CS/2229

CONSEIL DE SECURITE: LE LIEN ENTRE LA POURSUITE DU CONFLIT EN RDC ET L’EXPLOITATION ILLEGALE DE SES RESSOURCES NATURELLES EST SOULIGNE

14/12/2001
Communiqué de presse
CS/2229


Conseil de sécurité

4437e séance – matin et soir


CONSEIL DE SECURITE: LE LIEN ENTRE LA POURSUITE DU CONFLIT EN RDC ET L’EXPLOITATION ILLEGALE DE SES RESSOURCES NATURELLES EST SOULIGNE


Le Groupe d’experts sur la question recommande l’adoption d’un moratoire sur l’achat et le transit des matières précieuses dans la région des Grands Lacs


«Il est manifeste que le pillage de la République démocratique du Congo (RDC) est devenu l’élément moteur du conflit»: le Représentant de la France a ainsi souligné le lien étroit entre la poursuite de la guerre et l’exploitation illégale des ressources naturelles congolaises alors que le Conseil de sécurité examinait depuis ce matin, sous la présidence de M. Moctar Ouane (Mali), la situation en RDC à la lumière du rapport du Groupe d’experts sur l’exploitation illégale des ressources naturelles et autres richesses de ce pays.  Pour sa part, le représentant de la Belgique, qui s’exprimait au nom de l’Union européenne et des pays associés, a jugé cette situation particulièrement cynique et tragique pour la population congolaise, victime des richesses naturelles de son pays dont elle devrait être la bénéficiaire.


Le Président du Groupe d’experts, M. Mahmoud Kassem, a observé que, depuis la publication du rapport en mai 2001, l’exploitation systématique des ressources naturelles de la RDC s’est poursuivie sans relâche, procurant des gains substantiels à des réseaux d’intérêts qui ont fait en sorte que la guerre s’autofinance et se poursuive.  Pour y mettre un terme, le Groupe a recommandé, entre autres, l’adoption d’un moratoire sur l’achat et le transit de matières précieuses provenant de zones bien spécifiques.  Il reviendrait au Conseil de sécurité de rendre ce moratoire volontaire ou contraignant, a ajouté M. Kassem qui a également proposé au Conseil de mettre en œuvre un mécanisme de suivi et de contrôle qui serait chargé de lui rendre compte des progrès réalisés dans la mise en œuvre des recommandations du Groupe.


«Nous avons des doutes sur un moratoire interdisant l’exportation de produits provenant de zones rebelles», a déclaré le représentant des Etats-Unis, estimant que le traçage de ce type de produits est difficile et qu’un tel moratoire aurait un impact négatif sur les populations.  Ce risque a été évoqué par de nombreuses délégations, à l’instar du Vice Premier-Ministre et Ministre des affaires étrangères de l’Ouganda, M. James F. Wapakabulo, qui a mis en garde contre des sanctions qui affaibliraient les capacités des populations rurales.  En revanche, son homologue congolais, M. Leonard She Okitundu, a souhaité que le Conseil décrète un embargo sur les produits du pillage de son pays transitant par Kigali, Bujumbura et Kampala.


(à suivre – 1a)

Comme la plupart des pays mis en cause dans le rapport, le Rwanda a regretté que les experts n’aient pas suffisamment partagé leurs conclusions avec les Etats concernés ni transmis aux gouvernements les preuves de leurs accusations.  Le Ministre des affaires étrangères du Zimbabwe a rejeté les conclusions relatives à son pays, s’interrogeant sur l’agenda poursuivi par le Groupe d’experts. 


Les délégations, qui ont également examiné l’opportunité de convoquer une Conférence internationale pour la paix et le développement dans la région des Grands Lacs, ont encouragé la poursuite du processus de DDRRR prévu dans l’Accord de Lusaka ainsi que celle du Dialogue intercongolais.  En effet, comme l’a fait observer le représentant de Maurice, la pleine application de l’Accord de Lusaka mettra fin à l’exploitation illégale des ressources de la RDC et tranquillisera ses voisins.  Se faisant l’écho de la quasi-totalité des intervenants, le représentant du Mali a proposé la prorogation du mandat du Groupe d’experts pour une durée de six mois afin qu’il puisse soumettre au Conseil de sécurité des propositions d’actions dans le but de mettre un terme au pillage des ressources naturelles de la RDC.


Outre les représentants déjà mentionnés et le Vice-Ministre des affaires étrangères de la République-Unie de Tanzanie, les représentants des pays suivants ont pris la parole: Norvège, Irlande, Jamaïque, Bangladesh, Ukraine, Royaume-Uni, Fédération de Russie, Singapour, Tunisie, Colombie, Chine, Afrique du Sud, Canada, Angola, Burundi, Nigéria, Zambie, Namibie et Japon.


LA SITUATION CONCERNANT LA REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE DU CONGO


Rapport du Secrétaire général (S/2001/1072)


L’additif au rapport du Groupe d’experts sur l’exploitation illégale des ressources naturelles et autres richesses de la République démocratique du Congo (S/2001/1072), représente une mise à jour des données pertinentes et une analyse des éléments nouveaux, des informations sur les activités des pays et autres acteurs au sujet desquels on ne possédait pas jusqu’à présent d’informations fiables en quantité suffisante, une réponse fondée dans la mesure du possible sur des éléments de preuves corroborés aux commentaires et réactions des Etats et acteurs cités dans le rapport du Groupe d’experts et enfin une évaluation de la situation à la fin de la période de prorogation du mandat du Groupe.  Le rapport précise que le Groupe d’experts était présidé par M. Mahmoud Kassem (Egypte) et composé en outre du Général Mujahid Alam (Pakistan) et de MM. Mel Holt (Etats-Unis), Henri Maire (Suisse), Moustapha Tall (Sénégal).  Le Groupe étais secondé d’un conseiller technique, M. Gilbert Barthe, de deux spécialistes des questions politiques, d’un administrateur et d’un secrétaire.  Les membres du Groupe, qui ont commencé leurs travaux le 30 juillet 2001 à Nairobi, se sont rendus en Afrique du Sud, en Angola, en Belgique, au Botswana, au Burundi, aux Etats-Unis, en France, en Namibie, en Ouganda, en République centrafricaine, en République démocratique du Congo, en République du Congo, au Royaume-Uni, au Rwanda, en Tanzanie, en Zambie et au Zimbabwe. 


Le Groupe précise, pour ce qui est de l’exploitation des ressources naturelles, que le Zimbabwe est le plus actif des pays alliés et que, si la plupart des investisseurs sont des sociétés off shore, le Zimbabwe semble envisager une réduction de l’activité de ses forces armées et une intervention plus marquée des administrations publiques dans ce domaine commercial.  Il précise ensuite, pour ce qui est des forces non invitées, que les réseaux mis en place par les commandants des Forces de défense du peuple ougandais (UPDF) leur ont permis de poursuivre leurs activités d’exploitation en dépit du retrait d’un nombre important de soldats.  Pour sa part, l’Armée patriotique rwandaise continue de tirer de l’argent du commerce des richesses naturelles et à le faire circuler grâce à un mécanisme interne très élaboré. Le Groupe d’experts indique qu’il a cherché à savoir si les tendances qu’il avait constatées dans son rapport avaient évolué et ses enquêtes ont confirmé que l’exploitation des ressources persistait.  Cette exploitation est le fait de nombreux acteurs étatiques et non étatiques, parmi lesquels des rebelles et des groupes armés, et elle est menée sous le couvert de diverses entités de façade afin de dissimuler la vraie nature de ces activités ajoute le Groupe d’experts. 


Le Groupe précise ensuite, concernant le coltan (colombotantalite), que les réseaux de transport ont été restructurés depuis la publication du rapport et que la Sabena a cessé de transporter du coltan à partir de Kigali.  Il ajoute que le transporteur néerlandais Martinair a pris la place et achemine actuellement le minerai depuis Kigali, deux fois par semaine, jusqu’à Amsterdam.  Une compagnie de fret ougandaise, la DAS Air, transporterait également du coltan entre Bukavu ou Goma et l’Europe, via Kigali, ajoute le Groupe, tandis que des compagnies aériennes relevant d’intérêts sud-africains transporteraient également du coltan directement depuis la région du Kivu, ou par Kigali, vers l’Afrique du Sud.  Le Groupe d’experts a également appris qu’une grande quantité de coltan est transportée d’Ostende ou Anvers jusqu’à Hambourg et que ce minerai est ensuite transporté jusqu’à l’usine de traitement du tantale située à Ulba, au Kazakhstan.  Selon les termes de l’accord conclu en 1997 entre la société suisse Finconcord et l’établissement d’Ulba, Finconcord vend l’alliage à ses clients en Europe, aux Etats-Unis et au Japon. 


S’agissant du cuivre et du cobalt, le Groupe d’experts souligne que des sociétés australiennes, américaines, canadiennes, belges et sud-africaines ont créé des coentreprises dans les concessions de la Gécamines mais que le Gouvernement congolais a utilisé la Gécamines principalement pour conserver l’aide du Zimbabwe.  Il rappelle que le Zimbabwéen Billy Rautenbach a été nommé directeur général de la Gécamines en novembre 1998 après une visite à Harare du Président Laurent Kabila.  Aux termes de l’accord ainsi conclu, certaines des meilleures mines de cobalt de la Gécamines ont été transférées à une coentreprise réunissant la Ridgepoint Overseas Development Ltd de M. Rautenbach et le Groupe minier central, société congolaise contrôlée par M. Pierre-Victor Mpoyo qui était alors Ministre d’Etat.  Le Groupe précise ensuite que l’ancien Président Laurent-Désiré Kabila a remplacé M. Rautenbach par l’homme d’affaires belge Georges Forrest en mars 1999, le premier n’ayant pas remis au Gouvernement congolais la part des profits réalisés par la coentreprise.  Le Groupe ajoute que, à la demande instante des autorités zimbabwéennes, en janvier 2001, M. John Bredenkamp et sa société, la Tremal Ltd., a constitué une coentreprise avec la Gécamines, la Kababancola Mining Company (KMC) qui se voit accordée pour 25 ans une concession représentant les gisements les plus intéressants de la Gécamines. 


Pour ce qui est des diamants, le Groupe d’experts rappelle que, en 1998, l’ancien Gouverneur de la province du Kasai oriental, Jean-Charles Okoto, a été nommé Directeur général de la Société minière de Bakwanga (MIBA).  Il ajoute que, d’après les statistiques obtenues, si les diamants industriels et de qualité secondaire ont toujours représenté plus de 90% de la production de la MIBA au cours des 10 dernières années, la petite partie de pierres de qualité supérieure, qui représentait environ 4% de la production, a diminué progressivement depuis 1999 pour ne représenter plus que 1,8% de la production totale en 2001.  Une grande partie des diamants de très haute qualité de la MIBA est détournée et vendue à des fins de profit personnel par des cadres supérieurs de cette société et peut-être par des représentants du Gouvernement estime le Groupe d’experts.  Il ajoute que des informations crédibles indiquent que les autorités congolaises récupèrent régulièrement des millions de dollars provenant des ventes de la MIBA et que, dans certains cas, les fonds sont transférés directement du compte de la MIBA à Bruxelles à la Banque Belgolaise.  Par ailleurs, suivant de nombreuses allégations que le Groupe n’a pu vérifier, les diamants des forces rebelles angolaises de l’UNITA sont blanchis par le biais de la MIBA.  Le Groupe indique ensuite que l’une des principales coentreprises auxquelles sont associées les Forces de défense zimbabwéennes est la concession diamantifère Sengamines, d’une durée de 25 ans et qui représente manifestement les plus riches gisements du patrimoine de la MIBA avec une valeur de production potentielle estimée à plusieurs milliards de dollars.  Le Groupe estime ensuite qu’un tiers de la production totale de diamants bruts dans la RDC, évaluée à 300 millions de dollars par an, est exporté en contrebande vers la République centrafricaine et la République du Congo et qu’un pourcentage important de ces diamants se retrouve également en Afrique du Sud.  A partir de ces points de transit, le Groupe d’experts est d’avis que la plupart des pierres sont exportées vers les grands centres de commerce des diamants en Belgique, aux Pays-Bas, en Israël et au Royaume-Uni.  Les centres plus petits à Maurice, en Inde et à Dubai (Emirats arabes unis) recevraient une part moins importante.  Le Groupe souligne ensuite que les diamants provenant de l’exploitation artisanale dans le secteur nord de Kisangani ont fourni une source de revenus aux rebelles, à l’Armée patriotique rwandaise, aux Forces armées ougandaises, leur permettant de poursuivre le conflit. 


