Chronique ONU
La Grenade se reconstruit : Après l'ouragan
Par Kari Coley

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L'article
Le 7 septembre 2004, lorsque que l'ouragan Ivan a balayé la Grenade, île située dans les Caraïbes, Yvonne Felix a pratiquement tout perdu. Mais à peine un an après, grâce à un projet de réadaptation professionnelle, elle est menuisier certifié et participe à la construction de maisons pour les familles qui se sont retrouvées sans abri après le passage de l'ouragan. Pour elle, ce cours de formation de menuiserie, organisé par le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), a « changé sa vie », lui permettant de « sortir d'une situation désespérée pour apprendre un nouveau métier ».

Photos/Ulugzod A. Umarov, PNUD/UNV

Elle a participé à la construction de nouvelles maisons à Café Beau Hill, à Saint-Georges, destinées à trois familles à revenus bas : deux mères célibataires sans emploi avec des enfants en bas âge et une famille dirigée par une femme de 67 ans qui reçoit une aide du gouvernement. Ces familles, comme de nombreuses autres à la Grenade, ont eu leurs maisons entièrement détruites par l'ouragan et, depuis, vivent tant bien que mal, aidés par des amis et leur famille. Avec le soutien des apprentis en menuiserie et de bénévoles du Windward Island Caribbean Youth Group, les trois nouvelles maisons conçues pour résister aux ouragans et aux tremblements de terre ont été terminées à la mi-juin 2005. « J'ai apporté bonheur et confort à ces familles qui savent qu'elles ont dorénavant un endroit qui est le leur », explique Yvonne Félix.

L'une des bénéficiaires est Mme Hosford, 34 ans, mère célibataire avec cinq enfants et l'une des familles les plus pauvres de Café Beau Hill. Elle raconte qu'à l'annonce de l'ouragan, elle a quitté sa maison de bois pour se réfugier chez une voisine dont la maison en béton était plus solide. Après le passage de l'ouragan de catégorie 4 qui a détruit sa maison, elle a construit un abri temporaire avec l'aide de ses voisins, et n'avait aucune idée comment elle allait nourrir sa famille. Après avoir consulté l'Office du logement de la Grenade, le PNUD lui a fait don d'une nouvelle maison dans laquelle elle s'est installée et qui a résisté sans problème à l'ouragan Emily de catégorie 2 en juillet.

L'ouragan Ivan a fait 37 morts et causé des dégâts s'élevant à 900 millions de dollars US, soit 200 % du produit intérieur brut (PIB) du pays, et détruit 90 % des habitations, laissant la population de l'île anéantie et vulnérable. Selon une évaluation des dégâts réalisée par l'Organisation des États des Caraïbes orientales (OECO) et la Commission économique des Nations Unies pour l'Amérique latine et les Caraïbes, il fallait reconstruire environ 10 000 maisons et en réparer 22 000 autres. En mars 2005, seulement 23 maisons avaient été reconstruites, 50 % étant en cours de construction, forçant des milliers de personnes à vivre dans des abris temporaires et des conditions insalubres, dépendants de l'aide publique. Avec le soutien des Volontaires des Nations Unies, la plupart des projets de reconstruction menés par le PNUD étaient dans leur phase finale au début de mai et d'autres activités de reconstruction étaient en bonne voie pour être terminées le 31 octobre 2005. Le Ministre des Finances a exprimé sa reconnaissance au PNUD « pour sa contribution remarquable à la reconstruction de la Grenade après le passage de l'ouragan Ivan ».

En plus des habitations, l'ouragan a causé des dégâts importants à l'infrastructure et aux ressources naturelles. La Grenade a perdu la majorité de ses forêts, entraînant une perte de la biodiversité et des risques de glissements de terrain et d'érosion. Des services comme l'eau, l'électricité et les liaisons téléphoniques ont été gravement endommagés; les champs ont été dévastés, détruisant des moyens d'existence du jour au lendemain. Le secteur de l'éducation a perdu 75 écoles primaires et secondaires, seulement deux écoles étant dans des conditions de fonctionnement. Le secteur industriel a subi de lourdes pertes dues à la destruction de l'infrastructure des locaux et des stocks, et plusieurs entreprises ont été forcées de fermer avec peu de chances de rouvrir dans un avenir proche.

Les piliers économiques et les principales sources d'emploi de la Grenade - l'agriculture et le tourisme - ont été sérieusement touchés, 60 % à 90 % des produits agricoles ayant été détruits et 60 % des hôtels ayant été endommagés. Dans ces secteurs importants, ces pertes ont un effet triple se traduisant par une augmentation des niveaux de pauvreté et de chômage et une diminution des opportunités pour assurer les moyens d'existence. De plus, l'activité économique, qui devait progresser de 4,7 % en 2004, a connu un déclin estimé à - 1,7 %, entraînant une baisse du PIB de 6 points.

En réponse à la dévastation causée par Ivan, le système des Nations Unies et ses partenaires ont lancé à la Barbade, le 25 septembre 2004, un appel éclair, demandant à la communauté internationale 27,6 millions de dollars pour assurer des services d'assistance d'urgence. Les fonds étaient en priorité destinés à la coordination de l'aide, à la reconstruction des abris, à l'amélioration des secours, aux communications, à l'information publique, au rétablissement des moyens d'existence et de la gouvernance, ainsi qu'au soutien à long terme au redressement, y compris la réduction des risques dans le cadre de la planification du relèvement. L'aide humanitaire offerte par les organisations non gouvernementales (ONG) et le secteur privé a permis la distribution de nourriture, d'eau potable et de matériaux de construction, et le soutien d'un programme « nourriture contre travail » pour le retrait des débris. L'assistance d'urgence est principalement destinée aux plus vulnérables, y compris les personnes âgées, les enfants et les mères qui allaitent, leur assurant en priorité de la nourriture et un lit.

