CS/2729

LE CONSEIL DE SÉCURITÉ DEMANDE LE RÉTABLISSEMENT DU GROUPE DE CONTRÔLE DE L’EMBARGO SUR LES ARMES EN SOMALIE

17/08/2004
Communiqué de presse
CS/2729


Conseil de sécurité

5022e séance – après-midi


LE CONSEIL DE SÉCURITÉ DEMANDE LE RÉTABLISSEMENT DU GROUPE DE CONTRÔLE DE L’EMBARGO SUR LES ARMES EN SOMALIE


Condamnant les flux continus d’armes et de munitions qui arrivent en Somalie et transitent par celle-ci, en violation de l’embargo sur les armes, le Conseil a, ce matin, prié le Secrétaire général de rétablir dans les 30 jours et pour une période de six mois le Groupe de contrôle chargé d’enquêter sur de telles violations.  La résolution 1558 (2004), adoptée à l’unanimité, donne également mandat au Groupe de contrôle de formuler des recommandations concrètes dans les domaines techniques et d’évaluer les progrès des États de la région en vue de faire pleinement respecter l’embargo.


Le Groupe de contrôle doit en outre continuer d’affiner et d’actualiser les renseignements concernant le projet de liste de ceux qui continuent à violer l’embargo en Somalie et en dehors de la Somalie, ainsi que de ceux qui les soutiennent, en vue d’éventuelles mesures que le Conseil prendrait.  Il s’agit également pour le Groupe d’experts de collaborer étroitement avec le Comité des sanctions, créé en application de résolution 751 du 24 avril 1992, à l’élaboration de recommandations précises concernant des mesures supplémentaires à prendre afin d’améliorer le respect général de l’embargo sur les armes.


Par l’intermédiaire du Comité, le Groupe de contrôle devra soumettre un rapport à mi-parcours et un rapport final portant sur l’ensemble des tâches précitées.  Le Conseil attend du Comité qu’il lui recommande des mesures appropriées à envisager pour répondre à d’éventuelles violations de l’embargo.


LA SITUATION EN SOMALIE


Projet de résolution (S/2004/648)


Le Conseil de sécurité,


Réaffirmant ses résolutions précédentes ainsi que les déclarations de son président relatives à la situation en Somalie, en particulier la résolution 733 (1992) du 23 janvier 1992, par laquelle il a instauré un embargo sur toutes les livraisons d’armes et de matériel militaire à la Somalie (ci-après dénommé l’« embargo sur les armes »), et la résolution 1519 (2003) du 16 décembre 2003,


Soulignant de nouveau qu’il appuie fermement le processus de réconciliation nationale en Somalie et les travaux de la Conférence de réconciliation nationale en Somalie, parrainée par l’Autorité intergouvernementale pour le développement, en cours et réaffirmant l’importance de la souveraineté, de l’intégrité territoriale, de l’indépendance politique et de l’unité de la Somalie,


Condamnant les flux continus d’armes et de munitions qui arrivent en Somalie et transitent par celle-ci, en violation de l’embargo sur les armes, et se déclarant résolu à faire répondre les auteurs de ces violations de leurs actes,


Rappelant qu’il importe de renforcer la surveillance de l’embargo sur les armes en Somalie en procédant systématiquement à des enquêtes minutieuses sur les violations de l’embargo, compte tenu des liens qui existent entre le processus de réconciliation nationale en Somalie et l’application de l’embargo sur les armes et du fait que ces deux processus sont complémentaires,


Considérant que la situation en Somalie constitue une menace à la paix et à la sécurité internationales dans la région,


Agissant en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies,


1.    Souligne que tous les États sont tenus de se conformer pleinement aux mesures prescrites par la résolution 733 (1992);


2.    Prend note du rapport du Groupe de contrôle en date du 11 août 2004 (S/2004/604), présenté en application du paragraphe 6 de la résolution 1519 (2003), et des observations et recommandations qui y figurent, et déclare son intention de les examiner de près afin d’améliorer l’application des mesures prescrites par la résolution 733 (1992);


