AG/1080

L'ASSEMBLEE GENERALE REPREND LA SESSION EXTRAORDINAIRE D'URGENCE SUR LA QUESTION DE PALESTINE

18 octobre 2000


Communiqué de Presse
AG/1080


L’ASSEMBLEE GENERALE REPREND LA SESSION EXTRAORDINAIRE D’URGENCE SUR LA QUESTION DE PALESTINE

20001018

Réunie cet après-midi pour la reprise de sa dixième session extraordinaire d’urgence, l’Assemblée générale a poursuivi l’examen du point de son ordre du jour, intitulé “Mesures illégales prises par les autorités israéliennes à Jérusalem-Est occupée ainsi que dans le reste du Territoire palestinien occupé”.

Pour M. Nasser Al-Kidwa, Observateur permanent de la Palestine auprès des Nations Unies, l’occupation de la terre palestinienne par Israël apparaît comme un phénomène unique qui se perpétue depuis plus de 33 ans. Il a dénoncé, d’une part, l’usage excessif et injustifié de la force par les Israéliens qui a fait, en trois semaines environ, plus de 90 morts et environ 3 000 blessés palestiniens et, d’autre part, le recours aux armes lourdes et aux hélicoptères de combat. Il s’est indigné qu’Israël s’efforce d’incriminer les Palestiniens, c’est-à-dire “ceux qui ont été tués ou blessés”. L’Observateur a cependant admis que deux “erreurs” avaient été commises par les Palestiniens, l’endommagement du Tombeau de Joseph et le meurtre de deux soldats israéliens à Ramallah.

Pour sa part, le Représentant permanent d’Israël, M. Yehuda Lancry, a dit redouter que la tenue de cette session extraordinaire d’urgence, qu’il juge contraire à l’esprit de la déclaration de Charm el-Cheikh, n’aggrave la situation et ne compromette les efforts entrepris pour mettre fin à la violence. Cette session constitue une violation des règles de procédure en la matière, a-t-il dit. Il a stigmatisé le lynchage de deux réservistes israéliens, torturés, mutilés et puis tués par des manifestants.

S’exprimant en sa qualité de Président du Comité pour l’exercice des droits inaliénables du peuple palestinien, M. Ibra Deguene Ka, Représentant du Sénégal, a déclaré que les événements dont la communauté internationale est le témoin depuis le 28 septembre, sont manifestement le résultat d’actes, de mesures et de politiques de la partie israélienne qui sont en contradiction avec l’esprit de la Déclaration de principes et les accords d’applications postérieurs. Selon lui, Israël a le droit de vivre en paix et en sécurité, mais il doit relier ses exigences aux droits des autres peuples de la région de vivre aussi dans la dignité, dans la paix et le respect de leurs droits et convictions.

S´exprimant au nom du Mouvement des pays non alignés, M. Dumisani S. Kumalo, de l’Afrique du Sud, a déclaré que le Sommet de Charm el-Cheikh constitue un pas important, mais un pas seulement, sur la voie de la résolution du conflit. En ce sens, il s’est félicité de l’accord relatif au retrait des troupes israéliennes, à la levée de l’embargo contre les territoires palestiniens et à la réouverture de l’aéroport international de Gaza, confiant dans le fait que ces mesures créeraient les conditions nécessaires à une reprise rapide du processus de paix au Moyen- Orient.

L’Observateur permanent de la Palestine auprès des Nations Unies a fait usage de son droit de réponse.

Au titre de ce point, l’Assemblée était saisie d’une lettre (A/ES-10/36) du Représentant permanent de l’Iraq auprès de l’ONU qui, en sa qualité de Président du Groupe des Etats arabes pour le mois d’octobre, demandait la reprise de la dixième session extraordinaire. Il était appuyé dans sa demande par le Mouvement des pays non alignés, dont le soutien s’exprimait dans une lettre (A/ES-10/37) du chargé d’affaires par intérim de la Mission permanente de l’Afrique du Sud, en sa qualité de Président du Bureau de coordination du Mouvement des pays non alignés.

