CS/8266

CONSEIL DE SÉCURITÉ: LA PRÉSENCE RENFORCÉE DE L’ONU CONSIDÉRÉE COMME UNE CONDITION ESSENTIELLE AU SUCCÈS DES ÉLECTIONS IRAQUIENNES DU 30 JANVIER 2005

13/12/2004
Communiqué de presse
CS/8266


Conseil de sécurité

5099e séance – matin


CONSEIL DE SÉCURITÉ: LA PRÉSENCE RENFORCÉE DE L’ONU CONSIDÉRÉE COMME UNE CONDITION ESSENTIELLE AU SUCCÈS DES ÉLECTIONS IRAQUIENNES DU 30 JANVIER 2005


Le lien entre une présence renforcée des Nations Unies et le succès des élections prévues en Iraq pour le 30 janvier 2005 a été établi, ce matin, par le représentant des États-Unis, au nom de la force multinationale, et celui de l’Iraq, alors que le Conseil de sécurité examinait, en présence du Représentant spécial du Secrétaire général et chef de la Mission d’assistance des Nations Unies pour l’Iraq (MANUI), les derniers évènements intervenus dans ce pays depuis le 3 septembre dernier. 


Le représentant de l’Iraq a reconnu que la situation en matière de sécurité ne correspond toujours pas aux conditions posées par le Secrétaire général de l’ONU pour une totale implication de l’ONU dans le processus électoral.  M. Sumaida’ie s’est néanmoins demandé comment les Nations Unies entendent jouer le « rôle moteur » assigné par la résolution 1546 si elles continuent à s’éloigner du peuple iraquien.  La mention « si les circonstances le permettent », a-t-il ajouté, ne doit pas servir de mot d’ordre pour justifier une présence insuffisante sur le terrain. 


Dans la résolution 1546 du 8 juin 2004, les membres du Conseil de sécurité avaient pris note de l’intention du Secrétaire d’État américain de répondre favorablement à la demande du Secrétaire général de l’ONU visant à créer une entité distincte de la taille d’une brigade qui, opérant sous le commandement unifié de la force multinationale, aura pour seule mission d’assurer la sécurité d’une présence renforcée des Nations Unies en Iraq.  Le représentant iraquien a donc appelé, ce matin, les États Membres à fournir les troupes et les ressources financières nécessaires à la formation de cette brigade.  « Tout report des élections reviendrait à céder la victoire aux terroristes dont le but est d’enrayer le processus politique », a-t-il prévenu.


Ces propos ont été fermement appuyés par le représentant des États-Unis qui, au nom de la force multinationale, a réitéré son intention de soutenir la brigade de sécurité de l’ONU.  M. John Danforth a émis l’espoir qu’elle sera opérationnelle d’ici au 30 janvier 2005.  Le 30 novembre dernier, le Conseil avait approuvé la création d’un fonds d’affectation spécial pour financer la brigade.


Pour l’examen de cette question, le Conseil était saisi d’un nouveau rapport du Secrétaire général qui a été présenté ce matin par son Représentant spécial.


LA SITUATION ENTRE L’IRAQ ET LE KOWEÏT


Rapport présenté par le Secrétaire général en application du paragraphe 30 de la résolution 1546 (2004) (S/2004/959)


      Dans ce rapport, le Secrétaire général fait le point sur les activités des Nations Unies en Iraq depuis le dernier rapport en date du 3 septembre 2004.  Il récapitule les faits saillants et fait le bilan des arrangements en matière de sécurité concernant la présence des Nations Unies.  Le Secrétaire général se concentre sur les tâches prioritaires assignées à l’ONU dans la résolution 1546 et s’attache, en particulier, au rôle de l’ONU dans le processus politique, y compris la préparation des élections, et aux activités du Représentant spécial. 


Commençant par un résumé des faits les plus marquants survenus en Iraq, le Secrétaire général passe ensuite à l’état des dispositions relatives à la sécurité de la présence des Nations Unies en Iraq.  Il souligne que, l’ONU et les autres organisations internationales restant des cibles de choix à valeur médiatique élevée, tout renforcement des effectifs ou des activités de l’ONU en dehors de la zone internationale exigera non seulement la mise en place des mesures de protection très importantes énoncées dans ses rapports précédents mais aussi une amélioration générale de la sécurité.  Les mesures de sécurité requises pour que l’ONU puisse mener ses activités en Iraq, souligne encore le Secrétaire général, sont extrêmement coûteuses en personnel et en matériel spécial. 


