CS/8911

SERGE BRAMMERTZ DÉCLARE AUX MEMBRES DU CONSEIL DE SÉCURITÉ QUE L’ENQUÊTE SUR L’ASSASSINAT DE RAFIK HARIRI EST À UN STADE CRITIQUE

18/12/2006
Conseil de sécuritéCS/8911
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Conseil de sécurité

5597e séance – après-midi


SERGE BRAMMERTZ DÉCLARE AUX MEMBRES DU CONSEIL DE SÉCURITÉ QUE L’ENQUÊTE SUR L’ASSASSINAT DE RAFIK HARIRI EST À UN STADE CRITIQUE


Serge Brammertz, Président de la Commission d’enquête internationale indépendante, a fait état cet après-midi devant le Conseil de sécurité des progrès* de l’enquête concernant l’assassinat de l’ancien Premier Ministre libanais Rafik Hariri alors que, selon lui, l’enquête en est à une étape critique.  Il s’est félicité de la bonne collaboration de la Syrie en exprimant l’espoir que celle-ci allait se poursuivre.


Le représentant de la Syrie, tout en se réjouissant que le rapport fasse état de cette collaboration, a mis en garde contre un risque de manipulation de l’enquête par certaines parties pour parvenir à un résultat sans lien avec la vérité.  Il est nécessaire, a-t-il dit, de donner les moyens et le temps nécessaires afin de rejeter toute hypothèse n’ayant aucun fondement.


Pour la représentante du Liban, le travail de la Commission d’enquête mettra fin à la situation dans laquelle se trouve son pays et découragera de porter atteinte à la paix civile.


* S/2006/962



LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT


Exposé


M. SERGE BRAMMERTZ, Président de la Commission d’enquête internationale indépendante chargée d’enquêter sur l’assassinat de Rafik Hariri et de 22 autres personnes, qui a précisé que son exposé portait sur les travaux de la Commission entre le 25 septembre et le 10 décembre, a d’abord noté le caractère « volatile » de la situation au cours de cette période qui a été marquée en particulier par l’assassinat du Ministre libanais de l’industrie, Pierre Gemayel, le 21 novembre.


M. Brammertz estime que la Commission a atteint un stade critique de son enquête.  Dans ce contexte, la justice libanaise et la Commission estiment que l’éventuelle divulgation d’informations sur les suspects et les témoins ne faciliterait pas la prise de contact avec la Commission de personnes clefs et pourrait s’avérer préjudiciable à des procès futurs devant les tribunaux.


L’enquête a porté sur l’analyse des indices trouvés sur la scène du crime.  Les résultats des plus récentes analyses confirment qu’il n’y a eu qu’une seule explosion.  Il est probable en outre qu’une personne a déclenché la déflagration depuis l’intérieur de la camionnette Mitsubishi ou juste devant elle plutôt que par un système de déclenchement à distance.  La Commission a aussi analysé les restes d’un homme non identifié qui pourraient ceux de l’auteur de l’explosion.  Les analyses des médecins légistes montrent que cet individu n’a pas passé sa jeunesse au Liban mais qu’il y a séjourné dans les deux ou trois mois précédant sa mort.  La Commission espère qu’après une deuxième phase d’analyse, l’origine géographique et ethnique de cette personne pourra être déterminée.


M. Brammertz a indiqué que parmi les nombreux autres aspects de l’enquête, la Commission continuait de s’intéresser à Ahmed Abou Adass -qui a revendiqué l’attentat sur un document vidéo- et aux personnes susceptibles de lui être liées.  La Commission a réalisé 17 entretiens en Syrie et au Liban concernant cet aspect du dossier et a eu des contacts avec des responsables à Damas et à Beyrouth.  Elle a aussi visité un certain nombre de lieux en Syrie.  Elle a examiné également les menaces qui pesaient sur M. Hariri, ainsi que les motifs plausibles de l’assassiner liés à son activité politique dans les 15 derniers mois de sa vie.


Par ailleurs, la Commission a continué à fournir une assistance technique aux autorités libanaises dans les 14 cas d’assassinat.  La Commission a en particulier interrogé des témoins associés aux victimes des six attentats ciblés.  Il existe un nombre considérable de liens d’une part entre ces six cas et d’autre part entre ceux-ci et celui de Rafik Hariri, a souligné le Président de la Commission.  Ces attaques ont peut-être un lien commun, a-t-il estimé, compte tenu de l’identité des objectifs et des intérêts des victimes.


Serge Brammertz a ensuite évoqué l’assassinat de Pierre Gemayel en indiquant que la Commission fournissait une aide aux autorités libanaises pour en identifier les auteurs.  Les premiers éléments de l’enquête montrent que M. Gemayel faisait l’objet d’une surveillance dans le cadre d’une opération montée contre lui.  La Commission partage avec les autorités libanaises toutes les informations pertinentes.


