CS/8384

CONSEIL DE SÉCURITÉ: LES EFFORTS EN HAÏTI DOIVENT ÊTRE AXÉS SUR LES PROCHAINES ÉLECTIONS ET LE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE, INSISTENT LES DÉLÉGATIONS

13/05/2005
Communiqué de presse
CS/8384


Conseil de sécurité

5178e séance – matin


CONSEIL DE SÉCURITÉ: LES EFFORTS EN HAÏTI DOIVENT ÊTRE AXÉS SUR LES PROCHAINES ÉLECTIONS ET LE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE, INSISTENT LES DÉLÉGATIONS


Le Conseil de sécurité a tenu ce matin une réunion pour examiner le rapport de sa mission en Haïti, conduite par l’Ambassadeur du Brésil, Ronaldo Sardenberg, du 13 au 16 avril dernier.  Cette mission, la première du genre en Amérique latine et aux Caraïbes, le signe éloquent de l’intérêt que le Conseil de sécurité porte à la crise que traverse Haïti et à la nécessité d’une intervention immédiate, a-t-il souligné.  Un témoignage d’autant plus marqué que cette visite s’est déroulée parallèlement à celle qu’effectuait le Groupe consultatif ad hoc sur Haïti du Conseil économique et social (ECOSOC).  À l’instar de M. Sardenberg, de nombreuses délégations ont soutenu qu’il ne saurait y avoir de stabilité en Haïti tant qu’il ne sera pas en mesure de créer un environnement sûr, de faire respecter les droits de l’homme et de promouvoir le développement économique et social.  De même, a-t-il observé, la tenue d’élections au cours de cette année est le défi majeur pour les Haïtiens et la communauté internationale. 


Ces élections devront se tenir à la date prévue, a ajouté le représentant de la France.  Elles devront être libres et justes, ouvertes à tous les partis politiques qui ont renoncé à la violence, et permettre la participation la plus large possible de la population.  Afin de relever ce défi immédiat pour les Haïtiens, il convient, a-t-il précisé, de renforcer la sécurité, de mettre en œuvre au plus vite des projets de développement à impact rapide et de suivre de près la préparation des élections, en particulier l’enregistrement des électeurs ou l’effort d’éducation civique vers la population.


Le représentant du Canada, qui a présidé pour sa part le Groupe consultatif ad hoc sur Haïti de l’ECOSOC, a estimé qu’il incombait aux Haïtiens de s’acquitter de la responsabilité principale de bâtir un Haïti stable et démocratique.  La communauté doit cependant offrir son soutien à long terme à cet effort, a-t-il déclaré.  Le moment est venu, a-t-il ajouté, d’aller de l’avant, d’engager un dialogue national sur l’édification d’un pays stable, où les citoyens jouissent de la liberté et de la sécurité économique.


Comme le recommande la mission du Conseil, le représentant du Chili a jugé indispensable de procéder sans délai et de manière approfondie à la pleine mise en œuvre d’un programme de démobilisation, de désarmement et de réinsertion (DDR).  Ramener la paix en Haïti passe nécessairement par le désarmement de la société haïtienne tout entière et pas seulement de ceux qui ont servi dans l’armée, a-t-il expliqué.


La plupart des intervenants ont relayé la demande des autorités haïtiennes en faveur d’une prorogation du mandat de la MINUSTAH pour une période de douze mois.  Le représentant d’Haïti a assuré que le Gouvernement de transition, qui œuvrait au rétablissement de l’autorité de l’État sur toute l’étendue du territoire, était résolu à organiser des élections avant la fin de l’année et à remettre le pouvoir à un gouvernement élu.  Il entend également tout mettre en œuvre pour réaliser la réforme du système judiciaire et de la police, lutter contre toutes les violations des droits de l’homme et combattre l’impunité sous toutes ses formes.


Outre les orateurs cités, les représentants de l’Argentine, des États-Unis, de la République-Unie de Tanzanie, des Philippines, de la Roumanie, de la Grèce, du Luxembourg (au nom de l’Union européenne), du Guatemala, du Pérou, de la Norvège, de Trinité-et-Tobago, de l’Espagne, ainsi que l’Observateur permanent de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF) ont également pris la parole.



