Chronique ONU
Travailler ensemble
Les jeunes adeptes de la technologie
Qui sont-ils ? Où vont-ils ? Pourquoi ce phénomène est-il important ?

Par Joyce Malyn-Smith

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L'article
Cet article fait partie d'une série qui traitera les nombreus aspects des partenariats soutenus par le Fonds des Nations pour les partenariats internationaux (FNUPI). Des partenaires du secteur privé et de fondations privées expliqueront comment les partenariats avec l'ONU sont créés et l'impact qu'ils ont dans la société.
Photo reproduite avec l'autorisation d'Adobe Education
« L'Initiative Power Users vise à comprendre qui sont ces enfants qui ont développé des compétences technologiques sophistiquées. C'est un exemple de changement de mode d'apprentissage, un défi pour les écoles. Cela soulève d'importantes questions pour les éducateurs. Le défi de l'Initiative consistera à trouver la manière de traduire la recherche à long terme en un flux continu d'information afin d'informer les ministères de l'éducation pour qu'ils mettent en place une politique de l'éducation. »

-Dr. Ulf Lundin
directeur exécutif d'European Schoolnet, au SMSI, Genève, 2003
Qui sont ces nouveaux technomanes ? Ce sont des jeunes des pays en développement et des pays développés qui ont accès à la technologie chez eux, à l'école, dans les télécentres, dans les centres de technologie communautaires ou dans les cybercafés. Ils jouent aux jeux vidéo, utilisent la messagerie instantanée, écoutent de la musique et font leurs devoirs, accomplissant toutes ces tâches en même temps, passant d'une activité à l'autre sans aucun effort. Ils recherchent des informations, apprennent ce qu'ils veulent savoir, et quand ils le veulent, afin de satisfaire leurs besoins et leurs intérêts au moment voulu. Ils sont sollicités pour programmer des magnétoscopes, pour éliminer des « bugs » des logiciels et dépanner le matériel et fournissent des conseils lors de l'achat de technologies. En somme, ils sont nos conseillers en technologie.

Après dix ans de travail consacrés à donner aux jeunes et aux adultes la capacité d'utiliser la technologie comme outil d'apprentissage et de travail, le Centre de développement de l'éducation (EDC) a lancé une initiative de recherche à long terme pour apprendre des jeunes, et avec eux qui sont ces nouveaux adeptes de la technologie. Cette initiative pose les questions suivantes : quels effets la technologie a-t-elle sur les jeunes lorsque leur capacité technologique est très développée ? Comment cette capacité forme-t-elle leur pensée et leur raisonnement, comment influe-t-elle sur les décisions en matière d'éducation et de carrière, ainsi que sur les relations familiales et sociales ? Comment les jeunes mettent-ils à profit leurs compétences technologiques et leurs intérêts dans une société mondiale de l'information ?

« Nous investissons dans ce projet parce que nous savons que les technomanes offrent une nouvelle source de compétences et d'imagination pour l'avenir.

Mais notre objectif n'est pas seulement d'éduquer ces jeunes gens compétents pour créer une nouvelle élite mais de mieux comprendre ce qui est au cour de leur raisonnement et de réunir ce savoir pour donner à tous les enfants la possibilité de tirer avantage de ce que la technologie leur offre et, surtout, de créer des environnements qui les encouragent à créer et à inventer de nouvelles technologies qui nous connectent et améliorent notre vie », a déclaré Vivian Guilfoy, directrice adjointe d'EDC.

L'Initiative Power Users comprend plusieurs objectifs à court terme avec une base de recherche à long terme. Elle a pour but de :

  • sensibiliser les enseignants et les personnes chargées d'assurer le développement de la main-d'ouvre et du capital humain sur ce nouveau phénomène mondial qui a des conséquences importantes;


  • mettre en place une base de recherche internationale pour former un réseau mondial de recherche qui lie les chercheurs travaillant dans diverses disciplines et
  • créer une communauté de pratique pour apprendre avec l'aide de ces technomanes avertis comment vivre, apprendre et travailler avec la technologie.


