NATIONS UNIES

ASSEMBLEE GENERALE

DISCOURS D'OUVERTURE
DE SON EXCELLENCE JEAN PING
PRESIDENT DE LA 59E SESSION DE L'ASSEMBLEE GENERALE DES NATIONS UNIES


NEW YORK, LE 14 SEPTEMBRE 2004

Monsieur le Secrétaire général,

Excellences, distingués Délégués,

Mesdames et Messieurs,

Permettez-moi avant toute chose d’avoir une pensée pour les victimes des ouragans qui viennent de frapper de plein fouet le sud des Etats-Unis d’Amérique, la Jamaïque, la Grenade et Cuba et d’exprimer à cette occasion toute notre compassion et notre solidarité aux gouvernements et aux populations de ces pays face au drame qu’ils sont entrain de vivre.

Excellences, distingués Délégués,

Mesdames et Messieurs,

C’est pour moi un grand honneur et un réel privilège d’avoir à assumer à partir d’aujourd’hui, la présidence de la 59ème session de l’Assemblée générale des Nations Unies.

L’ouverture solennelle de cette auguste assemblée me donne l’occasion de vous exprimer de nouveau ma profonde gratitude, d’une part pour l’hommage rendu à l’Afrique, d’autre part pour la confiance témoignée à mon pays, le Gabon, à son peuple et à l’action de son Président, Son Excellence El Hadj Omar Bongo Ondimba.

J’aimerais également adresser mes sincères félicitations à mon prédécesseur, Son Excellence Monsieur Julian Hunte, pour l’œuvre accomplie, notamment dans le domaine de la revitalisation de nos travaux, ainsi que mes remerciements pour la disponibilité et l’appui dont son Cabinet et lui-même ont fait montre tout au long de la période de transition.

A vous, Monsieur le Secrétaire général, je rends hommage pour vos efforts en faveur d’un monde plus pacifique, plus juste, et aussi pour la détermination et la clairvoyance qui n’ont cessé de vous caractériser tout au long de votre mandat à la tête du Secrétariat de notre organisation.

J’associe à cet hommage l’ensemble du personnel des Nations Unies qui travaille avec courage et abnégation, souvent dans des conditions extrêmement périlleuses, payant parfois le prix le plus élevé pour la cause de la paix.

Pour ma part, je tiens à assurer l’ensemble des Représentants des Etats Membres de mon entière disponibilité à œuvrer de concert avec eux dans l’accomplissement du mandat qui m’est confié et de ma ferme volonté d’être à l’écoute des préoccupations de leurs pays.

Excellences, Mesdames et Messieurs,

La présente session s’ouvre dans un contexte international en constante et rapide mutation, marqué par de multiples menaces et de nombreux défis.

Face à une telle situation, les peuples du monde ont plus que jamais les yeux tournés vers les Nations Unies, unique cadre à vocation universelle où s’expriment dans toute leur diversité, les préoccupations et les aspirations de l’humanité toute entière.

L’Assemblée générale doit pouvoir remplir pleinement le rôle que lui assigne la Charte, en mobilisant, autant que faire se peut, toutes ses forces.

J’entends pour ma part orienter mon action dans ce sens en collaboration étroite avec les Etats Membres et avec les autres organes principaux des Nations Unies.

La multiplicité des zones de conflits et des crises humanitaires, la prolifération des armements, la récurrence des actes terroristes, l’accroissement de la pauvreté et les autres fléaux tels que la pandémie du VIH/SIDA, la dégradation de l’environnement, la recrudescence de la criminalité transnationale, le trafic illicite des stupéfiants, les violations des droits de l’homme ou encore les atteintes à l’état de droit et à la démocratie sont autant de préoccupations auxquelles il nous faut urgemment trouver des réponses appropriées.

Une autre question pour laquelle il faudra poursuivre les consultations est celle du clonage des êtres humains à des fins de reproduction, en raison des implications d’ordre éthique et scientifique qu’elle comporte.

Les répercussions dramatiques des conflits armés sur les peuples du Moyen-Orient, d’Afrique, d’Amérique du sud, d’Asie ou encore d’Europe orientale nous rappellent, chaque jour, qu’il faut encore redoubler d’efforts pour l’avènement d’un monde libéré des affres de la guerre.