MISSION DU CONSEIL DE SÉCURITÉ EN HAÏTI


Déclarations


M. RONALDO MOTA SARDENBERG (Brésil), qui avait conduit la mission du Conseil de sécurité en Haïti, a affirmé que la visite était la première de ce type dans un pays d’Amérique latine ou des Caraïbes.  La mission, composée de la quasi-totalité des ambassadeurs, était le signe éloquent de l’intérêt que le Conseil de sécurité porte à la crise que traverse Haïti et à la nécessité d’une intervention immédiate.  Les principales conclusions de la mission sont que la communauté internationale est engagée à appuyer Haïti dans cette crise qui est au carrefour de l’histoire de ce pays.  La mission ne peut pas agir au nom d’Haïti, a-t-il déclaré, mais elle demande aux Haïtiens eux-mêmes et au Gouvernement de transition d’assumer leur responsabilité historique et de prendre en main leur propre destin.  Il ne saurait y avoir de stabilité sans des progrès dans la création d’un environnement sûr, sans que l’on respecte les droits de l’homme et la promotion du développement économique et social.  La tenue d’élections au cours de cette année est le défi majeur pour les Haïtiens et la communauté internationale, a-t-il observé.  Elles sont essentielles pour la formation d’un gouvernement légitime.  Les résultats du vote doivent être respectés par tous les intervenants.  La préparation technique du scrutin doit être suivie de près par le Conseil à intervalles réguliers, a poursuivi M. Sardenberg.  Selon lui, des ressources supplémentaires seront probablement requises pour couvrir les coûts à hauteur de 22 millions de dollars.  La mission soutient un dialogue à long terme, avec l’implication de tous les secteurs de la société haïtienne, dans le but de développer une vision commune de l’avenir d’Haïti.  La sécurité doit être renforcée afin de permettre des élections justes et libres, a-t-il assuré.


Le Gouvernement de transition devrait accélérer son programme de démobilisation, de désarmement et de réinsertion (DDR), avec l’aide de la MINUSTAH, a souligné M. Sardenberg.  La mission du Conseil, a-t-il ajouté, lance un appel à la communauté internationale pour aider les Haïtiens à combattre l’impunité et promouvoir les respect des droits de l’homme.  Elle renouvelle également son appel pour que les fonds promis par les institutions financières internationales depuis la Conférence internationale des donateurs de juillet 2004  soient engagés.  Elle appuie fermement la conférence de suivi des donateurs qui doit avoir lieu au mois de juillet. 


En sa qualité de représentant du Brésil, M. Sardenberg a estimé que la tâche la plus urgente était d’assurer les conditions minimales du succès de la période de transition en faisant les premiers pas sur la grande route du redressement national.  Le Brésil estime qu’une période de douze mois pour le prochain mandat de la MINUSTAH est nécessaire.  Des arrangements de sécurité seront également nécessaires pour une période limitée en liaison avec les élections.  Il a en outre insisté pour que les effectifs des forces militaires et de police civile soient renforcés.  Il faut une plus grande participation de la police des Nations Unies pour assurer la sécurité, a-t-il ajouté.  De même, a-t-il souligné,  il ne pourrait y avoir de progrès durable s’il n’y a pas de réforme coordonnée du système judiciaire.


M. CÉSAR MAYORAL (Argentine) a estimé que Haïti se trouve à un moment décisif de son histoire et la MINUSTAH doit l’aider, dans ce contexte, en collaborant à la reconstruction de ses institutions démocratiques et aux programmes de développement.  Les problèmes économiques, sociaux et politiques du pays sont loin d’avoir été tranchés mais la situation serait plus dramatique si les Nations Unies n’étaient pas intervenues.  Il est essentiel, a poursuivi le représentant, d’assurer un niveau de sécurité pour faciliter un environnement normal pour les élections à partir du 8 octobre.  Il faut, pour ce faire, augmenter les contingents des militaires et de la police civile pendant toute la période électorale jusqu’à l’inauguration du nouveau gouvernement en 2006.  La MINUSTAH doit s’assurer que les élections soient libres, inclusives et ouvertes à tous les partis qui ont renoncé à la violence.  Le représentant a aussi souligné l’importance de l’assistance internationale pour les élections mais aussi pour la reconstruction des systèmes judiciaire et pénitentiaire afin d’assurer la défense des droits de l’homme et le respect du droit.  Le représentant a rappelé l’urgence que les fonds promis soient décaissés par les donateurs internationaux pour assurer la réalisation des projets de développement et convaincre la population locale que l’ONU est là pour l’aider. 