Le Groupe d’experts donne ensuite un aperçu général des liens existants entre l’exploitation des ressources et la poursuite du conflit.  Il indique par exemple que les affrontements qui ont eu lieu au cours des sept derniers mois dans la région orientale et au Kivu entre les Maï-Maï, qui semblent être mieux équipés et mieux coordonnés qu’avant, et l’UPDF et le groupe rebelle MLC paraissent être directement liés aux efforts faits pour contrôler l’exploitation du coltan et de l’or.  Il ajoute que de brefs combats qui avaient pour enjeu l’accès aux mines de coltan ont également opposé les Maï-Maï et l’APR dans toute la région du Kivu et que les luttes intestines qui ont eu lieu ces derniers mois entre les groupes rebelles congolais et qui ont provoqué des scissions au sein de ces groupes sont liées à la lutte pour le contrôle des mines de coltan, d’or et de diamants dans les régions de Beni et de Bafwasende.  Le Groupe d’experts précise qu’il a reçu des informations fiables corroborant des rapports de sources indépendantes selon lesquels le Zimbabwe appuie les forces rebelles burundaises FDD en leur fournissant des armes et des conseils d’experts et selon lesquelles les FDD sont formées par les Forces de défense zimbabwéennes à Lubumbashi, où elles ont leur quartier général et où se trouvent les exploitations de cuivre et de cobalt dans lesquelles le Zimbabwe a des intérêts.  Faisant observer que le lien qui existe entre le conflit et le contrôle et la commercialisation des ressources de la RDC est plus implicite qu’explicite, le Groupe estime que la poursuite de la guerre peut aussi servir à couvrir les activités de certains hauts fonctionnaires congolais en leur permettant de continuer à exploiter illicitement les richesses de leur pays.  La paix, qui pourrait obliger le Gouvernement congolais à exiger plus de transparence, à établir des contrôles plus stricts et à demander des comptes, risquerait, en définitive de s’avérer beaucoup moins profitable pour certains, ajoute le Groupe. 


Dans ses conclusions, le Groupe d’experts indique que l’exploitation systématique des ressources naturelles et autres formes de richesses de la RDC se poursuit sans relâche et que ces activités sont menées avec la participation d’un grand nombre d’acteurs, nationaux et non nationaux, appartenant ou non à la région, qu’ils participent directement ou non au conflit.  Elles se sont traduites par l’enrichissement de particuliers et d’institutions qui, avec opportunisme, profitent de la situation actuelle pour amasser le maximum de richesses.  Le Groupe ajoute que tant que n’aura pas été réglé le conflit de plus large ampleur dans l’ensemble de la RDC et dans la région, il serait parfaitement irréaliste d’espérer que cesse l’exploitation des ressources naturelles et autres formes de richesses.  La motivation initiale des armées étrangères qui sont intervenues en RDC était essentiellement d’ordre politique et liée à la sécurité, mais avec le temps et en raison de l’évolution de la nature du conflit, leur motivation primordiale est désormais de tirer de la situation le maximum d’avantages commerciaux et matériels, qu’il s’agisse des gouvernements alliés ou des partisans des rebelles.  Le Groupe fait ensuite observer que, nonobstant ses vives protestations, le Gouvernement de la RDC a permis à certaines sociétés étrangères de poursuivre l’exploitation de ressources dans les zones occupées par les rebelles, sans dénoncer ou résilier leurs contrats de concession, et que certains ministères à Kinshasa ont toujours des contacts avec ces sociétés et collaborent activement avec elles. 


Le Groupe d’experts considère que, pour que la RDC exerce effectivement son autorité sur son territoire et mette ses richesses naturelles à l'abri des activités illicites, la communauté internationale devrait aider à formuler un plan d’action organisant la restauration des institutions publiques du pays et organiser une conférence internationale sur la paix et le développement dans la région des Grands Lacs.  Il estime que la MONUC devrait accélérer les opérations de démobilisation, désarmement et réinstallation afin de réduire les problèmes de sécurité dont se sont explicitement inquiétés un certain nombre d’Etats de la région, y compris la RDC, jusqu’au niveau où les Etats concernés pourront négocier entre eux les moyens de garantir leurs frontières sans empiéter sur la souveraineté des autres.  Sur le plan financier et technique, le Groupe recommande à la Banque mondiale, au Fonds monétaire international et aux autres donateurs internationaux de présenter dans les meilleurs délais au Conseil de sécurité leurs conclusions quant au rôle que joue l’aide qu’ils fournissent dans le financement de la poursuite du conflit et le maintien du statu quo dans la région des Grands Lacs. 


Pour le Groupe, il conviendrait également d’imposer un moratoire à l’achat et à l’importation de produits précieux, comme le colombotantalite, le diamant, l’or, le cuivre, le cobalt, le bois d’œuvre et le café provenant des régions de la RDC où se trouvent des forces étrangères et de territoires tenus par les groupes rebelles.  Il considère en outre que les revenus tirés des richesses de la RDC devraient être acheminées par les budgets des Etats et que la collecte de l’impôt et l’emploi des recettes devraient être strictement contrôlés, transparents et assortis d’un système de responsabilisation.  Sur le plan des sanctions, le Groupe estime que le Conseil de sécurité peut envisager d’en imposer mais ajoute que le moment où il conviendra de le faire dépend de l’évolution de la situation en ce qui concerne l’exploitation des ressources naturelles de la RDC.  Avant de se prononcer en matière de sanctions, le Groupe recommande au Conseil de sécurité de mettre en place un mécanisme de contrôle et de suivi. 


Déclarations


M. MAHMOUD KASSEM, Président du Groupe d’experts sur l’exploitation illégale des ressources naturelles et autres richesses de la RDC, a souligné dans son rapport que l’exploitation systématique des ressources naturelles de la République démocratique du Congo (RDC) se poursuit sans relâche et procure des gains substantiels à des réseaux d’intérêts qui ont fait en sorte que la guerre s’autofinance et se poursuive.  Les préoccupations sécuritaires qui ont été à l’origine du conflit en RDC ont été remplacées par des préoccupations d’enrichissement et de profits immédiats résultant de l’exploitation des ressources de la RDC, a-t-il noté en souhaitant que la communauté internationale jette les bases d’une paix durable en limitant l’exploitation des ressources et que l’on privilégie la réorientation des ressources financières à des programmes qui bénéficieront aux populations congolaises.  Il a souhaité en outre qu’un message clair soit envoyé aux parties afin qu’elles mettent un terme à l’exploitation des ressources naturelles et qu’elles s’engagent dans la poursuite du processus de paix. 


M. Kassem a recommandé l’adoption d’un moratoire concernant l’achat et le transit de matières précieuses afin de mettre un terme à l’incitation qui alimente le conflit et légitime le renforcement des troupes étrangères en RDC et la poursuite de l’exploitation des ressources naturelles.  Il a recommandé en outre la mise en oeuvre d’un mécanisme de contrôle et de suivi qui serait chargé de rendre compte au Conseil de sécurité de la mise en œuvre du moratoire.  Il a ajouté qu’il incombe au Conseil de rendre le moratoire volontaire ou contraignant, avant de préciser que, à la différence du régime des sanctions qui interromprait tous les échanges de ces matières précieuses, le moratoire interdirait l’importation des ces matières provenant de zones bien spécifiques.  Il a recommandé en outre d’aider la RDC à recouvrer la paix et à rompre le lien entre le conflit et l’exploitation des ressources et à remettre en place la primauté du droit.  La renégociation de tous les accords commerciaux conclus depuis 1997, qui doit être une partie intégrante du processus de paix, afin que la RDC se libère des contrats conclus sous la pression de divers pouvoirs étrangers en temps de guerre a été en outre recommandée.  Il a ajouté que cette modalité devait figurer en bonne place à l’ordre du jour du dialogue intercongolais.  Il a ajouté que le processus de DDRRR est important car il encouragera les parties à restaurer la confiance.  Il a appelé les parties au conflit en RDC à assumer leurs responsabilités avant de préciser que l’objectif du Groupe d’experts était de protéger les populations congolaises contre l’impact de l’exploitation illégale des ressources naturelles de ce pays qui sont devenues le moyen et le motif de la poursuite du conflit.


M. LEONARD SHE OKITUNDU, Ministre des affaires étrangères et de la coopération internationale de la République démocratique du Congo, a informé le Conseil de sécurité des négociations intercongolaises tenues à Abuja du 6 au 9, suite à la rencontre d’octobre à d’Addis-Abeba.  Ces négociations se sont tenues en présence de médiateurs de l’ONU puis, à huis clos entre Congolais, qui sont parvenus à un certain nombre d’accords: ainsi, le nombre de participants a été ramené de 330 à 300 ; le quota des quatre composantes (Gouvernement, Rassemblement congolais pour la démocratie, Mouvement de libération du Congo et Opposition politique) est passé de 62 à 55 délégués ; la composante société civile a été renforcée et portée à 62 délégués, pour assurer la représentation des religieux et des guerriers mai-mai ; les chefs coutumiers auront au moins deux délégués dans chacune des composantes d’Abuja.  Et enfin, chaque composante pourra intégrer les membres de la diaspora de son choix.  La Réunion d’Abuja a également examiné le retrait des troupes étrangères et la difficulté réelle qu’il y aurait à faire aboutir le dialogue intercongolais au cas où les forces rwandaises et ougandaises ne se seraient pas retirées.  Les autorités rwandaises constituent désormais le principal obstacle à la paix et présentent le risque patent d’une reprise généralisée de la guerre, a-t-il dénoncé. 


Les parties présentes à Abuja se sont mises d’accord pour organiser une rencontre ultérieure en Afrique du Sud, a assuré le ministre, remerciant ce pays qui a proposé d’abriter ce forum et pour ses efforts en vue de rétablir la paix en RDC.  Il s’est félicité de ce que les participants à la réunion aient décidé de l’application des Accords de Gaborone et Lusaka, estimant que les principaux obstacles à la tenue de ce dialogue, autres que financiers, avaient été levés. Il a indiqué que le Ministre des affaires étrangères du Burundi avait été invité à se rendre à Kinshasa pour normaliser les relations entre les deux pays et pour envisager les modalités du retrait des troupes burundaises.