L’Assemblée poursuivra sa session extraordinaire d’urgence sur l’examen de ce point vendredi, 20 octobre, à partir de 15 heures. Le Secrétaire général de l’ONU, M. Kofi Annan, fera une déclaration et plus de quarante orateurs doivent prendre la parole. Demain matin dès 10 heures, l’Assemblée générale, en séance plénière, terminera l’examen du rapport du Conseil de sécurité.

MESURES ILLÉGALES PRISES PAR LES AUTORITÉS ISRAÉLIENNES À JÉRUSALEM-EST OCCUPÉE AINSI QUE DANS LE RESTE DU TERRITOIRE PALESTINIEN OCCUPÉ

Déclarations

M. NASSER AL-KIDWA, Observateur permanent de la Palestine, a déclaré qu’au moment où on pouvait penser que la communauté internationale était sur le point de mener à bien la décolonisation, l’occupation de notre terre palestinienne par Israël émerge comme un phénomène unique qui se perpétue depuis plus de 33 ans. Pire encore, cette occupation s’accompagne d’un comportement colonialiste évident qui se manifeste par des transferts forcés de populations vers le territoire occupé et des tentatives de colonisation de cette terre. Mais le comble est qu’à cette occupation doublée de colonialisme, vient s’ajouter l’usage excessif, injustifié et répétitif de la force par les occupants. Durant les trois dernières semaines environ, la puissance occupante a tué plus de 90 martyrs palestiniens et en a blessés plus de 3 000 dont un grand nombre est toujours dans un état grave. Un tiers de ces blessés et de ces morts sont des enfants de moins de 18 ans. Au cours de cette même période, les forces d’occupation ont utilisé des armes lourdes et des hélicoptères de combat. Pour couronner le tout, Israël ne cesse de blâmer les Palestiniens, ceux-là même qui ont été tués ou blessés.

Pour essayer de détourner l’attention de ce qui se passe dans la région, Israël a déclaré que quelques policiers palestiniens et des civils armés ont échangé des coups de feu avec les forces d’occupation israéliennes. En réalité, pas un seul coup de feu n’a été tiré du côté palestinien, au moins pendant les trois premiers jours de la campagne sanglante menée par les Israéliens. Et même après et jusqu’à ce jour, et en dépit de tout ce qui s’est passé, il n’y a pas eu d’affrontements importants ou généralisés entre la Police palestinienne et les forces d’occupation israéliennes. Il nous faut également rappeler la présence illégale des colons israéliens qui sont armés par l’armée israélienne dans des proportions bien supérieures à l’armement réduit des Palestiniens. Ces colons, qui vivent illégalement sur notre terre, ont commis de nombreuses atrocités à l’égard de notre peuple. Il faut que cela cesse et qu’ils rendent des comptes et, plus important encore, il faut mettre un terme à leur colonialisme et les amener à quitter la terre palestinienne.

M. Al-Kidwa a ensuite évoqué ce qu’il a appelé les deux erreurs commises par quelques civils palestiniens en colère, événements qui n’auraient jamais dû se produire. La première a trait au Tombeau de Joseph près de la ville de Naplouse et aux dommages qu’il a subis. Pendant les années écoulées, Israël a transformé cet endroit en place forte et durant les jours précédant son retrait de ce secteur, dix-huit Palestiniens ont été tués aux alentours, ce qui explique la réaction de colère des gens de la région. Néanmoins, nous avons clairement condamné ce qui s’est produit et avons donné des instructions immédiates pour entreprendre des réparations. Nous avons entretenu cet endroit avant et après l’occupation et n’avons pas changé de position à cet égard. Nous attendons qu’Israël fasse de même, en particulier dans le cas de la mosquée historique brûlée par les Israéliens dans la ville de Tibériade.

La seconde erreur concerne les deux soldats israéliens tués par des individus qui se sont introduits dans le poste de police de Ramallah malgré les tentatives des policiers pour les protéger. Ces individus avaient de bonnes raisons de croire que les deux soldats appartenaient à une unité militaire spéciale appelée “unité el-mustaribeen”. Cette unité a, à différentes occasions, infiltré des régions palestiniennes pour y perpétrer des actes de sauvagerie contre des Palestiniens, dont plusieurs exécutions sommaires de particuliers. Il est difficile de croire en la version israélienne qui affirme que ces deux soldats se sont perdus et sont arrivés au coeur de Ramallah, au vu de la situation actuelle et du nombre de points de contrôle israéliens autour de la ville. Malgré tout, nous avons clairement condamné l’assassinat de ces deux soldats et donné des instructions pour arrêter ceux qui sont impliqués dans cet acte illégal et incompatible avec nos valeurs.