M. STUART HOLLIDAY (États-Unis) a évoqué les lacunes du système judiciaire en Haïti, rapportant certaines des réflexions de la représentante américaine présente dans la Mission des Nations Unies en Haïti.  Il a affirmé ainsi que, selon des interlocuteurs haïtiens, les retards dans l’administration de la justice et des affaires à traiter étaient tels que ceux qui étaient en prison y étaient plus longtemps que la peine qu’ils encouraient.  C’est inacceptable, a-t-il affirmé. 


M. AUGUSTINE P. MAHIGA (République-Unie de Tanzanie) a rappelé que la MINUSTAH est la cinquième missiondes Nations Unies en Haïti depuis 1995.  Cette fois-ci, la Mission devrait pouvoir faire la différence en jetant les bases d’une stratégie globale de consolidation de la paix.  La MINUSTAH est un élément important qui remet Haïti au centre de l’attention de la communauté internationale.  Elle commence son travail de stabilisation comme en atteste la réduction de la violence.  Les grandes menaces qui subsistent proviennent d’éléments des forces armées et différents gangs armés ayant des visées politiques et criminelles.  Les services de renseignements tactiques de la Mission doivent être améliorés en la matière, et le Gouvernement doit intensifier ses efforts dans le processus de désarmement, démobilisation et réinsertion (DDR).  Le principe de l’état de droit est compromis en Haïti depuis longtemps.  Le rôle de la région et de la communauté internationale doit être renforcé par la volonté des Haïtiens eux-mêmes de prendre les rennes du développement.  Il faut écouter les Haïtiens et, en particulier ceux de la diaspora, a souligné le représentant, en se félicitant du lancement du dialogue politique auquel l’opposition doit à tout prix être intégrée.  Pour le moment, a-t-il regretté, une partie de cette opposition a choisi la politique de l’obstruction alors que la population est prête à prendre part au dialogue.  Le représentant a aussi souligné l’importance d’une bonne préparation des élections.  Concernant le développement, il a appelé à un décaissement rapide et coordonné des fonds promis.  La Conférence internationale de Cayenne est prometteuse, a-t-il dit, en soulignant que la pauvreté est la cause de l’instabilité en Haïti.  Il faut, a-t-il insisté, créer un climat politique inspirant la confiance des investisseurs. 


M. BAYANI S. MERCADO (Philippines) a affirmé que tout ne va pas encore bien en Haïti.  Plus d’un an après que la communauté internationale a décidé d’intervenir dans ce pays, il y a encore beaucoup trop de violence, a-t-il estimé.  La sécurité est essentielle pour Haïti, mais la situation demeure instable, même s’il y a moins de violence qu’il y a un an.  Des gens tirent souvent sur des membres de la MINUSTAH, a-t-il ajouté, précisant que les Haïtiens eux-mêmes étaient victimes de la terreur.  Il a émis l’idée de revoir les règles de l’engagement de la MINUSTAH par rapport au déploiement de l’an dernier.


Le désarmement des éléments armés devrait aller de l’avant conformément au programme de démobilisation, de désarmement et de réintégration, a-t-il dit.  Les violations des droits de l’homme demeurent une préoccupation importante.  Il faut faire plus pour la réconciliation nationale, a-t-il souligné.  L’ancien Premier Ministre a failli mourir en détention à la suite d’une grève de la faim suivie pour contester des accusations qu’il estime sans fondement, a rapporté le représentant.  La voie suivie n’est pas aisée, il nous faut continuer et aboutir, a-t-il conclu. 


M. GHEORGHE DUMITRU (Roumanie) a indiqué que l’expérience d’une série de pays en transition montre que les élections constituent l’étape primaire et indispensable pour ouvrir la voie à la stabilité politique, suivie de près par les autres composantes du processus de transition.  Il a donc souligné les responsabilités qui incombent tant au Gouvernement de transition qu’aux forces politiques et à la société civile.  L’expérience des pays en transition montre aussi, a-t-il poursuivi, la nécessité de déployer des efforts de longue haleine sur les plans politique, économique et concernant le changement des mentalités.  En l’occurrence, il a jugé important que la communauté internationale ait cette fois-ci dans les acteurs haïtiens des partenaires de bonne foi, engagés sans réserve tant sur le plan politique que pratique.  Il a donc estimé que la fragilité persistante de la situation a pour cause, dans une grande mesure, l’absence de confiance qui continue de prévaloir au niveau des responsables politiques, des divers groupes et communautés en Haïti.  Malheureusement, a-t-il aussi regretté, il semble que même à l’échelle sous–régionale, la confiance n’est pas complètement rétablie.  Le Conseil de sécurité, a préconisé le représentant, doit encourager la normalisation complète des relations entre Haïti et les pays des Caraïbes.  Il a, pour finir, espéré qu’à l’occasion du débat thématique que la Roumanie compte organiser au mois d’octobre, le cas d’Haïti pourra être présenté comme un cas de réussite de la coopération entre l’ONU et les organisations régionales. 