3.    Prie le Secrétaire général, agissant en consultation avec le Comité créé en application de la résolution 751 (1992) du 24 avril 1992 (ci-après dénommé « le Comité »), de rétablir, dans les trente jours suivant l’adoption de la présente résolution, et pour une période de six mois, le groupe de contrôle visé au paragraphe 2 de la résolution 1519 (2003), en le chargeant :


a)    De poursuivre l’exécution du mandat énoncé aux alinéas a) à d) du paragraphe 2 de la résolution 1519 (2003);


b)    De continuer d’affiner et d’actualiser les renseignements concernant le projet de liste de ceux qui continuent à violer l’embargo sur les armes en Somalie et en dehors de la Somalie, ainsi que de ceux qui les soutiennent directement, en vue d’éventuelles mesures que le Conseil prendrait, et de soumettre ces renseignements au Comité, selon les modalités et au moment que le Comité jugera opportuns;


c)    De continuer de formuler des recommandations en s’appuyant sur ses enquêtes, sur les rapports précédents du Groupe d’experts (S/2003/223 et S/2003/1035) nommé en application des résolutions 1425 (2002) du 22 juillet 2002 et 1474 (2003) du 8 avril 2003, et sur le premier rapport du Groupe de contrôle (S/2004/604);


d)    De collaborer étroitement avec le Comité à l’élaboration de recommandations précises concernant des mesures supplémentaires à prendre afin d’améliorer le respect général de l’embargo sur les armes;


e)    De soumettre au Conseil, par l’intermédiaire du Comité, un rapport à mi-parcours et un rapport final portant sur l’ensemble des tâches précitées;


4.    Demande en outre au Secrétaire général de prendre les dispositions voulues pour financer les travaux du Groupe de contrôle;


5.    Réaffirme la nécessité d’appliquer les mesures dont il est question aux paragraphes 4, 5, 7, 8 et 10 de la résolution 1519 (2003);


6.    Attend du Comité, en application de son mandat, qu’il recommande au Conseil des mesures appropriées à envisager pour répondre à d’éventuelles violations de l’embargo, en étudiant et en élaborant, en consultation étroite avec le Groupe de contrôle, des propositions visant à améliorer le respect de l’embargo sur les armes;


7.    Décide de rester activement saisi de la question.


Rapport du Groupe de contrôle sur la Somalie créé par la résolution 1519 (2003) du Conseil de sécurité (S/2004/604)


Ce rapport, transmis par le Président du Comité du Conseil de sécurité créé par la résolution 751 (1992) concernant la Somalie, Lauro L. Baja (Philippines), rend compte des enquêtes menées par le Groupe de contrôle créé le 16 décembre 2003.  Le Groupe de contrôle a pour mandat de se concentrer sur les violations en cours de l’embargo sur les armes, y compris les transferts de munitions, d’armes à usage unique et d’armes légères.  Il est composé des experts suivants: John E. Tambi (Sierra Leone), spécialiste des transports (par air, terre et mer) et coordonnateur; Melvin E. Holt, Jr. (États-Unis), expert en armements; Li Changsheng (Chine), expert en douanes; et Joel Salek (Colombie), expert en finances.


Les enquêtes menées par les experts ont révélé que les armes continuaient d’affluer en Somalie et de sortir du pays.  Depuis l’imposition de l’embargo sur les armes en Somalie, en 1992, pratiquement tous les chefs de guerre et chefs de factions ont violé et, dans certains cas, continuent de violer, l’embargo sur les armes. 


Au stade critique où se trouve actuellement la Conférence de réconciliation nationale en Somalie qui se tient à Mbagathi (Kenya), il est impératif d’assurer la continuité du Groupe de contrôle, de façon à permettre à ce dernier de dissuader les violations potentielles de l’embargo pendant la Conférence et de s’assurer que les groupes d’opposition ne déstabilisent pas le gouvernement de transition qui pourrait naître de la Conférence, ou de limiter le plus possible la violence qui risque d’éclater si la Conférence ne débouche pas sur des résultats concluants.  La Conférence de réconciliation nationale en Somalie, qui a été convoquée pour la première fois en octobre 2002 sous les auspices de l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) à Eldoret (Kenya), se trouve actuellement dans sa phase finale (phase III) qui est la plus critique.  Celle-ci, précisent les experts, prévoit que la Conférence sera parachevée par la création, en Somalie, d’un gouvernement fédéral de transition largement représentatif, avant la fin de juillet 2004.  L’issue de cette phase est d’une très grande importance et pourrait bien déterminer l’étendue et le niveau des violations de l’embargo sur les armes, à l’avenir, en Somalie.


Les experts notent que si les violations de l’embargo sur les armes continuent, le schéma du trafic d’armes et des violations qui s’ensuivent semble avoir changé.  Les trafiquants et autres hommes d’affaires jouent désormais un rôle plus important et plus actif dans ce trafic, alors que dans le passé, les chefs de guerre étaient connus pour être les principaux importateurs d’armes.  Les travaux du Groupe de contrôle montrent clairement que le marché d’armes de Bakaaraha à Mogadishu est en fait un vaste réseau alimenté par des armes en provenance de l’étranger, dont le marché principal est le marché d’Irtogte et dont il constitue le centre financier.  Dans ce contexte, le Groupe de contrôle recommande au Conseil de reconnaître le rôle crucial joué par ce réseau dans la persistance du conflit en Somalie et de confier à un groupe la tâche de suivre en permanence les activités de ce réseau et de lui faire rapport à ce sujet.


