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La santé mentale
La participation des éducateurs est nécessaire
Par Helen Herrman

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L'article

Photo OMS/P. Virot
Alors que les programmes destinés à améliorer la santé physique ont donné des résultats remarquables dans de nombreuses parties du monde, ceux concernant la santé mentale ont été largement négligés. Le problème est pourtant grave si l'on considère le fardeau de plus en plus lourd supporté par les personnes et la communauté. Le développement social et économique peut également menacer la santé mentale à moins que des mesures ne soient prises pour inverser cette tendance. Mais, surtout, nous avons les moyens de réduire le fardeau et d'améliorer la santé mentale par le biais de programmes de promotion de la santé1. Cependant, nombreux sont ceux qui restent convaincus que la santé mentale a un rapport direct avec leur situation.

Les partenariats entre les communautés internationales et locales peuvent faire en sorte que ce problème soit l'affaire de tous. L'opinion largement répandue selon laquelle cette maladie est un problème des pays riches ou des pays occidentaux est on ne peut plus fausse. Le Rapport sur la santé dans le monde 2001 montre que dans tous les pays, riches comme pauvres, la santé mentale est liée à la pauvreté et à la marginalisation. De nouveaux traitements efficaces existent, comme les antidépresseurs, les antipsychotiques et les antiépileptiques, ainsi que les thérapies psychologiques et sociales, mais ceux qui en ont le plus besoin y ont rarement accès. Le suicide est un problème de santé publique important lié étroitement à la santé mentale et une cause majeure de mortalité, spécialement chez les personnes atteintes de troubles mentaux, affectées par la consommation abusive d'alcool et de drogues et souffrant de contraintes sociales et économiques.

La communauté mondiale peut apporter sa contribution au niveau local en persuadant les décideurs et le public que la santé mentale est un problème important et que la situation peut changer. L'amélioration de la santé mentale nécessite la mise en place de stratégies de promotion, de prévention et de traitement des troubles mentaux. Les activités sont, certes, différentes à chacun de ces stades mais l'information et la recherche au niveau local sont importantes pour soutenir leur planification et leur évaluation. Une fois de plus, les associations et les partenariats internationaux ont un rôle vital à jouer.

La santé mentale est la base du bien-être et de l'épanouissement de l'individu. Elle n'est pas tant l'absence de troubles mentaux que la capacité à penser et à appendre, à comprendre et à gérer ses propres émotions et celles des autres. C'est un équilibre entre les fonctions physiques, psychologiques, sociales, culturelles et spirituelles2. Les liens entre la santé mentale et la santé physique sont très étroits et, de nombreuses façons, relèvent de la planification de la santé publique.

La santé mentale et le risque de troubles mentaux dans une communauté sont liés, pour le meilleur et pour le pire, aux conditions sociales et économiques.

Dans de nombreux pays, l'évolution rapide des modes de vie et l'instabilité sociale et économique sont des phénomènes fréquents qui sont souvent liés à de nouvelles conditions économiques mondiales.

L'appauvrissement continu ou croissant touche des groupes importants de personnes rurales et peu instruites. Les catastrophes, la violence, les déplacements, l'urbanisation, le sous-emploi et les ruptures familiales sont monnaie courante et donnent lieu au mécontentement, à des troubles du comportement et à l'intolérance. Ces facteurs sont liés à une augmentation des taux de troubles mentaux, notamment la dépression, l'anxiété, la consommation d'alcool et de drogues, ainsi que la détérioration de la santé mentale en général. Les personnes ont plus de chances de souffrir de troubles mentaux et sont moins aptes à y faire face individuellement et au sein de la famille. L'impact des ces facteurs rend également plus difficile l'accès aux services de santé en raison du coût, de la distribution ou de la stigmatisation.

La croissance de la population mondiale et la durée de vie de plus en plus longue signifient également que, dans les pays en développement et les pays développés, le nombre de personnes atteignant le groupe d'âge à risque augmente. Ceci inclut les adolescents comme les jeunes adultes - les groupes d'âge le plus à risque pour la schizophrénie et les troubles mentaux courants tels que la dépression et l'abus de drogue - ainsi que les personnes âgées, groupe à risque pour la démence. Les familles qui prennent en charge les malades ne sont pas suffisamment soutenues par les services de santé.

La situation exige l'adoption d'une action engagée à long terme ainsi que la mise en place de priorités dans chaque pays et dans chaque localité. Un grand nombre de pays reconnaissent l'importance d'une stratégie nationale qui comprend la promotion de la santé mentale, le développement de services destinés aux personnes qui souffrent de troubles mentaux, l'adoption d'une approche basée sur la promotion de la santé mentale, la mise en place d'une politique et d'une législation pour soutenir ces initiatives et le soutien au niveau local.

Dans la plupart des pays, les malades mentaux sont soignés dans de grands établissements isolés. Ceci influence les attitudes et empêche le développement de services adéquats, y compris le traitement des troubles mentaux au niveau des soins de santé primaires. La collaboration entre les prestataires de soins de santé mentale et de santé générale ainsi que la participation des communautés sont nécessaires. L'accent a été mis de manière inadéquate sur l'intervention précoce et la prévention. L'accès insuffisant aux traitements de la dépression, de la psychose et de l'épilepsie signifie que des incapacités qui peuvent être évitées affectent souvent les personnes dès leur très jeune âge et persistent à l'âge adulte. Les programmes de santé publique peuvent prévenir l'épilepsie et l'incapacité intellectuelle associée aux lésions cérébrales causées par un traumatisme, une infection et la malnutrition.

