Chronique ONU
Conversation
Les Messagers de la paix parlent de leur travail

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L'article
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Lors de ce cinquantième anniversaire de la Cloche de la paix, quelles sont vos impressions en tant que Messagers de la paix ?
Mme Cataldi : C'est aujourd'hui l'ouverture de l'Assemblée générale et, en cette journée de célébration de la paix, il est ironique que les débats porteront, en grande partie, sur la guerre. En ce sens, faire sonner la cloche m'apporte un sentiment d'espoir.

Mme Goodall : Pour moi, la cloche symbolise le fait que tous les gens du monde veulent la paix. Entendre la cloche sonner aujourd'hui, à une époque où il y a tant de dangers et de conflits était un peu incongru. Aujourd'hui, des jeunes de notre organisation dans soixante-sept pays font voler d'immenses marionnettes représentant des colombes de la paix et nous espérons que des milliers d'enfants y participeront. Nous tentons d'entretenir la flamme de l'espoir - l'espoir pour l'avenir - et la cloche nous aide à le faire.

Comment l'éducation pour la paix peut-elle contribuer à développer une culture de la paix ?
Mme Goodall : Après le 11 septembre, nous avons réuni un groupe de jeunes de tous les horizons, y compris des Arabes et des Musulmans, et lancé les « Initiatives de paix » qui s'étendent aujourd'hui à nos groupes dans le monde entier. Nous essayons d'aider les jeunes à comprendre les autres cultures, les autres religions et les autres groupes ethniques, surtout la religion parce qu'elle suscite tellement de divisions.

Mme Cataldi : Je me souviens avoir visité un jour un camp de réfugiés dans le sud du Soudan qui avait un programme de paix et de communications, ce qui est très important, parce que les gens qui sont là ont été personnellement touchés par la guerre. J'ai été beaucoup impressionnée par ce programme, par les femmes et par les gens. J'ai donné une conférence de trois jours sur les femmes et la justice, et cela m'a fait penser aux Nations Unies. La crise au Darfour, par exemple. L'ONU se sent impuissante parce qu'en tant que structure elle n'est pas vraiment apte à prévenir la guerre. Comment sauvegarder la paix quand il y a la guerre ? Mais cette conférence m'a rappelé que dans une situation d'après-guerre, nous avons besoin de l'ONU. Cette organisation composée d'institutions et d'organismes a les moyens de remettre rapidement les structures en place. C'est important. Peut-être que l'ONU est inefficace à gérer la guerre en Irak, mais dans les situations d'après-conflit, c'est ce qu'il y a de mieux.

Le sens de votre mission a-t-il changé ? Avez-vous recentré vos énergies sur de nouveaux domaines du maintien de la paix ?
Mme Goodall : Nous avons participé à des projets d'activités sportives, en particulier dans les camps de réfugiés. Je me suis recentrée sur cette initiative de paix, développant davantage ce programme pour les jeunes, parce qu'il faut leur donner espoir. Regardez le taux de suicide. Les jeunes sont désespérés pour des raisons diverses : la guerre, la dégradation de l'environnement, la criminalité ou la drogue. Partout ils sont confrontés à des problèmes et s'ils n'ont aucun espoir, ils ne peuvent pas aller de l'avant ou voir qu'ils peuvent faire quelque chose pour changer la situation. Et là, il n'y a pas d'espoir. Pourquoi avoir mis des enfants au monde si nous ne faisons pas notre possible pour les aider ? Non seulement leur donner un sentiment d'espoir, mais faire en sorte que ce sentiment soit réel, leur donner les moyens d'agir, de changer - c'est ce à quoi nous nous employons.

Pourquoi votre programme pour les jeunes s'appelle-t-il Racines et bourgeons ?
Mme Goodall : Les racines créent une fondation solide. Cependant, les pousses semblent très fragiles pour atteindre la lumière; mais elles peuvent passer à travers des murs de briques. Ces murs de briques sont tous les problèmes que nous avons causés à notre planète. Le message est que vous pouvez contribuer à améliorer le monde. Chaque groupe choisit trois sortes d'activités : pour le bienfait de la communauté locale, pour le bienfait des animaux et pour le bienfait de l'environnement - et ce sont des activités pratiques. Les enfants choisissent eux-mêmes un projet. Personne ne leur dit ce qu'il faut faire. Les programmes fonctionnent bien dans chacun des quatre-vingt pays. Ils ont été créés en premier en République unie de Tanzanie qui est un bastion, mais ils existent également au Congo, en Afrique du Sud, se développent au Kenya et débutent au Cameroun. J'ai travaillé en Afrique toute ma vie. L'un de nos programmes, appelé Tacare, vise à améliorer la vie des villageois qui habitent dans des régions déshéritées. On ne peut sauver l'environnement si les gens vivent dans une pauvreté extrême. L'objectif de ce programme est de les responsabiliser. Cela a très bien marché en Tanzanie. Nous essayons d'améliorer la vie des gens en octroyant des bourses d'études aux jeunes filles douées ou en développant des projets de microcrédit pour que les femmes puissent démarrer leur entreprise.