M. JEAN-MARC DE LA SABLIÈRE (France) a jugé utile la mission du Conseil en Haïti, qui a permis d’enrichir la connaissance de la situation dans ce pays.  La France a appuyé pleinement les recommandations de la mission, a-t-il souligné.  Le représentant a mis l’accent sur les efforts à fournir en vue de la tenue des élections locales, présidentielles et législatives l’automne prochain.  Ces élections doivent se tenir à la date prévue, et doivent être libres et justes, ouvertes à toutes les parties qui ont renoncé à la violence et à la population la plus large possible de la population.  Pour relever ce défi, il faut agir dans le renforcement de la sécurité pour que ces élections se déroulent dans les meilleures conditions possibles.  Il faut veiller à la bonne utilisation des personnes déjà présentes, en particulier de la police civile. 


Il convient également de mettre en œuvre le plus vite possible des projets de développement, a ajouté M. de La Sablière.  À cet égard, il faut apporter des améliorations visibles aux conditions de vie de la population et redonner espoir aux Haïtiens.  Les donateurs, a-t-il ajouté, doivent reprendre sans délai leur coopération avec Haïti.  Le représentant a également mis l’accent sur l’importance de l’enregistrement des électeurs et de l’effort dans l’éducation civique de la population.  Les élections, a-t-il conclu, constituent une condition nécessaire mais non suffisante de l’amélioration de la situation en Haïti. 


M. ADAMANTIOS VASSILIKIS (Grèce) a estimé qu’à cette croisée des chemins pour Haïti, il était important que le Conseil de sécurité fasse connaître à la population son appui continu et son engagement à long terme.  Il a appuyé fermement le travail de la Mission de l’ONU et a condamné sans équivoque toute attaque dirigée contre elle.  Il a poursuivi en soulignant, à son tour, l’importance de tenir des élections libres, justes, démocratiques et ouvertes à tous les partis politiques qui ont renoncé à la violence.  Il a ajouté que la réforme des institutions, le respect des droits de l’homme, la primauté du droit, l’atténuation de l’impact des catastrophes naturelles et la solution des problèmes humanitaires exigeront un travail à long terme et un engagement profond.  Soulignant l’impact de la pauvreté sur l’instabilité dans le pays, le représentant a appelé tous les donateurs à décaisser les fonds promis lors de la Conférence de juillet 2004 et ceux qu’ils promettront dans le cadre de la Conférence de suivi de Cayenne.   


M. ALLAN ROCK (Canada), Président du Groupe consultatif de l’ECOSOC sur Haïti, a affirmé que le lien entre développement, sécurité et droits de la personne n’était nulle part plus évident qu’en Haïti.  C’est aux Haïtiens eux-mêmes qu’incombe la responsabilité principale de bâtir un Haïti stable et démocratique.  La communauté doit cependant offrir son soutien à long terme.  L’ECOSOC même aura un rôle important à jouer, pendant que l’ONU cherche à jouer un rôle positif au cours des défis à venir, a-t-il souligné.  Selon le représentant, le rapport soumis à l’ECOSOC reconnaît l’immensité des défis que le prochain gouvernement, qui sera installé en février 2006, devra relever, tandis que le rapport national sur les progrès accomplis par Haïti en vue de réaliser les Objectifs du Millénaire pour le développement souligne l’ampleur des actions qui doivent être entreprises aux niveaux les plus élevés.  C’est pourquoi nous proposons, a-t-il ajouté, que le nouveau Gouvernement envisage d’ancrer sa planification à moyen terme dans un document de stratégie de réduction de la pauvreté (DSRP) fondée sur les Objectifs du Millénaire pour le développement.