  • « Une main-d'ouvre très qualifiée constitue la clé de la croissance économique et de la prospérité, deux objectifs qui demeurent au centre de la politique gouvernementale. Il est de plus en plus reconnu que le savoir et les compétences sont au cour du développement et de la diffusion des nouvelles technologies et sont essentiels à l'innovation technologique. »

    -Cadre global, Statistiques Canada, 2002
    Le Comité consultatif mondial Power Users, créé pour soutenir la conception du projet, ayant trouvé que cette initiative présentait de vastes intérêts, il a recommandé que le Premier Symposium international ait lieu en 2005. Réunissant des jeunes du monde entier, ce Symposium se penchera sur les interactions de ces jeunes technomanes et des adultes experts dans les domaines de l'éducation, de la psychologie, de la sociologie, de l'anthropologie culturelle, de l'apprentissage du savoir et de la cognition, car ils utilisent tous les outils de la technologie pour résoudre des problèmes complexes mondiaux. Cette expérience permettra de développer de nouvelles connaissances sur les capacités de la technologie, les façons de penser et de travailler ainsi que de mettre en place une recherche à long terme qui informe les décideurs et les responsables par le biais de publications et d'activités sur Internet ainsi que du réseau international de partenaires.

    S'inscrivant dans le cadre des Objectifs du millénaire pour le développement des Nations Unies et répondant au défi du Secrétaire général, Kofi Annan, concernant l'implication des entreprises de la Silicon Valley, l'initiative Power Users cherche à réaliser ses objectifs à long terme au travers d'un réseau international de partenariats public et privé. En quoi cette initiative est-elle importante pour l'ONU ?

    Costa Rica Schools
    De plus en plus, les technologies de l'information et de la communication (TIC) sont reconnues comme un outil important pour le développement dans notre nouvelle société de l'information mondiale. Les TIC pour le développement (ICT4D) ont été au cour du débat au Sommet mondial de la société de l'information (SMSI), qui s'est tenu à Genève en décembre 2003, où environ 40 000 personnes ont visité l'exposition et discuté avec des représentants internationaux, des entreprises de technologie et des ONG. Les ICT4D continueront de jouer un rôle important alors que le SMSI prépare l'ordre du jour du programme 2005.

    Il est devenu urgent d'assurer l'accès de toutes les nations et de tous les peuples à la technologie et d'évaluer son impact sur les personnes, les familles et les communautés qui forgent notre société mondiale de l'information.

    Selon Amir Dossal, directeur exécutif du Fonds des Nations Unies pour les partenariats internationaux (FNUPI), « les technomanes viennent des pays qui ont donné aux jeunes l'accès à la technologie. Il s'agit d'une initiative importante qui doit inclure la participation des jeunes du monde entier. » Ceci est particulièrement important pour les pays en développement qui passent directement à une économie du savoir.

    Les ordinateurs et l'internet se développent de manière exponentielle. « Entre 1975 et 2000, la production informatique a été multiplié par 66 000. D'ici à 2010, ce chiffre devrait atteindre 10 millions. Il y avait 200 millions d'internautes en 2000, 600 millions en 2002 et on en prévoit un milliard d'ici 2005. La part des pays en développement était de 2 % en 1991 et de 23 % en 2001 (revue Choix, décembre 2003). »

    Les pays cherchent à lier les activités éducatives et l'emploi. Ces efforts peuvent permettre aux nouveaux technomanes de trouver plus facilement un emploi une fois leurs études terminées. Des exemples d'Estonie, de Malaisie et d'Afghanistan ont récemment été mis en avant dans la revue Choix publiée par le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD). En Macédoine, l'EDC travaille avec les secteurs public et privé afin de lier l'acquisition des technologies dans les écoles aux compétences technologiques nécessaires pour réussir dans une économie en développement. Le projet USAID.Edu a permis de lancer une initiative destinée à créer des écoles d'éducation à distance afin d'aider une communauté de pratique parmi les enseignants qui intégreront les TIC dans le programme scolaire. L'année prochaine, l'EDC travaillera dans trois régions pour aider les centres professionnels d'excellence à connecter les TIC apprises à l'école aux diverses activités économiques dans les communautés. Au Congo, les échanges entre YouthLearn et les villages aident les éducateurs à utiliser la technologie dans la pédagogie et à développer des activités d'apprentissage par le biais de projets.

