CS/2480

LE CONSEIL IDENTIFIE, EN CONCERTATION AVEC LES ORGANISATIONS REGIONALES, LES MESURES A PRENDRE POUR RENFORCER LA SECURITE COLLECTIVE

11/04/2003
Communiqué de presse
CS/2480


Conseil de sécurité

4739e séance – matin


LE CONSEIL IDENTIFIE, EN CONCERTATION AVEC LES ORGANISATIONS REGIONALES,

LES MESURES A PRENDRE POUR RENFORCER LA SECURITE COLLECTIVE


Le renforcement des capacités régionales de maintien de la paix et de la sécurité était ce matin au cœur des préoccupations du Conseil de sécurité, réuni sous la présidence du Ministre des affaires étrangères du Mexique, M. Luis Ernesto Derbez, afin d’identifier, en partenariat avec les organisations régionales, les mesures à prendre pour améliorer l’architecture de sécurité collective et faire face aux nouveaux défis et enjeux.  Le sentiment d’insécurité mondiale a rarement été plus vif qu’aujourd’hui, a observé le Secrétaire général des Nations Unies, M. Kofi Annan, à l’ouverture de la séance, avant de mentionner certains problèmes auxquels doit faire face la communauté internationale, notamment le terrorisme et les inégalités accentuées par la mondialisation.  «Depuis la prolifération des armes de destruction massive jusqu’au trafic illicite d’armes légères, depuis les changements climatiques jusqu’à l’apparition de nouveaux virus mortels, tous pourraient bien menacer non seulement notre stabilité mais aussi notre survie», a mis en garde M. Annan. 


Rappelant ensuite que les Nations Unies s’étaient appuyées à de nombreuses reprises et à des degrés divers, au cours des dernières décennies, sur les partenaires régionaux, en Afrique, en Asie, en Europe et en Amérique latine, le Secrétaire général s’est adressé aux représentants d’organisations régionales présents pour les inviter à redoubler d’efforts afin de trouver une fois encore ce terrain d’entente, cette communauté d’objectifs.  M. Annan a souhaité la création d’un réseau de mécanismes efficaces et complémentaires –régionaux et mondiaux- qui soient souples et qui répondent à la réalité du monde d’aujourd’hui.  En écho à cet appel, et conscient de la complexité accrue des tâches qui incombent au Conseil de sécurité dans le domaine du maintien de la paix, le représentant du Royaume-Uni a proposé un mécanisme de coopération axé sur trois axes prioritaires: l’échange d’informations, le renforcement des capacités et le développement de relations permanentes.  Sur ce dernier point, il a encouragé les Nations Unies à structurer et formaliser le dialogue entre les organisations régionales coopérant avec les missions sur le terrain et le Département des opérations de maintien de la paix d’une part, et des affaires politiques d’autre part. 


Ce mécanisme pourrait s’inspirer notamment de l’expérience du Kosovo évoquée par le représentant de la Bulgarie et par le Secrétaire général de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), M. Jan Kubis, qui ont mis en avant l’interaction positive entre la KFOR et la MINUK et illustré ainsi les liens étroits entre les Nations Unies d’une part et les organisations régionales d’autre part, à savoir l’OTAN, l’OSCE et l’Union européenne.  Cette dernière déploie plus de 30 000 hommes et femmes dans le contexte des missions de maintien de la paix des Nations Unies, a précisé ensuite le Président en exercice de l’Union européenne et Vice-Ministre des affaires étrangères de la Grèce, M. Ioannis Magriotis, avant d’ajouter que l’Union fournit plus de 40% du budget du maintien de la paix. 


Abordant plus spécifiquement la question du renforcement des capacités africaines de maintien de la paix –largement citée par les représentants du Cameroun, de la Guinée et de l’Union africaine-, le Vice-Ministre grec a prôné une coopération étroite entre l’ONU et l’Union africaine afin de procéder à une évaluation des besoins.  M. Magriotis a enfin considéré que les Nations Unies devraient jouer un rôle central dans la reconstruction de l’Iraq. 


Nous ne pouvons accepter que les décisions du Conseil de sécurité ne soient pas respectées et que cet organe soit confiné à un rôle qui consisterait à réparer les dégâts d’une guerre qu’il n’a pas autorisée, a insisté pour sa part le Secrétaire général de la Ligue des Etats arabes, M. Amre Moussa.  Le Conseil de sécurité ne peut se transformer en organe chargé de recoller les morceaux de manière passive.  Tout en saluant la décision du Conseil de sécurité de refuser de légitimer la guerre en Iraq, M. Moussa s’est interrogé sur les raisons du silence du Conseil de sécurité au cours de ces trois dernières semaines, silence qui au-delà du Conseil a affaibli la crédibilité du système collectif de maintien de la paix et de la sécurité tout entier.  Lorsque la souveraineté et l’intégrité territoriale d’un Etat est menacée, quel rôle incombe au Conseil de sécurité sinon celui de faire respecter les dispositions de la Charte des Nations Unies, a demandé ensuite le Secrétaire général de la Ligue des Etats arabes avant de condamner la politique des «deux poids, deux mesures».  Faisant part de ses doutes quant au renforcement de la coopération entre les organisations régionales et le Conseil de sécurité, M. Moussa a regretté que ce dernier n’ait jamais apporté de soutien décisif à l’initiative arabe de paix au Moyen-Orient ni tenu compte de la position de la Ligue arabe en faveur de la poursuite des inspections en Iraq sur la base de la résolution 1441.


A cet échange de vues entre les quinze membres du Conseil de sécurité et les organisations régionales ont également participé le Secrétaire général de l’Organisation des Etats américains, M. Cesar Gaviria, le Ministre sud-africain de l’administration locale et Président par intérim de la Commission de l’Union africaine, M. Fholisani Sydney Mufamadi, et le Secrétaire exécutif de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest, M. Mohamed Ibn Chambas. 


LE CONSEIL DE SÉCURITÉ ET LES ORGANISATIONS RÉGIONALES: FACE AUX NOUVEAUX DÉFIS À LA PAIX ET À LA SÉCURITÉ


Déclarations


M. LUIS ERNESTO DERBEZ, Ministre des affaires étrangères du Mexique, a déclaré que les défis auxquels nous sommes confrontés aujourd’hui ainsi que la ferme volonté d’agir dans le cadre du droit international nous obligent à explorer les voies et moyens visant à renforcer la sécurité collective dans un cadre international et régional.  Notre responsabilité historique est en jeu pour nous qui aspirons à vivre dans un monde démocratique.  Nous devons donc créer un contexte dynamique de discussion et porter notre regard vers l’avenir pour identifier une voie à suivre qui soit à la hauteur des circonstances du moment.