Le représentant a lancé un appel à la communauté internationale pour qu’elle renforce ses engagements à l’égard d’Haïti tout en faisant preuve d’une plus grande souplesse.  La bureaucratie ne devrait pas se dresser comme un obstacle entre une bonne idée et le financement indispensable à sa concrétisation, de sorte que le Gouvernement haïtien puisse progresser rapidement vers l’amélioration de la qualité de la vie dont rêvent les Haïtiens, a-t-il estimé.  Le moment est venu d’aller de l’avant, d’engager un dialogue national sur l’édification d’un pays stable, où les citoyens jouissent de la liberté et de la sécurité économique que nous nous sommes tous engagés à promouvoir, a-t-il déclaré.


M. JEAN-MARC HOSCHEIT (Luxembourg), au nom de l’Union européenne, a estimé qu’à ce stade en Haïti, trois domaines exigent une attention particulière.  Il a cité la sécurité, les prochaines élections et le développement économique durable.  En matière de sécurité, il a estimé que pour apporter un soutien supplémentaire à la Police nationale haïtienne, un renforcement temporaire de la composante police civile de la MINUSTAH et une adaptation de son mandat à la situation de plus en plus problématique devraient être envisagés pour une période allant jusqu’aux élections.  Il a toutefois ajouté que si le rétablissement de l’ordre public nécessite une action vigoureuse de la part des services de police, cette action doit à tout prix respecter les normes en matière de droits de l’homme.  Des enquêtes approfondies sur les violations des droits de l’homme dont est accusée la Police nationale haïtienne devront être menées.  Il a, de nouveau, demandé au Gouvernement de transition de prendre les mesures nécessaires pour mettre un terme à l’impunité. 


Évoquant les questions électorales, le représentant a estimé que pour maintenir la dynamique nécessaire, il importe de respecter le calendrier annoncé.  Il a dit suivre de très près les opérations d’enregistrement des électeurs.  Il a rappelé que l’Union européenne étudie la possibilité d’envoyer une mission d’observation électorale en Haïti.  À cette fin, une mission d’évaluation est prévue pour le début de l’été et un montant de 20,5 millions d’euros a été affecté au soutien de ces élections.  Concluant sur les questions de développement, le représentant a indiqué que, sans tenir compte des contributions bilatérales des États Membres, les annonces de contributions de l’Union européenne ont été portées à 294 millions d’euros.  L’Union européenne a d’ailleurs procédé à un renforcement du personnel de la Commission européenne en Haïti et à une simplification des procédures relatives à la mise en œuvre des projets.  Le représentant a souligné en l’occurrence, que l’absence d’une administration publique qui fonctionne gêne considérablement l’avancement de ces projets.  En attendant, l’Union européenne se concentre sur des projets dans trois domaines, à savoir les infrastructures, l’éducation et la démocratisation. 


M. HERALDO MUÑOZ (Chili) a déclaré que la mission du Conseil de sécurité, la première dans la région d’Amérique latine et des Caraïbes, avait réaffirmé l’engagement des Nations Unies en faveur du processus de stabilisation politique et de reconstruction économique et sociale d’Haïti.  Le Chili est d’accord avec le Conseil de sécurité sur la nécessité de procéder sans délai et en profondeur à un programme complet de démobilisation, de désarmement et de réintégration, a-t-il souligné, précisant que ramener la paix en Haïti passait nécessairement par le désarmement de la société haïtienne tout entière et pas seulement de ceux qui ont servi dans l’armée.  Le représentant a en outre informé les membres du Conseil que la police en uniforme chilienne, les « Carabineros de Chile », avait signé le 11 mars dernier un accord de coopération avec la Police nationale haïtienne.  Selon les termes de cet accord, un groupe de « Carabineros » a travaillé pendant 10 jours avec la Police nationale haïtienne afin d’évaluer les exigences professionnelles de la force haïtienne.