Après les questions de sécurité, le Secrétaire général rend compte des activités de la Mission de l’ONU avant d’en venir aux observations.  Là encore, il souligne que l’insécurité est un obstacle majeur à la tenue de élections.  Pour que les élections exercent le meilleur effet possible, il faut des efforts politiques soutenus visant à assurer une transition sans aucune exclusive, avec la participation de tous, et aussi transparente que possible.  Il faut donc,  insiste-t-il, inciter les Iraquiens à travailler ensemble à la réconciliation nationale et, par les urnes, à l’exercice pacifique de la compétition politique.  L’exigence de l’heure, rappelle-t-il, est que toutes les parties, en Iraq, se rencontrent et se parlent comme il convient à un peuple unifié.  La transition politique doit se faire sans exclusive, de façon à panser les blessures du pays.  La communauté internationale doit maintenant serrer les rangs pour conforter le relèvement politique et économique de l’Iraq.  Elle a tout à gagner au succès de la transition politique, assure le Secrétaire général, rappelant que la résolution 1546 (2004) a défini un terrain d’entente pour atteindre ce but.  Avec un appui venant de l’intérieur et de l’extérieur de l’Iraq, ajoute-t-il, l’ONU espère apporter sa part de l’aide à fournir au peuple iraquien.  Le succès de la transition doit être notre visée commune, qui doit être partagée par le peuple iraquien et par la communauté internationale dans son ensemble, conclut-il


Déclarations


M. ASHRAF JEHANGIR QAZI, Représentant spécial du Secrétaire général pour l’Iraq, présentant aux membres du Conseil les faits nouveaux concernant la situation sur le terrain, a souligné que les prochaines élections constituent un test du nouvel ordre politique et du processus de transition en Iraq.  Le peuple iraquien doit cependant saisir l’occasion d’exercer ses droits politiques en participant au scrutin.  Tandis que nombreux Iraquiens souhaitent participer aux élections, d’importants segments de la population se sentent lésés ou exclus de ce processus de transition.  La situation en matière de sécurité demeure difficile, a-t-il reconnu.  La violence, qui se manifeste sous toutes ses formes et souvent de manière extrême et sans distinction, rend la situation très instable dans une large partie du pays.  La majorité des Iraquiens souhaite sortir de cette situation, grâce à un gouvernement qui réponde à leurs attentes.  Le souhait de trouver des solutions politiques aux problèmes politiques est partagé par tous les Iraquiens, a poursuivi le Représentant spécial.  Il a expliqué que les Nations Unies ont continué leurs efforts pour engager un dialogue avec toutes les parties, afin de les encourager à prendre part au processus politique.  Il a espéré que les élections à venir seront l’occasion de représenter tous les Iraquiens.  L’Assemblée nationale de transition, a-t-il insisté, doit aussi représenter tous les segments de la société iraquienne, car elle jouera également le rôle d’Assemblée constituante.  En conséquence, il n’existe aucune alternative au succès d’élections nationales inclusives.  Ceux qui refusent d’y participer ou cherchent à affaiblir le processus en cours agissent à l’encontre de leurs propres intérêts et de leur pays, a-t-il fait remarquer.  Il est impératif que chaque effort soit fait pour promouvoir le dialogue, le compromis et la réconciliation entre tous les Iraquiens afin de créer un climat plus sûr.  Une transition réussie sera facilitée, a-t-il assuré, par un engagement ferme de la part des acteurs de la région et de la communauté internationale.  Il a cité à cet égard la conférence de Charm el-Cheikh qui a eu lieu en novembre dernier et celle de Tokyo en octobre, dans le cadre de laquelle le Club de Paris a décidé de réduire sensiblement la dette de l’Iraq.  L’Iraq pourra obtenir un soutien économique supplémentaire à mesure que des progrès vers la transition sont réalisés.  Les Nations Unies sont en Iraq malgré les nombreuses contraintes, a-t-il expliqué, car elles sont sensibles aux attentes du peuple iraquien.  Il serait important d’obtenir un consensus plus large au sein de la communauté internationale, en particulier au Conseil de sécurité, pour soutenir les efforts du Secrétaire général et permettre à la Mission des Nations Unies en Iraq (MANUI) de s’acquitter pleinement de son mandat en vertu de la résolution 1546, a-t-il souligné.


M. JOHN DANFORTH (États-Unis), au nom de la force multinationale, a souligné l’importance d’une présence renforcée des Nations Unies en Iraq pour le processus politique, en particulier le succès des élections du 30 janvier 2005 et au-delà, le développement économique et la reconstruction.  La force multinationale, qui compte plus de 150 000 hommes et personnel d’appui de quelque 30 pays différents, est sur place à l’invitation du Gouvernement iraquien, a souligné le représentant, pour, a-t-il précisé, contribuer à la sécurité, à la stabilité et à la consolidation de la démocratie.  La force, en coordination avec le Gouvernement iraquien et les ONG nationales et internationales, fournit une aide humanitaire substantielle et des ressources très spécialisées dans le domaine de la reconstruction.  Naturellement, a-t-il dit, la force travaille de manière agressive pour isoler et neutraliser ceux qui menacent la sécurité du peuple iraquien. 