M. KOFI ANNAN, Secrétaire général des Nations Unies, a souligné la profonde aspiration des peuples à un cadre de paix et de sécurité solidement ancré dans la primauté du droit dans les relations internationales, insistant à cet égard sur la nécessité de développer de nouvelles approches pour faire face aux nouveaux défis.  M. Annan a notamment rappelé que la mondialisation avait accentué dans une certaine mesure les inégalités à l’échelle mondiale et que, malgré des progrès remarquables dans le domaine de la science, le sida tue un enfant chaque minute.  De même les progrès technologiques, s’ils offrent des moyens de communication rapides au monde entier, ont permis aux terroristes de disposer d’instruments leur permettant de mener à bien leurs projets, a observé le Secrétaire général.  De la prolifération des armes de destruction massive au trafic des armes légères, des changements climatiques à l’apparition de virus mortels, le monde est confronté à des menaces nouvelles qui pourraient non seulement mettre en jeu notre stabilité, mais aussi notre survie, a-t-il ajouté. 


Les attaques terroristes du 11 septembre et aujourd’hui la guerre en Iraq ont mis en lumière ces menaces qui sont depuis quelques temps déjà à l’ordre du jour des Nations Unies.  Aussi, a indiqué M. Annan, les populations du monde attendent des institutions qu’elles puissent soutenir les principes communs et déboucher sur des solutions multilatérales.  Elles se tournent vers l’ONU et recherchent les moyens de donner corps aux idéaux exprimés dans la Charte des Nations Unies, fruit de la longue histoire, souvent tragique, de l’humanité.  Malgré tous ses défauts, réels ou supposés, notre Organisation a acquis une expérience sans pareil, a déclaré ensuite M. Annan, en ayant à faire face aux crises les plus diverses, en apportant des secours humanitaires à des millions de personnes en détresse, en aidant les gens à reconstruire leurs pays après les conflits, en promouvant les droits de l’homme et l’état de droit et en menant bien d’autres activités, considérées aujourd’hui comme essentielles à l’instauration de la paix, au maintien de la paix et à la consolidation de la paix.


Dans toutes ses entreprises, a-t-il poursuivi, l’ONU s’est appuyée à des degrés divers sur les partenaires régionaux en Afrique, en Asie, en Europe et en Amérique latine.  Nous devons maintenant redoubler d’efforts pour trouver une fois encore ce terrain d’entente, cette communauté d’objectifs, a dit M. Annan.  Nous devons nous orienter vers la création d’un réseau de mécanismes efficaces et complémentaires –régionaux et mondiaux- qui soient souples et qui répondent à la réalité du monde d’aujourd’hui.  L’ONU est prête à œuvrer avec vous, les organisations régionales, à cette mission fondamentale, a assuré le Secrétaire général, ajoutant que la réunion d’aujourd’hui promet de donner un nouvel élan au partenariat. 


M. HANNS HEINRICH SCHUMACHER (Allemagne) s’est félicité de l’évolution très prometteuse des relations entre l’ONU et les organisations régionales manifeste dans les rapports du Secrétaire général depuis 1997.  Ce processus s’est accéléré depuis l’Assemblée du Millénaire, laquelle a permis de mettre en exergue l’intérêt de l’Organisation en matière de coopération régionale.  Alors que nous renforçons nos instruments de gestion des conflits, les attentes que suscite l’ONU sont de plus en plus grandes.  Beaucoup de nos défis sont mondiaux et risquent fortement de menacer notre stabilité et notre survie.  L’ONU ne peut, à elle seule, répondre à tous les aspects liés à la sécurité.  Il faut donc développer des échanges complémentaires avec les organisations régionales.  Cependant, la principale responsabilité du maintien de la paix et de la sécurité internationales revient à l’ONU et au Conseil de sécurité qui est l’enceinte de choix pour la gestion des conflits.  Si cette responsabilité est rejetée, les fondements du droit international seront remis en question car il n’existe pas d’autre base juridique universelle. 


C’est pourquoi, les organisations régionales doivent agir sous mandat des Nations Unies.  Pour assurer une complémentarité avec l’ONU, le dialogue doit être périodique et porter sur le fond.  Le Conseil de sécurité doit quant à lui améliorer et renforcer son dialogue avec l’Assemblée générale.  Le débat entre le Conseil de sécurité et l’Assemblée générale est en effet très important pour discuter et faire progresser les négociations sur une résolution sur la prévention des conflits.  Ce dialogue peut également servir de source d’information sur la façon dont on pourrait enrayer des conflits émergeants.  Enfin, nous saluons les efforts déployés pour renforcer la paix et la sécurité en Afrique par le biais des organisations régionales et soutenons l’objectif visant à faire en sorte que d’ici à 2010, les pays africains soient à même de participer de façon plus efficace au règlement des conflits africains.


M. ISMAEL ABRAAO GASPAR MARTINS (Angola) a estimé que les moments de crises sont les plus appropriés pour engager une réflexion de fond sur l’architecture internationale de paix et de sécurité.  Les organisations régionales ne se substituent pas au rôle des Nations Unies, a-t-il poursuivi, mais elles ont pour objectif de mettre en œuvre et de coordonner à l’échelle régionale les mesures prises au niveau mondial, notamment par le Conseil de sécurité.  Les relations et l’interaction entre organisations régionales et l’Organisation des Nations Unies ont fait l’objet de débats depuis quelques années déjà et le rôle des acteurs régionaux dépend globalement de la cohésion et de la solidité des consensus régionaux.  Les consensus régionaux permettent en outre d’améliorer la conformité, le respect et la durabilité des décisions prises par le Conseil de sécurité, a-t-il dit, mettant en avant le rôle de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC).  A ce titre, il a souligné la collaboration entre la SADC et les Nations Unies dans la recherche de solutions aux conflits au Mozambique et en Angola, de même que dans le processus d’accession à l’indépendance de la Namibie. 


