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Equipe spéciale de haut-niveau du Secrétaire général sur la Crise mondiale de la sécurité alimentaire

Lettre du Secrétaire général adressée à l’Équipe spéciale de haut niveau sur la crise mondiale de la sécurité alimentaire

10 décembre 2009

Chers collègues,

Je vous écris la présente lettre en tant que président de l’Équipe spéciale de haut niveau sur la crise mondiale de la sécurité alimentaire afin de vous livrer mes réflexions sur l’action coordonnée pour la sécurité alimentaire et afin de solliciter votre aide pour y répondre au niveau national.

Les conditions qui ont conduit à la flambée des prix des denrées alimentaires et de l’énergie peuvent resurgir à tout moment. La situation mondiale de la sécurité alimentaire et nutritionnelle est encore plus dangereuse puisqu’elle résulte d’un ralentissement économique mondial et de l’impact croissant des changements climatiques. Des millions de personnes ont vu leur pouvoir d’achat fortement diminuer et doivent faire face à des incertitudes climatiques grandissantes. La production et le conditionnement alimentaires ont fourni une protection capitale contre les chocs économiques et politiques.

Les 22 entités constituant l’Équipe spéciale de haut niveau des Nations Unies sur la crise mondiale de la sécurité alimentaire (HLTF) travaillent ensemble afin de soutenir les actions nationales en mettant l’accent sur la synergie des politiques. Elles encouragent les collaborations effectives et prônent un appui soutenu et accru aux autorités nationales.

Nous nous réjouissons de constater les efforts des nombreuses Équipes nationales des Nations Unies qui travaillent étroitement avec la Banque mondiale ainsi qu’avec les donateurs et les partenaires de la société civile afin de répondre à l’insécurité alimentaire et à la malnutrition. Toutefois, les efforts doivent s’intensifier et devenir encore plus effectifs. Les partenaires nationaux et régionaux ont besoin de notre appui lorsqu’ils traitent les questions politiques et structurelles à long terme afin d’éviter une aggravation de la situation actuelle. Simultanément, ils doivent répondre aux besoins urgents en aide alimentaire, y compris la mise en place de mesures de protection. En utilisant le droit à l'alimentation comme référence globale, nous devons chercher ensemble à combattre la malnutrition, la volatilité des prix, les systèmes d’échanges dysfonctionnels, l’accès insuffisant aux intrants et marchés agricoles, les modèles instables de l’agriculture, les conditions de travail inacceptables ainsi que le manque de protection sociale.

Au cours de l’année dernière, nous avons assisté à un engagement politique et financier accru autour d’un nouveau mouvement pour la sécurité alimentaire. En juillet 2009, au sommet du G8 à L’Aquila, 26 pays et 14 agences multilatérales ont convenu d’une approche coordonnée de la sécurité alimentaire, en partenariat avec les pays et destinée à les aider dans la mise en œuvre de leurs stratégies nationales. Lors du sommet du G20 en septembre 2009 à Pittsburgh, 22 milliards de dollars ont été promis pour soutenir la sécurité alimentaire. Il est probable que la majorité de cette somme couvrira les engagements existants, mais il semble qu’il y ait de la part de certains donateurs une volonté réelle d’augmenter tant leur appui bilatéral que multilatéral, dont une partie de cette dernière transitera par un nouveau mécanisme de coordination financière de la Banque mondiale pour une aide stratégique à long terme destinée à l’agriculture et aux denrées alimentaires.