Ces questions ne changent en rien la nature réelle de ce qui se passe, c’est-à-dire l’usage excessif et injustifiable de la force par la puissance occupante et les atrocités perpétrées par les forces d’occupation contre un peuple tout entier qui exprime sa souffrance et sa frustration face à l’occupation et tente de défendre ses lieux saints, a fait observer l’Observateur. L’Assemblée générale doit prendre en compte également, en raison de son importance et du danger qu’elle représente, la brutalité exercée par la police israélienne contre les manifestants arabes israéliens qui s’est traduite par 15 morts et des centaines de blessés.

Le Conseil de sécurité a traité avec beaucoup de sérieux les événements sanglants survenus dans le territoire palestinien occupé y compris Jérusalem, a estimé M. Al-Kidwa. Après plusieurs jours, il a adopté, en dépit des difficultés, une très importante résolution, la résolution 1322 (2000) du 7 octobre 2000. Malgré cela, la situation sur le terrain n’a pas changé et Israël ne s’est conformé à aucune des dispositions de la résolution. C’est alors qu’est survenue l’escalade de violence israélienne et notamment les bombardements à Ramallah et Gaza du 12 octobre, qui équivalaient à une déclaration de guerre au peuple palestinien. Nous nous sommes alors à nouveau tournés vers le Conseil de sécurité pour qu’il adopte immédiatement une résolution mettant fin à cette escalade et qu’il évite ainsi que toute la région tombe dans une confrontation généralisée. Malheureusement, nous avons échoué et un membre permanent du Conseil de sécurité a déclaré, à l’intérieur et à l’extérieur des Nations Unies, qu’il utiliserait son droit de veto à l’égard de quelque résolution que ce soit à ce sujet. Cela signifie clairement que le Conseil ne pourra en aucune manière agir. Le Groupe arabe et nous-mêmes n’avions plus d’autres choix que de demander la tenue d’une session extraordinaire d’urgence de l’Assemblée générale.

Le Sommet de Charm el-Cheikh et les réunions qui ont précédé, constituent des tentatives sérieuses pour remédier à la situation et peut-être à terme relancer le processus de paix, a-t-il déclaré. Ces tentatives méritent notre soutien. Il nous faut néanmoins noter qu’aucun communiqué n’a été signé à l’issue du Sommet et que certaines ambiguïtés subsistent. Nous restons également préoccupés par le fait qu’Israël n’a jamais respecté les accords passés jusqu’à présent. L’important est maintenant ce qui va se passer sur le terrain. Nous nous efforcerons de faire de ces arrangements un succès. Nous examinerons le projet de résolution soumis à l’Assemblée au regard de ce qui va se passer dans les heures à venir.

L’Observateur s’est félicité des efforts du Secrétaire général et a manifesté l’espoir qu’ils déboucheront sur la participation effective des Nations Unies à la Commission d’enquête. Il a déclaré attendre avec impatience la déclaration du Secrétaire général, vendredi prochain, devant l’Assemblée générale.

M. YEHUDA LANCRY (Israël) a déclaré que, pour la seconde fois en deux semaines, un organe des Nations Unies est amené à traiter de la situation grave qui prévaut au Proche-Orient. Il a souhaité que la déclaration adoptée cette semaine à Charm el-Cheikh permette de restaurer le calme dans la région. Cependant, il a exprimé son inquiétude quant à la tenue de cette session extraordinaire d’urgence de l'Assemblée générale qui est contraire à l'esprit de cette déclaration et qui risque d'aggraver la situation et de compromettre les efforts entrepris pour mettre fin à la violence.