S’agissant du rapport qui occupe aujourd’hui le Conseil, sur l’exploitation illégale des ressources naturelles de la RDC, M. Okitundu a rappelé que le terme «exploitation illégale» signifiait sans l’aval du Gouvernement, donc en violation de la souveraineté de la RDC.  Aussi, en mettant en cause les pays membres de la SADC qui sont venus assister l’un d’entre eux le rapport s’écarte de sa définition de l’exploitation illégale telle que stipulée au paragraphe 15 du rapport.  Aucune armée de la SADC ne se serait introduite dans mon pays s’il n’avait pas été envahi et agressé, a insisté le Ministre, jugeant que c’est là dénier à un Etat le droit fondamental à user de la légitime défense pour sauvegarder l’intégrité et la souveraineté de son territoire.  M. Okitundu s’est dit satisfait que l’additif du rapport vienne confirmer les conclusions du précédent rapport et valide les éléments qui y étaient contenus, à savoir que le pillage systématique et systémique demeure l’enjeu majeur du conflit car, parallèlement à la guerre et dans son ombre, il est procédé à l’une des plus grandes opérations de pillage que le continent ait jamais connue.  L’insécurité, invoquée par les agresseurs de la RDC, ne saurait donc justifier l’occupation de près de la moitié du territoire de la RDC alors que les lignes de front se trouvent parfois à plus de 2000 km de ses frontières. 


Il a ainsi déclaré que selon la commission d’experts nationaux mise en place par son pays, l’exploitation des diamants avait rapporté plus de 427 millions de dollars au Rwanda, à l’Ouganda et au Burundi entre 1998 et 2001, et le coltan,  800 millions de dollars.  Le Ministre a cité un rapport de parlementaires britanniques dénonçant le Rwanda qui a déclaré avoir produit 63 tonnes de coltan, alors qu’il en a en réalité exporté 603 tonnes pour l’année 2000.  A qui profite le crime? a demandé le Ministre en dénonçant l’existence de réseaux mafieux qui contribuent à la criminalisation de toute la région des Grands Lacs, où se croisent pourvoyeurs de fausse monnaie, marchands d’armes et «blanchisseurs» de narco-dollars.  Il a noté que les massacres se déroulent toujours dans les zones minières et que l’exploitation illégale des ressources de la RDC s’accompagne de massacres, de déplacements de populations et de l’utilisation abusive d’enfants et de prisonniers de droit commun rwandais dans des carrières ou des exploitations forestières.  Le ministre a rappelé que selon les organisations non gouvernementales internationales, 16 millions de personnes sont menacées de famine en raison de la guerre, 3 millions sont mortes, directement ou indirectement, de la guerre et 2 millions sont déplacées.


La course effrénée et mercantiliste vers le plus grand profit, a-t-il poursuivi, a amené le Rwanda et l’Ouganda aux affrontements meurtriers de Kisangani, les deux armées se battant pour l’exploitation de ressources qui ne leur appartiennent pas.  Tous les parcs nationaux du pays, classés patrimoine de l’humanité, sont systématiquement dévastés, objets de braconnage : des espèces uniques au monde sont abattues à l’arme automatique. Ainsi sur 11 000 hippopotames du parc des Virunga, il n’en reste que mille.  Le ministre a donc lancé un appel pressant à la communauté internationale pour qu’elle agisse en faveur de la protection des espèces menacées et en cours d’extermination.  Notant par ailleurs que le Groupe d'experts avait reconnu les efforts du Président Kabila, le ministre en a rappelé les grands axes : défense de la souveraineté et de l’intégrité du territoire, restauration d’une paix durable, recherche de voies et moyens devant permettre au peuple congolais de jouir de libertés fondamentales et droits humains de base, mise en oeuvre d’une meilleure gestion des services publics et mise en valeur des ressources nationales, humaines et matérielles.


Le Ministre a demandé que le mandat du Groupe d'experts soit reconduit et surtout renforcé pour lui permettre de mieux circonscrire les responsabilités dans l’exploitation illégale des richesses.  Il a demandé que soit établi un lien entre cessation des hostilités et relèvement économique du pays et souhaité que le Conseil décrète un embargo sur les produits du pillage de son pays transitant par Kigali, Bujumbura et Kampala.  Il a espéré que le déploiement de la Mission des Nations Unies en RDC, la MONUC, serait accéléré et que la démilitarisation de la ville de Kisangani serait rapidement imposée.


M. JAMES F. WAPAKABULO, Vice-Premier Ministre et Ministre des affaires étrangères de l’Ouganda, a rappelé que son Gouvernement a, conformément à la demande du Conseil de sécurité, mis en place le 25 mai 2001 une Commission d’enquête indépendante nationale conduite par le juge britannique, M. Justice Porter, et chargée d’enquêter sur les allégations contenues dans le rapport du Groupe d’experts sur l’exploitation illégale des ressources naturelles de la République démocratique du Congo (RDC).  Il a ajouté que le Gouvernement de l’Ouganda est pleinement disposé à mettre en œuvre les recommandations de la Commission Porter, contenues dans le rapport S/2001/1080, dont le mandat a été prolongé jusqu’en février 2002 afin de lui permettre de collaborer étroitement avec le Groupe d’experts des Nations Unies.  Il a assuré que l’Ouganda attache une grande importance au rétablissement de la paix en RDC et dans la région des Grands Lacs avant de juger que l’additif au rapport du Groupe d’experts est plus équilibré puisqu’il tient compte de tous les pays impliqués en RDC, s’agissant tant des pays de transit que de destination de ces ressources.  Il a souligné que le Groupe d’experts reconnaît la légitimité des préoccupations sécuritaires de l’Ouganda menacé depuis la RDC par des groupes terroristes.  Il s’est félicité du fait que, depuis le 5 décembre 2001, les organisations terroristes ADF et LRA aient été inscrites par les Etats-Unis et le Royaume-Uni sur la liste des organisations terroristes, ces groupes ne pouvant plus être considérés par certains Etats comme combattants de la liberté.  Il a fait observer que le Groupe d’experts a pu établir, notamment pour ce qui est du groupe DARA-Forest, que les allégations du rapport initial du Groupe d’experts n’étaient pas exactes à l’égard de l’implication de la famille du Président Museveni dans l’exploitation illégale des ressources.  Il a souhaité que le déploiement de la MONUC à Buta et à Bunia soit rapidement envisagé afin de permettre le retrait des forces ougandaises de ces villes.  Le Ministre a regretté certaines faiblesses et certaines erreurs dans l’additif du rapport, en particulier au sujet des réseaux dont disposent certains officiers de l’armée ougandaise pour l’exploitation des ressources de la RDC, demandant au Groupe d’experts de transmettre si possible les preuves de ces allégations à la Commission Porter.  Il a assuré que l’armée ougandaise n’est pas impliquée dans des activités commerciales en RDC, faisant valoir que l’Ouganda dispose de règles strictes qui prévoient des commissions d’enquêtes pour les officiers qui contreviennent à ce code de conduite.  Il a nié tout transit de bois d’œuvre par l’Ouganda depuis 1998 et a jugé que ces éléments reposaient sur de fausses informations.  S’agissant de l’exploitation, par les forces ougandaises, de l’or à Kilomoto et de diamants au Nord de Kisangani, il a rejeté la validité de ces informations, faisant observer que les forces ougandaises se sont retirées six mois avant les faits constatés par la MONUC en mai/juin 2001.  Le Ministre a appuyé l’idée de la tenue d’une conférence internationale sur les Grands Lacs mais a suggéré que cette rencontre ait lieu après la conclusion du Dialogue intercongolais et après la mise en œuvre de l’Accord d’Arusha au Burundi.  Il a mis en garde contre l’adoption d’un moratoire, régime de sanctions qui affaiblirait les capacités des populations rurales ougandaises.  Il a ensuite fait observer que contrairement à ce qu’affirme le Groupe d’experts, l’Ouganda produit autant de café que la Côte d’Ivoire.  Il a accepté le principe d’une renégociation des accords commerciaux mais a estimé que cette tâche devrait incomber au Gouvernement de transition qui résultera du Dialogue intercongolais.  Il a souhaité que l’accent soit mis sur la mise en œuvre de l’Accord de Lusaka qui permettra de lutter contre l’exploitation illégale des ressources. Il a appelé le Conseil de sécurité à faire progresser le processus de désarmement, de démobilisation et de réintégration et à encourager le Dialogue intercongolais avant de proposer une rencontre entre les membres du Conseil et le Comité politique de l’Accord d’Arusha.


M. ABDULKADEER SHAREEF, Vice-Ministre des affaires étrangères de la République-Unie de Tanzanie, a indiqué que le Groupe d'experts s’est rendu dans son pays les 18 et 19 septembre dernier et avait pu rencontrer nombre de responsables gouvernementaux.  Aussi, a-t-il regretté que l’additif au rapport contienne des allégations non étayées contre la Tanzanie, indiquant par exemple que la Tanzanie n’a pas fourni toutes les informations requises.  Le Groupe d’experts s’est également dit déçu par le manque de coopération adéquate de notre Gouvernement, a poursuivi le Vice-Ministre, précisant que le Groupe d’experts avait en revanche reçu toute l’aide possible quand il se trouvait à Dar Es-salaam.


La République-Unie de Tanzanie est accusée de transporter du diamant, du bois et du coltan depuis son port de Dar Es-salaam.  Or, a assuré M. Shareef, l’exportation des diamants depuis la Tanzanie est assurée de façon tout à fait légale comme l’a mentionné un rapport de l’ONU concernant les sanctions contre l’UNITA.  Pour ce qui est des exportations de bois d’œuvre, tous les documents montrent que les autorités portuaires de Tanzanie n’ont pas eu à en gérer pendant la période considérée.  Le Ministre a indiqué que son Gouvernement avait été surpris que le Groupe d'experts n’ait pas partagé ses conclusions avec lui.  Concernant le coltan, il a assuré qu’aucun navire baptisé « Karina S » n’avait quitté le port de Dar Es-salaam à la date indiquée par le rapport et a demandé des preuves de ces accusations.


La Tanzanie, a rappelé le Vice-Ministre, est un pays de transit pour les pays voisins qui utilisent ses ports, routes et aéroports  et, à moins qu’il n’y ait des sanctions des Nations Unies ou des soupçons de trafic, les autorités portuaires tanzaniennes respectent les documents fournis par les pays exportateurs.  C’est pourquoi, le Vice-Ministre a réclamé que le Groupe d'experts fournisse au Gouvernement tanzanien toutes les preuves dont il dispose.  Il a par ailleurs regretté que la Tanzanie soit accusée d’abriter des camps rebelles - notamment mai-mai - sur son territoire, jugeant que ces allégations risquaient d’avoir un impact négatif sur ses relations avec les pays voisins.   La Tanzanie n’est pas non plus un pays de transit pour les armes au profit des rebelles impliqués dans le conflit en République démocratique du Congo, s’est-il défendu, déplorant que le Groupe d'experts l’accuse de faire transiter ces armes au profit de ces rebelles. 


La République-Unie de Tanzanie est l’un des architectes de l’Accord de Lusaka, a rappelé M. Shareef, en souhaitant que le rapport final du Groupe d'experts tienne compte des erreurs qu’il venait de relever.  La coopération du Groupe d'experts, en fournissant les preuves demandées par son Gouvernement, serait un élément en faveur de la paix dans la région, a insisté le Ministre, rappelant que plus de 170 000 réfugiés de RDC se trouvaient dans son pays.  Il a enfin jugé que le rapport du Groupe d'experts aurait eu plus de poids s’il avait fait mention des utilisateurs finaux du trafic illégal des richesses de la RDC.


