ECOSOC/6203-ONG/597

COMITÉ DES ONG: PROFONDS DÉSACCORDS CONCERNANT LES DEMANDES PRÉSENTÉES PAR UNE ONG DE DÉFENSE DES HOMOSEXUELS ET UNE AUTRE DE DÉFENSE DES DROITS DE L’HOMME

17 mai 2006
Conseil economique et socialECOSOC/6203
ONG/597
Département de l’information • Service des informations et des accréditations • New York

Comité chargé des ONG

23e et 24e séances – matin et après-midi


COMITÉ DES ONG: PROFONDS DÉSACCORDS CONCERNANT LES DEMANDES PRÉSENTÉES PAR UNE ONG DE DÉFENSE DES HOMOSEXUELS ET UNE AUTRE DE DÉFENSE DES DROITS DE L’HOMME


Le Comité chargé des ONG a poursuivi son examen de candidatures d’ONG au statut consultatif auprès du Conseil économique et social.  Il a recommandé, dans ce cadre, le statut consultatif spécial* pour une ONG.  Après des débats animés, il a rejeté la candidature d’une association de défense des droits des homosexuels.  Les discussions autour du dossier d’une association italienne de défense des droits de l’homme ont également été vives. 


Ma Qualcuno Pensi ad Abele, basée à Rome (Italie), a fourni les réponses réclamées par le Comité à la suite de sa candidature au statut consultatif.  Mais le délégué de Cuba a déploré des contradictions dans la réponse de cette ONG concernant des actions menées au sujet de Cuba, notamment sa participation à une conférence sur les droits de l’homme à Cuba.  La déléguée de l’Algérie, en tant qu’observatrice, a également demandé des explications sur les actions de cette ONG au Sahara occidental.  Le délégué de la France a reconnu que les réponses de l’ONG n’étaient pas claires mais il a souligné que le fait d’avoir organisé une conférence sur les droits de l’homme à Cuba ne saurait être retenu comme un grief par le Comité.  Il a également estimé que les travaux de cette ONG n’avaient pas porté sur le Sahara occidental et, s’adressant à la déléguée algérienne qui avait déclaré que l’ONG « prétendait » défendre les droits de l’homme, il a demandé qu’aucun procès d’intention ne soit fait à cette organisation.  Il a rétorqué au délégué de Cuba qu’il n’y avait pas lieu de qualifier de « terroriste » cette ONG et que ce terme, émanant d’un organe des Nations Unies, ne pouvait être utilisé que dans le cadre de la stricte définition onusienne.  Le délégué de Cuba a insisté sur les allégations de terrorisme à l’encontre de cette ONG, rappelant qu’elle se livre à des activités anticubaines.  Le délégué du Soudan a soutenu son homologue cubain en affirmant que si cette ONG n’a pas participé à des activités terroristes, ou même simplement politiques, elle doit en faire la preuve devant le Comité.  Le dossier de Ma Qualcuno Pensi ad Abele a donc été laissé en suspens par le Comité.


Le dossierd’ILGA-Europe, association belge qui œuvre en faveur de l’égalité des homosexuels, bisexuels et transsexuels, a fait l’objet de vifs débats de fonds et de procédures.  La déléguée de l’Iran s’est dite insatisfaite des réponses apportées par cette ONG et a demandé de rejeter immédiatement la candidature d’ILGA-Europe.  Soutenu par le délégué de la France qui a estimé qu’un tel rejet romprait avec le règlement, le délégué allemand a demandé que, conformément à l’article 50 du règlement intérieur de l’ECOSOC, l’étude de ce dossier soit reportée à la prochaine session du Comité.  À l’inverse, le délégué soudanais, tout comme le Sénégal, a appuyé la déléguée iranienne et a donc demandé de statuer immédiatement sur cette candidature.  À l’issue d’un vote* par 11 voix contre, 7 voix pour, et une abstention, le report demandé par l’Allemagne et la France a été rejeté.  Refusant que le rejet du dossier se fasse sans vote, le délégué français a alors demandé un scrutin sur la candidature d’ILGA-Europe.  Soutenu par la Colombie, la Roumanie et l’Allemagne, il a estimé que, conformément à la résolution 9631 de l’ECOSOC, une ONG doit avoir la possibilité de répondre à toute question.  Il a également affirmé qu’hier, le Comité a violé la règle 15 de la résolution 9631 en rejetant le dossier de la Fédération des homosexuels et lesbiennes d’Allemagne après une remarque de la déléguée iranienne sans donner la possibilité à l’ONG de répondre.  Le délégué allemand a déploré que ce type de difficultés se produise systématiquement au sujet d’ONG de défense des droits des homosexuels.  « Les homosexuels font partie de la société civile et le Comité doit en tenir compte » a-t-il conclu.  À l’issue d’un vote** par 9 voix contre, 7 voix pour et deux abstentions, la candidature d’ILGA-Europe au statut consultatif auprès de l’ECOSOC a été rejetée.  A l’issue du vote, la déléguée du Pérou a estimé que les procédures n’ont pas été respectées et s’est dite « préoccupée de constater que la discrimination et la non-tolérance se sont insinuées dans le Comité ».  Le délégué de la Roumanie a affirmé que « si le Comité voulait jouer le jeu de la discrimination », sa délégation ne voulait pas y être impliquée. 


Le Comité a en revanche décidé de reclasser l’ONG russe Federation For Peace and Conciliation.  Cette ONG a demandé à passer de l’inscription sur la Liste au statut consultatif spécial***.  Federation for Peace and Conciliation œuvre dans les domaines du désarmement et de la sécurité, de la résolution des conflits, de la tolérance, de la démocratie et des droits de l’homme.


