52/86 Mesures en matière de prévention du crime et de justice pénale pour éliminer la violence contre les femmes
Date: 12 décembre 1997
Adoptée sans vote
Séance plénière: 70ème
Rapport: A/52/635

L'Assemblée générale,

Ayant à l'esprit sa résolution 48/104 en date du 20 décembre 1993, dans laquelle elle proclamait la Déclaration sur l'élimination de la violence contre les femmes, et rappelant la définition de cette violence donnée aux articles premier et 2 de la Déclaration,

Condamnant énergiquement toutes les formes de violence contre les femmes,

Soulignant que l'application effective de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes1/ contribue à l'élimination de la violence contre les femmes et que l'application de la Déclaration sur l'élimination de la violence contre les femmes renforce et complète ce processus,

Rappelant la Déclaration de Beijing2/ et le Programme d'action3/ adopté lors de la quatrième Conférence mondiale sur les femmes : lutte pour l'égalité, le développement et la paix, qui a eu lieu à Beijing du 4 au 15 septembre 1995 et, en particulier, la ferme intention des gouvernements de prévenir et d'éliminer toutes les formes de violence contre les femmes et les fillettes,

Reconnaissant la nécessité d'appliquer pleinement la Déclaration de Beijing et le Programme d'action dans le domaine de la prévention du crime et de la justice pénale, et d'élaborer des stratégies et des activités concrètes en la matière,

Rappelant la résolution 1997/44 de la Commission des droits de l'homme du 11 avril 1997 concernant l'élimination de la violence à l'égard des femmes4/,

Se félicitant du renouvellement du mandat confié par la Commission des droits de l'homme au Rapporteur spécial sur la violence contre les femmes, ses causes et ses conséquences,

Rappelant les conclusions et recommandations du Rapporteur spécial, que la Commission des droits de l'homme a soulignées dans sa résolution 1997/44, et selon lesquelles les États ont l'obligation concrète de promouvoir et de protéger les droits fondamentaux des femmes et d'agir avec la diligence voulue pour prévenir les actes de violence contre les femmes,

Appuyant la résolution 1996/12 du Conseil économique et social, en date du 23 juillet 1996, sur l'élimination de la violence contre les femmes,

Se déclarant vivement préoccupée par les coûts sociaux, économiques et de santé élevés résultant de la violence contre les femmes, que doivent assumer les particuliers et la société,

Consciente que les organismes de justice pénale devraient collaborer étroitement avec les praticiens d'autres secteurs, dont ceux de la santé, des services sociaux et de l'éducation, ainsi qu'avec les membres de la collectivité pour traiter le problème de la violence contre les femmes,

Reconnaissant la précieuse contribution des organisations non gouvernementales, des organisations qui luttent pour l'égalité entre les sexes et des organismes communautaires dans l'action menée pour éliminer la violence contre les femmes,

1. Prie instamment les États Membres de revoir et d'évaluer, conformément à leur système juridique, les lois et principes juridiques, les procédures, les politiques et les pratiques en matière pénale afin de déterminer s'ils sont préjudiciables aux femmes et, si tel est le cas, d'apporter les modifications nécessaires pour garantir que les femmes bénéficient d'un traitement équitable dans le système de justice pénale;

2. Prie aussi instamment les États Membres d'élaborer des stratégies et des politiques et de diffuser des éléments d'information pour promouvoir la sécurité des femmes chez elles et au sein de la société tout entière, ce qui comprend des stratégies précises de prévention de la criminalité qui reflètent véritablement la situation quotidienne des femmes et répondent à leurs besoins distincts dans des domaines tels que le développement social, l'aménagement du cadre de vie et de l'éducation préventive;

3. Prie en outre instamment les États Membres d'encourager une politique active et manifeste de prise en considération de l'égalité des sexes dans l'élaboration et l'application de tous les programmes et de toutes les politiques relatifs à la prévention du crime et à la justice pénale qui peuvent contribuer à l'élimination de la violence contre les femmes afin de permettre, avant que des décisions soient prises, de procéder à une analyse pour assurer qu'elles ne comportent aucun préjugé défavorable contre les femmes;

