CS/2469

LE CONSEIL DE SECURITE PREND CONNAISSANCE DES PROGRES REALISES EN AFGHANISTAN ET DES DEFIS A RELEVER, NOTAMMENT DANS LES DOMAINES DE LA RECONSTRUCTION ET DE LA SECURITE

27/03/2003
Communiqué de presse
CS/2469


Conseil de sécurité

4727e séance – après-midi


LE CONSEIL DE SECURITE PREND CONNAISSANCE DES PROGRES REALISES EN AFGHANISTAN ET DES DEFIS A RELEVER, NOTAMMENT DANS LES DOMAINES DE LA RECONSTRUCTION ET DE LA SECURITE


Le Conseil de sécurité s’est réuni cet après-midi sous la présidence de M. Mamady Traoré (Guinée), dans le cadre de ses réunions d’information sur la situation en Afghanistan, pour entendre une présentation du Sous-Secrétaire général chargé des opérations de maintien de la paix, M. Hédi Annabi.  Abordant l’évolution de la situation en Afghanistan au cours des quatre derniers mois et ses conséquences pour la paix et la sécurité internationales, M. Annabi a insisté sur les progrès réalisés dans la mise en œuvre de l’Accord de Bonn, sur les défis à venir dans cette mise en œuvre et sur le rôle qu’aura à jouer la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA) dans ce contexte.  La poursuite des réformes administratives et institutionnelles a été à cet égard abordée, de même que la nécessité de consolider les acquis dans les domaines de la sécurité, de la justice et du programme de désarmement, démobilisation et réinsertion (DDR).  M. Annabi a indiqué que le succès de ces réformes est étroitement lié au bon déroulement du processus électoral prévu en 2004.


Au cours de son intervention, M. Annabi a déclaré que dans le courant de l’année à venir, la MANUA continuerait d’assister le Gouvernement afghan dans ses efforts de consolidation de l’autorité de l’Etat sur l’ensemble du territoire ainsi que dans la mise en œuvre de politiques nationales à l’échelle de tout le pays.  Le Sous-Secrétaire général a indiqué que ces efforts s’inscriraient dans le prolongement des progrès réalisés au cours de l’année écoulée dans la mise en place de structures gouvernementales et qu’ils auraient pour but de renforcer les capacités nationales notamment dans les domaines de l’administration et de la sécurité, et de poursuivre les transformations politiques en cours pour renforcer la représentation.  Les structures politiques afghanes doivent être consolidées et renforcées, a insisté M. Annabi, et cela suppose un soutien accru de la communauté internationale. 


Les 13 et 14 mars dernier, le Gouvernement a présenté son projet de budget aux bailleurs de fonds lors du Forum afghan sur le développement, avant de le soumettre à nouveau à Bruxelles, le 17 mars, lors du Forum stratégique de haut niveau pour l’Afghanistan, a rappelé le Sous-Secrétaire général.  Ce processus budgétaire qui a été longuement discuté entre membres du Gouvernement afghan et représentants des donateurs s’inscrit dans la durée et devra répondre à des objectifs clairement définis, a-t-il dit, dans la mesure où un processus de suivi est prévu.  Ce budget fixe clairement le rôle de l’Etat afghan en tant que régulateur et de garant du bien-être social et du développement du peuple afghan, et il consacre par ailleurs le principe de l’égale répartition géographique des ressources.  Il prévoit des dépenses de l’ordre de 2,26 milliards de dollars, a-t-il précisé, dont 200 millions seront couverts par les ressources internes.  A ce jour, les donateurs ont consenti 1,87 milliard de dollars d’aide tandis que 191 millions de dollars devront être trouvés pour boucler le budget de cette année.

Insistant ensuite sur la nécessité de renforcer la capacité du Gouvernement afghan dans la définition des priorités nationales dans le processus de reconstruction, M. Annabi a rappelé qu’au terme des longues années de guerre, il importe de transformer un système informel où les organisations non gouvernementales et les agences des Nations Unies jouaient un rôle clef vers un système dans lequel l’Etat recouvre ses fonctions essentielles pour le développement national.  Les efforts de reconstruction et de développement économique du Gouvernement afghan supposent une réforme administrative en profondeur, a-t-il dit, et l’Etat devra à ce titre investir dans le développement du capital humain et dans la promotion du secteur privé comme levier de la croissance économique. 