Si les opposants à la paix et à la sécurité sont tenaces, la force a néanmoins fait des progrès pour créer des conditions permettant de tenir des élections libres et justes et assurer la transition vers la démocratie.  Les forces iraquiennes, qui comptent aujourd’hui quelque 116 240 hommes, ne sont pas encore en mesure d’assumer la responsabilité de la sécurité du pays.  Tant que ces forces ne seront pas pleinement formées et opérationnelles et que les insurgés ne cesseront pas leurs actes terroristes, la sécurité restera un problème grave.  Reconnaissant les multiples attaques de ces insurgés, le représentant a déclaré que la force multinationale comprend les préoccupations des Nations Unies quant à la sécurité de son personnel.  Elle est engagée, a-t-il affirmé, à lui fournir la sécurité requise.  Le représentant a donc encouragé l’ONU à dépêcher davantage de personnel sur le terrain, lequel est essentiel à l’avenir de l’Iraq et en particulier au succès des prochaines élections.


Le représentant s’est donc félicité que plusieurs gouvernements aient confirmé leur intention de contribuer à l’entité distincte chargée de la sécurité du personnel de l’ONU et autorisée par la résolution 1546.  Espérant que cette entité sera opérationnelle à temps pour les élections, le représentant a souligné que la sécurité des Nations Unies restera pour longtemps encore une question clef.  Il a donc lancé un appel urgent aux donateurs pour qu’ils contribuent en troupes et en ressources financières.


M. SAMIR SUMAIDA’IE (Iraq) a rappelé que la raison d’être du Gouvernement transitoire iraquien est de guider le peuple iraquien dans l’organisation et la tenue des élections.  Au cours de la prochaine étape, il procèdera à l’élaboration d’une constitution permanente et organisera les premières élections en vertu de cette constitution d’ici la fin 2005.  C’est un calendrier ambitieux mais une écrasante majorité d’Iraquiens souhaite un gouvernement légitime et le retour à la vie normale dès que possible.  Mon gouvernement, a assuré le représentant, est pleinement conscient et préoccupé par la situation actuelle en matière de sécurité, mais il a aussi une obligation juridique et politique à l’égard du peuple iraquien.  Certains groupes s’arrogent le droit de s’exprimer au nom du peuple iraquien alors qu’ils ne représentent pas toute la population.  Ceux qui appellent au boycott des élections seront peut-être suivis par une large partie de la population, a-t-il fait remarquer, mais comme d’autres expériences l’ont déjà montré, l’Iraq réussira à convaincre la majorité des Iraquiens à se rendre aux urnes pour la première fois dans leur vie.  De l’avis de M. Sumaida’ie, ce ne sont pas les tentatives de boycott mais plutôt la violence et les campagnes d’intimidation qui risquent d’entraver le processus électoral.  Il a donc demandé aux pays voisins d’assister l’Iraq dans ses efforts.  Le représentant a tenu à souligner qu’aucun responsable ne considère l’usage de la force militaire à large échelle dans une ville comme la meilleure option, mais le recours à la force devient une obligation lorsqu’il demeure le seul moyen de libérer une nation tout entière des souffrances et de garantir son avenir.  Concernant la contribution des Nations Unies au processus électoral, le représentant s’est félicité de la décision de l’ONU d’augmenter les effectifs de l’équipe chargée de l’assistance électorale mais a considéré que leur nombre reste insuffisant.  Il s’est ainsi demandé comment les Nations Unies entendent jouer le « rôle moteur » assigné par la résolution 1546 si elles continuent à s’éloigner du peuple iraquien.  La mention « si les circonstances le permettent », a-t-il ajouté, ne doit pas servir de mot d’ordre et justifier une présence insuffisante sur le terrain.  Tout report des élections reviendrait à céder la victoire aux terroristes dont le but est d’enrayer le processus politique, a-t-il prévenu.  Par ailleurs, le représentant s’est déclaré convaincu que l’aide humanitaire peut aussi être améliorée par des contacts directs et a espéré que la présence des Nations Unies soit renforcée dans les zones sensibles.  Il a félicité le Représentant du Secrétaire général, M. Ashraf Qazi, pour ses efforts inlassables en dépit des nombreuses contraintes sur le terrain et rendu hommage au personnel de l’ONU qui a péri en août 2003.  Avant de conclure, le représentant iraquien a souligné que l’aide des Nations Unies et de la communauté internationale est indispensable pour relancer l’économie du pays.


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