4. Demande à la Commission pour la prévention du crime et la justice pénale, agissant par l'intermédiaire de la Division de la prévention du crime et de la justice pénale du Secrétariat et des instituts affiliés au réseau du Programme des Nations Unies pour la prévention du crime et la justice pénale, de collaborer avec tous les organes, organismes et autres entités du système des Nations Unies et de coordonner leurs activités concernant la violence contre les femmes et l'élimination de toute discrimination fondée sur le sexe, dans l'administration de la justice pénale;

5. Invite les instituts affiliés au réseau du Programme à poursuivre la formation dans le domaine de la violence contre les femmes ainsi qu'à réunir et diffuser largement les informations sur les modèles d'intervention et les programmes de prévention appliqués avec succès à l'échelon national;

6. Prie la Commission pour la prévention du crime et la justice pénale de veiller à ce que le document intitulé Stratégies de lutte contre la violence dans la famille : Manuel destiné aux intervenants5/, déjà paru en anglais, soit publié dans les autres langues officielles de l'Organisation des Nations Unies, sous réserve que les ressources nécessaires soient disponibles, au titre du budget ordinaire ou de fonds extrabudgétaires, et reconnaît la contribution apportée par le Canada à cet égard;

7. Demande aux gouvernements, aux organisations internationales et aux organisations non gouvernementales de faire traduire dans les langues locales, selon que de besoin, le document Stratégies de lutte contre la violence dans la famille : Manuel destiné aux intervenants, et de veiller à ce qu'il soit largement diffusé pour qu'il soit utilisé dans des programmes de formation et d'éducation;

8. Prend note du rapport du Secrétaire général sur l'élimination de la violence contre les femmes6/, y compris la version révisée du projet de mesures concrètes, de stratégies et d'activités concrètes dans le domaine de la prévention du crime et de la justice pénale pour éliminer la violence contre les femmes, rapport établi sur la base des commentaires reçus des États Membres, des entités des Nations Unies, notamment les institutions spécialisées et autres entités associées, ainsi que des organisations intergouvernementales et non gouvernementales;

9. Adopte les Stratégies et mesures concrètes types dans le domaine de la prévention du crime et de la justice pénale pour éliminer la violence contre les femmes, annexées à la présente résolution comme modèles de directives à utiliser par les gouvernements pour traiter, dans le cadre du système de justice pénale, les diverses manifestations de la violence contre les femmes;

10. Invite instamment les États Membres à s'inspirer des Stratégies et mesures concrètes types lorsqu'ils élaborent et mettent en oeuvre des stratégies et des mesures concrètes visant à éliminer la violence contre les femmes et à promouvoir l'égalité des sexes au sein du système de justice pénale;

11. Prie la Commission pour la prévention du crime et la justice pénale d'aider, par l'intermédiaire de la Division de la prévention du crime et de la justice pénale, les États Membres qui en font la demande à utiliser les Stratégies et mesures concrètes types;

12. Invite la Commission pour la prévention du crime et la justice pénale à continuer d'inclure la question de l'élimination de la violence contre les femmes dans les activités de formation et d'assistance technique du Programme des Nations Unies pour la prévention du crime et la justice pénale;

13. Prie le Secrétaire général de veiller à ce que les Stratégies et mesures concrètes types soient largement diffusées en vue de promouvoir leur application;

14. Prie aussi le Secrétaire général de transmettre les Stratégies et mesures concrètes types aux organisations et organes compétents des Nations Unies, tels que la Commission de la condition de la femme, le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes, la Commission des droits de l'homme, notamment le Sous-comité de la lutte contre les mesures discriminatoires et de la protection des minorités, et le Rapporteur spécial sur la violence contre les femmes, ses causes et conséquences, et invite ces organisations et organes à élaborer, dans leurs domaines de compétence, des stratégies et des mesures concrètes visant à éliminer la violence contre les femmes;

15. Invite le Conseil économique et social à envisager d'inclure la question de la violence contre les femmes dans le débat de haut niveau de l'une de ses prochaines sessions, dans le contexte de l'examen des droits fondamentaux de la femme;

16. Prie le Secrétaire général de soumettre à l'Assemblée générale à sa cinquante-quatrième session, par l'intermédiaire du Conseil économique et social, un rapport sur la mise en oeuvre de la présente résolution.