En République démocratique du Congo, la SADC a également insisté sur la nécessité de trouver une solution politique globale qui garantisse le respect de la souveraineté du pays, a dit le représentant, saluant ensuite le rôle des Nations Unies en RDC.  Il a souligné le rôle central que peuvent jouer les organisations régionales dans le maintien de la paix et de la sécurité, sur la base des dispositions du Chapitre VIII de la Charte des Nations Unies et en coopération avec le Conseil de sécurité, tandis que les Etats membres de ces organisations régionales doivent renforcer l’intégration économique et politique. 


M. CESAR GAVIRIA, Secrétaire général de l’Organisation des Etats américains (OEA), a estimé qu’on ne peut instaurer la paix et la sécurité en soi mais qu’il faut pour cela une volonté politique et des ressources financières.  De même, il faut éviter les divergences régionales.  Dans la région des Amériques, nous avons depuis plus d’un siècle créé des instruments politiques qui nous ont permis de maintenir la paix et la sécurité.  Nous avons réussi, notamment depuis une dizaine d’années, à faire de la démocratie le pilier de la paix et de la sécurité.  La non-intervention, l’autodétermination et le respect de la souveraineté territoriale constituent les principes fondamentaux qui régissent notre Organisation.  Nous avons organisé toute une série de conférences sur les mesures de confiance et de sécurité qui ont permis d’éliminer de nombreux divergents territoriaux et qui nous ont permis de faire du commerce un pilier de la coopération. 


Les principaux défis posés à la sécurité de notre région sont aujourd’hui d’ordre non militaire et revêtent la forme du terrorisme, du trafic d’armes et des catastrophes naturelles.  Face à ce type de défis non militaires, nous avons mis en place tout un ensemble d’instruments régionaux.  Nous avons notamment convoqué deux conférences sur la lutte contre le terrorisme et, depuis le 11 septembre, nous travaillons activement dans plusieurs domaines, notamment an matière de coopération financière.  Pour ce qui est de la lutte contre les stupéfiants, nous avons développé une stratégie commune à tous les pays de la région.  Nous disposons à présent d’un langage commun ainsi que d’une stratégie qui tient compte de tous les aspects.  Nous sommes parvenus à éliminer un langage négatif pour nous engager davantage sur la voie de la coopération.  Nous avons, dans ce contexte, pu acquérir une grande expérience en matière de lutte contre le terrorisme par la formation, en particulier d’unités de renseignement et la collaboration avec l’Union européenne. 


Nous avons également mis en place des institutions des droits de l’homme qui sont autonomes et qui nous ont aidé à protéger une nouvelle génération de droits.  De même, nous avons aussi mis en place la conférence des ministres de la justice et des procureurs pour faire face aux crimes et aux délits commis par des organisations transnationales.  Nous avons en outre tenté de régler le problème des mines antipersonnelles et avons mené des activités de déminage dans de nombreux pays, notamment au Nicaragua.  Des milliers de mines ont également été détruites au Pérou, au Guatemala et au Honduras.  La conférence des ministres de la défense nous a permis d’établir des mesures de confiance et des recueils sur les armes classiques. 


M. JUAN GABRIEL VALDES (Chili) a estimé que les Etats Membres et les organisations régionales doivent réfléchir ensemble aux moyens de renforcer les capacités mondiales de maintien de la paix et de la sécurité afin de faire face aux nouvelles menaces.  Il a mentionné entre autres le terrorisme, favorisé par des réseaux mondiaux, et le trafic de drogues qui est étroitement lié au trafic d’armes légères.  La collaboration entre mécanismes sous-régionaux et régionaux de sécurité collective et les Nations Unies doit être encouragée afin de maintenir un dialogue permanent et de préserver le rôle central du Conseil de sécurité dans le domaine du maintien de la paix et de la sécurité internationales.  La condamnation du terrorisme, dans la région de l’Amérique latine et centrale, doit s’accompagner d’une analyse de ses sources du trafic des stupéfiants à la corruption et à l’intolérance, sans oublier la pauvreté et le sous-développement. 


Le représentant a mis en avant l’importance des programmes de l’Organisation des Etats américains en matière de droit et de bonne gouvernance, insistant toutefois sur le lien étroit entre prévention des conflits et lutte contre la pauvreté.  Il nous faut faire face avec détermination et responsabilité aux défis qui interviennent dans nos régions, a-t-il dit, avant de demander au Secrétaire général de l’Organisation des Etats américains d’indiquer les voies et moyens que son Organisation emploiera pour renforcer sa collaboration avec les Nations Unies, et ce dans la perspective de la réunion prévue en mai au Mexique. 


M. RICHARD WILLIAMSON (Etats-Unis) a souligné que l’action des Nations Unies est parfois limitée par son caractère bureaucratique et son éloignement.  Il est en effet parfois difficile d’atteindre toutes les régions du globe.  Les organisations régionales sont, quant à elles, plus sensibles aux défis régionaux et sont plus à même d’imposer des règles à leurs Etats membres.  Cependant, elles ont beaucoup à apprendre et à enseigner les unes aux autres, notamment en matière de respect des lois.  C’est pourquoi, il faut mettre en place une façon systématique de partager cette coopération régionale.  Les Nations Unies doivent compter de plus en plus sur les organisations régionales en matière de maintien de la paix.  A cet égard, nous saluons les efforts de l’Union africaine (UA) en la matière.  Plusieurs Etats africains connaissent des troubles internes.  Face à cela, le Conseil de sécurité développe le plus souvent une approche économique et politique.  Quelle serait, dans ce contexte, la meilleure voie à suivre pour l’Union africaine?  Les Etats-Unis sont, pour leur part, prêts à renforcer les capacités des organisations régionales.  Plus de 10 millions de dollars ont notamment été consacrés au maintien de la paix au Burundi. 


La question des atrocités et des droits de l’homme est également traitée par les Nations Unies.  Néanmoins, pour que l’action dans ce domaine soit durable, il faut que la responsabilité des personnes qui se trouvent dans les gouvernements de transition des pays qui sortent d’un conflit soit mise en jeu.  C’est pourquoi, nous plaidons en faveur de la mise en place de commissions d’établissement des faits.  Quel peut être, en outre, le rôle de l’Union africaine pour aider cette transition judiciaire?  Nous pensons de notre côté qu’il est possible d’avoir une meilleure perception du judiciaire au niveau régional plutôt qu’au niveau des Nations Unies.  Le Conseil de sécurité a par ailleurs beaucoup travaillé au problème du trafic des armes mais nous avons constaté que le moratoire n’est pas toujours respecté.  Que fait la CEDEAO à cet égard?  Les Etats-Unis estiment également que la coopération régionale est cruciale en matière de lutte contre le terrorisme.  Sur ce point, M. Williamson a souhaité savoir comment les organisations régionales envisagent de faire respecter la résolution 1373.  Son Gouvernement, a-t-il indiqué, demande à ces dernières d’encourager leurs Etats membres à travailler avec le Comité contre le terrorisme et à adhérer aux douze conventions sur le terrorisme. 