M. PATRICK MAZIMHAKA, Envoyé spécial du Président de la République rwandaise pour la RDC, a reconnu que la question de l’exploitation illégale des ressources a entraîné un grand nombre de souffrances dans la région des Grands Lacs avant de préciser que les observations du Rwanda concernant l’additif sont contenues dans le document S/2001/1161.  Il a regretté ensuite que l’additif ne cite pas explicitement des organisations rwandaises impliquées dans les activités commerciales résultant de l’exploitation illégale des richesses de la RDC.  Il a regretté que le Groupe d’experts n’ait pas établi le lien entre l’exploitation des ressources et les activités de l’Armée patriotique rwandaise avant de demander au Groupe d’experts de fournir des preuves de ces allégations.  M. Mazimhaka a salué les recommandations du Groupe d’experts, notamment concernant le contrôle par les autorités de la RDC de leurs ressources.  Il a demandé à la MONUC de poursuivre le processus de désarmement, démobilisation et réintégration (DDRRR) afin de renforcer les dispositions de l’Accord de Lusaka.  Un grand nombre de combattants des ex-Forces armées rwandaises et des milices Interhamwe ont été enrôlés dans l’armée de Kinshasa, a regretté M. Mazimhaka.  Il a ajouté que parmi ces forces, nombreux sont des criminels qui doivent être poursuivis et traduits en justice.  Il a fait observer que les conflits de faible intensité qui prévalent dans l’Est de la RDC sont alimentés par le Gouvernement de Kinshasa qui arme des groupes armés en violation du cessez-le-feu.  Il a ensuite réitéré l’appui de son Gouvernement à l’Accord de Lusaka et aux dispositions relatives à la restauration de la souveraineté de la RDC.  Il a toutefois rappelé que les origines du conflit datent de la déstabilisation du Rwanda par des forces négatives opérant dans l’Est de la RDC depuis 1997 ; ces groupes n’ont pas changé d’objectif et continuent de disposer de l’appui du Gouvernement de Kinshasa.  Il a ajouté que l’ALIR est financée par Kinshasa alors qu’il s’agit d’une organisation terroriste.  Le représentant a demandé le déploiement rapide de la MONUC dans l’Est de la RDC afin qu’elle surveille les voies terrestres, aériennes et lacustres, notamment le long du Lac Tanganyika.  Le Conseil de sécurité doit exhorter le Gouvernement de Kinshasa à cesser son appui aux forces négatives, a déclaré M. Mazimhaka avant de demander au Tribunal pénal international pour le Rwanda de demander l’arrestation des dirigeants de l’ALIR et leur transfert à Arusha.  Il a ensuite demandé le renforcement du processus de DDRRR et a appuyé la poursuite du Dialogue intercongolais, émettant toutefois la crainte que ses progrès soient limités.  Il a demandé au Conseil de sécurité de faire en sorte que les négociateurs reprennent leurs discussions et que les organisateurs du Dialogue intercongolais disposent des ressources financières adéquates.  Il a enfin assuré que le Gouvernement rwandais est convaincu que la souveraineté de la RDC n’est pas négociable et a souhaité que le Gouvernement de Kinshasa recouvre au plus vite la souveraineté sur ses richesses naturelles avant de tendre la main au Gouvernement de la RDC afin que, conjointement, ils trouvent une solution aux questions de sécurité, dans le cadre de l’Accord de Lusaka, en cessant notamment tout soutien aux forces négatives de l’ALIR. 


M. JEAN-DAVID LEVITTE (France) a salué l’occasion qui était donnée au Conseil de discuter, avec les pays qui sont ses partenaires dans la mise en œuvre de l’Accord de Lusaka, du rapport du Groupe d’experts qu’il a jugé remarquable.  Il est manifeste, a-t-il dit, que le pillage est devenu l’élément moteur du conflit.  L’exploitation illégale des richesses n’est pas une conséquence du conflit, mais elle est peut–être l’une des causes de sa continuation, a-t-il dit, certaines parties impliquées trouvant intérêt à poursuivre la guerre dans le pillage de la RDC.


La question est de plus en plus prise au sérieux par les parties elles-mêmes, a-t-il noté, comme le montre la création de la Commission Porter en Ouganda.  Néanmoins, il reste beaucoup à faire, a jugé M. Levitte.  Tout en saluant la récente rencontre intercongolaise d’Abuja, il a rappelé que, de son côté, le Conseil de sécurité avait décidé le démarrage de la phase III de la MONUC et pourrait bientôt engager le désarmement et la démobilisation des groupes armés, souhaités par les pays de la région.  Alors que l’Ouganda, l’Angola, le Zimbabwe ont commencé de retirer leurs troupes et que la Namibie a retiré tout son contingent, le processus de paix n’a pas encore franchi son point de non retour, notamment dans l’est, a fait valoir M. Levitte. Or, a-t-il relevé, c’est dans cette région orientale que se trouvent la plupart des ressources soumises au pillage.


L’exploitation illégale des richesses n’est pas compatible avec l’avancement du processus de paix car aussi longtemps que certains auront le choix entre la poursuite de l’exploitation et la mise en oeuvre de l’Accord de Lusaka, il restera peu de chance pour la paix en RDC, a jugé M. Levitte.  Il faut que le dialogue entre les parties, ainsi que le désarmement des forces négatives progressent.  Mais si l’on veut aller vers le retrait des forces et restaurer la souveraineté de la RDC, il ne faut pas oublier le lien qui existe entre le pillage des ressources du pays et le maintien des forces étrangères, a-t-il réclamé : c’est ce lien qu’il faut casser, a-t-il souligné.


Selon le rapport, l’exploitation continue sans faiblir.  Ceci doit cesser, a déclaré M. Levitte, appelant ceux qui jouent un rôle dans ces activités, directement ou par l’intermédiaire de mouvements qu’ils contrôlent, d’y mettre fin.  Il a insisté sur la nécessité pour les Etats de la région dont les troupes se trouvent en RDC, identifiés par le rapport du Groupe d’experts, d’examiner les informations contenues dans ce rapport et de prendre les mesures qui s’imposent.  Mais la communauté internationale a aussi un rôle à jouer pour les y inciter, a-t-il poursuivi, en citant notamment les institutions financières, les institutions de l’ONU ou les organisations non gouvernementales.


Dans cet esprit, a indiqué M. Levitte, le Conseil va s’orienter dans la reconduction du mandat du Groupe d'experts pour une nouvelle période de six mois, de façon à préciser et préparer les mesures que le Conseil pourrait être amené à prendre.  Il a rappelé que les experts avaient soumis depuis avril dernier de nombreuses recommandations, notamment l’imposition d’un moratoire sur certaines ressources qui mériterait, selon lui, d’être approfondie en précisant les matières premières auxquelles il s’appliquerait et l’impact de cette mesure sur l’économie de la RDC. Pour le représentant, le principe essentiel de ces travaux est de ne pas oublier qui sont les victimes de ces activités, à savoir la RDC et les populations congolaises.  A cet égard, il a parlé d’ironie cruelle et intolérable de la situation qui veut que les extraordinaires richesses de ce pays soient utilisées pour le malheur de ses habitants.  Il a indiqué que le Conseil prendrait en compte les observations et les engagements de ses partenaires présents aujourd’hui pour mettre un terme au pillage de la République démocratique du Congo.  


M. OLE PETER KOLBY (Norvège) a déclaré que son pays notait avec regret que l'exploitation systématique des ressources naturelles de la République démocratique du Congo (RDC) se poursuivait, menée malheureusement par un grand nombre d'Etats et d'acteurs non-étatiques qui continuent à se livrer à ce genre d'activités.  En plus, l'exploitation de ces ressources est la raison de l'habitude prise par les parties d'une confrontation militaire persistante et contrôlée, comme l'indique le rapport du Groupe d'experts.  Il y a donc des raisons de se demander si ces parties négocient de bonne foi, et s'il existe vraiment des perspectives de paix en RDC dans un proche avenir.  La Norvège demande aux parties, a dit le représentant, de prouver le contraire, et de démontrer que des résultats tangibles peuvent être atteints dans le processus de paix.  Nous partageons le point de vue selon lequel un règlement politique du conflit aiderait à mettre fin à l'exploitation des ressources naturelles de la RDC.  Le Gouvernement de la RDC et les autres parties doivent donc, de manière prioritaire, participer activement et de manière constructive au Dialogue intercongolais.  Notre délégation voit le besoin d'élaborer un plan d'action pour la mise en place d'institutions d'Etat adéquates en RDC, l'additif au rapport soulignant clairement que les différents régimes qui ont dirigé le Congo, même avant l'indépendance de ce pays, ont négligé les fonctions et institutions vitales d'Etat, et que les hommes politiques ont abusé de ces institutions à des fins d'ambition personnelle et autres raisons.


En tenant compte des progrès du Dialogue intercongolais, cette question pourrait être discutée lors d'une conférence qui a été proposée sur les questions de la paix et du développement dans la région des Grands Lacs.  La Norvège soutient l'approche régionale adoptée par l'ONU et les autres institutions envers ce conflit.  Nous attendons de recevoir le programme multipays pour la démobilisation et la réintégration des ex-combattants dans la région des Grands Lacs, qui est actuellement élaboré par la Banque mondiale.  Nous attendons aussi la création d'un fonds régional d'affectation spéciale complémentaire pour le financement des opérations de désarmement, de démobilisation et de réintégration, programme que nous soutenons.  La Norvège note que le Groupe d'experts suggère que les institutions financières internationales et les donateurs évaluent leur

assistance pour examiner si elle contribue à la perpétuation du conflit.  Ceci serait important en vue d'assurer que cette assistance sert aux objectifs qui lui avaient été assignés, y compris ceux visant à limiter et à mettre fin aux conflits dans la région des Grands Lacs.  Nous sommes d'accord que tous les pays devraient revoir leur législation nationale, et si nécessaire adopter de nouveaux textes pour mener des enquêtes et procéder à des jugements sur les activités illicites de produits de haute valeur qui alimentent le conflit. 


M. GERARD CORR (Irlande) a réaffirmé son appui au processus de paix de Lusaka qui apparaît comme la seule solution viable au conflit en République démocratique du Congo (RDC) et au pillage de ses ressources.  Il a attiré l’attention sur l’exploitation des ressources humaines du pays qui est l’aspect le plus inquiétant de cette situation complexe.  Il s’est déclaré gravement préoccupé par les violations systématiques des droits fondamentaux de la population congolaise et a émis l’espoir que le Groupe d’experts poursuivra l’examen de cette question.  Dans ce contexte, le représentant s’est déclaré favorable à la prolongation du mandat du Groupe d’experts et a estimé qu’un contrôle continu de la situation sera un important facteur de dissuasion.  Il convient également d’adresser un message clair à ceux qui sont engagés dans ces activités illicites en leur faisant savoir que le Conseil n’acceptera pas que des individus, des groupes et des Etats profitent des ressources de la RDC aux dépens de la population de ce pays.  Dans cette optique, le représentant s’est déclaré favorable à la proposition du Groupe d’experts d’appeler à l’imposition d’un moratoire volontaire sur les importations de certains produits.  En effet, une telle action pourrait avoir un impact sur les consommateurs et les inciter à faire pression sur les entreprises qui acquièrent ces matières premières pour qu’elles cherchent d’autres sources d’approvisionnement. 


