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Les catastrophes
Ce que les Nations Unies et leurs organisations peuvent faire


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Parce que, d'une part, la guerre civile a fait rage dans le pays jusqu'en 1992. Depuis la fin de la guerre, les organisations de l'ONU ont participé activement au processus de redressement d'après-guerre et à la mise en place d'instances administratives, législatives et judiciaires civiles qui sont nécessaires au maintien de la paix et à la gouvernance. C'est à ces organisations que revient la responsabilité de mettre en pratique les connaissances existantes afin de réduire les effets des tremblements de terre et d'autres phénomènes dévastateurs tels que l'ouragan Mitch (1998). Après cette tragédie, El Salvador était dans une position idéale pour prendre les mesures drastiques qui s'imposaient pour se préparer à faire face non seulement au prochain ouragan mais aussi aux prochains séisme, éruption volcanique ou phénomènes causés par El Niņo.


Les dégâts causés par l'ouragan Mitch aux Honduras (Nigel Dickinson/Croix-Rouge internationale).

Les dégâts subis au El Salvador n'ont pas été comparables à ceux enregistrés au Honduras et au Nicaragua; pourtant, dans le cadre de la planification des situations d'urgence, la prise en compte des risques naturels faisaient partie intégrante des préoccupations des donateurs en Amérique centrale. Des institutions telles que la Banque interaméricaine pour le développement, la Banque mondiale et le groupe de donateurs de Stockholm, ont encouragé la planification urbaine, l'utilisation adéquate des terres et la gestion de l'environnement — que l'on pourrait appeler "le développement durable".

Si les connaissances, les institutions et le financement étaient disponibles, que manquait-il donc en El Salvador, en Inde et dans d'autres régions du monde où les catastrophes ne cessent de causer des pertes en vies humaines ?

Ceci étant dit, quelles autres actions les Nations Unites et leurs organisations pourraient-elles préconiser ? Jusqu'à présent, les organismes de l'ONU ont fourni trois choses : les connaissances techniques, le soutien à la mise en place d'institutions et l'aide financière par des subventions et des prêts. Bien que nécessaires, elles ne suffisent pas à initier les changements de comportement des nations face aux catastrophes. Il manque un impératif moral qui pourrait mobiliser la volonté politique locale. C'est lorsque le monde dans son ensemble accepte des normes de responsabilité établies par les États Nations pour leurs citoyens sous la forme de traités, de conventions et d'autres accords que la force morale est la plus forte.

Pourquoi, alors, ne pas élaborer un traité international qui engagerait les gouvernements du monde à appliquer les solutions peu coûteuses basées sur les connaissances disponibles afin de prévenir de telles pertes tragiques ?

Il existe des réseaux de scientifiques et d'ingénieurs qui pourraient se charger de la définition technique de ces normes. Ils ont été, en partie, créés par la DIPCN — 10 ans d'échanges scientifiques mandatés par les Nations Unies. Cependant, les résultats sont incomplets. Certes, l'échange de connaissances scientifiques a été important mais encore faudrait-il que les connaissances soient appliquées ! Un tel effort exigerait que des milliers d'experts développent des pratiques minimales et peu coûteuses en vue de prévenir d'autres tragédies. Il faudrait qu'ils consultent des avocats, des législateurs et des spécialistes en la matière pour déterminer la faįon de faire appliquer ces normes de base. Le plus difficile du travail réside dans les détails, mais les détails ne sont-ils pas le pain quotidien des scientifiques et des avocats ?


Les conséquences des inondations au Venezuela (avec l'autorisation de la Fédération internationale de la Croix-Rouge et du Croissant rouge).

Ce n'est pas une tâche impossible. Cela s'est déjà fait. Par exemple, l'échange entre des centaines d'organisations qui travaillent pour le secours humanitaire et aux sinistrés a abouti à un accord sur un ensemble de normes techniques minimales très détaillé. Connu comme projet SPHERE, les documents publiés couvrent la nourriture, l'eau, les abris, les soins de santé et de nombreux autres aspects des secours. Il existe aussi un grand nombre de normes de sécurité adoptées au niveau international en ce qui concerne les industries chimiques, du transport aérien et nucléaires, etc. qui ont été mises en place dans les régions où le réchauffement climatique est plus manifeste.

Le Groupe intergouvernemental d'experts sur l'évolution du climat (GIEEC) a rassemblé des milliers de scientifiques dont les travaux ont débouché sur un processus d'élaboration d'un traité qui a abouti à l'Accord de Kyoto sur les émissions de gaz à effet de serre.

Les Nations Unies ne pourraient-elles pas créer un groupe intergouvernemental similaire pour les catastrophes naturelles qui rassemblerait, de la même manière, des experts en la matière en vue d'élaborer un traité ? Vu la variété de connaissances et d'expertises en jeu, il est nécessaire de créer un tel organisme. Aucune des organisations spécialisées existantes de l'ONU, telles que l'UNESCO, le Programme de l'ONU pour le développement, l'Organisation mondiale de la santé et l'Organisation météorologique mondiale, ne couvre toutes les connaissances requises. C'est pourquoi le GIECC a été créé.