Soulignant le rôle de coordination des réformes joué par les Nations Unies au cours de l’année écoulée, le Sous-Secrétaire général a indiqué que le Gouvernement afghan avait d’ores et déjà pris des mesures pour réguler le marché des changes, changer le personnel de l’administration pour répondre aux principes de l’égale répartition géographique, ou encore créer des commissions nationales dans les domaines de la réforme de la sécurité, de l’administration ou de la justice.  Abordant les défis de l’année à venir, M. Annabi a indiqué qu’une des difficultés résiderait dans les prochains mois dans le renforcement des capacités administratives au niveau provincial et dans la promotion d’une bonne gouvernance au niveau local.  Ce processus suppose avant tout d’améliorer les conditions de sécurité au-delà de Kaboul, a-t-il observé. 


A cet égard, M. Annabi s’est inquiété du fait que les questions de sécurité continuent de menacer le processus de paix.  Il a jugé important que les membres du Conseil considèrent les réformes de l’armée et de la police nationales non pas comme une fin en soi mais comme un mécanisme permettant au gouvernement central d’étendre son contrôle sur l’ensemble du pays et, aux processus politique et économique de bénéficier d’un espace caractérisé par un secteur sécuritaire opérationnel.  La mise en place d’une armée et d’une police multiethniques et responsables, a poursuivi M. Annabi, permettra à l’Etat de créer un environnement respectueux de l’ordre du public et soucieux de la primauté du droit et des droits de l’homme.  Pour sa part, la création d’une police des frontières efficace permettra, par la collecte des revenus douaniers, au gouvernement central d’améliorer son pouvoir et sa durabilité.  La réforme de l’appareil judiciaire est cruciale pour la promotion de l’état de droit.  M. Annabi a encore indiqué que la lutte contre le trafic illicite des drogues ne peut que réduire l’effet insidieux de l’économie parallèle qui continuer de priver l’Etat de ses revenus et de renforcer la criminalité et l’instabilité.  Enfin, il est attendu de la mise en oeuvre du programme DDR qu’il mine de l’intérieur la force des factions armées responsables de l’insécurité et échappant au contrôle du Gouvernement.


Pour aider le Représentant spécial à apporter l’assistance requise au Gouvernement afghan dans ces domaines, le Secrétaire général, a indiqué M. Annabi, a recommandé d’affecter plusieurs conseillers militaires et de police à la MANUA.  En la matière, il est important que la réforme du secteur de la sécurité et le développement de l’administration s’accompagnent d’un processus de transformation politique qui assure au Gouvernement la représentativité et la responsabilité nécessaires.  Dans ce cadre, l’élaboration et l’adoption d’une nouvelle

constitution ainsi que les préparatifs des élections prévues pour 2004 seront les tâches clefs de l’avenir.  Le Secrétaire général est d’ailleurs disposé à répondre favorablement à la demande du Président Karzaï d’attribuer à la MANUA un rôle essentiel dans le processus électoral.  Les observateurs électoraux, qui opèrent déjà au sein de la MANUA, ont confirmé la grande complexité qu’aura l’exercice électoral en Afghanistan, a prévenu M. Annabi en annonçant l’intention du Secrétaire général de créer une véritable section électorale au sein de la MANUA.


Sur ce plan, les ressources nécessaires à la création d’un environnement institutionnel et sécuritaire favorable à la tenue d’élections seront importantes, a encore prévenu M. Annabi.  Le mandat de la MANUA venant à expiration, il a jugé impératif que la communauté internationale montre son ferme engagement en faveur du processus de Bonn pendant cette période cruciale.  Il est tout aussi important, a-t-il ajouté, que toutes les parties prenantes participent activement au respect de la lettre et de l’esprit de la Déclaration de bon voisinage, signée le 22 décembre 2002 à Kaboul.  Etats Membres, donateurs et partenaires internationaux du processus de paix en Afghanistan devraient peut-être, a suggéré M. Annabi, examiner les moyens d’apporter leur appui à l’ensemble du processus.  Le Sous-Secrétaire général aux opérations de maintien de la paix a émis l’espoir que le Conseil maintiendra son approche unifiée et ciblée qui a été si déterminante pour les progrès obtenus jusqu’ici.


Rapport du Secrétaire général sur la situation en Afghanistan et ses conséquences pour la paix et la sécurité internationales (A/57/762-S/2003/333)


      Dans ce rapport, qui couvre la période allant du 21 octobre à début mars, le Secrétaire général fait le point de l’application de l’Accord de Bonn de 2001 –Accord définissant les arrangements provisoires applicables en attendant le rétablissement d’institutions étatiques permanentes-; de l’assistance humanitaire, du relèvement et de la reconstruction; et de l’appui à la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA).  Son mandat, arrivant à expiration le 28 mars prochain, le Secrétaire général indique si le Conseil décidait de le proroger, il proposerait de le conserver dans les termes définis par la résolution 1401 (2002).  Le mandat de la Mission comprend deux piliers «affaires politiques» et «assistance humanitaire, relèvement et reconstruction».