La situation au Moyen orient et en particulier la question israélo-palestinienne exige une attention soutenue de la communauté internationale, en raison de ses ramifications et de son impact sur la paix et la sécurité internationales.

C’est sans doute dans ce berceau de civilisations millénaires que se joue, pour une bonne part, notre avenir à tous.

Le climat qui prévaut en Irak et en Afghanistan, entre autre, suscite toujours de grandes inquiétudes.

En Afrique, les guerres constituent un facteur prédominant d’insécurité, d’appauvrissement et d’instabilité politique. La crise du Darfour au Soudan, les récents massacres de réfugiés à la frontière du Burundi et de la République Démocratique du Congo reflètent hélas cette déplorable situation.

Il est de ce fait urgent et crucial, dans le domaine humanitaire, de repenser la coordination des organisations intergouvernementales et non gouvernementales agissant sur le terrain aux fins d’une action plus efficace.

De même apparaît la nécessité d’organiser la Conférence internationale sur la paix, la sécurité et le développement dans la région des Grands Lacs, dont le principe a déjà été accepté.

Là où des processus de paix sont en cours, il est vital de tout mettre en œuvre pour les appuyer par l’exécution de mesures concrètes visant notamment la prévention des conflits, le désarmement, la démobilisation et la réinsertion des anciens soldats.

Il faudrait surtout que des ressources suffisantes accompagnent l’effort de reconstruction d’après-guerre, afin de prévenir le retour possible à l’instabilité et le risque d’anarchie. Notre organisation ne peut déroger à cette responsabilité.

La prolifération des armes, notamment les armes légères et de petits calibres, contribue à l’intensification des conflits toujours plus dramatiques pour les populations civiles. De même, les menaces que continuent de faire peser sur la paix et la sécurité internationales l’existence d’immenses quantités d’armes de destruction massive, nous rappellent chaque jour l’impérieuse nécessité d’avancer sur la voie du désarmement général et complet. Nous devons tous y travailler.

Nous devons agir vite pour trouver les meilleurs moyens de lutter plus efficacement contre le terrorisme. En effet, l’ampleur et la brutalité tragique des événements survenus ces dernières années ici même à New York et à travers le monde, nous imposent une action commune et une vigilance de tous les instants.

Mais si la paix et la sécurité nous interpellent quotidiennement, elles ne doivent pas nous détourner des questions tout aussi pressantes que celles du développement. Comme le disait si justement le Pape Paul VI dans son encyclique " Populorum progressio " : " Le développement est le nouveau nom de la paix ".

C’est dire à quel point il est nécessaire d’agir ensemble et simultanément sur ces deux terrains. A cet égard, j’aimerais ici souligner l’importante contribution des organisations de la société civile, qui agissent en véritables partenaires des Etats dont elles amplifient l’action.

Si nous voulons véritablement réduire les disparités entre nations et au sein même de chaque nation, accroître à la fois nos chances et celles des générations futures de vivre dans un monde plus équitable et plus sûr, nous devons tenir les engagements pris en matière de développement, notamment dans la Déclaration du Millénaire et le Consensus de Monterrey.

Nous n’avons pas d’autres choix : Nos nations, nos peuples respectifs, en attendent beaucoup. Nous ne pouvons rester sourds à cette légitime aspiration d’un monde meilleur, ces légitimes revendications du respect des droits de l’homme, de la sécurité des personnes et tout particulièrement des plus vulnérables.

J’aimerais ici insister sur l’importante contribution des femmes à l’édification de la société, et formuler le vœu que leur rôle soit davantage reconnu.

Nous devons aussi combattre énergiquement le trafic des êtres humains, en particulier le trafic des femmes et des enfants. C’est là un devoir que le droit et la morale nous imposent.

Continent le plus déshérité, l’Afrique a pris son destin en main. Notre organisation a décidé de lui accorder un traitement prioritaire et de soutenir ce programme de fond, inspiré par la volonté des responsables politiques africains qu’est le NEPAD.

Le Nouveau Partenariat pour le Développement de l’Afrique exprime la ferme volonté des peuples de ce continent de rompre avec des décennies de pessimisme.