    Que se passe-t-il lorsque les personnes ont accès à la technologie ? Comment s'en servent-elles pour générer des revenus importants pour les individus, les groupes et leur société ?

    Le Costa Rica est un exemple illustrant l'émergence de ces jeunes technomanes. Ce pays, qui s'est engagé à équiper les secteurs de l'éducation et de l'économie de capacités technologiques, est le premier à offrir à ses citoyens une messagerie électronique nationale gratuite : costaricense.cr.

    « Les technomanes de l'information et de la communication sont des jeunes qui échappent à l'apprentissage traditionnel, font fi des barrières démographiques ou technologiques en utilisant, en partageant, en créant, en produisant ou en échangeant l'information de façons créatrices, innovantes et/ou involontaires de sorte qu'ils deviennent des multiplicateurs de force dans leurs propres environnements. »

    Comité consultatif mondial Power Users, 2002
    Un grand nombre d'écoles primaires publiques intègrent les TIC dans leur programme scolaire. La Fondation Omar Dengo contribue à la réalisation de cet objectif en aidant les élèves et les enseignants à utiliser la technologie comme outil d'apprentissage et de travail. En dix ans seulement, le Costa Rica a développé une économie fondée sur la technologie de l'information qui, selon les indicateurs économiques, a dépassé les recettes provenant de l'exportation de café, une activité centenaire. Les avantages économiques de cet investissement bilatéral se sont déjà concrétisés : les investissements étrangers directs sont passés de 162 millions de dollars en 1990 à 448 millions en 2001 et le nombre d'entreprises de logiciels établies au Costa Rica est élevé (78 %) (Revue Estrategia & Negocios, juin 2001).

    M. Olman Segura-Bonilla, directeur du CINPE à l'université nationale Heredia Costa Rica, définit ces jeunes technomanes au Costa Rica en ces termes : « Nous voyons des jeunes qui ont un potentiel, une capacité à travailler très vite et qui apprennent rapidement grâce à l'informatique. Ce sont des autodidactes qui développent de nouvelles connaissances dans des environnements virtuels et apprennent davantage entre eux qu'avec les enseignants. Ces jeunes s'ennuyant en classe parce qu'ils apprennent plus vite, il est impératif de modifier le programme scolaire pour capter leur intérêt. » À cet égard, ces jeunes peuvent permettre de réduire la fracture numérique, surtout si nous accordons une plus grande attention à ce phénomène et mettons en place des politiques nationales qui vont dans ce sens.

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    Selon l'Indice d'alphabétisation numérique COQS, les jeunes européens ont des niveaux beaucoup plus élevés par rapport à la population générale. Ces tendances, qui se manifestent dans toute la communauté européenne, soulèvent des questions d'ordre national. Lone Dirckinck-Holmfeld, directrice du laboratoire d'informatique au département de communication de l'université Aalborg, au Danemark, et directrice de Doctoral School on Human-centered Informatics, a analysé ces tendances ainsi que la recherche actuelle lors de la table ronde consacrée aux ICT4D, qui a eu lieu durant le SMSI. Nous nous trouvons dans une situation unique où nous pouvons observer et apprendre une nouvelle culture qui évolue, où les enfants qui adoptent ces technologies ont plus de connaissances que leurs enseignants dans des domaines spécifiques. « Ces jeunes technomanes trouvent de nouvelles façons d'apprendre, défiant nos institutions et notre société», a-t-elle ajouté. « Quel impact ont-ils sur nos institutions et comment celles-ci s'adapteront-elles ? Quel est l'impact social ? Les pays en développement pourront-ils passer outre le paradigme de l'industrialisation ? Certains pays en développement seront-ils plus avantagés et plus compétitifs parce qu'ils passeront directement à une société de l'information et du savoir ? Nos sociétés industrialisées évoluent-elles trop lentement, freinant le progrès vers une société de l'information ? Comment cela influera-t-il sur l'équilibre du pouvoir dans le monde ?