Il a poursuivi en souhaitant que soit encouragé le processus de paix tout en soulignant que, au nom de son pays et de son peuple, il avait le devoir de s'attarder sur les événements des dernières semaines. Il les a qualifiés de tragédie humaine inquiétante dans la mesure où ils sont de nature à compromettre la paix et la stabilité en Israël et au Proche-Orient. Evoquant le lynchage de deux réservistes israéliens, jeudi dernier, entrés par erreur dans la ville palestinienne de Ramallah, il a déploré que ces soldats aient été torturés, mutilés puis tués par des manifestants dans les locaux de la police palestinienne. Selon M. Lancry, cet acte inqualifiable qui a eu lieu dans un des bureaux de l'Autorité palestinienne, ne peut que contribuer à saper la confiance mutuelle que les deux parties avaient mis tant d'années à consolider.

Le représentant a constaté par ailleurs une divergence dans les positions israéliennes et palestiniennes au sujet des pertes en vies humaines. Alors qu’il exprimait sa profonde tristesse devant le Conseil de sécurité la semaine dernière, suite au décès de nombreux palestiniens, son homologue palestinien, M. Nasser Al- Kidwa, a-t-il ajouté, a pour sa part tenu, dans une déclaration reprise par Reuters, des propos justifiant la mort des soldats israéliens à Ramallah. La paix ne peut s'établir avec la perpétuation de tels actes de violence. Le représentant a ensuite rappelé, à propos du lynchage des deux soldats israéliens, que ce n'était pas la première fois que des membres de l'Autorité palestinienne toléraient, encourageaient, voire participaient à des actes de violence envers les Israéliens, rappelant que même des membres de la Police palestinienne étaient impliqués dans plusieurs des dernières effusions de sang.

Il a déclaré que les Israéliens et les Juifs du monde entier avaient été profondément choqués par la destruction du Tombeau de Joseph, lieu saint tant pour les juifs que pour les musulmans, et situé dans la ville palestinienne de Naplouse, et que son pays considérait les autorités palestiniennes comme responsables de cet acte outrageux. Il a regretté que, au lieu de prévenir la violence, l'Autorité palestinienne contribue à attiser les tensions en utilisant la télévision et la radio comme des vecteurs d'incitation à la violence contre le peuple israélien. Il a notamment cité M. Assan Asfour, un Ministre de l'Autorité palestinienne qui appelait, le 9 octobre, "les Palestiniens (selon Reuters) à prendre les colons comme cibles". Il a regretté que l'Autorité palestinienne ait procédé la semaine dernière à la libération de prisonniers condamnés par les tribunaux palestiniens pour des actes terroristes perpétrés contre Israël.

Il a en outre déclaré que des membres du Hamas et du Djihad islamique avaient été admis à participer à une réunion du Cabinet palestinien, un acte qui légitime leur engagement à privilégier le terrorisme comme alternative aux négociations de paix. Il a déclaré que ces actions étaient inquiétantes dans la mesure où elles traduisent un changement d'attitude de la part des autorités palestiniennes qui envoient ainsi un signal clair à leur peuple, à Israël, et au monde entier selon lequel ils ont opté pour la violence. Il a rappelé que seule une solution négociée et acceptable par les deux parties pourraient constituer les fondements d'une coexistence.

Il a poursuivi en soulignant que, au cours des événements des dernières semaines, Israël avait fait preuve de la plus grande retenue dans ses réactions face aux provocations palestiniennes et a réfuté les allégations selon lesquelles les Israéliens avaient fait un usage excessif de la force. Rappelant le lynchage des deux soldats israéliens, il a déclaré qu'aucun Etat au monde ne pourrait tolérer un tel déchaînement de violence contre ses citoyens sans réagir et a ajouté que le bombardement du siège de la Police palestinienne à Ramallah, consécutif à ce lynchage, avait été mené en minimisant le plus possible les pertes en vies humaines, déclarant que les forces israéliennes avaient prévenu les autorités palestiniennes pour qu'elles évacuent les locaux. Il a regretté que l'Observateur permanent de la Palestine ait, dans sa lettre datée du 12 octobre 2000, qualifié ces représailles de "déclarations de guerre" et fait référence à des "lourdes pertes en vies humaines" alors que, selon lui, aucun Palestinien n'a été tué dans le bombardement du siège de la Police palestinienne à Ramallah. Il a ajouté qu'Israël n'avait aucun intérêt à déclarer la guerre aux Palestiniens et causer des dommages à ses voisins et que ces accusations de M. Al-Kidwa n'avaient aucun fondement réel. Il a poursuivi en déclarant qu'Israël avait même permis à des pays avec lesquels il n'entretient pas de relations d'acheminer de l'aide humanitaire au peuple palestinien et que son seul souci était de maintenir l'ordre dans la région, ceci en conformité avec les règles de droit international.