M. JORGE SKINNER-KLÉE (Guatemala) s’est félicité de l’interaction entre le Groupe consultatif de l’ECOSOC sur Haïti et la mission du Conseil de sécurité.  En effet, outre la question sécurité, le rôle de l’ONU est aussi d’assurer une aide humanitaire et un développement à long terme pour éviter toute reprise du conflit.  S’il a reconnu que la responsabilité première revient aux Haïtiens, il a néanmoins souligné que le pays ne peut rien réaliser sans l’aide de la communauté internationale.  Au nom de son Gouvernement, il a réaffirmé son engagement à participer à la Mission de l’ONU.  Il a appuyé fermement le travail de cette Mission en rappelant que ses éléments militaires et civils sont principalement d’Amérique latine.  Il a dit partager la préoccupation de tous sur les conditions de sécurité et l’état du système judiciaire.  C’est pourquoi, il est important de continuer à soutenir le peuple haïtien pour lui permettre d’exercer pleinement ses droits et les efforts du Gouvernement de transition visant à rétablir l’État de droit, a souligné le représentant.  Le dialogue politique est essentiel pour assurer une meilleure préparation des prochaines élections.  Le représentant a insisté sur le déficit de 22 millions de dollars au budget électoral avant de rappeler la communauté internationale à ses promesses financières.  Il a enfin souligné l’importance du processus de DDR, en regrettant les retards enregistrés et les difficultés financières.  Rappelant que la pauvreté a un impact considérable sur l’instabilité en Haïti, il a exhorté le Gouvernement de mettre en place une stratégie de développement à long terme que doit appuyer la communauté internationale.  


M. OSWALDO DE RIVERO (Pérou) a jugé fondamental le fait que la mission du Conseil de sécurité ait pu réaliser cette visite de travail en Haïti.  Il s’est en outre réjoui que le Groupe consultatif ad hoc sur Haïti de l’ECOSOC ait pu effectuer cette visite en même temps.  C’est une formule rarement utilisée mais qui permet de mieux appréhender les problèmes de pays comme Haïti.  Le Pérou partage l’évaluation faite par la mission du Conseil ainsi que les recommandations qu’elle a formulées.  Le représentant a mis l’accent sur la nécessité d’une prolongation de douze mois du mandat de la MINUSTAH.  Il a en outre estimé indispensable d’intégrer l’ensemble de la société haïtienne au processus de réconciliation et de dialogue en cours.  Sans cela, il serait difficile d’envisager que la situation critique actuelle puisse être résolue.  Le moment est venu pour que la communauté internationale et les pays de la région unissent leurs efforts pour obtenir le pacte social en Haïti.


Le représentant a indiqué qu’au cours des derniers mois, le contingent péruvien de la MINUSTAH avait participé à plusieurs opérations dans des zones du pays où il y avait une recrudescence de la violence et du banditisme.  Il a déploré les pertes subies parmi le personnel militaire de la MINUSTAH.  Le Pérou a un engagement envers Haïti et doublera son contingent au sein de la MINUSTAH, a-t-il annoncé.  Il a jugé nécessaire d’imprimer un élan et de fournir les ressources nécessaires au programme de démobilisation, de désarmement et de réinsertion (DDR).  L’amélioration de la situation est indissociable du développement économique et social, a-t-il dit.  Le Gouvernement et la société haïtienne assument la responsabilité de réaliser les efforts internes nécessaires pour asseoir les bases de ce processus, mais ils ont besoin de l’appui décidé de la communauté des donateurs, des Nations Unies et des institutions financières internationales, a-t-il déclaré. 


M. JOHAN L. LØVALD (Norvège) a affirmé que la détérioration de la situation en Haïti demeurait une source de préoccupation.  Haïti a besoin de restaurer la sécurité et mettre en œuvre l’investissement nécessaire pour établir les bases d’une reconstruction nationale et renforcer l’État de droit, a-t-il souligné.  Un effort concerté des Nations Unies, des organisations régionales et de la communauté internationale est essentiel à cette fin, a-t-il estimé.  Selon lui, une paix durable et soutenue dépend de l’existence d’autorités nationales légitimes.  Les élections à venir offrent la possibilité d’un nouveau départ permettant à Haïti de relever les nombreux défis auxquels le pays est confronté.  Les priorités sont aujourd’hui le rétablissement de la sécurité et le succès des élections, a-t-il déclaré. 


Le représentant a également affirmé qu’il n’y avait pas d’autre alternative que le dialogue et le compromis pour résoudre les défis.  Une bonne gouvernance fondée sur la démocratie, le respect des droits de l’homme, une bonne gestion économique et la responsabilité doit venir de l’intérieur, a-t-il estimé.  Dans une perspective à long terme, la paix et la prospérité n’interviendront qu’au seul moyen d’un dialogue politique, a-t-il souligné.