Afin d’appuyer le processus de paix de Lusaka, le représentant a estimé qu’il serait utile que le Groupe d’experts recommande au Conseil de sécurité des mesures en vue de limiter et de juguler l’exploitation des ressources liée à la poursuite du conflit.  Ces recommandations devraient également inclure une évaluation précise des conséquences humanitaires et sociales de ces mesures.  Le Groupe d’experts devrait présenter un rapport au Conseil dans six mois.  Le représentant a également recommandé que le Groupe d’experts fasse des propositions sur la manière dont les organisations et les mécanismes internationaux peuvent être utilisés pour contrôler l’exploitation illicite des ressources de la RDC.  Partant, la communauté internationale doit également contribuer à la reconstruction des institutions et des infrastructures du pays.  Dans ce contexte, il faut espérer que le dialogue intercongolais parviendra rapidement à une conclusion positive et que les partis se mettront d’accord sur leurs futures institutions politiques.  En accord avec le Groupe d’experts, il a estimé que les concessions, les contrats et les accords commerciaux signés depuis 1997 doivent être réévalués afin d’assurer que les revenus provenant des ressources de la RDC bénéficient à sa population tout entière.  En dernier lieu, il s’est de nouveau déclaré favorable à la prolongation du mandat du Groupe d’experts et a appuyé la recommandation du Groupe d’experts selon laquelle les Etats impliqués, directement et indirectement, dans le conflit en RDC (y compris les pays de transit) doivent prendre des mesures appropriées pour apporter une solution aux problèmes posés par l’exploitation illicite des ressources de la RDC.


MME PATRICIA M. DURRANT (Jamaïque) a regretté que l’exploitation illégale des ressources de la RDC continue d’aggraver les conditions de vie des populations de ce pays.  Elle a souligné le lien évident qui existe entre l’exploitation des ressources naturelles de la RDC et la poursuite du conflit et a regretté que cette exploitation se poursuive sans relâche et bénéficie tant à des acteurs étrangers qu’à des acteurs congolais.  Elle a condamné cette situation et souhaité qu’il soit mis fin au plus vite à l’exploitation illicite des ressources de la RDC.  Elle a fait observer que la persistance de ces pratiques sape les progrès enregistrés dans la mise en œuvre de l’Accord de Lusaka.  Mme Durrant a mis l’accent sur les recommandations relatives à l’adoption urgente de mesures visant le rétablissement de l’autorité de l’Etat congolais sur tout le territoire, par l’adoption notamment d’un code minier et la révision des contrats de concession.  Elle a exhorté la MONUC à accélérer le processus de désarmement, démobilisation et de réintégration des ex-combattants (DDRRR) afin de répondre aux préoccupations sécuritaires de nombreux Etats de la région, y compris la RDC.  Une telle mesure, a-t-elle ajouté, permettrait au Rwanda, à la RDC et à l’Ouganda de conclure des accords sur la sécurité à leurs frontières respectives.  Elle a appuyé l’imposition d’un moratoire qui doit aussi viser les utilisateurs finaux des matières précieuses.  Elle a également appuyé la prorogation du mandat du Groupe d’experts afin qu’il puisse approfondir ses recommandations et aider le Conseil de sécurité à répondre de manière adéquate à cette situation. 


M. MUNSHI FAIZ AHMAD (Bangladesh) a dit que sa délégation était tentée de souscrire à la mise en oeuvre immédiate de certaines recommandations du Groupe d'experts présidé par l'Ambassadeur Mahmoud Kassem, notamment en ce qui concerne un moratoire obligatoire sur les importations de produits de base de grande valeur en provenance des territoires contrôlés par des mouvements rebelles ou forces étrangères.  Toutefois, a-t-il précisé, compte tenu de la nécessité impérative de maintenir la dynamique du processus de paix, sa délégation est d’avis que le Conseil ne prenne une décision à cet égard qu'après une étude approfondie de certains facteurs, notamment les conséquences humanitaires de telles mesures.  Selon M. Ahmad, un examen des accords et contrats commerciaux existants constituerait une mesure efficace pour rompre le lien existant entre la guerre et l'exploitation des ressources de la RDC.  Le Bangladesh préconise à cette fin la mise en place d'un organisme sous les auspices du Conseil de sécurité qui serait créé avec l'aval du Gouvernement de la RDC.  Concernant les sanctions, il a dit souhaiter que les parties concernées coopéreront avec le Conseil de sécurité afin de prévenir le recours à de telles mesures coercitives.


Le représentant a estimé que le Conseil devrait envisager de mettre en oeuvre certaines recommandations du rapport soumis en avril par Mme Ba N’Daw, et portant en particulier sur le commerce des minerais, les transactions financières, un embargo sur les armes, la coopération militaire et l’indemnisation pour le préjudice subi.  Selon M. Ahmad, une fois une décision prise pour mettre en place un moratoire sur les produits de base de grande valeur, celui-ci devrait aussi s'étendre à ces autres domaines, insistant en outre sur la nécessité pour  tous les pays concernés d’avoir l'obligation morale de joindre ce moratoire sur l'importation, l'exportation et le transport de certains minerais ainsi que sur les transactions financières y relatives.  Il a invité les pays en question à envisager de mettre en oeuvre dès maintenant un moratoire sur la fourniture d'armes et matériels militaires aux rebelles opérant en RDC.  La demande exprimée par le Conseil en faveur de telles mesures intérimaires devrait s'étendre à tous les acteurs engagés dans des activités illégales, à savoir les gouvernements, forces armées, individus, entreprises privées et publiques impliquées dans l'extraction, le transport, l'importation et l'exportation de ressources de la RDC, a-t-il précisé.  Le Bangladesh souscrit à une prolongation de six mois du mandat du Groupe d'experts, afin qu'il puisse terminer ses travaux et examiner la faisabilité et les impacts possibles des mesures proposées.  Le représentant a aussi tenu à souligner que la RDC doit maintenir sa pleine souveraineté sur ses ressources nationales.


Pour M. JAGDISH KOONJUL (Maurice), les conclusions du Groupe d'experts montrent le lien malsain et réel qui existe entre l’exploitation illégale des richesses et la poursuite du conflit en République démocratique du Congo (RDC).  Il a rappelé que le rapport du Groupe d’experts et son additif montraient le rôle des pays voisins de la RDC dans ce trafic et les a appelés à mettre fin à ces activités, et à poursuivre ceux de leurs ressortissants qui seraient impliqués.  De l’avis de sa délégation, si l’on ne règle pas le conflit dans la région, il sera irréaliste d’espérer la fin de cette exploitation illégale des richesses.  Il faut donc redoubler d’efforts pour mettre en œuvre l’Accord de Lusaka car, une fois le processus finalisé, le Gouvernement congolais sera à même de contrôler lui-même et de protéger ses ressources.


Le représentant a estimé que la recommandation, préconisant de réexaminer tous les contrats d’exploitation conclus depuis 1998, ne pourrait être prise qu’en accord avec le Gouvernement de la RDC.  Quant à l’imposition d’un moratoire sur les produits naturels, M. Koonjul a considéré qu’il s’agit d’une idée novatrice qui doit être examinée de manière approfondie.  Jugeant que le processus de paix avait progressé en RDC, il a souhaité que l’on évite de prendre des mesures entraînant un durcissement des positions : les actions envisagées par le Conseil de sécurité ne doivent pas risquer d’entraver le processus de paix.  Leur impact sur les populations civiles doit faire l’objet d’un examen, de même que la recommandation portant sur des sanctions. 


Maurice, a poursuivi son représentant, préconise une approche globale de la question, convaincu que l’application de l’Accord de Lusaka mettra fin à l’exploitation illégale des richesses et tranquillisera les voisins de la RDC.  Aussi, a-t-il appelé le Conseil à axer ses efforts sur le processus de paix, notamment avec un déploiement à grande échelle de la MONUC et en créant les conditions nécessaires pour faciliter le retrait des troupes étrangères afin de répondre aux préoccupations sécuritaires des pays voisins, pleinement reconnues par l’Accord de Lusaka.


Quant à une conférence régionale dans la région des Grands Lacs, elle ne pourra, selon le représentant, avoir lieu que lorsque la RDC aura retrouvé le contrôle de tout son territoire.


M. VALERY KUCHINSKY (Ukraine) a exprimé la préoccupation de son pays face à l’exploitation illégale des ressources naturelles de la République démocratique du Congo au profit d’une poignée de puissants et aux dépens de la majorité qui vit dans la misère.  Nous appelons donc, a-t-il poursuivi, toutes les parties concernées à prendre immédiatement les mesures nécessaires pour mettre fin à ces activités et pour s’assurer que leurs ressortissants et leurs sociétés font de même.  L’Ukraine, a ajouté le représentant, prend note des conclusions du Groupe d'experts et considère qu’elles méritent un examen approfondi par le Conseil de sécurité. 


L’Ukraine soutient la création d’un mécanisme de contrôle qui rendrait compte des progrès accomplis dans ce domaine, a ajouté le représentant, soulignant que cette recommandation doit être prise en compte dans la perspective du renouvellement du mandat du Groupe d'experts mais aussi dans le contexte de recommandations plus larges, notamment la création d’un mécanisme de contrôle permanent au sein du Secrétariat des Nations Unies.  Pour sa délégation, a-t-il rappelé, l’exploitation illégale des ressources s’inscrit dans le contexte du processus de paix en RDC et de la mise en oeuvre de ses points clefs, à savoir l’application pleine et entière de l’Accord de cessez-le-feu de Lusaka et des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité, le programme de désarmement, de démobilisation, de rapatriement, de réinstallation, de réinsertion (DDRRR), le retrait de toutes les forces étrangères, et le Dialogue intercongolais.


De l’avis de la délégation ukrainienne, le rapport du Groupe d'experts et son additif constituent l’un des éléments des efforts internationaux visant le rétablissement de la paix en RDC et dans la région et devraient servir à encourager les efforts de paix durable et de réconciliation.   


M. JEREMY GREENSTOCK (Royaume-Uni) a salué le travail du Groupe d’experts et a déclaré sa confiance dans l’objectivité de l’Ambassadeur Kassem.  Il a réaffirmé la nécessité de faire progresser le Processus de paix de Lusaka et a suggéré de s’attaquer efficacement aux obstacles qui se posent.  Il a, à ce titre, souligné que mettre fin à l’exploitation illégale permettrait de mettre un terme à l’une des sources alimentant le conflit en RDC.  Il a appuyé la promotion de la bonne gouvernance en RDC et le renforcement des mesures de confiance à l’échelle de la sous-région.  M. Greenstock a appelé les parties à mettre fin au pillage destructif de la RDC et a exhorté les parties congolaises elles-mêmes à rompre la méfiance et faire progresser la réconciliation par le biais du Dialogue intercongolais.  Il a jugé que le processus de DDRRR doit se poursuivre et que le Processus de Lusaka doit être renforcé.  M. Greenstock a enfin recommandé la prorogation du mandat du Groupe d’experts pour une durée de six mois. 


M. JAMES B. CUNNINGHAM (Etats-Unis) a estimé, à propos des rapports du Groupe d'experts, que seules les parties au conflit ont le pouvoir de mettre fin au pillage si elles ont l’intention de le faire.  Il a salué le courage du Groupe d'experts et s’est félicité des engagements pris par plusieurs pays d’enquêter sur les exploitations illicites des ressources congolaises par leurs ressortissants, engageant les autres à faire de même.


Un gouvernement cité comme ne coopérant pas avec le Groupe d'experts, a poursuivi le représentant, est le Zimbabwe : ceci nous préoccupe car cet allié de la RDC est cité comme l’un des plus actifs dans le pillage et donc il utilise son lien avec la RDC pour s’enrichir, a-t-il dit.  Il est important que le Conseil dise au Zimbabwe qu’il est conscient de ses activités et que ce dernier pays devra chercher à y mettre un terme.  Pour cette raison, les Etats-Unis recommandent la prolongation du mandat du Groupe d'experts.


Le représentant a jugé important d’utiliser les agences internationales pour mettre en œuvre les recommandations du Groupe et a fait à cet égard plusieurs observations sur les moyens de renforcer l’application de l’Accord de Lusaka. Nous avons, a-t-il ajouté, des doutes sur un moratoire interdisant l’exportation de produits provenant de zones rebelles: il ne pourra être mis en œuvre car il est difficile de tracer ces produits de base et, en outre, cela risquerait d’avoir un impact négatif sur les populations.  Il serait donc plus efficace de contrôler les exportations plutôt que de les interdire. Il a appelé les Etats de la région à examiner leurs législations pour voir si elles peuvent faire face à ce type d’exploitations illégales.