Suite à l'ouragan, l'équipe des Nations Unies pour l'évaluation et la coordination en cas de catastrophes a été immédiatement déployée à la Grenade à la mi-septembre afin d'établir un centre de coordination international de l'ONU et de soutenir la coordination des secours. À la fin septembre, l'équipe a confié les opérations au PNUD chargé d'aider le pays à protéger la vie de la population et à garantir les moyens d'existence.

Un nombre de projets de relèvement et de développement prioritaires ont été mis en ouvre par le PNUD, en collaboration avec d'autres organisations et institutions.
  • Dans le cadre du projet « Soutien aux activités d'urgence et de redressement à la Grenade », une analyse complète, secteur par secteur, des conséquences de l'ouragan Ivan a été effectuée; une évaluation des dégâts causés aux habitations a été réalisée par des conseillers de la région des Caraïbes, conduisant à la mise au point de méthodes pour améliorer la conception des petites habitations pour résister aux catastrophes naturelles; et un programme de formation a été proposé avec la participation de 181 artisans expliquant l'utilisation de méthodes de construction adéquates pour résister aux ouragans - une initiative qui s'est révélée si fructueuse que d'autres pays de la région ont souhaité suivre une formation similaire.


  • Dans le cadre du projet « Système d'informations des ressources et des communication de la communauté », des espaces dotés d'ordinateurs ont été aménagés pour former la communauté aux technologies de l'information et des communications (TIC), y compris à l'accès à Internet. Le programme est destiné aux jeunes adultes et aux mères célibataires afin d'améliorer leur accès à l'information, à l'éducation et à la formation ainsi que leurs connaissances et leurs compétences dans l'utilisation des TIC en tant qu'outil permettant d'éradiquer l'extrême pauvreté et améliorer leur niveau de vie. Il sera proposé à d'autres communautés rurales au cours de l'année.


  • Un autre projet, « Assurer le redressement et le développement rural à la Grenade », a été lancé pour renforcer les institutions nationales, qui jouent un rôle important dans le redressement et la reconstruction du pays. Il permet de soutenir et de renforcer le dialogue au sein de la communauté ainsi que la participation à la reconstruction nationale et à la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement. Il permet également d'entreprendre une enquête sur les conditions de vie et d'assurer la protection des moyens d'existence, en particulier pour les jeunes des communautés rurales, et spécialement les femmes.


  • Le projet « Restaurer les moyens d'existence durables à la Grenade », créé en décembre 2004 avec un budget de 1,2 million de dollars, était destiné à créer des emplois et à générer des revenus avec l'engagement actif de la société civile et des ONG. Les accords entre le PNUD et trois ONG - Grenada Save the Children, Agency for Rural Transformation et Grenada Community Development Agency - ont permis de réaliser plusieurs sous-projets, comme le nettoyage des plages et la restauration de l'environnement, le déblaiement des terres et l'élevage de volailles, la réduction des risques d'amiante, la remise en état des centres communautaires, l'acquisition de compétences et la construction de capacités. Les points forts du projet comprennent l'embauche de dix personnes sans emploi, la moitié étant des femmes, pour nettoyer les plages Grand Anse et Morne Rouge, la construction de coopératives pour les éleveuses de volailles ainsi que la réparation, la protection et l'équipement de plusieurs centres communautaires pour servir d'abri. Le programme de formation auquel Yvonne Felix a participé a été un succès : sept jeunes femmes et cinq jeunes hommes ont obtenu un diplôme de menuiserie et six sont déjà employés par l'Office du logement de la Grenade.


  • Les progrès accomplis dans le cadre de la reconstruction du pays n'auraient pas été possibles sans le financement et l'aide de la communauté régionale, qui ont complété les efforts de redressement et de reconstruction de la communauté internationale. Le rétablissement des moyens d'existence par les programmes « nourriture contre travail », de formation et de développement des capacités ainsi que par la reprise du secteur de l'éducation avec la réouverture et un fonctionnement partiel des écoles, sont des signes qui indiquent que l'île est sur la voie du relèvement.

    Cependant, le double défi de traiter les effets psychologiques de cette crise, que le gouvernement tente de faire par la création d'un programme visant à promouvoir le bien-être national, et la nécessité d'accélérer les travaux de réparation et de reconstruction des habitations continuera d'être une préoccupation pressante pour l'avenir de l'île. On ne peut qu'espérer que les Grenadiens se remettent vite de cette expérience et retrouvent rapidement une vie normale.
    Biographie
    Kari Coley est associée de programme à l'Unité de réduction des risques pour l'Amérique latine et les Caraïbes, Bureau du PNUD pour la prévention des crises et le rétablissement. Elle a préparé cet article avec l'aide de Rebecca Arias, représentante résidente, PNUD Barbade et OECO; d'Angeles Arenas, conseillère régionale en matière de réduction des catastrophes, PNUD; de Janette Headley et d'Ian King, directeur de projet, Initiative de gestion des risques dans les Caraïbes, PNUD Barbade et OECO.
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