Il a ensuite rappelé que cette escalade de la violence intervenait au moment où Israël avait fait des concessions sans précédent au Sommet de Camp David, au cours duquel M. Ehud Barak s'était engagé à tout faire pour finaliser un accord avec les Palestiniens. Il a regretté que l'Autorité palestinienne ait répondu à ces concessions en recourant à la violence et à la provocation, en violation de la Déclaration trilatérale adoptée à l'issue du Sommet dans laquelle les deux parties s'engageaient à "créer un environnement propice à la négociation et dégagé de toute pression, intimidation ou menaces de recours à la violence".

Le représentant a poursuivi en considérant que la convocation de la présente session extraordinaire d'urgence constituait une violation honteuse des règles de procédures de l'Assemblée générale contenues dans les annexes de la résolution 377A du 5 novembre 1950, relatives aux sessions spéciales d'urgence dont au moins deux des conditions ne sont pas remplies en l'occurrence.

Il a encouragé le Président Arafat à appeler son peuple et ses forces de sécurité à mettre un terme à la violence et aux provocations, à désarmer les milices, à arrêter les membres d'organisations terroristes, à cesser de diffuser des appels à la violence dans les médias et à prendre des mesures concrètes pour restaurer la paix et la sécurité dans la région, rappelant que seule une solution négociée, dans une atmosphère dégagée de toute violence, pouvait permettre de mettre un terme à la violence.

Poursuivant son intervention en français, M. Lancry a qualifié la résolution annoncée de fortement alignée où se distillent, dans une conviction troublée, l'arbitraire, l'inique et le partial, car elle stipule la condamnation obstinément unilatérale d'Israël sans souffler mot sur aucune forme d'excès palestinien. Déplorant le silence résolu de la résolution sur la barbarie humaine vécue à Ramallah, comme sur l'atteinte à des Lieux saints multiséculaires à Naplouse et à Jéricho, il a ajouté que ce silence semblait être porteur d'une sourde reconnaissance aux Palestiniens et à leur leadership et décernait un brevet de respectabilité à l'instinct primaire et au déchaînement profanateur. Il a poursuivi en déclarant que, manifestement, ce silence consoliderait le Président Arafat mais apparaissait à son pays comme une source de nuisance à l'esprit de paix et de réconciliation. Il a poursuivi son propos en rejetant catégoriquement le projet de résolution, considérant qu'il s'inscrivait, dans sa forme comme dans son fond, à contre-courant de la paix.

Il a déclaré que les acquis politiques concrets issus des Accords d'Oslo, comme les linéaments prometteurs d'un statut final conçu à Camp David et le vécu quotidien tissé de peuple à peuple, sept années durant, ne pouvaient s'anéantir dans la tragédie des trois semaines écoulées. Il a conclu en déclarant que, plus qu'une résolution, c'était à leur propre recours et à leur commun secours que devaient s'acheminer Palestiniens et Israéliens, considérant que c'était à travers les résonateurs d'une récitation plurielle de la paix que devait s'articuler et se conjuguer la parole de paix israélo-palestinienne.

M. IBRA DEGUENE KA (Sénégal), en sa qualité de Président du Comité pour l’exercice des droits inaliénables du peuple palestinien, a rappelé que depuis plus de deux semaines, des violences meurtrières font rage dans toutes les zones palestiniennes et des affrontements sanglants n’ont pu être évités après la visite provocatrice au sanctuaire d’Haram al-Charif, de M. Sharon, accompagné d’un groupe de membres de la Knesset appartenant au Likoud, escorté d’un fort contingent d’agents de la sécurité et de policiers israéliens. Effusions de sang, blessures graves, un bilan tragique: plus de 110 morts, pour la plupart des Palestiniens, et quelque 3 000 blessés, tel est le spectacle horrifiant qui hante encore nos mémoires, avec le massacre d’enfants palestiniens, dont certains avaient à peine deux ans, a constaté le Président du Comité. Les forces de défense israéliennes ont réagi contre les manifestations avec une force disproportionnée, brutale et indiscriminée, a-t-il ajouté.