Sur la révision des accords conclus par le Gouvernement congolais, c’est une bonne idée, a-t-il estimé, jugeant toutefois qu’il n’était pas nécessaire de créer de nouveaux mécanismes, la Banque mondiale, par exemple, pouvant s’en charger.  Il est important que le FMI et les donateurs internationaux vérifient que leur aide n’est pas utilisée pour financer le conflit dans les Grands Lacs.  La démarche américaine face à ce problème, a-t-il résumé, est que la meilleure et la seule façon de réagir est de mettre en œuvre les Accords de Lusaka.


M. GENNADI GATILOV (Fédération de Russie) a déclaré que l’information contenue dans l’additif au rapport du Groupe d’experts permet de mieux comprendre les intérêts des divers acteurs impliqués dans ce conflit.  Il a appuyé la prorogation du mandat du Groupe d’experts pour une durée de six mois et a demandé aux Etats cités dans le rapport de coopérer pleinement.  Il a exhorté les responsables de cette exploitation illégale à y mettre fin le plus rapidement possible et a jugé que cette situation résulte du délabrement des infrastructures en RDC depuis des décennies.  Il a également exhorté la MONUC à axer ses efforts sur les programmes de DDRRR et sur le retrait des forces étrangères.  Il a souhaité que la révision des accords et concessions conclus par les Gouvernements congolais précédents fassent l’objet d’un examen dans le cadre du Dialogue intercongolais et a demandé aux institutions financières internationales de coopérer à la restructuration de l’économie du pays. 


M. KISHORE MAHBUBANI (Singapour) s’est félicité de la teneur de l’additif soumis par le Groupe d’experts, présidé par M. Mahmoud Kassem, qu’il juge plus équilibré et plus constructif que le rapport présenté précédemment par Mme Ba N’Daw.  Il a estimé ensuite que le pillage des ressources naturelles de la RDC est inacceptable et a demandé au Conseil de sécurité de s’investir davantage dans la recherche de solutions visant la fin de cette exploitation illégale des ressources de la RDC.  Il a souhaité que la déclaration présidentielle en cours de préparation ne soit pas adoptée à la hâte, estimant que le Conseil devrait examiner de manière plus approfondie les réponses à apporter à cette situation et les suites à donner à cet additif.  Il a ensuite cité une étude sur les liens entre la poursuite des guerres civiles et l’exploitation illégale des ressources naturelles avant de considérer que, pour mettre un terme au conflit en RDC, il faudrait mettre un terme aux sources de financement de ce conflit.  Il a estimé que les ressources naturelles de la RDC ne peuvent être utilisées pour alimenter le conflit.  Ces ressources doivent être utilisées au profit des populations congolaises, a considéré M. Mahbubani avant de réitérer qu’il faut accorder un délai raisonnable aux membres du Conseil pour trouver des solutions concrètes.


M. MOHAMED SALAH TEKAYA (Tunisie) a souligné que la réunion se tient à un moment où l’élan du processus de paix en RDC doit être consolidé pour atteindre le point de non retour et il a encouragé les parties congolaises à poursuivre leurs efforts à la lumière des récents développements d’Abuja.  Pour lui, l’additif présenté par le Groupe d’experts confirme le lien entre la poursuite du conflit et l’exploitation illégale des ressources de la RDC.  Mais ce rapport insiste sur le fait qu’il serait irréaliste d’espérer que cesse cette exploitation tant que dure le conflit, a-t-il remarqué.


C’est pourquoi, le représentant a jugé que la situation exige un examen approfondi de la part du Conseil, en vue de prendre les décisions appropriées pour faire cesser le pillage de la RDC et mettre fin au conflit.  Il a appelé à des efforts soutenus en vue d’aider la RDC à restaurer son contrôle de son territoire et de ses ressources.  Toute mesure, selon la  Tunisie, doit permettre d’encourager la mise en œuvre du processus de paix.  Son représentant a souhaité que le Groupe d'experts puisse continuer de mener ses évaluations sur le terrain, afin de  permettre au Conseil de prendre des décisions en en étant informé.  Il a poursuivi en appelant au retrait rapide et complet du retrait des forces étrangères, et au respect de la souveraineté et de l’intégrité de tous les Etats de la région.


M. ALFONSO VALDIVIESO (Colombie) a souligné que le rapport présenté par le Groupe d’experts fournit des données préoccupantes sur la situation et a insisté sur la nécessité de mettre fin au pillage des ressources de la RDC et de contribuer au renforcement des capacités institutionnelles de la RDC.  Il a appuyé la démarche visant à dénoncer publiquement les responsables du pillage de ces ressources avant de demander au Conseil de ne pas rester indifférent à ces activités de pillage et à l’aggravation de la situation en RDC.  Il a fait observer que ces ressources illégales sont utilisées pour acheter des armes et encourager les seigneurs de la guerre.  Appelant le Conseil à suivre les recommandations du Groupe d’experts, M. Valdivieso a appuyé la prorogation du mandat du Groupe.  Il a en outre demandé aux pays de transit et aux pays destinataires d’enquêter sérieusement sur les réseaux impliqués dans l’exploitation illégale.  Il a souhaité que les trafiquants d’armes soient identifiés et dénoncés car ils sont responsables des atrocités dont souffrent les populations de la RDC.  Le représentant a enfin souhaité la poursuite des efforts en faveur de la paix en RDC, notamment par la mise en œuvre de l’Accord de Lusaka et la bonne conduite du Dialogue intercongolais. 


Pour M. SHEN GUOFANG (Chine), très peu de choses ont changé entre le rapport publié en mai et l’additif présenté aujourd’hui par le Groupe d'experts, le pillage de la RDC continuant sans relâche.  Il a jugé indispensable que le Conseil prenne aujourd’hui toutes les mesures pour y mettre fin.  Les recommandations contenues dans l’additif aideront le Conseil à réagir et à rétablir la paix dans la région des Grands Lacs, a-t-il estimé, précisant que pour sa délégation, le pillage des ressources n’est que l’un des aspects de ce conflit :  le Conseil devra tenir compte de tous les aspects pour pouvoir y mettre fin.  A cet effet, le représentant a souhaité que le dialogue intercongolais se poursuive et qu’il soit couronné de succès.  La Chine appuie le renouvellement du mandat du Groupe d'experts pour lui permettre de continuer de suivre de près l’évolution de la situation, a conclu le délégué.


M. MOCTAR OUANE (Mali) a souligné que l’additif du Groupe d’experts confirme qu’il existe bien un lien entre l’exploitation illégale des ressources naturelles de la RDC et la poursuite du conflit qui affecte ce pays et a tenu à condamner fermement toute exploitation illégale des ressources naturelles et autres richesses d’un Etat indépendant et souverain.  Il a poursuivi en recommandant la prorogation du mandat du Groupe d’experts afin de lui permettre d’aider le Conseil à mieux réfléchir aux mesures à prendre pour mettre fin à cette situation.  Il a jugé que les recommandations faites dans le rapport final et dans l’additif méritent d’être approfondies et estimé qu’il fallait également en évaluer les implications au plan humanitaire.  M. Ouane a estimé que le Conseil de sécurité devrait, dès que le Groupe d’experts lui remettra ses recommandations, prendre les actions nécessaires dans le but de mettre un terme au pillage des ressources naturelles de la RDC qui a un impact négatif non seulement sur la situation humanitaire et économique de ce pays, mais aussi sur la marche du processus de paix de Lusaka.  Il a considéré également qu’il est essentiel de préserver la dynamique du processus de paix de Lusaka et, ce, dans le strict respect de l’intégrité territoriale et de la souveraineté de la RDC et des autres Etats de la région des Grands Lacs.


M. STANCILAS MUDENGE, Ministre des affaires étrangères du Zimbabwe, a souhaité que le débat sur l’exploitation illégale des ressources de la RDC repose sur la franchise et a regretté que l’additif au rapport du Groupe d’experts ne respecte plus les termes de référence initiaux et contenus dans le rapport du mois d’avril 2001, s’interrogeant sur l’agenda poursuivi par le Groupe d’experts, sous la présidence de M. Mahmoud Kassem.  Faisant observer que des accords commerciaux ont été conclus avec le Gouvernement de Kinshasa, l’Angola, le Zimbabwe et la Namibie ne peuvent être mis sur le même plan que le Rwanda, le Burundi et l’Ouganda.  Il a regretté que la frontière entre commerce illicite et exploitation licite n’apparaisse pas clairement dans l’additif du rapport qui tend à placer puissances invitées et non invitées sur le même pied d’égalité alors que le Ministre de la communication de la RDC, M. Bin Karubi, reconnaissait récemment la légitimité de la présence de l’Angola, de la Namibie et du Zimbabwe.  Il a fait observer qu’il existe un protocole d’accord sur la libre circulation entre la RDC et le Zimbabwe et a regretté que le Groupe d’experts ne respecte pas les positions exprimées par le Président Joseph Kabila en mai dernier.  Il a ajouté que le Zimbabwe et la RDC appartiennent tous deux à la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) et a jugé inacceptable que le Groupe d’experts parle du Gouvernement de la RDC comme du « Gouvernement de Kinshasa », ce qui reprend les termes des rebelles et des pays envahisseurs.  Il a déclaré qu’il n’y a qu’un seul gouvernement légitime en RDC qui a appelé, conformément aux statuts de la SADC et de la Charte des Nations Unies, le Zimbabwe, l’Angola et la Namibie pour lui venir en aide afin de repousser les envahisseurs.  Il a condamné l’ostracisme contre le Gouvernement du Zimbabwe qui est fréquemment relayé à la Chambre des communes britannique.  Il a condamné le fait que le Groupe d’experts souscrive à la campagne actuelle qui consiste à dénigrer le Zimbabwe, faisant observer que ce pays est la seconde démocratie multipartite en Afrique, depuis 1980, après le Botswana.  Il a condamné la propagande mal intentionnée des détracteurs du Zimbabwe et a assuré que de nombreux pays ont été invités pour observer les élections de mars 2000, à l’exception de ceux, majoritairement européens, qui ont financé l’opposition.  Il a jugé que le programme de réforme agraire n’a rien à voir avec la RDC et a regretté que le rapport Kassem y fasse référence alors que cette situation résulte du legs colonial britannique.  Il a nié les allégations sur la chute des ressources minières du Zimbabwe, faisant observer que son pays est le troisième producteur mondial de platine. 