Reprenant la parole, le Secrétaire général de l’Organisation des Etats américains a précisé que l’Organisation a établi une bonne coopération pour assurer la mise en œuvre de la résolution 1373 sur le contre-terrorisme, notamment en élaborant une convention sur la coopération interaméricaine.  Il a assuré que l’OEA est disposée à partager son expérience avec les autres organisations régionales, notamment concernant la lutte contre le blanchiment d’argent, le financement des groupes terroristes ou l’échange d’informations.  En outre, notre expérience dans le domaine de la prévention des conflits et de gestion des processus post-conflit, notamment au Nicaragua, pourrait être mise à profit par d’autres mécanismes sous-régionaux.  Au Nicaragua, a-t-il rappelé, l’OEA est

parvenue à démobiliser 21 000 combattants uniquement par l’intermédiaire d’observateurs civils.  Enfin, a-t-il dit, la coopération entre les Nations Unies et les organisations régionales en matière de contre-terrorisme, dans le prolongement de la réunion du 6 mars dernier, sera encouragée par l’OEA, a assuré M. Gaviria, avant de souligner également le rôle de l’OEA dans la lutte contre le trafic des armes légères, des stupéfiants et plus généralement contre la corruption.  Il a mis en avant les échanges entre l’OEA et les structures sous-régionales telles que le MERCOSUR.


M. AMRE MOUSSA, Secrétaire général de la Ligue des Etats arabes, a salué l’initiative de la présidence mexicaine du Conseil de sécurité d’organiser cet échange de vues avec les organisations régionales.  Lors de la convocation de cette rencontre, en mars dernier, a-t-il rappelé, la crise iraquienne se trouvait dans une phase critique et tout était mis en œuvre pour empêcher la paralysie du Conseil de sécurité et encourager la poursuite des inspections de la CCVINU et de l’AIEA qui s’avéraient suffisantes pour éliminer les armes de destruction massive en Iraq.  Il a approuvé la décision du Conseil de sécurité de refuser d’accorder la légitimité d’une guerre en Iraq avant de s’inquiéter du silence du Conseil de sécurité au cours de ces trois dernières semaines, silence qui au-delà du Conseil a affaibli la crédibilité du système collectif de maintien de la paix et de la sécurité tout entier.  M. Moussa a invité le Conseil de sécurité à reprendre ses responsabilités et a jugé que la réunion d’aujourd’hui aurait dû se tenir dans un contexte où le Conseil de sécurité serait à la barre.  Il s’est interrogé sur le rôle du Conseil de sécurité lorsque la souveraineté et l’intégrité territoriale d’un Etat sont menacées.  Quelle est sa responsabilité dans une telle situation, a-t-il demandé, avant de faire écho aux propos de ceux qui considèrent que le Conseil de sécurité n’est plus un havre de paix. 


Nous ne pouvons accepter que les décisions du Conseil de sécurité ne soient pas acceptées et que cet organe soit confiné à un rôle qui consisterait à réparer les dégâts d’une guerre.  Le Conseil de sécurité devient un organe qui recolle les morceaux après la guerre, a-t-il constaté, et ses membres non permanents n’ont pas été élus pour y assister de manière passive.  M. Moussa a rappelé que la Ligue des Etats arabes continue d’assumer son rôle dans la recherche de solutions pacifiques, en Palestine comme en Iraq.  Il a souligné l’initiative de la Ligue en faveur de la recherche d’une solution arabe juste et durable basée sur la reconnaissance de deux Etats, sur base des frontières de 1967 et avec Jérusalem comme capitale d’un Etat palestinien.  Comment a réagi le Conseil de sécurité face à cette position de la Ligue arabe, a demandé M. Moussa?  Il n’a rien fait, a-t-il fait remarquer, condamnant la politique des «deux poids, deux mesures» du Conseil de sécurité qui ne fait rien pour forcer Israël à respecter ses résolutions.  De même, a-t-il rappelé, en 1991, la Ligue arabe a immédiatement soutenu le Conseil de sécurité dans les mesures prises pour parvenir à la libération du Koweït, avant de souligner que plus récemment, les Etats membres de la Ligue avaient soutenu la reprise des inspections et la résolution 1441 et avait lancé un appel en faveur d’un règlement pacifique de la crise iraquienne et du respect de la légitimité.


Sur ces deux questions, palestinienne et iraquienne, la Ligue des Etats arabes en appelle au respect de la justice et de la légitimité pour renforcer la paix et la stabilité dans le Moyen-Orient.  M. Moussa a ajouté que l’élimination des armes de destruction massive iraquiennes n’est qu’une étape pour faire du Moyen-Orient une zone dénucléarisée, tout en s’inquiétant du fait qu’Israël dispose encore d’armes nucléaires contrairement aux dispositions de la résolution 687.  La Ligue des Etats arabes entend poursuivre son action pour maintenir la pertinence et la cohésion du système de sécurité collective, en coopération avec les organes des Nations Unies, a-t-il dit ensuite, mais le système fait face au défi le plus sérieux aujourd’hui dans la mesure où certains Etats ont recours à des mesures punitives unilatérales et décident d’occuper d’autres Etats sans l’aval des Nations Unies.  L’ONU ne peut en aucun cas légitimer un gouvernement installé après une intervention militaire et contre la volonté de son peuple, a dit M. Moussa, rappelant à nouveau que le Conseil de sécurité est au cœur de l’architecture de sécurité collective.  Il a proposé à cet égard la poursuite d’une réflexion courageuse sur les conséquences de la guerre en Iraq qui est une guerre dangereuse pour l’avenir de la sécurité collective dans la mesure où, une fois le premier acte passé et la guerre terminée, le second acte, celui de l’occupation étrangère, entraînera une révolution.  Aussi, a-t-il proposé la convocation d’une conférence internationale sur la préservation de la paix à l’échelle mondiale et sur les nouveaux défis posés à la sécurité collective, cette conférence devant être soutenue par des rencontres régionales et, ce, pour palier aux insuffisances du Conseil de sécurité. 