M. PHILIP SEALY (Trinité-et-Tobago), au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), a appuyé les recommandations contenues dans le rapport de la mission du Conseil de sécurité.  Il a aussi appuyé le point de vue selon lequel le respect des droits de l’homme contribue au renforcement de la stabilité et à la sécurité.  Il a estimé, en l’occurrence, que l’administration provisoire doit accorder la priorité à cette question pour rétablir la confiance de la population dans la loi, la police et le système judiciaire.  À cet égard, le représentant a attiré l’attention du Conseil sur le sort d’Yvon Neptune qui attend toujours son procès, en violation des procédures prévues par la Constitution haïtienne.  La détention illimitée des dirigeants et des activistes du parti Lavalas montre clairement que la détention arbitraire se fait sur la base de l’appartenance politique, a dénoncé le représentant.  Il a, dans ce contexte, souligné l’importance pour le processus politique d’être totalement inclusif.  Il a conclu sur les impératifs du développement, en appelant la communauté internationale à honorer ses engagements financiers.  Dans l’immédiat, a-t-il néanmoins estimé, les efforts doivent viser à renforcer la capacité d’absorption du pays pour le rendre capable d’utiliser au mieux l’assistance de la communauté des donateurs. 


M. JUAN ANTONIO YÁÑEZ-BARNUEVO (Espagne) a affirmé que son pays appuyait pleinement la déclaration faite par le Luxembourg, au nom de l’Union européenne.  La participation de l’Espagne à la MINUSTAH témoigne de son engagement en faveur de la sécurité d’Haïti, a-t-il dit.  L’Espagne partage les préoccupations décrites dans le rapport de la Mission.  Les élections prévues pour la fin de l’année sont sans conteste un des principaux défis pour Haïti et la communauté internationale.  Mais les élections elles-mêmes ne constituent pas une solution à long terme, a-t-il souligné, mettant l’accent sur la nécessité d’assurer le développement économique et social du pays.  En l’absence de développement, il ne peut y avoir de progrès, a-t-il affirmé.  Il a espéré une participation aussi élevée que possible des citoyens haïtiens.  La participation d’observateurs internationaux serait également utile, de même qu’un renforcement de la sécurité.  Il faut que le dialogue se poursuive après les élections et l’installation du nouveau pouvoir, a-t-il en outre estimé.


La MINUSTAH joue un rôle très important sous l’angle de la stabilité et de la dissuasion.  Il y a eu très peu de progrès sous l’angle du désarmement, a-t-il dit, jugeant nécessaire un engagement plus ferme du Gouvernement de transition en faveur du programme de démobilisation, de désarmement et de réinsertion.  Il serait logique de proroger de douze mois le mandat de la Mission, a-t-il également souligné, notant que l’Espagne poursuivrait ses efforts en faveur de la paix et du développement en Haïti.  Il s’est également déclaré convaincu que des mesures décisives pourront être prises dans les mois à venir, l’Espagne étant prête à y apporter sa contribution.


M. RIDHA BOUABID, Observateur permanent de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), a estimé que pour effectuer le sursaut nécessaire et retrouver le chemin de la paix, de la démocratie, de l’état de droit et du développement durable, les Haïtiens devraient pouvoir compter sur un appui encore plus soutenu de la communauté internationale et sur des moyens humains et matériels autrement plus importants, de manière à garantir le maximum de chance à la transition en cours, et de jeter les bases d’un avenir durablement meilleur.  Après avoir rappelé la visite du Président de l’OIF en Haïti, le 20 mars dernier, M. Bouabid a estimé qu’une attention particulière doit être accordée aux questions de la sécurité, des élections et de la concrétisation des engagements pris par les donateurs.  Concernant la sécurité, il a appuyé la demande du Premier Ministre par intérim visant à renforcer le dispositif de sécurité pendant la période électorale et à prévoir le déploiement d’un personnel additionnel de police civile francophone de la MINUSTAH, tant il est apparu qu’une présence francophone rendrait les opérations de police plus efficace.  Si le Conseil venait à adopter une telle mesure, a-t-il assuré, la Francophonie pourrait contribuer à mobiliser ses pays membres en vue d’une nouvelle mise à disposition de policiers civils francophones.  