Concernant la République arabe syrienne, la coopération avec celle-ci est généralement satisfaisante, a indiqué le Président de la Commission, qui continue à compter sur celle-ci en raison de son caractère essentiel.  M. Brammertz a déclaré qu’au cours de la dernière période, la Commission avait présenté une douzaine de demandes officielles pour obtenir l’assistance des autorités de Damas et entrepris des activités et des entretiens avec des ressortissants syriens.  La Commission est satisfaite par le respect des échéances et l’efficacité de la Syrie, ainsi que par les arrangements logistiques et sécuritaires pris par les autorités syriennes permettant de poursuivre l’enquête en Syrie.  Elle continue donc de compter sur la pleine coopération des autorités syriennes, indispensable à l’achèvement de ses travaux.


Concernant la coopération internationale au sens large, le nombre total de requêtes atteignent la soixantaine, en dehors de celles adressées au Liban et à la Syrie.  M. Brammertz a indiqué que certains États avaient fourni leurs informations de façon incomplète ou en retard, ce qui a ralenti la Commission.  Celle-ci espère pouvoir bénéficier de la coopération de tous dans la prochaine période.


En résumé, la Commission a fait des progrès dans deux domaines principaux –à savoir l’analyse des éléments de preuve sur la scène du crime et l’enquête sur les suspects potentiels-, a conclu le juge.  La réalisation d’une cinquantaine d’entretiens et la collecte d’autres éléments de preuve sont prévus pour la prochaine période à l’examen en vue de les présenter devant un futur tribunal, a annoncé M. Brammertz.  En outre, la Commission continuera d’apporter son soutien dans l’enquête sur l’assassinat de Pierre Gemayel, en vue non seulement d’en déterminer les responsables mais aussi d’examiner les liens de ce crime avec d’autres.  La Commission espère qu’elle pourra compter sur la coopération du Conseil de sécurité pour lui permettre de mener à bien son mandat.


Déclarations


Mme CAROLINE ZIADE (Liban) s’est félicitée de l’excellent travail réalisé par M. Brammertz, qui a permis à la Commission d’enquête internationale indépendante, chargée d’enquêter sur l’assassinat de Rafik Hariri et de 22 autres personnes, de faire des progrès.  Nous pensons que la Commission a un rôle à jouer et le Liban continuera de mettre à disposition toutes les ressources nécessaires à la Commission pour lui faciliter la tâche.  Les efforts de la Commission internationale d’enquête et les efforts du Tribunal international mettront fin à la situation dans laquelle se trouve le Liban et découragera de porter atteinte à la paix civile.  Le Gouvernement libanais réaffirme son plein appui à l’équipe et espère que le Conseil prorogera le mandat de la Commission de six mois pour lui permettre de s’acquitter de son mandat, a conclu la représentante.


M. BASHAR JA’AFARI (République arabe syrienne) a indiqué que son pays prenait note des informations positives concernant son pays.  Le rapport démontre clairement, selon lui, que la coopération syrienne est satisfaisante et qu’elle se fait dans les temps.  La délégation syrienne a confirmé que la coopération de son pays avec la Commission d’enquête contribuait à lever le voile sur l’assassinat, d’en identifier ses auteurs et commanditaires. 


Ce sixième rapport périodique démontre que la Syrie fournit toutes les informations tirées par toutes les institutions concernées, a estimé son représentant.  La Syrie espère que cette enquête va se poursuivre et réitère que le plus grand risque auquel fait face cette procédure serait que certaines parties continuent d’exploiter cette enquête pour aboutir à des conclusions fallacieuses.  Il y a aussi le risque, selon son représentant, que certaines parties tentent d’orienter l’enquête afin de parvenir à des objectifs étrangers aux motifs ayant présidé à la création de la Commission d’enquête.


Le représentant syrien souligne la nécessité d’examiner tous les éléments de preuve en fonction des critères internationaux admis.  Elle appelle tous les pays à collaborer et à refuser à donner refuge à d’éventuels suspects.  Nous aurions aimé que l’on nous donne les noms des États qui n’ont pas encore collaboré avec la Commission, a déclaré le représentant syrien.  Il a souligné la nécessité de préserver la confidentialité de l’enquête, qu’il était nécessaire de donner à ce processus les moyens et le temps nécessaire afin de rejeter toute hypothèse n’ayant aucun fondement.  Enfin nous confirmons que la Syrie s’engage à collaborer de manière neutre et impartiale, a-t-il conclu.


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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