ANNEXE

Stratégies et mesures concrètes types relatives à l'élimination de
la violence contre les femmes dans le domaine de la prévention du
crime et de la justice pénale

1. La violence contre les femmes revêtant de nombreuses formes, il s'impose d'adopter différentes stratégies adaptées aux différentes manifestations de la violence et au contexte dans lequel elles se produisent. Les mesures, stratégies et activités concrètes décrites ci-après peuvent être introduites dans le domaine de la prévention du crime et de la justice pénale en vue de traiter le problème de la violence contre les femmes. Sauf indication contraire, le terme "femme" englobe les "fillettes".

2. Reposant sur la définition de la violence contre les femmes énoncée dans la Déclaration sur l'élimination de la violence à l'égard des femmes7/ et réitérée dans le Programme d'action adopté par la quatrième Conférence mondiale sur les femmes tenue à Beijing du 4 au 15 septembre 19958/, les Stratégies et mesures concrètes types relatives à l'élimination de la violence contre les femmes dans le domaine de la prévention du crime et de la justice pénale s'inspirent des mesures adoptées par les gouvernements dans le Programme d'action, compte tenu du fait que certains groupes de femmes sont particulièrement vulnérables à la violence.

3. Les Stratégies et mesures concrètes types reposent sur la nécessité d'adopter une politique active visant à tenir compte du sexe des intéressés dans toutes les politiques et tous les programmes concernant la violence contre les femmes et de réaliser l'égalité des sexes et l'équité d'accès à la justice, ainsi que d'établir l'objectif de l'équilibre entre les sexes dans le domaine de la prise de décisions concernant l'élimination de la violence contre les femmes. Ces stratégies et mesures concrètes devraient servir de lignes directrices et s'appliquer en conformité avec les instruments internationaux pertinents, y compris la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes9/ et la Convention relative aux droits de l'enfant10/ et le Pacte international relatif aux droits civils et politiques11/, en vue de contribuer à leur mise en oeuvre équitable et efficace.

4. Les Stratégies et mesures concrètes types devraient être mises en oeuvre par les États Membres et autres entités, sans préjudice du principe de l'égalité des sexes devant la loi, afin de faciliter les efforts déployés par les gouvernements pour contrer, dans le cadre du système de justice pénale, les différentes manifestations de la violence contre les femmes.

5. Les Stratégies et mesures concrètes types visent à assurer l'égalité de droit et de fait entre les femmes et les hommes. Les Stratégies et mesures concrètes types n'accordent pas un traitement de faveur aux femmes, mais elles visent à faire en sorte que l'on corrige les inégalités ou les formes de discrimination auxquelles les femmes sont confrontées quant à l'accès à la justice, plus particulièrement dans le cas des actes de violence.

I. DROIT PÉNAL

6. Les États Membres sont instamment invités à :

a) Revoir, évaluer et réviser périodiquement leurs lois, codes et procédures, surtout en droit pénal, afin de s'assurer de leur valeur et de leur efficacité pour éliminer la violence contre les femmes et de supprimer les dispositions qui permettent ou tolèrent une telle violence;

b) Revoir, évaluer et réviser leur droit pénal et leur droit civil, dans le cadre de leur système juridique national, pour s'assurer que tous les actes de violence contre les femmes sont interdits et, si tel n'est pas le cas, adopter des mesures à cet effet;

c) Revoir, évaluer et réviser leur droit pénal pour veiller à ce que :

i) Les personnes qui sont traduites devant les tribunaux pour des faits de violence ou qui ont été condamnées pour de tels faits puissent, dans le cadre de leur système juridique national, être soumises à des restrictions en matière de détention et d'usage d'armes à feu et autres armes réglementées;

ii) Des mesures puissent être prises, dans le cadre de leur système juridique national, pour interdire à quiconque de harceler, d'intimider ou de menacer les femmes ou pour empêcher de tels faits.

