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' Ne nous envoyez pas vos armes ': L'Assemblée générale se penche sur la paix et la sécurité
Par Jonas Hagen pour la Chronique

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Alors que les États membres étaient réunis à l'occasion de la cinquante-septième Assemblée générale, les dirigeants mondiaux ont fait le bilan des situations de paix et des souffrances causées par les conflits en cours.

Prenant la parole lors de l'ouverture du débat général le 12 septembre, le Président de l'Afghanistan, Hamid Karzaï, qui venait d'échapper de justesse à une tentative d'assassinat la semaine précédente, a récapitulé les efforts de son pays à établir une paix et un ordre durables. Dans le cadre de la " Loya Jirga ", une grande assemblée traditionnelle, " des centaines de délégués ont exercé leur droit d'exprimer librement leurs opinions et leur désir de mettre en place la sécurité, la paix, la reconstruction, la démocratie et une bonne gouvernance ", a-t-il dit, ajoutant que le " peuple afghan s'était déclaré hostile à la guerre et à la violence ".

Il a partagé sa vision d'un État moderne fondé sur les valeurs islamiques, " promouvant la justice, la primauté du droit, les droits de l'homme, la liberté du commerce, construisant un pont entre les cultures et les civilisations, étant un modèle de tolérance et de prospérité fondé sur le riche patrimoine de la civilisation islamique ". Il a souligné les efforts concrets menés pour reconstruire la société afghane, notamment le lancement d'une campagne de retour à l'école qui a permis à 3 millions d'enfants de reprendre le chemin de l'école, l'éradication des champs de pavots et la destruction de drogues dont la valeur estimée s'élève à 8 milliards de dollars, ainsi que l'établissement d'une commission des droits de l'homme protégeant les droits des femmes et les libertés civiles. Il a remercié la communauté de donateurs pour leur soutien, mais a jugé que les niveaux de soutien financier direct étaient " insuffisants " et a appelé la communauté internationale à honorer ses promesses.

Les dirigeants africains ont exprimé leurs espoirs concernant le rétablissement récent de la paix. En Angola, l'armée et les leaders militaires de l'UNITA ont signé un cessez-le-feu, mettant fin à 27 ans de guerre civile qui ont fait 500 000 victimes et déplacé des millions de personnes. Pour sa part, le Ministre angolais des affaires étrangères, Joao Bernardo de Miranda, a parlé du principal défi auquel son gouvernement avait dû faire face, celui de " réinsérer dans la société des milliers de soldats vétérans, 4 millions de personnes déplacées et de réfugiés ainsi que des milliers de handicapés, d'orphelins de la guerre et de veuves ". En avril 2002, la Commission chargée de la délimitation des frontières entre l'Éthiopie et l'Érythrée a adopté un règlement final. L'Ambassadeur d'Érythrée, Ahmed Tahir Baduri, a reconfirmé sa confiance dans la solution juridique à la guerre meurtrière menée contre l'Éthiopie pendant deux ans et demi. " Depuis le début, mon gouvernement était convaincu que ce conflit ne pourrait pas se régler par la force mais seulement par des moyens pacifiques. "

Deux autres pays de la Corne de l'Afrique, la Somalie et le Soudan, ont informé l'Assemblée des progrès vers un accord mettant fin à la guerre civile. Le Ministre somalien, Yusuf Hassan Ibrahim, a imploré un soutien international, estimant que " la présence de casques bleus serait nécessaire ", une fois que les parties somaliennes auront accepté le cadre de paix.

Le délégué du Soudan, Mustafa Osman Ismael, a rapporté que son gouvernement avait " organisé des conférences nationales et des réunions de dialogue et répondu positivement aux divers efforts régionaux et internationaux visant à mettre fin au conflit. "

Le Président de la Sierra Leone, Ahmad Tejankabbah, a fait part de son " sentiment de joie immense " de voir la fin de la guerre civile dans son pays et la réinsertion de plus de 55 000 ex-combattants. Les élections en mai 2002 avaient prouvé que le peuple sierra-léonais ne renoncerait jamais à exercer son droit constitutionnel d'élire ses dirigeants en ayant recours au vote. Il a exhorté la communauté internationale à aider la nouvelle démocratie en Sierra Leone, estimant que ce serait " une terrible erreur si, par simple complaisance, nous laissions le pays s'engager à nouveau dans un conflit armé ".

Le délégué tadjik, Takbak Nazarov, a parlé des éléments fondamentaux du processus de paix tels que " le respect de l'histoire et des traditions tadjikes, le respect des droits de l'homme, la tolérance envers les opinions et les points de vue différents et la prise en compte des préoccupations majeures de la nation ", qui avaient permis de mettre fin à une guerre fratricide de cinq ans.

Faisant allusion à la tragédie du 11 septembre qui a fait près de 3 000 victimes, le Président de la Colombie, Manuel Uribe, a fait remarquer que la violence faisait autant de morts, chaque mois, dans son pays. Ce n'est pas un soutien militaire qu'il nous faut mais une aide pour endiguer le flux des drogues illégales. " Ne nous envoyez pas vos armes ! Détruisez vos marchés de la drogue et des substances chimiques nocives ! Aidez-nous en interdisant le trafic aérien et en faisant des saisies de drogue dans le Pacifique et les Caraïbes ! "

Les délégués des États comprenant l'ex-Yougoslavie ont exprimé le désir de construire l'avenir en respectant la paix établie dans la région. De son côté, le Ministre des affaires étrangères de Bosnie-Herzégovine, Zlato Lagumdzija, a précisé que " de nombreuses routes, de nombreux villages et toits [...] de nombreuses mosquées et églises ont été construits et réparés ".