    Pour répondre à ces questions, l'EDC établit des réseaux d'adeptes et de collaborateurs. Frans Rameckers, directeur d'EDC Europe, met en place des partenariats au sein de la communauté européenne, sensibilisant les institutions sur ce nouveau phénomène, telles que l'European Schoolnet and Bertlesmann Foundation, et coordonnant les étudiants afin d'étudier les travaux de recherche pertinents.

    Six Centres internationaux de recherche Power Users ont été établis pour promouvoir l'initiative et assurer la participation de toutes les régions du monde. Le Réseau mondial de recherche mettra au point un ordre du jour commun. Avec l'EDC, les centres développeront des partenariats, des projets et des activités de recherche qui contribueront à la mission et aux objectifs de l'initiative. À ce jour, deux centres ont été créés : le CINPE, au Costa Rica dirigé par Olman Segura-Bonilla, qui sera l'institution de coordination en Amérique latine, et le laboratoire d'informatique de l'université d'Aalborg, établi en Europe. Le conseil d'administration d'EDC recherche d'autres institutions partenaires pour qu'elles se joignent à l'initiative afin de représenter les intérêts de l'Amérique du Nord, de l'Asie, de l'Afrique et de l'Australie. L'initiative est soutenue par une grande variété de partenaires, dont EDC Europe, Microsoft Research, la George Lucas Educational Foundation, DigiPen Institute of technology, CINPE-Universidad Nacional, l'université d'Aalborg, California State University à Sacramento, KEMPSTER GROUP,PTC et le FNUPI.

    Il est possible de participer à cette nouvelle initiative de plusieurs façons :

  • en la faisant connaître au sein de vos propres réseaux. Établissez un lien sur votre site, créez de nouveaux forums pour partager l'information, invitez les représentants de cette initiative à faire un exposé lors de conférences et à publier des revues ou des articles pour les personnes intéressées;


  • en faisant partie du réseau de recherche. Participez activement à la communauté internationale des technomanes. Participez aux groupes de discussion, proposez des articles « Call for Papers » afin de synthétiser la recherche en cours sur les utilisateurs de la technologie Internet et/ou testez de nouvelles hypothèses;


  • en donnant la possibilité aux étudiants de faire un stage pour participer à la recherche, aux projets et aux activités ayant trait aux adeptes de la technologie.


  • en accordant des bourses d'études à ce nouveau type d'utilisateurs dans votre région pour qu'ils participent au Symposium international en 2005 ou en parrainant des équipes d'éducateurs/d'experts en contenu pour servir d'observateurs participants;


  • en prenant part au Conseil international des partenaires, qui fournit un soutien à l'initiative Jeunes Technomanes et prépare le premier Symposium international;


  • en soutenant la recherche et les activités régionales en accordant des subventions, un appui et en créant un partenariat dans le domaine de la recherche et de vos programmes.


  • Nous vous encourageons à vous joindre à nous pour participer à cette communauté d'éducation prospective, travailler ensemble pour comprendre l'énorme potentiel des jeunes et aider la prochaine génération à assumer le rôle de leader qui fera de ce monde un meilleur endroit où vivre.
    Biographie
    Joyce Malyn-Smith est directrice stratégique des programmes relatifs à l'éducation, à l'emploi et à la communauté au centre de développement et d'éducation de l'EDC, une société de recherche et de développement à but non lucratif comptant plus de 320 projets dans quarante pays dans le monde (www.edc.org). Elle a été enseignante et administratrice dans les écoles publiques de Boston pendant plus de vingt ans.
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