M. MUNIR AKRAM (Pakistan) a rappelé que le Conseil de sécurité a pour rôle d’assurer un système de sécurité collective, lequel a été conçu pour protéger les faibles contre les forts.  Il nous revient, par conséquent, malgré les imperfections de la Charte des Nations Unies, de faire en sorte que ceux qui ont besoin des Nations Unies puissent compter sur elles.  Ce n’est pas le Conseil de sécurité qui a échoué dans la crise iraquienne mais les Etats membres du Conseil de sécurité.  Si nous estimons que l’état de droit a été violé, il nous incombe de le rétablir.  Il faut en effet travailler à combler les lacunes ou corriger les défauts du Conseil de sécurité.  A cet égard, les organisations régionales peuvent apporter leur contribution en conformité avec la Charte des Nations Unies.  Nous estimons qu’à l’avenir, nous aurons besoin de formats hybrides faisant participer les pays concernés au règlement des crises mais également les organisations régionales et le Conseil de sécurité doté d’un rôle d’intercession. 


M. ADAM THOMSON (Royaume-Uni) a souligné que les tâches du Conseil de sécurité deviennent de plus en plus étendues et complexes et le développement de sa capacité à maintenir la paix et la sécurité suppose la création de mécanismes.  Aussi, a-t-il souligné le rôle fondamental des organisations sous-régionales et régionales dans la poursuite des objectifs des Nations Unies, notamment l’échange d’informations, le renforcement des capacités et le développement de relations permanentes.  S’agissant de l’échange d’informations, il a jugé que celui-ci doit répondre à une logique à deux voies, interrogeant les organisations régionales sur le succès de la collecte d’informations destinées au Conseil de sécurité.  De même, il a invité ces organisations régionales à continuer de mettre à la disposition du Conseil de sécurité des informations relatives à la mise en œuvre des résolutions sur le terrain.  S’agissant du renforcement des capacités, le représentant a demandé des précisions sur les moyens dont dispose le Conseil de sécurité pour agir au niveau régional, faisant notamment référence au rôle de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) en Sierra Leone.  Il a exhorté les organisations régionales à coopérer entre elles dans le domaine du renforcement des capacités, se tournant notamment vers l’OSCE et l’OEA.  Au-delà de l’échange d’informations et du renforcement des capacités, a-t-il poursuivi, dans quelle mesure les Nations Unies pourraient-elles structurer le dialogue entre les organisations régionales et le Département des affaires politiques ou le Département des opérations de maintien de la paix. 


Reprenant la parole, le Secrétaire général de la Ligue des Etats arabes a exhorté les Etats Membres, les organisations régionales et tous les acteurs à renforcer la crédibilité du Conseil de sécurité.  Il a exprimé sa crainte de voir le Conseil de sécurité menacé dans son rôle et sa crédibilité et a souhaité qu’une réflexion profonde soit menée pour faire en sorte que le rôle du Conseil sorte renforcé des épreuves actuelles.  Il a approuvé la proposition britannique de mise en place de mécanismes d’échange d’informations, de renforcement des capacités et de développement des relations entre organismes régionaux, Conseil de sécurité et système des Nations Unies.  M. Moussa a encouragé les Nations Unies à réfléchir à un système d’échanges permanent entre organes des Nations Unies et mécanismes régionaux sur les questions de maintien de la paix et de la sécurité. 


M. JAN KUBIS, Secrétaire général de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), a souligné que le défi d’assurer la sécurité dans un monde caractérisé par le terrorisme, les trafics de toute sorte, la criminalité transnationale organisée ou la discrimination ethnique et religieuse, exige une approche multidimensionnelle et une réponse commune.  Dans ce contexte, a-t-il indiqué, l’OSCE a décidé de mettre au point, au cours de cette année, une stratégie de lutte contre les menaces à la sécurité et à la stabilité au XXIe siècle.  La stratégie comprendra l’inventaire desdites menaces et l’analyse de leur nature et de leurs causes, permettant ainsi à l’OSCE de les prévenir ou de les combattre et de contribuer aux efforts internationaux.  L’OSCE a aussi décidé de mener une étude du maintien de la paix pour évaluer sa capacité à lancer de telles opérations et identifier les options de sa participation dans sa région.  En outre, la première conférence annuelle sur la sécurité doit être convoquée, au mois de juin, pour servir de cadre à un dialogue renforcé sur les questions de sécurité.  Détaillant les mesures prises par l’OSCE en matière de lutte contre le terrorisme dont l’adoption du Plan d’action de 2001 et la Charte de 2002, le Secrétaire général a aussi attiré l’attention du Conseil sur la politique de l’OSCE en matière de contrôle des frontières et de lutte contre le trafic sous toutes ses formes.  Le renforcement du travail de l’OSCE dans ces domaines est la priorité de la présidence néerlandaise de l’OSCE en 2003, a-t-il souligné.


Soulignant la capacité de l’OSCE à travailler de concert avec les autres organisations comme l’ONU, le Secrétaire général a indiqué que l’OSCE voit aussi son rôle comme celui d’un cadre général pour l’interaction et la coopération entre les organisations sous-régionales.  L’OSCE a aussi intensifié ses contacts avec les organisations régionales des autres continents, a souligné le Secrétaire général en citant, entre autres, comme point de départ d’une telle coopération, le travail commun avec ses six partenaires méditerranéen et ses quatre partenaires asiatiques.  L’OSCE, a-t-il conclu, reste ouverte à la coopération, est prête à partager ses connaissances et son expérience, et est disposée à apprendre des Nations Unies et des autres partenaires internationaux.


M. SERGEY LAVROV (Fédération de Russie) a fait remarquer que le Conseil de sécurité a déjà accumulé une expérience considérable en matière de coopération avec les organisations régionales représentées aujourd’hui.  Le Conseil de sécurité a trouvé des partenaires fiables dans toutes les régions du monde.  A cet égard, nous souhaiterions souligner le rôle crucial de la Communauté des Etats indépendants, de l’Organisation du traité de sécurité collective qui a été la première à poser la question de la lutte contre le régime des Taliban ainsi que de l’Organisation de Shanghai qui joue un rôle important en Asie.  Le problème du renforcement et du perfectionnement des Nations Unies doit viser à une utilisation plus efficace des ressources des organisations régionales.  Cette coopération doit être souple et s’appuyer sur le rôle central de l’ONU sur la base d’un partage des tâches raisonnable. 