Le Ministre croate des affaires étrangères, Tonino Picula, a annoncé qu'une solution temporaire concernant la frontière sur terre et sur mer autour de la péninsule de Prevlaka était négociée avec la République fédérale de Yougoslavie et que le Mission de l'ONU en Prevlaka " avait mené à bien son mandat avec succès et qu'il ne serait donc pas prolongé après son expiration ". À propos des leçons tirées de l'expérience croate concernant les efforts des opérations de maintien de la paix de l'ONU, il a ajouté que " nous soutenons les efforts du Secrétaire général visant à passer d'une culture de réaction à une culture de prévention. Nous considérons que l'envoi à point nommé d'opérations du maintien de la paix bien structurées, dotées d'un mandat clair et efficace, peut prévenir la recrudescence des conflits et créer une plate-forme pour reconstruire la paix et les sociétés brisées ".

Améliorer le statut des femmes dans les processus de paix et de sécurité
Le rapport final du Secrétaire général sur les femmes, la paix et la sécurité, rendu public le 21 octobre 2002, a coïncidé avec le deuxième anniversaire de l'adoption par le Conseil de la résolution 1325 (2000), qui donnait mandat au Secrétaire général de réaliser une étude portant sur l'impact des conflits armés sur les femmes et les fillettes, le rôle des femmes dans la consolidation de la paix et le rôle des hommes et des femmes dans le processus de paix et la résolution du conflit. Le rapport contient des recommandations sur la façon dont l'ONU peut améliorer le statut des femmes et faciliter la mise en ouvre de la résolution.

Photo ONU
The study analyzes the effects of armed conflict situations involving women and girls, who are both victims and perpetrators of violence, and whose contributions to all aspects of peace operations—peacemaking, peace-building, humanitarian operations, and reconstruction and rehabilitation—would increase the chances to achieve sustainable peace. The study asserts that there has been a failure to integrate gender perspectives into peace processes and conflict resolution due to a lack of know-how and accountability mechanisms on the part of policy- and decision-makers.

L'étude analyse les effets des conflits armés impliquant les femmes et les fillettes, qui sont à la fois les victimes et les auteurs de violence et montre comment leurs contributions à tous les aspects des opérations de paix — les opérations d'établissement et de consolidation de la paix, les opérations humanitaires, la reconstruction et la réinsertion — pourraient augmenter les chances de parvenir à une paix durable. Elle fait état de l'échec à intégrer les perspectives sexospécifiques dans les processus de paix et la résolution des conflits en raison du manque de savoir-faire et de mécanismes de responsabilité de la part des responsables et des décideurs. Bien que des exemples montrent que les femmes ont contribué à la reconstruction de leurs communautés, l'intégration des questions sexospécifiques reste insuffisante et les préjugés contre les femmes et les fillettes continuent d'être exacerbés pendant les guerres. Les femmes continuent d'être exclues du processus de paix formel et peu d'entre elles occupent des positions élevées dans les missions politiques et de consolidation de la paix, ainsi que dans les opérations humanitaires, militaires et de police.

Le rapport a également fait état des progrès en matière de droits humanitaires internationaux, de droits de l'homme, de droits des réfugiés et de droit pénal international concernant les femmes et les filles — les activités des Tribunaux pénaux internationaux ad hoc pour l'ex-Yougoslavie et le Rwanda, le Statut de Rome de la Cour pénale internationale et le Tribunal spécial pour la Sierra Leone.

La prise de conscience accrue des problèmes auxquels les femmes et des fillettes sont confrontées dans les conflits armés a contribué à ces progrès. L'application et la reconnaissance des lois existantes permettront d'améliorer la protection des femmes et des fillettes qui sont victimes de nombreuses formes de violence. L'étude souligne que la violence sexuelle en particulier devrait être clairement classée dans la catégorie des crimes de guerre contre l'humanité.

Cette vaste étude a été préparée par l'Équipe spéciale interorganisations sur les femmes, la paix et la sécurité et coordonnée par Angela King, conseillère spéciale sur les questions sexospécifiques et la promotion des femmes. Un groupe d'étude, comprenant des agents expérimentés venant de différentes zones de conflit et des experts en affaires politiques et juridiques liées aux conflits armés, à la résolution des conflits et à la consolidation de la paix, ont révisé l'étude, s'assurant qu'un grand nombre d'expériences et de perspectives régionales y étaient présentées.

Elle propose des recommandations concrètes, orientées vers l'action qui sont soumises au Conseil, aux États membres, aux institutions de l'ONU, à la société civile et à d'autres acteurs pour examen afin d'améliorer la mise en ouvre de la résolution 1325. L'une de ces recommandations a trait à la création d'un poste chargé des questions de parité entre les sexes, dépendant du Département des opérations de maintien de la paix, afin d'accorder une attention plus soutenue aux droits des femmes et des enfants dans les opérations de la paix.

Si les recommandations proposant l'intégration des femmes dans les processus de paix et de sécurité sont suivies, les études futures présenteront certainement des résultats efficaces. Il est impératif de mettre en ouvre les directives et les politiques existantes concernant l'intégration d'une démarche séxospécifique dans les processus de paix, la résolution des conflits, la reconstruction et la réinsertion et de les faire respecter afin d'assurer la paix et la stabilité à court et à long termes.

—Pauline Karakat for the Chronicle
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