-Lucie. 


S’agissant de l’Article 14 de la Convention, qui porte sur les femmes rurales et le développement, ANAMAH TAN, experte de Singapour, a demandé quels étaient les progrès réalisés à ce jour.  Elle a également demandé si le pays disposait d’une évaluation du nombre de filles qui vont à l’école en milieu rural.  L’experte de la Jamaïque a demandé pour sa part si des efforts étaient réellement entrepris pour recycler les femmes rurales qui ont subi de plein fouet les difficultés de l’industrie bananière. 


Mme Pascal a expliqué que les conditions de vie des femmes rurales se sont considérablement améliorées au fil des années.  Beaucoup de choses sont réalisées pour offrir de nouvelles qualifications aux travailleurs issus de l’industrie bananière, a-t-elle également affirmé.  Des programmes de diversification à grande échelle ont été lancés afin d’inciter les femmes à produire d’autres récoltes, a-t-elle ajouté, précisant que la formation était prévue dans un cadre national de recyclage.  


L’examen des Articles 15 et 16 de la Convention, relatifs à l’égalité devant la loi et aux questions du mariage et de la famille, a donné lieu à de nombreuses questions, notamment de la part de l’experte du Bénin.  Celle-ci s’est interrogée sur la formulation dans le Code civil en vigueur à Saint-Lucie, qui stipule qu’un homme doit protéger son épouse alors qu’une femme lui doit obéissance, jugeant une telle disposition discriminatoire.  Elle a en outre relevé qu’en cas de litige, le mari représente juridiquement la communauté de biens et qu’il n’existe pas de possibilité de divorce par consentement mutuel.  L’experte de Singapour a en outre demandé pourquoi seul le nom du père figurait dans l’acte de naissance d’un nouveau-né.  Il n’y a pas de garantie de protection des femmes en cas de violences conjugales, a-t-elle également noté, à la lumière des rares statistiques relatives à la formation de personnel en la matière, mentionnées dans les rapports périodiques présentés ce matin.  L’experte du Bangladesh s’est quant à elle demandée si le viol par le mari est pris en compte dans le Code civil.  Elle a également demandé si la baisse de la population de Sainte-Lucie était, selon la délégation de Sainte-Lucie, liée à un recours important à l’avortement dans le pays.  Enfin, l’experte du Ghana a demandé les mesures qui sont prises dans le cadre de la réforme du Code civil pour permettre la transmission des biens d’union de fait au cas où l’un des deux partenaires décède sans laisser de testament, ainsi que des clarifications concernant ces mêmes questions de transmission pour les enfants dits illégitimes. 


Répondant à ces questions, Mme Taylor Alexander a rappelé que la notion d’enfant « illégitime » tendait à être éliminée dans la réforme du Code civil.  Les positions juridiques à Sainte-Lucie ont longtemps été influencées très fortement par l’Église catholique, positions très morales qui sont actuellement revues, a-t-elle indiqué, assurant que dans un an, l’égalité entre les époux devrait être pleinement acquise, notamment sur les questions liées au divorce.  Il n’y a pas de statut juridique sur les unions de fait, a-t-elle poursuivi, déclarant que cela devrait également être réformé.  Enfin, sur la question des poursuites judiciaires liées à la violence domestique, elle a fait état de certaines réticences de la part de la police mais elle a assuré que le problème était abordé de manière très proactive.  Mme Pascal a d’ailleurs surenchéri, affirmant qu’un programme de sensibilisation auprès de la police a été lancé afin de faire comprendre que la violence domestique est effectivement de nature criminelle.  Elle a conclu en estimant que la baisse de la natalité à Sainte-Lucie était probablement liée à l’utilisation des préservatifs, suite aux campagnes menées dans le pays sur le VIH/sida, précisant cependant que des éléments plus précis sur cette question étaient nécessaires.


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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