Venant à la question électorale, M. Bouabid a souligné le rôle que la communauté internationale a joué notamment en termes d’assistance technique et de soutien financier.  Pour sa part, a-t-il rappelé, la Francophonie continue à contribuer à cet effort en mettant à la disposition du Conseil électoral l’expertise nécessaire jusqu’à la tenue des élections.  Enfin, l’Observateur de l’OIF a souligné la nécessité de concrétiser les promesses faites lors de la Conférence des donateurs en juillet 2004.  Il a indiqué qu’outre l’assistance électorale, la Francophonie entend donner une suite concrète aux deux missions qu’elle a dépêchées dans le pays ces derniers mois, respectivement dans le domaine des médias et dans le secteur clef de l’appui à la justice et à la réforme du système judiciaire.  Cette deuxième mission sera concrétisée par un programme qui sera mis en œuvre grâce à une coopération quadripartite entre le Ministère haïtien de la justice, l’Agence canadienne de développement international, l’Union européenne et l’OIF.  En concluant, M. Bouabid a joint sa voix aux délégations qui ont rappelé l’importance d’un dialogue national inclusif, le caractère vital de la mise en œuvre urgente d’un programme global de désarmement, démobilisation et réinsertion (DDR) et l’urgence de s’attaquer à la cause profonde de l’instabilité en Haïti qu’est la pauvreté.


M. LÉO MÉRORÈS (Haïti) a affirmé que la mission du Conseil de sécurité, la première en Haïti et en Amérique latine, parallèlement à celle du Groupe consultatif ad hoc sur Haïti de l’ECOSOC, témoigne du grand intérêt de la famille des Nations Unies à la cause haïtienne.  La pauvreté et le chômage sont à l’origine de la grave crise que traverse le pays, a-t-il dit.  Le Gouvernement intérimaire, qui œuvre à jeter les bases d’un État moderne, appuie les recommandations de la mission du Conseil et l’affirmation selon laquelle Haïti est à un tournant décisif de son histoire.  Depuis le mois écoulé, la Police haïtienne, avec l’aide de la MINUSTAH, a abouti à des résultats positifs dans le démantèlement de gangs, a-t-il affirmé.  Le Gouvernement de transition travaille au rétablissement de l’autorité de l’État sur toute l’étendue du territoire, a-t-il poursuivi. 


Le chef de l’État a officiellement lancé le dialogue national, a-t-il déclaré, précisant que ce dialogue, ouvert sans exception aucune, s’adresse à toutes les forces politiques qui auront renoncé à la violence.  Une commission a été mise oeuvre pour appliquer le programme de désarmement, de démobilisation et de réintégration (DDR).  Toutefois, les fonds requis pour la mise en œuvre du programme dépassent largement les ressources dont dispose le Gouvernement, a-t-il dit.  La mise à disposition des fonds promis reste indispensable, a-t-il ajouté.  Le Gouvernement intérimaire fait siennes les recommandations du Secrétaire général des Nations Unies pour le développement, la sécurité et les droits de l’homme contenues dans son rapport « Dans une liberté plus grande », a ajouté le représentant.  Le Gouvernement entend tout mettre en œuvre pour réaliser la réforme du système judiciaire et de la police.  Il renouvelle une fois de plus sa volonté de lutter contre toutes les violations des droits de l’homme et de combattre l’impunité sous toutes ses formes.  Il ne peut, à cet égard, que regretter les propos de certains qui douteraient de cette volonté, a-t-il dit.  Le représentant a réaffirmé que le Gouvernement intérimaire était résolu à organiser des élections avant la fin de cette année et à remettre le pouvoir à un gouvernement élu.  Il a également plaidé en faveur d’un renouvellement de douze mois du mandat de la MINUSTAH.


Reprenant la parole,  le représentant duBrésil s’est félicité de l’unanimité « remarquable » des points de vue qui se dégage des déclarations faites aujourd’hui.  Il a estimé qu’avec les recommandations de sa mission, le Conseil de sécurité dispose d’une bonne base de discussions sur la voie à suivre.  Il a aussi répondu aux préoccupations de la CARICOM concernant l’ancien Premier Ministre Yvon Neptune.  Le représentant a souligné l’urgence de traiter de la question au nom de la réconciliation nationale et a rappelé que lors de son séjour en Haïti, la mission du Conseil a mis dûment l’accent sur la nécessité d’accélérer l’examen des cas des dirigeants et activités du parti Lavalas.


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