M. Mudenge a jugé que le tableau pathétique dépeint par le Groupe Kassem est la position des détracteurs du Zimbabwe qui ont adopté depuis deux ans des sanctions économiques et financières contre le Gouvernement zimbabwéen en raison du programme de réforme agraire et en raison du soutien à la RDC.  Il a assuré que, contrairement à ce qu’avance le Groupe d’experts, le Zimbabwe n’attend rien en échange de son soutien au Gouvernement de la RDC qui repose sur la solidarité africaine.  Il n’y a aucune revendication de la part d’Harare en échange de l’effort de guerre en RDC, a déclaré M. Mudenge avant de rappeler que son pays a toujours soutenu les mouvements de libération nationale sans exiger aucune compensation.  Il a dénoncé le Groupe d’experts qui veut dissimuler les accords conclus clandestinement entre les grands groupes occidentaux et les rebelles de la RDC.  Il a ajouté que M. Rautenbach cité dans le rapport est l’une des dix plus grandes fortunes du Royaume-Uni mais que cette précision ne figure pas dans le rapport Kassem.  Il a ensuite assuré que le Zimbabwe ne soutient en aucun cas les rebelles burundais, ajoutant que de telles pratiques iraient à l’encontre des bonnes relations entretenues avec l’Afrique du Sud qui assure la médiation du processus d’Arusha.  Il a demandé au Groupe d’experts de définir clairement le Zimbabwe : est-ce que le Zimbabwe est un pirate qui bénéficie massivement des ressources de la RDC ou plutôt ce pays qui ne peut plus honorer ses paiements internationaux en raison de la guerre en RDC ?  Il a soupçonné le Groupe d’experts de céder à la schizophrénie et de ne plus être en mesure d’analyser les enjeux.  Il a affirmé que, depuis la signature de l’Accord de Lusaka, le Zimbabwe a demandé au Conseil de sécurité de déployer les forces de la MONUC afin de permettre le retrait de ses troupes avant de regretter les retards.  Il a estimé que l’argument du Groupe d’experts selon lequel le maintien des troupes zimbabwéennes bénéficie au Gouvernement est sans fondement et purement spéculatif.  Il a conclu en rejetant catégoriquement les allégations contre son pays.


M. DUMISANI KUMALO (Afrique du Sud) a rappelé que son pays était depuis plusieurs années engagé dans les efforts visant à résoudre de manière pacifique le conflit en RDC, ayant notamment fourni un lieu neutre pour les efforts visant la transition entre les Présidents Mobutu Sese Seko et Laurent-Désiré Kabila.   L’an prochain, l’Afrique du Sud sera encore celle qui abritera le dialogue intercongolais, tandis que ses soldats servent sous la bannière de la MONUC.  Néanmoins, a poursuivi le représentant sud-africain, il s’agit aujourd’hui de clarifier certains points.  Tout en reconnaissant la tâche considérable à laquelle le Groupe d'experts est confrontée, il a déploré que dans son additif il mentionne la faible coopération dont a fait preuve son pays, jugeant ces accusations infondées.   Bien qu’aucune assertion ne concerne directement l’Afrique du Sud, a-t-il poursuivi, de nombreux citoyens sud-africains sont mis en cause, tout comme des éléments agissant depuis le territoire sud-africain.  Ces assertions ont fait l’objet d’enquêtes par les services sud-africains eux-mêmes, a assuré le représentant.  Dans cet esprit, le Gouvernement de Pretoria a pleinement coopéré avec les enquêteurs du panel, leur a fourni des rapports détaillés et, en outre, a continué d’enquêter lui-même pour collecter des informations sur des sujets soulevés par le Groupe d'experts.  Pour cette raison, a repris le représentant, l’Afrique du Sud est surprise des plaintes du Groupe d’experts selon lesquelles il dispose d’informations « crédibles » impliquant des individus ou des entités sud-

africaines, opérant depuis le territoire national pour conduire des activités illégales en RDC d’autant que le Groupe d'experts n’a jamais partagé ces informations avec les autorités sud-africaines.  Mon pays, a-t-il remarqué, ne manque pas de mesures juridiques adéquates mais d’informations crédibles et de preuves : engager des poursuites contre les auteurs présumés de ces opérations illégales ne peut se faire qu’à condition de disposer des preuves et informations les impliquant.


La délégation sud-africaine, a-t-il ajouté, conseille donc au Groupe d'experts de mieux partager ses informations avec les Etats Membres.  Faute de quoi, notre capacité à enquêter, surveiller et poursuivre restera affectée, compromettant l’efficacité du travail du Groupe d'experts.  Le délégué a enfin estimé que le rapport avait négligé la référence aux « activités illégales » menées « sans le consentement du Gouvernement légitime » de RDC .  Enfin, il a indiqué que le Processus de Kimberley, présidé par l’Afrique du Sud et visant à établir des procédures de certification pour les diamants bruts afin de rompre le lien entre les conflits et le trafic des diamants, espérait pouvoir s’adresser au Conseil de sécurité au début de l’année prochaine.  Il s’agit de s’assurer que les diamants provenant des zones de conflit ne sont pas utilisés pour perpétuer la guerre, comme on a pu le voir au Congo, a-t-il indiqué.


M. PAUL HEINBECKER (Canada) a estimé qu’il était très important de laisser la possibilité au Groupe d’experts de poursuivre son enquête sur le pillage des ressources naturelles de la RDC.  L’additif au rapport du Groupe d’experts est alarmant et préoccupe considérablement le Canada quant aux sources de financement du conflit dévastateur en RDC.  Il a condamné tout Etat ou tout groupe armé ayant contribué à exploiter illégalement les ressources naturelles de la RDC.  Le représentant a invité le Groupe d’experts à poursuivre ses travaux, recommandant la prorogation de son mandat pour aider la communauté internationale à trouver les voies et moyens de mettre un terme à l’exploitation illégale des ressources de la RDC.  Une telle démarche, a-t-il ajouté, renforcera le processus de paix en RDC et la sécurité dans la région des Grands Lacs.


M. JEAN DE RUYT (Belgique), s’exprimant au nom de l’Union européenne et des pays associés, a fait observer que le rapport du Groupe d’experts montre qu’un conflit initialement politique et sécuritaire est en train de se transformer en lutte pour l’enrichissement.  Il a ajouté que les parties impliquées trouvent un intérêt à la poursuite du conflit qui s’éternise et dont la dimension économique devient une force directrice.  M. de Ruyt a fait observer que, si la situation est particulièrement cynique, elle est surtout tragique pour la population congolaise qui est victime des richesses nationales de son pays.  Il a ajouté que cette situation complique sérieusement les efforts de paix car les parties mettent en œuvre des instruments politiques dans un conflit qui est devenu, en partie, une lutte économique dans laquelle le changement d’alliances et la fragmentation des mouvements rebelles apparaissent en partie dictés par des motivations lucratives.  L’Union européenne, a ajouté le représentant, condamne ce pillage des ressources naturelles de la RDC qui doit cesser.  Il a appelé la communauté internationale à établir des mécanismes de contrôle ainsi que des mesures adaptées pour contrecarrer la contrebande et demandé aux pays cités dans le rapport d’examiner les informations qu’il contient et de prendre les mesures qui s’imposent.  Il a poursuivi en considérant que le mandat du Groupe d’experts devait être renouvelé afin de maintenir la surveillance très utile que leurs travaux ont permis d’exercer jusqu’à présent.  Il a souhaité que le suivi contribue à la dynamique du processus de Lusaka et s’inscrive dans le cadre global de la recherche d’une solution politique au conflit en RDC.  Il a estimé, s’agissant de la proposition de moratoire, qu’il fallait prendre garde de ne pas retirer des mains de la population congolaise le peu de ressources dont elle dispose et de bien cibler sur les responsables du pillage des mesures restrictives éventuelles.  M. de Ruyt a déclaré que le Dialogue intercongolais constitue un des éléments importants du processus de paix et a encouragé toutes les parties à faire tous les efforts possibles afin de garantir le succès de la réunion prévue en Afrique du Sud.  Il a conclu en assurant que l’Union européenne partage pleinement les préoccupations du Groupe d’experts concernant le rôle que peut jouer l’aide internationale dans le financement de la poursuite du conflit avant de juger que cette problématique doit faire l’objet d’une approche responsable des donateurs.


M. JOAQUIM BELO MANGUEIRA (Angola) a indiqué que le rapport présenté aujourd’hui contenait certains éléments de préoccupation pour sa délégation, quand bien même les auteurs notent que la présence de l’Angola en RDC est due à des raisons stratégiques et qu’il est le seul pays à n’avoir reçu aucune compensation pour son action militaire dans ce pays.  Cette réaffirmation, comme cela avait déjà été dit dans le précédent rapport, montre bien que la politique menée par le Gouvernement angolais était basée sur les principes de la défense de la souveraineté et de l’intégrité de son territoire et de ses frontières, dans le respect de ses voisins, a insisté le représentant. 


En tant que pays souverain et indépendant, a-t-il poursuivi, la RDC a le pouvoir de signer des accords avec d’autres Etats dans le respect des lois nationales et du droit international.  Par conséquent, l’Angola ne peut soutenir certaines des propositions formulées dans le rapport, notamment celles concernant la révision des accords de concession conclus par le Gouvernement de Kinshasa, des accords commerciaux et autres.  Nous considérons cette recommandation comme une ingérence dans les affaires intérieures de ce pays.  Seuls les Etats concernés peuvent revoir ces accords.  Ainsi, la compagnie angolaise Sonangol Company a établi, dans le cadre de sa stratégie régionale, des partenariats avec ses pairs dans d’autres pays afin de contribuer au développement des pays concernés.  Ce fut le cas à Sao Tomé-et-Principe, au Congo, au Cap-Vert, a fait remarquer le représentant.  Nous sommes convaincus, a-t-il ajouté, que la solution au conflit en RDC réside sans aucun doute dans l’application des Accords de Lusaka et des protocoles additionnels : une fois soigneusement observées, ces dispositions établiront les conditions nécessaires à un règlement définitif de questions comme l’exploitation illégale des ressources naturelles de la RDC.  En conclusion, les recommandations du Groupe d’experts devraient formuler des mesures concrètes pour mettre fin à cette exploitation illégale, et non pas désigner les pays qui ont des accords librement consentis avec la RDC parmi ceux qui contribuent au pillage de ses richesses.


M. JEAN DE RUYT (Belgique), s’exprimant au nom de l’Union européenne et des pays associés, a fait observer que le rapport du Groupe d’experts montre qu’un conflit initialement politique et sécuritaire est en train de se transformer en lutte pour l’enrichissement.  Il a ajouté que les parties impliquées trouvent un intérêt à la poursuite du conflit qui s’éternise et dont la dimension économique devient une force directrice.  M. de Ruyt a fait observer que, si la situation est particulièrement cynique, elle est surtout tragique pour la population congolaise qui est victime des richesses nationales de son pays.  Il a ajouté que cette situation complique sérieusement les efforts de paix car les parties mettent en œuvre des instruments politiques dans un conflit qui est devenu, en partie, une lutte économique dans laquelle le changement d’alliances et la fragmentation des mouvements rebelles apparaissent en partie dictés par des motivations lucratives.  L’Union européenne, a ajouté le représentant, condamne ce pillage des ressources naturelles de la RDC qui doit cesser.  Il a appelé la communauté internationale à établir des mécanismes de contrôle ainsi que des mesures adaptées pour contrecarrer la contrebande et demandé aux pays cités dans le rapport d’examiner les informations qu’il contient et de prendre les mesures qui s’imposent.  Il a poursuivi en considérant que le mandat du Groupe d’experts devait être renouvelé afin de maintenir la surveillance très utile que leurs travaux ont permis d’exercer jusqu’à présent.  Il a souhaité que le suivi contribue à la dynamique du processus de Lusaka et s’inscrive dans le cadre global de la recherche d’une solution politique au conflit en RDC.  Il a estimé, s’agissant de la proposition de moratoire, qu’il fallait prendre garde de ne pas retirer des mains de la population congolaise le peu de ressources dont elle dispose et de bien cibler sur les responsables du pillage des mesures restrictives éventuelles.  M. de Ruyt a déclaré que le Dialogue intercongolais constitue un des éléments importants du processus de paix et a encouragé toutes les parties à faire tous les efforts possibles afin de garantir le succès de la réunion prévue en Afrique du Sud.  Il a conclu en assurant que l’Union européenne partage pleinement les préoccupations du Groupe d’experts concernant le rôle que peut jouer l’aide internationale dans le financement de la poursuite du conflit avant de juger que cette problématique doit faire l’objet d’une approche responsable des donateurs.