L'étude des effets du réchauffement climatique nécessite une variété de connaissances dans des domaines divers, tels que la santé publique, l'économie, l'agriculture, l'océanographie, en plus de l'expertise en matière de climat mondial et régional.


les conséquences du séisme en Turquie (avec l'autorisation de la Fédération internationale de la Croix-Rouge et du Croissant rouge);.

En attendant qu'un tel traité existe, ce qui peut prendre des années, que devons-nous faire ? Heureusement que des mesures peu coûteuses seront peu à peu adoptées par la société. Les groupes de citoyens demanderont à leurs gouvernements de prendre des mesures, comme cela s'est vu en Turquie, où il est devenu clair que les promoteurs n'avaient pas respecté les normes de construction et avaient utilisé des matériaux de mauvaise qualité; ou au sud de la Floride, où il est apparu que les méthodes de construction inadéquates ont été à l'origine d'une grande partie des dégâts causés par l'ouragan Andrew.

La prévention des catastrophes doit se faire à tous les niveaux, des habitants aux instances gouvernementales. La sécurité absolue n'est pas un droit de l'homme. Mais la sécurité contre les pertes évitables, les blessures et la mort le sont. La Déclaration universelle des droits de l'homme n'a aucun sens si les êtres humains, qui sont censés jouir de ces droits, peuvent perdre la vie à cause de la négligence des gouvernements à faire appliquer leurs propres normes de construction.

Pour en savoir plus, consulter le site www/anglia.ac.uk/ geography/radix.

Liste d'ouvrages sur la gestion des catastrophes, compilée par Ben Wisner :

Blaikie, P., Cannon, T., Davis, I., Wisner, B. 1994. At Risk: Natural Hazards, People's Vulnerability, and Disasters. London: Routledge.

Boyce, James K. 2000. Let Them Eat Risk? Wealth, Rights and Disaster Vulnerability, Disasters 24,3, pp. 254-261.

Comfort, L. et al. 1999. Reframing Disaster Policy: The Global Evolution of Vulnerable Communities. Environmental Hazards 1, 39-44.

Eade, D. and Williams, S. 1995. The Oxfam Handbook of Development and Relief. 3 vols. Oxford: Oxfam Publications.

Enarson, E. and Morrow, B., eds. 1998. The Gendered Terrain of Disaster: Through Women's Eyes. Miami, FL: International Hurricane Center [http://www.ihc.fiu.edu/].

Hardoy, J., et al. 2000. Environmental Problems in an Urbanizing World. London: Earthscan.

Inter-American Development Bank (IDB). 2000. Facing the Challenge of Natural Disasters in Latin America and the Caribbean: an IDB Action Plan. Washington, D.C. [http://www/iadb.org/sds/env ].

Maskrey, A. 1989. Disaster Mitigation: A Community Based Approach. Oxford: Oxfam.

Noji, E., ed. 1997. The Public Health Consequences of Disasters. New York: Oxford University Press.

Pan American Health Organization (PAHO). 2000. Natural Disasters: Protecting the public's health. Washington, D.C.


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Points forts de la Stratégie internationale pour la prévention des catastrophes

Proposée par le Secrétaire général en vertu de la résolution 1999/63 du Conseil économique et social, la Stratégie internationale pour la prévention des catastrophes (SIPC) est une action concertée pour la prévention des catastrophes au niveau international. La SIPC s'appuie également sur le Programme Forum de la DIPCN (Genève, 5 au 9 juillet 1999) et ses résultats spécifiques, le Mandat de Genève sur la prévention des catastrophes et Pour un monde plus sûr au XXIe siècle : stratégies pour la prévention des risques et des catastrophes.

La SIPC a deux objectifs : la prévention des catastrophes et l'amélioration de la capacité d'adaptation des communautés. La SIPC propose de passer d'une culture de la réaction aux risques à une culture de la gestion et de la prévention des risques; elle vise à améliorer l'accès de la science et de la technologie pour prévenir les risques dans les communautés locales et souhaite réduire la vulnérabilité des sociétés face aux risques naturels et technologiques par des approches proactives et non pas réactives. Parmi les projets précédents connexes qui ont été menés, figurent l'initiative RADIUS pour l'évaluation du séisme en zone urbaine et l'approche interorganisations en vue de faire face aux effets du phénomène El Niņo.

La SIPC s'appuie sur les travaux d'experts regroupés en équipes multidisciplinaires et multisectorielles ainsi que sur la coopération des décideurs politiques et la confiance du public. Les buts recherchés sont :

– l'amélioration de la sensibilisation du public;

– l'engagement des autorités publiques à prévenir les risques pour les citoyens;

– la sollicitation de la participation du public à tous les niveaux afin de créer des communautés prêtes à faire face aux catastrophes par le développement de partenariats et de réseaux;

– l'intégration de la prévention des risques dans le développement durable

– la réduction des pertes économique et sociales.

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