Cette approche est construite sur les cinq principes suivants :

  1. Des plans nationaux. Les stratégies durables destinées à diminuer l’insécurité alimentaire, la malnutrition et la pauvreté doivent être nationales. Les plans de développement de la sécurité alimentaire et de l’agriculture menées par les pays doivent être techniquement solides, refléter les investissements nationaux et la volonté politique et ils doivent être élaborés après consultation des acteurs clés nationaux et internationaux, y compris des agriculteurs, des partenaires de développement ainsi que des intervenants du secteur privé, de la société civile, des fondations et des établissements de recherche.
  2. Une prise en compte exhaustive. Il est nécessaire de s’intéresser à l’ensemble des questions affectant la nutrition et la sécurité alimentaire. Cela requiert d’instaurer une croissance agricole écologiquement viable, de mettre en place des mesures efficaces de protection pour les personnes les plus vulnérables, de satisfaire aux besoins urgents ainsi que de lutter contre la malnutrition, particulièrement pour les personnes déjà en difficulté. Les marchés doivent être développés et les régions intégrées sur le plan économique tout en préservant la base de ressources naturelles et en autonomisant les petits exploitants, dont les femmes forment une grande partie, afin qu’ils participent aux marchés locaux, nationaux, régionaux et internationaux.
  3. Une coordination plus efficace de l’aide. L’aide doit être coordonnée aux niveaux national, régional et mondial, y compris par le biais de partenariats multidonateurs et de fonds destinés à soutenir les plans nationaux. Ces dispositions doivent être suffisamment souples pour s’adapter à une grande diversité de contextes nationaux tout en établissant des critères et des objectifs publics permettant un suivi et un contrôle par les pairs. Toutes les parties prenantes doivent contribuer à garantir l’efficacité, la transparence et la responsabilisation tout en supprimant les doubles emplois et les lacunes.
  4. Un renforcement du rôle des institutions. Les agences, fonds et programmes des Nations Unies ainsi que les institutions financières internationales doivent apporter à tous les niveaux leur appui et leur collaboration à cette approche de la sécurité alimentaire.
  5. Un engagement continu en matière de ressources financières. Des ressources financières pluriannuelles et un soutien technique profitant directement aux plus pauvres doivent être engagés, dont les contributions et le progrès seront surveillés annuellement, à savoir une aide respectant les principes qui garantisse un transfert effectif de l’aide. Le respect de ces principes génère et donne de l’ampleur aux opportunités permettant d’avancer grâce à la collaboration et à l’accroissement des investissements.

Il est primordial que nous travaillions tous ensemble aux niveaux mondial, régional et national pour soutenir cette initiative. Nous devons, en particulier, nous assurer que les nouveaux cadres d'aide au développement des Nations Unies (UNDAF) adoptent une approche plus globale de la sécurité alimentaire conforme au Cadre d'action globale (disponible sur www.un-foodsecurity.org) et que les systèmes soient en place pour une coordination entre institutions plus efficace et un appui conjoint aux plans et stratégies de sécurité alimentaire menés par les pays.  À cet égard, les nouvelles directives de l’UNDAF, « Comment élaborer un UNDAF: Directives pour les équipes de pays des Nations Unies (Partie I)et Directives techniques pour les équipes de pays des Nations Unies (Partie II) », approuvées par le Groupe des Nations Unies pour le développement le 30 novembre 2009, vous seront communiquées très prochainement. Il se pourrait qu’elles vous soient utiles puisqu’elles s’intéressent aux défis que posent les crises alimentaires, énergétiques et financières ainsi que les changements climatiques dans la réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement.

Nous ne doutons pas que nous pouvons compter sur le rôle de coordination du système de Coordonateur résident des Nations Unies ainsi que sur votre constante collaboration avec les autorités nationales pour encourager la participation de l’ensemble des parties prenantes dans le développement, l’appui à la mise en œuvre et le contrôle des politiques. La coordination nous permet de mettre à profit les forces et les avantages comparatifs de chaque agence et de garantir que nous offrons aux pays où nous agissons le meilleur soutien possible.

Veuillez nous faire part de vos réflexions concernant les besoins, les lacunes à combler et la coordination au niveau national et veuillez nous conseiller sur la meilleure manière d’encourager une réponse effective.

Sincèrement vôtre,

Ban Ki-moon