Cependant, la coopération en vue du maintien de la paix doit être sanctionnée par le Conseil de sécurité, surtout lorsqu’elle actionne un système de coercition.  Du succès de la coopération régionale dépendra l’efficacité de l’action de la communauté internationale pour répondre aux défis de notre époque.  L’avenir est en effet aux efforts collectifs.  Nous estimons que pour insuffler vie à ces politiques collectives et pour les traduire en réalité, il faut mettre en place un système global de lutte contre les menaces et les défis du monde moderne sur la base de décisions multidimensionnelles.  Nous nous félicitons d’ailleurs que la Déclaration du Millénaire ait déjà indiqué les principaux objectifs du travail à effectuer en la matière. 


M. STEFAN TAFROV (Bulgarie) a salué les efforts déployés par le Secrétaire général pour dynamiser le rôle des Nations Unies dans le domaine du maintien de la paix et de la sécurité.  Il a souligné une dimension complexe des relations entre le Conseil de sécurité et les organisations régionales, notamment s’agissant des menaces à la paix et à la sécurité internationales qui évoluent et supposent que le Conseil s’adaptent afin de préserver la paix et la sécurité dans le monde.  D’un côté, le monde est confronté à des Etats faibles où la menace est interne, a-t-il constaté, avant de mentionner les facteurs transnationaux qui menacent la paix au-delà des frontières, au premier rang desquelles le terrorisme.  Elles exigent du Conseil de sécurité qu’il s’adapte pour y faire face et c’est là que les organisations régionales et sous-régionales prennent toute leur importance sur la base de règles juridiques définies par le Conseil.  Dans le domaine du maintien de la paix, par exemple, nous sommes passés de missions classiques à des missions plus complexes auxquelles participent des contingents militaires mais aussi de police civile et d’autres experts, a constaté M. Tafrov.  Aussi, a-t-il prôné des démarches intégrées entre Nations Unies et organisations régionales sur le terrain pour relever les défis de la promotion des droits de l’homme, de l’état de droit, et également pour répondre aux causes des conflits.  Se tournant vers la question de la définition des mandats, il a indiqué que dans la mesure où leur mise en œuvre est censée impliquer des organisations régionales, celles-ci doivent jouer un rôle en consultation dans les domaines qui relèvent de leur compétence.  Le représentant bulgare a pris ensuite l’exemple de l’interaction entre la KFOR et la MINUK au Kosovo pour illustrer les liens étroits entre les Nations Unies et l’OTAN, l’OSCE et l’Union européenne pour assurer le succès du processus de normalisation dans cette province.  Il a assuré que la présidence bulgare de l’OSCE en 2004 serait une étape supplémentaire sur la voie du renforcement des capacités et de la coopération.  Il a ensuite demandé au Secrétaire général de l’OSCE d’indiquer les mesures prises en application de la résolution 1373.


Reprenant la parole, le Secrétaire général de l’OSCE s’est félicité des engagements pris par la Bulgarie en faveur du renforcement de l’architecture de sécurité collective par le truchement des organisations régionales, notamment l’OSCE.  Il a poursuivi en saluant la proposition britannique de développer un mécanisme d’échange d’informations avec les Nations Unies, notamment un centre de situation, pour améliorer les opérations sur le terrain.  Des réunions comme celle d’aujourd’hui permettent de prendre conscience des capacités disponibles aux niveaux sous-régional et régional, a-t-il poursuivi, donnant l’exemple du programme de visites, de sensibilisation et d’échange d’informations avec d’autres organisations telles que l’Union africaine.  Il a fait part de consultations régulières entre l’OSCE et les Départements des opérations de maintien de la paix et des affaires politiques.  M. Kubis a déclaré ensuite que l’OSCE avait prévu de développer les échanges avec les Etats membres dans la mise en œuvre de la résolution 1373.


M. FHOLISANI SYDNEY MUFAMADI, Ministre sud-africain de l’administration locale, Président par intérim de la Commission de l’Union africaine, a fait observer que nous sommes confrontés à une situation dans laquelle de nouveaux facteurs ont fait jour.  Nous devons par conséquent développer de nouvelles stratégies pour assurer la paix et la sécurité dans le monde.  Cette tâche se trouve au cœur de la raison d’être des organisations régionales.  L’un des principaux défis de l’Afrique post-coloniale était l’apparition de conflits ponctuels.  Les exhortations morales n’ont souvent pas réussi à dissuader les auteurs de ce fléau.  Ces conflits éclatent souvent en raison du désir d’accéder aux ressources.  Les chefs de guerre utilisent en effet les troubles pour avoir accès aux ressources de leurs pays.  Récemment, nous avons travaillé en toute sincérité dans la continuité de l’action de l’Organisation de l’Union africaine.  En 2002, l’Union africaine (UA) a convenu de créer un Conseil de paix et de sécurité afin de mettre fin aux conflits.  A cet égard, il faut souligner que la République démocratique du Congo s’est enfin mise d’accord, grâce au dialogue, sur le type de société qu’elle souhaite construire.  Cependant, les accords récemment signés ne constituent que le début d’un long chemin.  Nous formulons par conséquent l’espoir que le Conseil de sécurité appuiera ces accords qui représentent un événement venant s’apposer contre l’afro-pessimisme. 


Bien que certains des instruments de l’Union africaine ne soient pas totalement achevés, les événements récents ont prouvé que notre région dispose de potentiels considérables.  La façon dont le système des Nations Unies est structuré reflète la réaction directe aux défis qui ont suivi la deuxième guerre mondiale.  Depuis lors, nous avons assisté à une évolution sans précédent en faveur d’une intervention mondiale et à la nécessité de mettre en place des accords structurels.  Nous avons également assisté au renforcement des organisations régionales, lequel entraîne à son tour le renforcement l’ONU.  L’Union africaine a toujours été en faveur du renforcement des efforts des Nations Unies.  Nous formulons par conséquent l’espoir que le dialogue avec les organisations régionales permettra de rendre au Conseil de sécurité la légitimé qui lui revient.