L’Afrique a pour cela obtenu le soutien politique de la communauté internationale. Elle a également pris un ensemble de mesures concrètes, notamment le Mécanisme d’évaluation par les Pairs, afin de promouvoir la paix, la bonne gouvernance, les droits de l’homme et la démocratie.

Mais l’Afrique attend aussi résolument la mise en œuvre des engagements souscrits dans ce cadre par l’ensemble de ses partenaires au développement, et en particulier ceux du G8.

Je voudrais par ailleurs appeler l’attention de la communauté internationale pour une meilleure prise en compte des besoins des pays les moins avancés, des pays en développement enclavés et des petits Etats insulaires en développement. Il nous faut donc travailler pleinement à l’élaboration de solutions appropriées.

A cet égard, la prochaine Conférence de Maurice sur la mise en œuvre du Programme d’Action de la Barbade constituera une étape importante.

D’autres urgences et sans doute les plus cruciales pour les populations marginalisées sont la famine et la malnutrition. Est-il encore nécessaire de rappeler ces chiffres accablants, qui ne peuvent nous laisser indifférents : plus de huit cent millions de personnes dans le monde souffrent de malnutrition et cela, précisent les experts, " en dépit d’une production alimentaire globalement satisfaisante ".

Il est donc tout aussi capital que l’Assemblée générale concentre ses efforts, en vue de l’éradication de la faim et de la pauvreté dans le monde.

Il est vital que l’Assemblée générale, en concertation avec le Conseil économique et social, se mobilise aussi pour des questions portant sur les négociations commerciales internationales, la dette, le financement du développement, en raison de leur impact sur la situation économique et sociale des pays en développement.

Excellences, Mesdames et Messieurs,

Il faut renforcer les relations entre l’Assemblée générale, le Conseil de sécurité et le Conseil économique et social, pour affermir le socle d’une coopération internationale harmonieuse. Cette coopération est d’autant plus essentielle qu’elle est indispensable à la réalisation des objectifs de l’organisation.

Elle doit aussi permettre de préserver le rôle et l’autorité de l’Assemblée générale en tant qu’organe central de délibération et d’expression de la volonté commune des 191 Etats Membres des Nations Unies.

Certes des progrès notables ont déjà été réalisés, en vue de revitaliser nos travaux ; cependant nous devons veiller à ce que l’Assemblée générale conserve toutes ses prérogatives. Il est de notre intérêt et de notre responsabilité collective d’endiguer l’érosion de l’autorité de cet important organe.

Plus globalement, il est évident que les mutations actuelles du monde nécessitent une adaptation constante de notre organisation pour lui permettre de mieux répondre aux exigences des temps présents.

Il convient donc, et on ne le dira jamais assez, de renforcer le rôle et l’autorité de l’ONU et lui fournir toutes les ressources nécessaires à l’accomplissement de ses multiples missions.

Le renforcement du rôle de l’ONU dépendra également des efforts que nous devons déployer, en vue de réformer le Conseil de sécurité. De nombreuses propositions existent déjà. Il s’agit dès lors de faire montre de volonté politique pour faire avancer cette importante question et parvenir à une formule consensuelle.

De même, nous devons encourager une plus grande coopération entre les organes de l’ONU et les organisations régionales et sous régionales, afin de renforcer les capacités de celles-ci pour une action plus efficace sur le terrain.

La célébration l’année prochaine du 60ème anniversaire de notre organisation sera l’occasion d’évaluer ses réalisations, de mesurer le chemin parcouru depuis la Déclaration du Millénaire et d’envisager sereinement l’avenir. C’est pourquoi, nous devons unir nos forces dans la préparation de cet événement tant attendu.

Pour ma part, je veillerai à ce que l’Assemblée générale assume ses responsabilités à cet effet.

Excellences, Mesdames et Messieurs,

J’invite chacun des membres de notre Assemblée à œuvrer de concert, en vue d’adapter les Nations Unies aux besoins de notre époque et mieux la préparer à relever les défis actuels et futurs.

J’aurai besoin de tout votre appui pour accomplir la délicate mission que vous m’avez confiée. Et je voudrais, une ultime fois, assurer l’ensemble des Etats Membres de mon entière disponibilité à travailler de concert avec eux, à être toujours à l’écoute de leurs préoccupations et naturellement de leurs propositions.

Je vous remercie.


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