Le dossier de l’Association civile Consorcio Desarrollo y Justicia basée au Venezuelaa été laissé en suspens car il a fait l’objet de plusieurs questions posées par les délégations de Cuba et du Venezuela.  M. Carlos Eduardo Ponce Silèn, Directeur général de cette association vénézuelienne était venu répondre longuement devant le Comité dans l’après-midi.


Les missions de la Section des ONG du Secrétariat


Dans la matinée, M. Ricardo Espinosa, Administrateur de la Section des ONG, a rappelé que le temps manquait souvent à la Section pour transmettre les informations au Comité en temps voulu.  Il a également évoqué l’une des tâches de la Section qui revient à rester vigilante quant au comportement d’ONG.  Par exemple, certaines organisations ayant le statut consultatif auprès de l’ECOSOC organisent des stages de formation au Palais des Nations à Genève où tout leur est offert (locaux, formateurs etc.).  Malgré cela, ces ONG demandent aux participants de débourser des sommes importantes.  Un autre problème émane du fait que des ONG utilisent, sans aucune autorisation, le logo des Nations Unis pour leurs documents.  


Mme Hanifa Mezoui, Chef de la Section des ONG de l’ECOSOC a notamment rappelé que la Section portait toute l’attention nécessaire à la familiarisation des ONG avec les Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD).  À cet égard, le délégué des États-Unis, tout en reconnaissant qu’il était important de familiariser les ONG aux Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD), a estimé cependant que la priorité de la Section des ONG et du Comité était d’examiner les nouvelles candidatures d’ONG au statut consultatif auprès de l’ECOSOC, de vérifier les dossiers des ONG qui sont déjà accréditées, de prendre note des rapports quadriennaux et de faciliter la communication entre le Comité et les ONG.  Il a affirmé qu’une fois ce travail essentiel effectué par la Section et le Comité, il ne voyait aucun inconvénient à engager les ONG à contribuer à la réalisation des OMD.


La représentante du Chili a proposé notamment que le travail des séances officieuses du Comité soit renforcé afin d’avoir plus de temps pour étudier les dossiers et donc d’être plus efficaces.


À l’instar de la déléguée du Chili, celui des États-Unis a jugé nécessaire que des notifications écrites soient envoyées à deux reprises aux ONG qui n’ont pas rendu leur rapport quadriennal dans les temps.  Si les ONG ne répondent pas, il faudrait ensuite aller plus loin et mettre en ligne sur le site Internet des Nations Unies la liste des ONG qui sont en retard d’au moins un an pour remettre leur rapport quadriennal.  Les délégués de la Russie et du Cameroun ont approuvé cette dernière proposition.


Le délégué de Cuba a quant à lui suggéré l’envoi de trois courriels et d’un courrier postal.  Il a proposé des sanctions à l’encontre des ONG qui possèdent le statut consultatif et qui ne respecteraient pas les délais lorsque le Comité leur demande des documents, notamment les rapports quadriennaux.  L’une des sanctions pourrait être le déclassement et la simple inscription sur la Liste****.  Par ailleurs, le délégué cubain a approuvé le délégué américain en proposant que, lorsqu’une ONG accréditée auprès de l’ECOSOC fusionne avec une ONG non accréditée, la nouvelle entité soit obligée de reformuler une demande de statut consultatif auprès du Comité.  Le délégué cubain s’est également plaint de la réduction de la durée des sessions du Comité, qui sont passées de trois à quatre semaines.


Le délégué de la Turquie s’est également prononcé pour l’envoi d’un courrier aux ONG qui sont en retard dans la remise de leur rapport quadriennal puis, après deux rappels, le Comité devrait s’assurer qu’il n’y a pas d’autres moyens de communiquer avec elles.  Il s’est en revanche opposé à la proposition du délégué de Cuba de sanctionner les ONG en retard.  Tout en déplorant que le Comité ait parfois à envoyer jusqu’à sept rappels à des ONG en retard pour leur rapport quadriennal, le délégué de la Chine a estimé qu’une sanction telle que le déclassement d’une ONG devrait être décidée avec prudence après s’être assuré que tous les moyens de rappel ont été épuisés.  Concernant la fusion des ONG, il s’est aligné sur la proposition américaine.  De son côté, la déléguée du Pérou a qualifié de « dangereux » le principe de sanctions. 


Le Comité chargé des ONG reprendra ses travaux demain, jeudi 18 mai, à 10 heures.


*     Les résultats du vote sont les suivants: 7 pour (Chili, France, Allemagne, Inde, Pérou, Roumanie et États-Unis), 11 contre (Cameroun, Chine, Colombie, Côte d’Ivoire, Cuba, République islamique d’Iran, Pakistan, Fédération de Russie, Sénégal, Soudan et Zimbabwe) et une abstention (Turquie).


**    Les résultats du vote sont les suivants: 9 pour (Cameroun, Chine, Côte d’Ivoire, République islamique d’Iran, Pakistan, Fédération de Russie, Sénégal, Soudan et Zimbabwe), 7 contre (Chili, Colombie, France, Allemagne, Pérou, Roumanie et Etats-Unis), et 2 abstentions (Inde et Turquie).  


***   Le statut consultatif spécial concerne des ONG reconnues au niveau international pour leurs compétences spécifiques dans certains domaines d’activités du Conseil.  Ces ONG peuvent soumettre des communications écrites et des pétitions auprès de l’ECOSOC.


****  La Liste concerne les ONG qui contribuent périodiquement aux travaux de l’ECOSOC et ne peuvent lui soumettre que des communications écrites.


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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