M. MARTIN BELINGA-EBOUTOU (Cameroun), faisant sienne une déclaration du Secrétaire général du 15 décembre 1999 à l’issue d’un débat public sur la situation de l’Afrique, a déclaré que le maintien de la paix a acquis une forte dimension régionale partout où il a été mis en œuvre.  Il a également rappelé que l’Afrique est la région du monde la plus affectée par des conflits armés et que son développement s’en trouve inévitablement retardé.  Illustrant les efforts de ce continent en matière de maintien de la paix et de la sécurité, il a évoqué la mise en place en 1993, au sein de l’Organisation de l’unité africaine, de l’Organe central du mécanisme chargé de la prévention, de la gestion et du règlement des conflits et, en 2001, du Conseil de la paix et de la sécurité.  Il a salué la mise en place d’un Groupe de travail spécial ad hoc sur la prévention et le règlement des conflits en Afrique, qui traduit la volonté du Conseil de resserrer ses liens de coopération avec l’Union africaine.  Dans le même ordre d’idées, il s’est félicité de l’envoi de missions communes Union africaine-Conseil de sécurité et du développement d’une coopération et d’une coordination appropriées.


Par ailleurs, le représentant du Cameroun a estimé que la coordination par l’ONU des efforts sous-régionaux de prévention et de règlement des conflits était d’une grande importance.  Dans ce contexte, il a particulièrement apprécié la création du Bureau régional de l’ONU en Afrique de l’Ouest, en appelant à des efforts similaires dans d’autres parties de l’Afrique.  Il a appelé l’attention sur la situation de l’Afrique centrale où sept des onze pays de la sous-région sont en conflit.  Il a évoqué les structures en place en Afrique comme le Conseil de paix et de sécurité de la Communauté économique des Etats d'Afrique centrale (CEEAC), le Mécanisme d’alerte rapide de l’Afrique centrale (MARAC), la Force multinationale de l’Afrique centrale (FOMAC) ou encore la Commission de défense et de sécurité, en exhortant la communauté internationale et en particulier le Conseil de sécurité à soutenir les capacités de ces organisations encore très jeunes.


M. WANG YINGFAN (Chine) a souligné la complémentarité et la coopération entre Conseil de sécurité et organisations régionales comme le démontrent les rôles joués par l’Union africaine et la CEDEAO dans la mise en œuvre des résolutions du Conseil.  Il a notamment salué le rôle de la CEDEAO dans le règlement des crises dans la région du fleuve Mano et plus récemment en Côte d’Ivoire, appelant le Conseil de sécurité à renforcer sa coopération avec ces organisations.  Il a estimé qu’avant de prendre des décisions, il fallait coordonner les consultations avec ces organisations régionales afin d’en assurer la pertinence, et a souhaité qu’une liaison soit maintenue avec l’Union africaine, notamment dans la mise en œuvre des résolutions.  Il a soutenu le principe d’échanges permanents avec les organisations régionales et souhaité que le Conseil de sécurité poursuive ses réflexions en ce sens. 


M. IOANNIS MAGRIOTIS, Vice-Ministre des affaires étrangères de la Grèce, au nom de l’Union européenne et des pays associés, a reconnu le rôle de plus en plus important que jouent les organismes régionaux en matière de maintien de la paix.  Ces dernières années, un certain nombre d’organisations se sont dotées de capacités institutionnelles en matière d’alerte rapide.  Nous appuyons pleinement les efforts concertés visant à se doter de la possibilité de répondre efficacement aux nouveaux défis du monde contemporain.  Cependant, nous reconnaissons également que les Nations Unies représentent le principal organe pour le maintien de la paix et l’Union européenne entend appuyer, dans ce cadre, le Conseil de sécurité.  Pour relever les défis actuels, il faut toute une palette d’instruments.  Un des principes directeurs en matière de gestion des crises est la nécessité de se doter d’un volet militaire et d’un volet civil.  A cet égard, l’Union européenne s’engage à développer des relations efficaces et durables avec l’ONU et d’autres organisations régionales. 


L’Union européenne entend en outre renforcer son appui aux efforts de consolidation de la paix des Nations Unies, notamment en matière d’action préventive.  Une conférence régionale de l’Union européenne sur la prévention des conflits à été convoquée en Suède en 2002 afin d’analyser les moyens de renforcer la coopération pour prévenir les conflits violents.  Dans ce cadre, des ateliers régionaux ont été organisés au cours desquels la dimension régionale de la prévention des conflits a été abordée en vue d’accroître le dialogue avec les Nations Unies et les organisations régionales.  La liste des instruments de l’Union européenne qui touche à la gestion et à la prévention des conflits est longue.  Pour pouvoir atteindre nos objectifs, nous nous sommes fixé en particulier des cibles à atteindre qui supposent la participation de nombreuses personnes et la définition d’objectifs concrets en matière de réponse aux crises. 


L’Union européenne contribue notamment aux opérations de maintien de la paix en participant à plusieurs activités.  Nous avons plus de 30 000 hommes et femmes qui travaillent en faveur de la paix dans le contexte des Nations Unies.  Outre ce personnel, nous fournissons plus 40% de tout le budget du maintien de la paix.  Parallèlement, nous souhaitons être en contact et en dialogue constant avec les Nations Unies.  Nous encourageons également le renforcement des capacités de maintien de la paix en Afrique ainsi que la coopération entre l’ONU et l’Union africaine sur la base d’une évaluation des besoins.  L’Union européenne est particulièrement favorable à toute action de consolidation de la paix et nous sommes convaincus que l’ONU devrait jouer un rÔle central dans la reconstruction de l’Iraq. 


Mme ANA MARIA MENENDEZ (Espagne) a souhaité que la réunion d’aujourd’hui ne soit qu’une étape dans le renforcement de la coopération entre organisations régionales et Nations Unies.  Elle a insisté plus particulièrement sur la prévention des conflits qui suppose une bonne connaissance du terrain et une interaction entre les divers acteurs impliqués dans les processus.  Elle a invité les gouvernements et les organismes sous-régionaux et régionaux de tout mettre en œuvre pour éviter qu’une crise ne débouche sur un conflit.  A cet égard, elle a jugé que les organismes régionaux peuvent, grâce au renforcement des voies de communications avec le Conseil de sécurité, contribuer à prévenir des conflits en le tenant informé en temps opportun. 