L’autre spectacle, extrêmement troublant aussi, se déroulait avec des colons juifs armés, autorisés à se déployer dans les villes et les villages contrôlés par l’Autorité palestinienne et pouvant utiliser, à leur guise, des armes à feu contre des populations sans défense. Pour ajouter aux difficultés des Palestiniens, le Gouvernement israélien aurait procédé à un bouclage systématique du territoire palestinien, contraignant trois millions de Palestiniens à ne plus se déplacer, donc à ne plus travailler. Ces mesures sont considérées par M. Deguene Ka comme illégales et destinées à infliger un châtiment collectif à un peuple, tout en violant les droits de l’homme du peuple palestinien.

Selon le Président du Comité, les événements dont la communauté internationale est le témoin depuis le 28 septembre sont manifestement le résultat d’actes, de mesures et de politiques de la partie israélienne qui sont en contradiction avec l’esprit de la Déclaration de principes et les accords d’applications postérieurs. M. Deguene Ka a tenu à souligner qu’Israël demeure rigoureusement lié par ces accords, de même que par les dispositions de la quatrième Convention de Genève relative à la protection des civils en temps de guerre et les autres normes de droit international.

Le Comité pour l’exercice des droits inaliénables du peuple palestinien a réagi à ces événements en adoptant une déclaration sur la situation dans le territoire occupé de Palestine dans laquelle il réaffirme que l’ONU doit continuer à assumer une responsabilité permanente en ce qui concerne tous les aspects de la question de Palestine, y compris Jérusalem, jusqu’à ce que cette question soit réglée de manière satisfaisante, conformément aux résolutions de l’Organisation. Le Comité partage par ailleurs la grave préoccupation de la Communauté internationale sur les effets des affrontements et la crainte qu’ils échappent à tout contrôle et aient des conséquences imprévisibles. Il demande aux parties de faire preuve d’un maximum de retenue dans leurs actions sur le terrain et de privilégier le retour à la table des négociations. Selon M. Deguene Ka, le moment est venu – et c’est peut-être le moment de la dernière chance – pour que la Communauté internationale dans son ensemble se mobilise derrière les parties concernées pour les encourager au dialogue et à la réconciliation.

Israël a le droit de vivre en paix et en sécurité, mais il doit relier ses exigences aux droits des autres peuples de la région de vivre aussi dans la dignité, dans la paix et le respect de leurs droits et convictions, a encore affirmé le Président du Comité. Israël, en tant que Puissance occupante, doit veiller au respect des Lieux saints, doit garantir la protection des Palestiniens et de leurs biens dans le territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem, et doit s’employer sans retard à appliquer intégralement et de bonne foi les accords déjà conclus avec les autorités palestiniennes en vue de parvenir à un règlement juste, complet et durable fondé sur les résolutions 242 (1967) et 338 (1973) du Conseil de sécurité, a-t-il ajouté. Laisser la chance offerte par le récent Sommet de Charm el-Cheikh nous échapper serait simplement déraisonnable et irresponsable de la part de tous ceux qui lucidement, courageusement et patiemment ont conçu et mis en place le processus de paix depuis la Conférence de Madrid en 1991, a-t-il conclu.

M. DUMISANI S. KUMALO (Afrique du Sud), s’exprimant au nom du Mouvement des pays non alignés, a déclaré que la question de la Palestine relève de la responsabilité permanente de l’Organisation des Nations Unies, jusqu’à ce qu’elle soit résolue. Le Mouvement déplore aussi bien l’usage excessif de la force par l’Armée israélienne que les pertes inacceptables en vies humaines, les nombreux blessés et les dégâts matériels. Le Sommet de Charm el-Cheikh, a-t-il dit, constitue un pas important, mais un pas seulement, sur la voie de la résolution du conflit. Dans ce contexte, M. Kumalo s’est félicité de l’accord relatif au retrait des troupes israéliennes, à la levée de l’embargo contre les territoires palestiniens et à la réouverture de l’aéroport international de Gaza, estimant que