Comment pouvez-vous contribuer à connecter le local au mondial ? Vos expériences vous ont-elles donné des idées sur la manière d'améliorer les choses ou de les faire différemment ?
Mme Goodall : En tant que messagère de la paix, je suis amenée à voyager dans le monde et donc à établir des liens entre les pays. Nous avons créé des programmes « partenaires en compréhension » qui réunissent des jeunes et les responsabilisent. Par exemple, le partenariat avec le réseau Global Youth Action, présent dans 170 pays, a permis de faire connaître le programme Racines et bourgeons partout dans le monde, éduquant les jeunes et leur donnant les moyens de créer leurs projets et de partager leurs objectifs. Nous avons aidé à construire ces liens, mais il nous faut toucher les zones plus sombres dont personne ne parle.

Mme Cataldi : Un autre aspect de mon travail consiste à encourager les médias à aborder les sujets tombés dans l'oubli. L'Afghanistan, par exemple. Dans ce pays, tout le monde se plaint d'avoir été oublié. L'autre jour, j'ai rencontré une journaliste qui était venue uniquement pour couvrir les élections et qui repartira aussitôt après.

M. Ali, vous vous êtes également rendu en Afghanistan. Comment ce voyage a-t-il affecté votre travail de messager de la paix ?
Mme Ali : M. Ali veut dire qu'à titre de messager de la paix, vous êtes amené à vous rendre dans des pays comme l'Afghanistan. Mohammed y est allé juste après la guerre et a vu l'ampleur du désastre. Où que vous regardiez, ce ne sont que des ruines. Et je suis sûre que cela n'a pas changé. Ces gens vivent au milieu des ruines et dans la poussière. Et, comme l'a dit Mme Cataldi, vous allez en Afghanistan, vous organisez des élections et ensuite ? Ces gens ont été abandonnés, et nous faisons la même chose dans trop de pays. Les déplacements de Mohammed sont limités à cause de sa santé et de sa disponibilité mais quand il se déplace, il part plein de détermination, de résolution et de conviction pour apporter aux gens quelque chose de concret, pas seulement des promesses, ce qui est malheureusement trop souvent le cas. Comme vous l'avez dit, ce rôle d'ambassadeur de la paix est aujourd'hui encore plus important qu'il ne l'était il y a quatre ans en raison des événements qui sont survenus entre-temps. Il nous faudrait peut-être commencer à regarder chez nous, aux États-Unis, et voir de plus près ce qui s'y passe, parce que le travail que nous accomplissons dans le monde, nous devons aussi le faire ici : promouvoir la tolérance pour que les peuples de différentes origines ethniques et religieuses coexistent dans un pays qui a été fondé sur ce principe même. Nous avons encore du pain sur la planche.

Mme Goodall : J'aimerai ajouter ceci : en Afrique, dans notre programme Racines et bourgeons, les jeunes qui vont à l'école secondaire ou à l'université se rendent dans les villages pour parler aux élèves - ce sont eux que les plus jeunes écoutent. Ils parlent du VIH/sida et peuvent mentionner les préservatifs et le « pénis ». Si c'est un adulte, ils ricanent et n'écoutent pas. Mais si c'est un garçon un plus âgé qu'eux, ils changent d'attitude. Nous tentons de travailler avec la Banque mondiale pour fournir des autocars aux équipes médicales afin qu'elles puissent aller dans les régions rurales expliquer aux gens les traitements simples qui existent et parler de la prévention. Mme Cataldi : Quand, en 1992, je suis allée en Somalie avec Audrey Hepburn, je me souviens que les gens me demandaient : « Est-ce qu'Audrey est actrice ? » Beaucoup ne savaient pas qu'elle était une star, mais elle laissait une impression telle que partout où elle allait les gens l'interpellaient : « Audrey, Audrey, Audrey ». Tout le monde se souvient d'elle, non pas parce qu'elle était connue mais pour ce qu'elle a fait.
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