Les professionnels et les services de santé mentale jouent un rôle direct dans l'identification des groupes à risque, notamment ceux souffrant de dépression et dépendants de l'alcool, et dans leur prise en charge au niveau des soins primaires. Les gouvernements sont également exhortés à intégrer la santé mentale dans leurs programmes intersectoriels de promotion de la santé. Promouvoir la santé mentale signifie lui accorder une place importante dans l'échelle des valeurs des individus et des sociétés afin que les décisions prises par le gouvernement et les entreprises contribuent à l'amélioration de ce problème. Cela est possible quand les responsables dans les secteurs de l'éducation, du bien-être, du logement, de l'emploi et de la santé prennent des mesures afin d'améliorer les liens sociaux, réduire la discrimination fondée sur la race, l'âge, le sexe ou la santé et améliorer la participation économique3.

Il faut que les gouvernements, en consultation avec des partenaires et des organisations, mettent en place des programmes afin de venir en aide aux populations vulnérables et déplacées telles que les jeunes, les personnes âgées, les populations rurales, les populations autochtones, les personnes déplacées et les immigrants. Les activités menées dans des cadres définis, tels que les écoles et les lieux de travail, peuvent être coordonnées entre plusieurs secteurs avec, pour objectif, de renforcer, par exemple, les liens sociaux et réduire la discrimination et la violence. Les exemples importants comprennent les interventions de soutien aux familles afin d'améliorer les soins donnés aux enfants et diminuer les risques de négligence et de maltraitance des enfants, le problème de la violence à l'école et l'établissement de rapport d'enquêtes sur les conditions de travail des personnes âgées et les soins qui leur sont prodigués.

L'intégration de la santé mentale dans les soins de santé, particulièrement au niveau des soins de santé primaires, exigera une gestion continue du changement au cours des années à venir et l'intégration de leur promotion exigera un changement des mentalités et des valeurs communautaires. Les communautés locales sont cependant de plus en plus conscientes de l'impact de leur action sur la santé mentale. Le savoir, les outils et les stratégies sont désormais disponibles et peuvent être utilisés en partenariat avec l'ONU et d'autres organisations mondiales.

Notes
1 Rapport sur la santé dans le monde 2001. Santé mentale : nouvelle conception, nouveaux espoirs. Genève, OMS.
2 Sartorius N. Universal strategies for the prevention of mental illness and the promotion of mental health. In: Jenkins R, Ustun TB, eds. Preventing Mental Illness: Mental Health promotion in Primary Care. Chichester, R-U, John Wiley, 1998.
3 Sartorius op cit; Victorian Health promotion Foundation 1999, Mental health promotion plan, www.vichealth.vic.gov.au



Helen Herrman est professeur de psychiatrie et de santé publique à l'université de Melbourne (Australie) et directrice du service de santé mentale à St. Vincent, à Melbourne. De 2001 à 2002, elle a été conseillère régionale en matière de santé mentale pour la région Pacifique occidentale de l'Organisation mondiale de la santé.
Suivi - Les ressources sont insuffisantes pour répondre aux besoins
Institut du comportement humain et des Sciences appliquées à New Delhi, en Inde.
Dans le numéro 2, 2002 de la Chronique ONU (également accessible en ligne à www.un.org/chronicle), nous avions abordé plusieurs questions liées à la santé mentale. Or, selon les dernières données recueillies auprès des gouvernements et publiées par l'OMS dans Atlas : profils par pays sur les ressources en santé mentale, il existe une pénurie importante des ressources allouées au traitement des troubles mentaux, neurologiques et du comportement, qui représentent 12,3 % de la charge mondiale de morbidité.

Dans les pays riches, les ressources en santé mentale sont encore trop limitées. Un cinquième des pays ne dispose pas des trois médicaments les plus couramment prescrits pour traiter des troubles tels que la dépression, la schizophrénie et l'épilepsie. Dans de nombreuses régions du monde, le nombre de professionnels de santé mentale est insuffisant. Pour plus de 680 millions de personnes vivant en Afrique et en Asie, y compris au Bangladesh et au Nigeria, qui comptent une population de plus de 100 millions d'habitants, il y a moins d'un psychiatre par million d'habitants. Des pays comme la Chine, l'Iran, le Nigeria, la Thaïlande et la Turquie, ne disposent d'aucune législation spécifique en matière de santé mentale quoique certains soient en voie d'en créer une. Sur les pays ayant communiqué des renseignements, environ un tiers consacre moins de 1% du budget de santé aux activités liées à la santé mentale. La création de services de soins communautaires est prévue dans la moitié des pays d'Afrique, de la Méditérranée orientale et de l'Asie du Sud-Est. Ceux-ci ne sont pas disponibles dans au moins un tiers des autres pays. Environ deux tiers des lits psychiatriques dans le monde sont dans les hôpitaux psychiatriques, bien que les services de soins communautaires soient considérés plus efficaces et plus humains. En Irlande, en Israël, aux Pays-Bas et en Espagne, 80 à 95 % de ces lits sont prévus dans les hôpitaux psychiatriques; en France, en Allemagne et au Japon, 60 à 75 % et en Australie, au Canada et aux États-Unis, près de 40 %.
- Erika Reinhardt

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