ces mesures créeraient les conditions nécessaires à une reprise rapide du processus de paix au Moyen-Orient. Par ailleurs, il s’est déclaré convaincu qu’une commission impartiale visant à établir les faits et travaillant en coopération avec l’ONU pourrait empêcher que de tels événements ne se produisent à nouveau. Il a également demandé l’application complète et rapide de la résolution 1322 (2000) du Conseil de sécurité et prié le Conseil de rester saisi de cette affaire conformément à sa responsabilité principale de maintien de la paix et la sécurité internationales.

Par ailleurs, M. Kumalo a réaffirmé, d’une part, que la quatrième Convention de Genève relative à la protection des civils en temps de guerre doit être appliquée et, d’autre part, qu’à Genève l’année dernière, les parties contractantes à cette Convention ont réaffirmé qu’elles sont collectivement responsables d’assurer son respect.

Aux yeux du Mouvement des pays non alignés, la question de la Palestine se trouve au coeur du conflit du Moyen-Orient. L’exercice du droit inaliénable du peuple palestinien à l’autodétermination et à l’indépendance est essentiel à l’établissement de la paix dans la région. C’est pour cette raison que le Mouvement invite de façon urgente toutes les parties à cesser les hostilités, à renouer le dialogue et à faire tout ce qui est en leur pouvoir pour mener des négociations pacifiques. M. Kumalo a appelé l’OLP et Israël à respecter et à mettre en oeuvre les engagements pris lors de la Conférence de Madrid. Il a par ailleurs rappelé la nécessité de bâtir une paix juste et globale sur la base des résolutions du Conseil de sécurité 242 (1967) et 338 (1973).

Droit de réponse

M. NASSER AL-KIDWA, Observateur permanent de la Palestine, a déclaré que l’Assemblée a entendu la déclaration qualifiée de “regrettable” du représentant israélien témoignant des mêmes méthodes que celles pratiquées par ce pays dès qu’il s’agit de cette question. Le représentant israélien a notamment tenté d’utiliser certains arguments discutables dans son intervention, insinuant par exemple que la Tombeau de Joseph était plus important qu’une mosquée. Il a fourni des détails, comme des déclarations de personnes inconnues, constituant autant d’attaques spécifiques contre des personnalités spécifiques avec des exemples hors contexte. La déclaration faite par l’Ambassadeur Al-Kidwa n’a par ailleurs été citée que partiellement par le représentant israélien qui est coutumier de ces pratiques, même sur CNN.

M. Lancry nous induit délibérément en erreur, il donne de fausses informations dont nous n’avons pas besoin, a affirmé l’Observateur de la Palestine. Selon lui, les actes israéliens ne correspondent pas à une déclaration de guerre au peuple palestinien. Quand faut-il considérer qu’Israël nous a déclaré la guerre quand nous voyons le bombardement du siège de l’Autorité palestinienne, par exemple, a-t-il demandé. L’Observateur de la Palestine a également tenu à dire que sa mission n’avait pas d’informations sur les pertes en vies humaines au moment du bombardement de ses positions sur le terrain. Il a encore cité le représentant israélien selon lequel personne ne pourrait supporter les attaques dont font l’objet ses citoyens dans le territoire palestinien. L’Observateur de la Palestine a alors interrogé «Pourquoi cette occupation, et qui sont ces citoyens?».

Il a attiré l’attention sur les allégations israéliennes selon lesquelles une opération de force des Israéliens était fondée alors que des rapports officiels montrent que les forces israéliennes ont agi comme des forces paramilitaires entraînant la mort de Palestiniens sur le terrain. Des centaines de milliers de personnes ont vu à la télévision les violences perpétrées par les Israéliens. S’il existait un tribunal international il devrait juger de ces crimes commis contre des civils palestiniens. L’Observateur a ensuite indiqué qu’une rumeur circule selon laquelle Israël a enlevé plusieurs citoyens palestiniens dans la ville de Ramallah. Il a demandé pour conclure que la lumière soit faite sur ce point.

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