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Opinion
Ce que l’ONU devrait faire en matière de vieillissement de la population mondiale


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Une convention pour protéger leurs droits ?
Par Danielle Bridel


Depuis les préparatifs de la Première Assemblée mondiale sur le vieillissement, qui s’est tenue à Vienne en 1982, un grand nombre d’informations orales et écrites, ainsi que des suggestions et des recommandations, ont été présentées sur la manière de s’adapter le mieux possible au vieillissement de la population mondiale.

Au cours des dernières années, l’ONU s’est débattue avec les changements démographiques dans le monde et, non des moindres, dans son Plan d’action international sur le vieillissement de 1982, qui contenait des informations importantes concernant les personnes âgées dans des domaines tels que la santé et la nutrition, la protection du consommateur, le logement et l’environnement, la famille, la promotion sociale, l’aide sociale, l’emploi et, surtout, l’éducation tout au long de la vie. Moins de dix ans après, le 16 décembre 1991, l’Assemblée générale de l’ONU a adopté, dans sa résolution 46/91, les Principes des Nations Unies pour les personnes âgées, qui comportaient cinq volets : indépendance, participation, soins, épanouissement personnel et dignité. La Journée internationale des personnes âgées et l’Année des personnes âgées ont été proclamées en 1999.

Malgré ces efforts, un grand nombre de personnes âgées dans le monde sont marginalisées et considérées comme un fardeau pour la société, en particulier pour la population active. Résultat : mises à l’écart de la vie de la communauté, elles s’isolent.

Comment l’ONU peut-elle améliorer la situation de cette partie de la population en constante augmentation ?

Le Plan d’action international sur le vieillissement de 2002 « appelle à un changement d’attitudes, de politiques et de pratiques à tous les niveaux et dans tous les secteurs, de façon à répondre au potentiel du vieillissement important au XXIe siècle ». Malgré ces belles paroles, il est difficile de prédire, après deux Comités préparatoires, si le nouveau Plan sera mieux appliqué que le précédent.

Dans la période préparatoire à la Deuxième Assemblée mondiale sur le vieillissement, prévue à Madrid en avril 2002, certaines institutions spécialisées de l’ONU ont déployé des efforts considérables et constructifs afin de faire avancer le débat. Deux exemples de ces contributions sont le document d’information de l’Organisation mondiale de la santé, fondé sur un document de travail débattu dans de nombreuses consultations, et le rapport de l’Organisation internationale du travail « Une société inclusive pour une population du troisième âge : le défi de l’emploi et de la protection sociale ».

UN Photo
Un grand nombre d’organisations non gouvernementales préconisent une approche fondée sur les droits, où les personnes âgées sont considérées comme des citoyens à part entière et égaux jouissant de leurs pleins droits et de droits égaux. Une tentative a été faite dans ce sens par le Comité sur les droits économiques, sociaux eet culturels, dans son Commentaire général n° 6, adopté en 1995.

Notant que dans le Pacte relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, la discrimination en fonction de l’âge n’est pas interdite, le Comité déclare que les États parties au Pacte doivent apporter une attention particulière à la promotion et à la protection des droits économiques, sociaux et culturels des personnes âgées. Dans le même temps, il explique également comment les différents droits contenus dans le Pacte devraient être appliqués aux personnes âgées. Si je devais résumer l’ensemble des idées mises en avant dans le Commentaire général n° 6, je dirais qu’il a montré comment le vieillissement pourrait être intégré dans l’application d’un instrument international.

Sur la question des « droits égaux des femmes et des hommes », le Comité souligne que les États parties devraient apporter une attention particulière aux femmes âgées car, s’étant occupées de leur famille durant toute leur vie ou une partie de leur vie, elles n’ont exercé aucune activité rémunératrice qui leur aurait donné droit à une retraite.

En traitant des droits liés au travail, le Comité note la nécessité d’adopter des mesures afin de prévenir la discrimination fondée sur l’âge dans les domaines de l’emploi et de l’activité, d’assurer aux personnes âgées des conditions de travail sûres et d’appliquer les programmes pour préparer les personnes âgées à la retraite.

L’Article 9 du Pacte, qui reconnaît les droits de tous à la sécurité sociale, est particulièrement important pour les personnes âgées. Le Comité précise que les États parties devraient, dans les limites des ressources disponibles, fournir des prestations non contributives aux personnes âgées et d’autres services d’aide à toutes celles qui n’ont pas droit à une retraite ou aux prestations versées par la sécurité sociale et qui n’ont aucune autre source de revenus pour protéger leur famille. En vertu du Pacte, il est nécessaire que les gouvernements et les acteurs non gouvernementaux mettent en place des services sociaux destinés à soutenir les familles dont les membres comptent des personnes âgées.

Pour les personnes âgées, le droit à un niveau de vie adéquat signifierait l’accès à la nourriture, à l’eau, à un logement et à des vêtements adéquats, ainsi qu’à une assistance pour rénover, développer, améliorer et adapter leur lieu d’habitation.

Elles devraient avoir le droit de jouir d’une santé physique et mentale satisfaisante dans laquelle elles ont pu investir tout au long de leur vie. La prévention, ainsi que la rééducation, jouent un rôle important.

Le dernier commentaire du Comité concerne le droit à l’éducation et à la culture. Pour les personnes âgées, ce droit pourrait être réalisé par l’intermédiaire de programmes d’éducation et d’opportunités qui leur permettent de transmettre leur savoir et leur expérience aux jeunes générations. Les médias et les établissements d’enseignement pourraient, et devraient, aider à changer les images stéréotypées négatives des personnes âgées.

Comparant les Commentaires du Comité avec les demandes de reconnaissance de tous les droits concernés, il semblerait que ces commentaires n’aient pas eu sur les législations nationales l’impact recherché. Toujours est-il, elles ne traitent pas des droits civils et politiques des personnes âgées.

Certaines propositions ont été faites pour que les droits des personnes âgées soient intégrés dans les rapports des Rapporteurs spéciaux de la Commission des droits de l’homme. Étant donné que ces rapports intègrent déjà les questions de l’égalité entre les sexes, il est possible que cette solution soit accueillie favorablement et acceptée, mais, à mon avis, elle ne devrait être qu’une mesure provisoire.

À long terme, il serait conseillé à l’ONU d’envisager une Convention des droits des personnes âgées, s’inspirant des Conventions relatives aux droits de l’enfant et des travailleurs migrants. Pour ce qui est des droits économiques, sociaux et culturels, une convention de ce type pourrait être fondée sur les Commen-taires dont je viens de parler plus haut et être complétée par une section consacrée aux droits civils et politiques des personnes âgées. Il serait, bien entendu, nécessaire de créer un comité chargé de surveiller l’application de cette convention. Je me rends parfaitement compte qu’une telle proposition ne serait pas accueillie avec un grand enthousiasme au niveau politique, les gouvernements estimant qu’il existe déjà une structure juridique complète des droits de l’homme. Toutefois, en tant que représentante d’une organisation non gouvernementale, je prends l’initiative de la soumettre même si, à l’heure actuelle, elle est un rêve ou une utopie.

Liens:
Principes des Nations Unies pour les personnes âgées
Danielle Bridel est Présidente du Comité sur le vieillissement (Genève) et a travaillé durant toute sa carrière avec le gouvernement pour la sécurité sociale suisse. Depuis 1982, elle est représentante de Zonta International à l’ONU, à Genève.


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