Il semble que les armes sortent de Somalie en moindre quantité, mais quotidiennement, en particulier vers un État voisin.  D’après les informations obtenues, les chefs de guerre somaliens, dont certains participent au trafic de drogues, sont tous impliqués dans la violation de l’embargo sur les armes.  D’après les renseignements reçus, le transport par voie aérienne a diminué, mais on continue de soupçonner que certains aéroports somaliens sont utilisés pour le trafic d’armes.  Actuellement, les voies maritimes et routières sont les moyens privilégiés de transport.  De solides éléments donnent à penser que les armes entrées en contrebande du territoire d’un État du golfe voisin sont transportées jusqu’au port d’un État voisin, puis transférées en Somalie soit par voie terrestre, soit par voie maritime.  Il est possible que le produit du commerce du khat et de la vente de haschisch à des pays étrangers serve à l’achat d’armes, précisent les experts en ajoutant que des informations donnent à penser que certains chefs de guerre somaliens ne tiennent guère à voir un gouvernement en place en Somalie car cela porterait préjudice à leurs opérations commerciales.  On signale également que certains chefs de guerre qui n’ont pas d’appui à l’extérieur de la Somalie se procurent des armes auprès de deux États de première ligne et à l’intérieur du pays. 


S’agissant de l’établissement, en application du paragraphe 2 e) de la résolution 1519 (2003) du Conseil de sécurité, d’un projet de liste de ceux qui continuent àvioler l’embargo sur les armes en Somalie et en dehors de la Somalie, ainsi que ceux qui les soutiennent directement, en vue d’éventuelles mesures que le Conseil prendrait, le Groupe de contrôle est d’avis qu’une telle demande est prématurée au stade actuel des enquêtes.  Il précise qu’un certain nombre de questions doivent être examinées avant de publier le projet de liste (critères de preuve, définition de la violation de l’embargo, période d’examen, traitement du Gouvernement national de transition et des administrations régionales comme le Puntland et le Somaliland. 


Dans ce contexte, le Groupe de contrôle recommande d’appeler le projet de liste « liste de surveillance », et d’en assurer la confidentialité.  Cette liste donnera le nom des personnes sur lesquelles il convient de mener une enquête plus poussée afin d’établir clairement si elles continuent à violer l’embargo sur les armes.  Les experts recommandent que l’enquête visant les personnes figurant sur la liste de surveillance comprenne un examen de leurs transactions et avoirs financiers et soit limitée aux Somaliens.  Après des enquêtes plus approfondies, expliquent-t-ils, les personnes figurant sur la liste de surveillance qui continueraient de violer l’embargo devraient être inscrites sur le projet de liste et le Conseil devrait imposer des sanctions contre elles.  Celles qui n’auraient pas violé l’embargo seraient rayées de la liste.  Une liste de surveillance pour les non-Somaliens devrait être établie et traitée de la même manière que la liste de surveillance des Somaliens, après l’établissement du projet de liste visant ces derniers.  L’inscription sur la liste de surveillance devrait concerner tous les chefs de guerre et chefs de factions dont les noms revenaient systématiquement dans les rapports précédents au sujet des violations de l’embargo sur les armes, et continuent d’être mentionnés lors des enquêtes en cours; tous les chefs de guerre, chefs de factions et hommes d’affaires qui exploitent notamment des aéroports, des ports maritimes, et des routes, perçoivent de l’argent de ces sources et arment leurs milices afin de continuer à tirer profit des sources en question; tous les hommes d’affaires dont on sait qu’ils ont importé des armes ou se sont livrés au commerce des armes en Somalie, qui ont violé l’embargo sur les armes et dont le nom continue d’être mentionné dans des enquêtes en cours.


S’agissant des mesures à prendre à l’encontre des personnes figurant sur la liste une fois approuvée par le Conseil de sécurité, le Groupe de contrôle propose l’interdiction des voyages, à l’exception de tout déplacement entrepris à destination d’un lieu convenu pour des pourparlers de paix et à geler les avoirs des personnes visées.  Il prévoit que la liste confidentielle des contrevenants, qui portera sur la période allant de la date de la création du Groupe en 2002 jusqu’à l’expiration du présent mandat sera transmise sous pli séparé, au Comité.  En outre, il recommande que les États de première ligne et les États voisins de la Somalie -Kenya, Djibouti, Érythrée, Éthiopie, Soudan et Yémen- devraient étudier la possibilité d’adopter les 40 recommandations et les huit recommandations spéciales sur le financement du terrorisme adoptées par le Groupe d’action financière (GAFI).  Il insiste aussi sur le renforcement des douanes et de la surveillance des transports, en particulier maritimes.


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