M.T.D. HART (Nigéria) a relevé une remarque dans le paragraphe 10 de l’additif au rapport du Groupe d'experts, qui énonce que dans l’histoire de la RDC et quel que soit le régime ou le gouvernement en place, l’abus systématique des ressources naturelles et humaines du pays, connu pour ses immenses richesses est réduit aujourd’hui à l’une des nations les plus pauvres.  Il est malheureusement vrai, a-t-il poursuivi, que la plupart des pays africains dotés de telles richesses naturelles ont eu à souffrir une exploitation illégale de celles-ci, au détriment de ces pays et de leurs populations.  Outre la RDC, le représentant a cité la Sierra Leone ou l’Angola, où les chefs de guerre ont réalisé des profits considérables en accordant des concessions à leurs affidés pour satisfaire des besoins politiques.


Notant que le rapport du Groupe avait établi un lien entre le pillage des ressources et la continuation de la guerre en RDC, les groupes rebelles, notamment ceux qui financent leurs activités grâce à l’exploitation du coltan, de l’or ou du diamant, il a jugé plus inquiétant encore le fait que des pays voisins soutiennent ces groupes armés, essentiellement dans le but d’obtenir des concessions minières.   Il s’est dit particulièrement préoccupé par les révélations concernant le rôle du Zimbabwe ou du Rwanda au Congo, et leurs effets possibles sur les soucis de sécurité du Rwanda et du Burundi, ainsi que sur la prolongation de la guerre.


Pour le représentant, les problèmes de la RDC sont multifaces et ne peuvent être traités séparément.  La solution doit passer par une prise en compte globale des questions de paix et de sécurité dans la région des Grands Lacs et nécessitera des efforts concertés de pays voisins comme l’Ouganda, le Rwanda et le Burundi.  Seule une action collective tout au long de leurs frontières poreuses pourra permettre de contrer la contrebande.  Aussi le Nigéria soutient-il la recommandation contenue dans le rapport, qui demande aux pays de la région des Grands Lacs de mettre en place des contrôles efficaces et des mécanismes juridiques pour contrecarrer la contrebande des ressources naturelles.  Son pays, a poursuivi le représentant, soutient également la proposition de moratoire pour une période déterminée, interdisant l’achat et l’importation de produits tels que le coltan, les diamants, l’or, le cuivre, le bois ou le café provenant de régions de RDC où sont présentes des troupes étrangères.   Cette mesure devrait, selon lui, s’ajouter à l’imposition de certificats d’origine pour les ressources naturelles de ces régions, tels que préconisés par le Conseil mondial du diamant.  Le représentant du Nigéria a pressé le Conseil d’envisager l’imposition de sanctions contre tout pays violant la résolution relative à l’exploitation des ressources naturelles de la RDC.


M. MWELWA MUSAMBACHIME (Zambie) s’est dit extrêmement déçu par les commentaires du Groupe d’experts qui insinuent à tort que la Zambie tente de saper les efforts de la communauté internationale pour atteindre la paix en République démocratique du Congo (RDC).  Rappelant que la Zambie accueille en ce moment plus de 270 000 réfugiés sous la supervision du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), le représentant a contesté l’accusation selon laquelle des entraînements militaires auraient lieu dans les camps de réfugiés.  S’ils avaient lieu, ce qui n’est pas le cas, a fait remarquer le représentant, le HCR en serait informé.  Il a rappelé que la Zambie était le pays le plus affecté par l’arrivée de réfugiés venant d’Angola et de RDC, et a reconnu que des éléments armés et d’anciens combattants s’étaient joints aux réfugiés.  Cependant, a-t-il affirmé, ces combattants sont désarmés en collaboration avec le HCR, et envoyés vers le camp d’Ukwimi, loin des lieux de conflits et des autres camps de réfugiés.  Le représentant a estimé à 2 278 le nombre de ces ex-combattants, indiquant que le Groupe d’experts aurait pu obtenir cette information s’il l’avait demandée.


Le représentant s’est dit également choqué que le Groupe d’experts reproche à son pays un manque de coopération alors qu’il lui a été possible de rencontrer le Président de la République zambienne ainsi que quatre ministres.  Il a souligné que la Zambie avait toujours coopéré avec le Groupe d’experts des Nations Unies et que celui-ci avait pu se rendre où bon lui semblait et voir ce qu’il voulait.  Il a déclaré que le ton et le contenu du rapport créaient un contexte de méfiance très dommageable, et que la Zambie se sentait insultée par les accusations.  Il a demandé au Groupe d’experts de justifier les allégations contenues dans le rapport ou de revenir sur ses paroles et présenter des excuses.


M. GERHARD THERON (Namibie)a assuré que son pays soutenait le mandat du Groupe d'experts car il souhaitait fermement qu’il soit mis fin au pillage des ressources naturelles de la RDC, qu’il considère comme le carburant du conflit en cours.  Pour cette raison, la Namibie lui a apporté à deux occasions toute l’aide qu’il pouvait consentir et se félicite de voir cette bonne coopération signalée par le Groupe dans l’additif de son rapport.  Le représentant a estimé que la brutale agression de la RDC menée par le Rwanda et l’Ouganda était exacerbée par le pillage systématique des ressources naturelles effectué par les mêmes forces d’invasion.  La situation perdure malheureusement en toute impunité, a-t-il déploré, et est directement liée à l’occupation du pays.  Les pays qui ont violé l’intégrité territoriale de la RDC continuent de se défier des résolutions du Conseil de sécurité et, encore plus inquiétantes sont les informations sur le renforcement de la présence armée du Rwanda, a poursuivi le représentant namibien, évoquant une des remarques du rapport sur les avantages que le Rwanda a tiré du conflit.  En revanche, le rapport du Groupe d'experts fait la différence avec les pays qui, venant à la défense de la RDC, ont avec elle des accords économiques de coopération. 


Tout en soutenant les conclusions du rapport, le délégué a indiqué qu’il ne partageait pas ses recommandations affectant des décisions souveraines, prises entre gouvernements légitimes.  Il a précisé que, pour lui, l’idée d’un organisme chargé de revoir les accords de concession était inacceptable.  De même, le délégué namibien a regretté la réticence, selon lui, du Groupe d'experts à reconnaître que certains pays exploitent tout à fait légalement certaines ressources congolaises.  Enfin, il a critiqué la référence faite par le Groupe d’experts dans son rapport au chef de l’Etat namibien, M. Sam Nujoma.  M. Theron a rappelé que son pays avait été invité expressément par les autorités légitimes de la RDC et non pas pour l’exploitation illégale du coltan, de l’or, du cuivre ou du cobalt.  La Namibie, a-t-il ajouté, a souligné à de nombreuses reprises son respect pour la souveraineté de la RDC, pour son intégrité territoriale et pour qu’elle contrôle ses ressources naturelles.  C’est pourquoi, il a appelé le Conseil à s’assurer que les forces qui ont envahi le pays se retireront sans délai, même si cela doit exiger l’adoption de nouvelles mesures, au nombre desquelles il a cité l’obligation, pour ces pays, de réparer les préjudices causés à la RDC.


M. YOSHIYUKI MOTOMURA (Japon) a rappelé aux pays producteurs et importateurs de ressources naturelles leur responsabilité dans l'exploitation illégale de ces ressources en République démocratique du Congo (RDC).  Selon le représentant, la reconnaissance de cette responsabilité est un élément susceptible de créer un climat dans lequel la communauté internationale serait encouragée à prendre des initiatives déterminées pour mettre fin au commerce illicite des ressources naturelles.  La fin du conflit se profilant à l'horizon, le représentant a jugé important de protéger le commerce des produits de base, en arguant que ces derniers constituent bien une source importante de revenus aux fins de la reconstruction du pays.  Les mesures visant à mettre fin au trafic illicite doivent donc, a insisté M. Motomura, être conformes à la revitalisation des activités économiques en RDC.  La communauté internationale, a-t-il poursuivi, doit accorder l'attention requise à la protection de l'exploitation et du commerce des produits de base en RDC. 


Le représentant a conclu en soulignant l'importance d'une conférence internationale sur la paix et le développement dans la région des Grands Lacs.  Il a aussi souligné l'importance qu'il y a à accélérer le processus de désarmement, de démobilisation et de réintégration lancé par la Mission de l'ONU afin, a-t-il dit, de créer un environnement dans lequel les parties peuvent trouver des solutions à leurs préoccupations sécuritaires. 


M. MAHMOUD KASSEM, Président du Groupe d’experts sur l’exploitation illégale des ressources naturelles et autres richesses de la RDC, a répondu au Ministre des affaires étrangères du Zimbabwe qui indiquait que la présence des forces de son pays en armées en RDC répondait à un appel lancé aux pays de la SADC.  Toutefois, a insisté M. Kassem, si la présence de l’armée du Zimbabwe est un fardeau pour ses ressources limitées, pourquoi continue-t-elle? Pourquoi ne pas la réduire? Le Ministre, a-t-il poursuivi, a assuré que les activités de son pays en RDC sont légitimes et résultent d’accords entre pays souverains: si les activités du Zimbabwe résultent d’accords conclus avec le Gouvernement de Kinshasa, ceux-ci sont-ils légaux? Les conditions dans lesquelles ces activités ont commencé étaient-elles normales, étaient elles légales par rapport au droit congolais? Reflètent-elles des liens commerciaux bilatéraux traditionnels? La valeur obtenue en RDC par le Zimbabwe est-elle à la hauteur de son modeste investissement? La réponse chaque fois est «non», a soutenu M. Kassem, citant à l’appui des exemples circonstanciés de signatures de contrats en présence de militaires.


En ce qui concerne la valeur des investissements, a-t-il estimé, le Zimbabwe n’a présenté ni capital, ni terres, ni conseils d’administration d’entreprises.  Les activités commerciales du Zimbabwe en RDC subiraient-elles une influence négative s’il n’avait plus de présence militaire dans le pays? Les activités du Zimbabwe en RDC visent-elles à garantir la poursuite du conflit pour garantir ses activités commerciales ? La réponse est, dans les deux cas, affirmative, a répondu M. Kassem.  Il suffit de regarder les zones où sont déployées les troupes zimbabwéennes pour s’apercevoir qu’elles sont situées dans des zones stratégiques d’exploitation des ressources.  Par conséquent, a-t-il poursuivi, le Zimbabwe devrait être le premier à se féliciter d’une révision des contrats dans une atmosphère de transparence, ce qui lui permettrait, comme à la RDC, d’entreprendre des négociations commerciales saines et justes, profitables aux deux parties.


A propos de l’intervention de la Tanzanie, M. Kassem a rappelé que son délégué avait défendu la coopération de son Gouvernement avec le Groupe d'experts or, il s’est agi d’hostilité envers les enquêteurs: les fonctionnaires tanzaniens ont été activement découragés de communiquer des informations aux experts, a-t-il assuré.  Quant à la Banque de Tanzanie, il a été prouvé que certains fonctionnaires commercialisaient les diamants directement depuis les locaux de la Banque vers les marchés d’Anvers.


M. Kassem a répondu à la Zambie: évoquant l’absence de coopération des responsables de ce pays, son groupe a été surpris de constater, à Lusaka, que des informations disponibles dans les journaux ne pouvaient lui être communiqués.  De jeunes fonctionnaires ont indiqué qu’ils n’avaient pas le droit de remettre les documents demandés.  Une réunion avec le  Président Chiluba a été arrangée au dernier moment, à la hâte, après que le Groupe d'experts se soit plaint, a précisé M. Kassem.


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