S’agissant de l’application de l’Accord de Bonn, le Secrétaire général indique que pendant la période considérée, l’Administration de transition a continué de renforcer son autorité dans tout le pays et de mettre en œuvre les politiques nationales.  L’un des principaux instruments, à cet égard, a été le budget national pour l’exercice 2003.  Selon le Secrétaire général, la mise en place d’un système administratif cohérent relevant de la capitale, suppose, entre autres, un apport constant de ressources ainsi qu’une coordination étroite et un accord entre tous les protagonistes aux échelons provincial, national et international. 


Le Secrétaire général ajoute que la consolidation de la paix en Afghanistan exige des progrès dans les activités de reconstruction.  Il juge impératif, à cet égard, que les Afghans tirent profit de manière claire et tangible des trois grands programmes nationaux, à savoir le Programme national d’urgence pour l’emploi financé par le Fonds d’affectation spéciale pour la reconstruction; le Programme de solidarité nationale, financé par la Banque mondiale; et le Programme national de développement des zones, bénéficiant d’une assistance du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD).  Une description exhaustive de la mise en œuvre de ces trois programmes est expliquée dans le rapport.


L’Accord de Bonn, rappelle ensuite le Secrétaire général, prévoit la rédaction et la ratification d’une nouvelle constitution d’ici à la fin de 2003.  Le Comité de rédaction de la Commission constitutionnelle, qui a été officiellement inauguré le 3 novembre 2002, a d’ailleurs pratiquement achevé l’élaboration d’un avant-projet de constitution.  Le Secrétaire général annonce donc la création, au cours de ce mois, d’une commission constitutionnelle plus importante composée d’une trentaine de membres.  La tenue d’élections d’ici à 2004, poursuit-il, est un autre élément de l’Accord de Bonn.  Il fait ainsi part de la lettre qu’il a reçue du Président de l’Afghanistan lui demandant que la MANUA soit chargée d’aider à préparer et d’organiser le processus électoral et de coordonner l’assistance électorale apportée par la communauté internationale.  A ce propos, le Secrétaire général indique que la Division de l’assistance électorale du Département des affaires politiques et la MANUA sont en train de mettre la dernière main aux prévisions de dépenses initiales pour 2003. 


La sécurité, reconnaît le Secrétaire général, est le problème le plus grave auquel se heurte le processus de paix.  L’amélioration de la situation suppose, selon lui, des progrès sur plusieurs fronts connexes, à savoir la création de l’armée, d’une force de police et d’une police des frontières vraiment nationale; le désarmement, la démobilisation et la réinsertion des membres des factions armées; la réforme du secteur de la justice; et la lutte contre la culture et le trafic des drogues.  Donnant le détail des progrès en la matière, le Secrétaire général passe ensuite aux questions des droits de l’homme.


Il indique ainsi que, malgré des années de dures épreuves, la brutalité de la guerre et le déni persistant de leurs droits fondamentaux, les femmes afghanes reviennent lentement à la vie publique en tant que cadres, étudiantes et membres actives de la société.  La Commission indépendante des droits de l’homme, la Commission judiciaire et la Commission constitutionnelle, dont les activités sont expliquées dans le rapport, comprennent toutes des femmes parmi leurs membres.  Le Secrétaire général se félicite d’ailleurs que l’Afghanistan ait déposé, le 5 mars 2003, l’instrument de ratification de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes.  


En conclusion, le Secrétaire général estime que l’Administration afghane de transition et la communauté internationale, aux côtés de la MANUA, peuvent se targuer d’avoir à leur actif un certain nombre de réalisations notables.  Le Secrétaire général cite le respect presque total du calendrier prévu par l’Accord de Bonn; le retour de 1,5 million de réfugiés et la réinstallation de 500 000 personnes déplacées; l’inscription de 3 millions d’enfants à l’école; l’émission d’une nouvelle monnaie; l’élaboration d’un budget national détaillé; et l’absence d’une reprise majeure des combats. 


Le processus de paix demeure fragile, prévient-il néanmoins en citant les problèmes d’insécurité et d’ordre public; la lenteur de la reconstruction et du développement économique; et la faiblesse de la réconciliation nationale.  Le Secrétaire général affirme, en conséquence, que l’Afghanistan aura besoin du soutien politique et financier de la communauté internationale pendant quelques temps encore.  Il demande instamment aux donateurs de continuer à honorer les engagements pris et à participer au processus de paix et de reconstruction au cours de l’année à venir comme ils l’ont fait pendant l’année écoulée.


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