M. MIKHAIL WEHBE (République arabe syrienne) a jugé que la question de la coopération entre les Nations Unies et les organisations régionales revêt une importance cruciale au regard de l’évolution de la situation en Palestine et en Iraq.  L’agression contre les populations palestiniennes s’est poursuivie pendant des décennies sans que les organisations régionales ou internationales, notamment l’ONU, n’aient pu faire quoi que ce soit, a dit M. Wehbe, avant de considérer que la guerre en cours en Iraq exige de repenser l’architecture de sécurité collective.  Il a souhaité la création d’un réseau de dispositifs de coopération efficace, placé dans le contexte des Nations Unies, permettant de mettre un terme aux menaces qui pèsent sur la sécurité, à savoir le terrorisme d’Etat et les armes de destruction massive sans autoriser aucune exception.  Les organisations régionales sont les mieux placées pour imprimer un nouvel élan à cette fin, a-t-il dit, en particulier dans un contexte où le Conseil de sécurité n’est pas parvenu à empêcher l’éclatement d’une guerre et l’invasion d’un Etat Membre des Nations Unies.  Il a partagé le point de vue du Secrétaire général de la Ligue des États arabes, M. Amre Moussa, qui traduit bien l’état d’esprit de la population arabe.  Il a défendu la mise en place d’un mécanisme d’échanges entre les Nations Unies et les organisations régionales et entre organisations régionales elles-mêmes, se félicitant notamment des relations étroites entre l’Union européenne et la Ligue des États arabes. 


M. MOHAMED IBN CHAMBAS, Secrétaire général de la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), a souligné la nécessité de voir le Conseil de sécurité développer une collaboration de plus en plus proche avec les organisations régionales dans le souci de faire face aux nouveaux défis de la paix et de la sécurité internationales.  Il a salué la création du Bureau régional de l’ONU en Afrique de l’Ouest, où la succession des conflits a affaibli les institutions des pays, les capacités humaines, le développement dans son ensemble et a abouti à une marginalisation d’une grande partie de la population.  Il a souligné la pertinence de la réponse apportée par la CEDEAO en Guinée, dans les pays de la région du fleuve Mano et plus récemment en Côte d’Ivoire, par le biais de son Mécanisme chargé de la prévention, de la gestion et du règlement des conflits créé en 1999. 


Evoquant la situation en Côte d’Ivoire et au Libéria, M. Chambas a souligné la nécessité urgente de renforcer la coopération en matière de maintien de la paix et de la sécurité entre la CEDEAO et les Nations Unies et tout particulièrement avec le Conseil de sécurité.  S’agissant de la Côte d’Ivoire, il a évoqué la contribution de la CEDEAO dans la mise en œuvre des accords de Linas-Marcoussis qui ont permis des progrès substantiels en Côte d’Ivoire.  Il a également précisé que la CEDEAO avait dès la mi-mars déployé une force de 1 288 hommes, conformément au mandat confié par le Conseil de sécurité aux termes de la résolution 1464 du 4 février 2003, force qui devrait être portée à 3 209 hommes.  A cet égard, il a précisé que les États de la CEDEAO n’ont pas les moyens, compte tenu de leur situation économique précaire, de financer le maintien de ses troupes en Côte d’Ivoire.  Dans ce contexte, il a exhorté le Conseil de sécurité à fournir les fonds nécessaires pour le financement de ces troupes. 


M.          . JEAN-MARC DE LA SABLIERE (France) s’est réjoui du rôle important joué par l’Europe aujourd’hui en faveur de la paix et de la sécurité internationales, notamment dans les Balkans et en Afghanistan.  Au moment où l’Europe se dote d’une politique de sécurité et de défense, la France et le Royaume-Uni ont proposé que cette politique puisse apporter une contribution aux opérations de maintien de la paix des Nations Unies.  Dans ce contexte, il a formé le vœu que les relations entre le Conseil de sécurité et les organisations régionales obéissent au principe de complémentarité et que chaque organisation intervienne en priorité là où elle apporte une réelle valeur ajoutée. 

Face à l´hétérogénéité du monde, le représentant a souligné la nécessité de faire preuve de flexibilité et d’inventivité en matière de coopération entre le Conseil de sécurité et les organisations régionales.  Illustrant son propos sur le rôle de ces organisations mais aussi des Gouvernements en matière de paix et de sécurité, il a tout particulièrement souligné le rôle joué par le Ghana dans la mise en œuvre des accords de Linas-Marcoussis qui ont permis des progrès substantiels en Côte d’Ivoire.  Dans le même ordre d’idées, il a salué le rôle essentiel joué par la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), qui a d’abord été un organisme économique avant de se doter d’une identité politique, complétée ensuite par une identité politico-militaire.  Aujourd’hui, la CEDEAO constitue un volet indispensable de l’engagement de la communauté internationale, en pleine harmonie avec les Nations Unies.  En outre, le représentant de la France s’est félicité du rôle joué par l’Union africaine dans la région des Grands Lacs et en Ethiopie-Erythrée, rôle qu’il a défini comme un cas de coopération réussie.  


Parmi les propositions faites par le représentant de la France, pour faire face plus efficacement aux nouveaux défis de la paix et de la sécurité internationales, figurent la nécessité de renforcer la coopération entre les organisations régionales et le Département de maintien de la paix, l’importance que les donateurs tiennent leurs engagements et enfin, la nécessité de renforcer la coopération dans certains domaines particuliers comme, par exemple, la lutte contre le mercenariat et les petites armes. 


M. MAMADY TRAORE (Guinée) a rappelé que les organisations présentes ce matin, par les structures qu’elles ont mises en place et l’expérience qu’elles ont acquise, ont atteint un niveau qui leur permet de faire face à toutes les situations de crise.  Toutefois, des problèmes subsistent, notamment en termes de ressources financières.  Le cas de la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) est à cet égard édifiant.  Depuis plus d’une décennie, la CEDEAO a pris des mesures concrètes en vue de venir à bout de nombreux conflits et tente actuellement d’apporter son soutien au règlement de la crise en Côte d’Ivoire.  Cependant, la CEDEAO a besoin de financements supplémentaires.  Il est donc important que des Etats emboîtent le pas en matière de financement à ceux qui ont déjà mis à disposition de la CEDEAO des ressources conséquentes. 


Le respect des résolutions du Conseil de sécurité est en outre essentiel et éliminer la confrontation régionale.  Les organisations régionales doivent à cet égard travailler étroitement avec le Conseil de sécurité.  Lorsque les autorités d’un Etat estiment normal de transmettre au Conseil de sécurité les raisons pour lesquelles il a violé les résolutions du Conseil de sécurité, il doit cependant respecter ses obligations en vertu de la Charte des Nations Unies.  Nous estimons également que ce type d’Etats ne devrait pas pouvoir bénéficier du soutien des organisations régionales. 


*   ***   *


À l’intention des organes d’information. Document non officiel.