II. PROCÉDURE PÉNALE

7. Les États Membres sont instamment invités à revoir, évaluer et réviser leur procédure pénale, selon qu'il convient, pour faire en sorte :

a) Qu'en cas de violence contre les femmes, la police soit dûment habilitée, avec l'autorisation du juge si la loi nationale l'exige, à s'introduire sur les lieux pour procéder à des arrestations et notamment pour confisquer les armes;

b) Que la responsabilité principale d'engager les poursuites incombe aux autorités de poursuite et non pas aux femmes victimes de violences;

c) Qu'il soit donné aux femmes victimes de violences les mêmes possibilités de témoigner devant les tribunaux qu'aux autres témoins et que des mesures soient prévues pour faciliter leur témoignage et protéger leur vie privée;

d) Que les règles et principes de défense ne soient pas discriminatoires à l'égard des femmes et que les auteurs de violences contre les femmes ne puissent invoquer des moyens de défense tels que l'honneur ou la provocation pour se soustraire à toute responsabilité pénale;

e) Que ceux qui commettent des violences contre les femmes alors qu'ils se sont volontairement placés sous l'empire de l'alcool ou de la drogue ne soient pas exonérés de toute responsabilité pénale ou autre;

f) Que les violences, voies de fait, harcèlements et faits d'exploitation antérieurs imputables à l'auteur, dont la preuve a été rapportée, soient pris en considération dans les procédures judiciaires, conformément aux principes du droit pénal national;

g) Que les tribunaux aient le pouvoir, sous réserve des dispositions de la constitution nationale, en cas de violence contre les femmes, d'ordonner des mesures de protection et de prononcer des interdictions, notamment l'expulsion de l'auteur des violences hors du domicile, l'interdiction pour celui-ci de communiquer à l'avenir avec la victime et d'autres parties concernées, au domicile ou à l'extérieur, et le pouvoir d'imposer des sanctions en cas de non-respect de ces injonctions;

h) Que des mesures puissent, si nécessaire, être prises pour assurer la sécurité des victimes et de leur famille et les protéger contre l'intimidation et les représailles;

i) Qu'il soit tenu compte des risques en matière de sécurité dans les décisions concernant l'imposition d'une peine carcérale ou semi-carcérale, l'octroi d'une mise en liberté sous caution, l'octroi de la libération conditionnelle, ou le placement sous le régime de la mise à l'épreuve.

III. POLICE

8. Les États Membres sont instamment invités, dans le cadre de leurs systèmes juridiques nationaux, à :

a) Veiller à ce que les dispositions de leurs lois et codes et les procédures touchant la violence contre les femmes soient systématiquement appliquées de sorte que tous les actes criminels de violence contre les femmes soient reconnus comme tels et traités en conséquence par le système de justice pénale;

b) Mettre au point des techniques d'investigation qui ne soient pas dégradantes pour les femmes victimes de violences et qui réduisent au minimum les intrusions dans la vie privée tout en maintenant des normes propres à faire au mieux la lumière sur les faits;

c) Veiller à ce que la police tienne compte, notamment pour décider s'il y a lieu d'arrêter l'auteur, de le placer en détention ou, en cas de mise en liberté, de soumettre celle-ci à telles ou telles conditions, de la nécessité d'assurer la sécurité de la victime et celle des tiers qui sont unis à cette dernière par des liens familiaux, sociaux ou autres, et à ce que les mesures prises soient aussi propres à empêcher de nouveaux actes de violence;

d) Donner à la police les pouvoirs voulus pour qu'elle puisse intervenir rapidement en cas de violence contre les femmes;

e) Veiller à ce que la police exerce ses pouvoirs en respectant les règles d'un État de droit et celles des codes de conduite qui lui sont applicables, et à ce que toute infraction à ces règles engage sa responsabilité;

f) Encourager les femmes à devenir membres des forces de police, y compris au niveau opérationnel.

IV. SANCTION PÉNALE ET MESURES CORRECTIVES

9. Les États Membres sont instamment invités, selon qu'il convient, à :

a) Revoir, évaluer et réviser leurs politiques et procédures en matière de sanction pénale de sorte qu'elles permettent d'atteindre les objectifs suivants :

i) Tenir les auteurs de violences contre les femmes pour responsables de leurs actes;

ii) Mettre fin aux comportements violents;

i iii) Tenir compte, en cas de violence exercée au sein de la famille, des incidences que la peine prononcée aura pour la victime et les autres membres de la famille;

iv) Promouvoir des sanctions qui soient comparables à celles dont sont passibles d'autres actes de violence;

b) Veiller à ce que toute femme victime de violences soit informée de toute mise en liberté de l'auteur desdites violences lorsque l'intérêt que cette information présente pour sa sécurité justifie une telle intrusion dans la vie privée de l'auteur;

c) Faire en sorte que soient pris en compte, pour la détermination de la peine, la gravité du préjudice physique et psychologique subi par la victime et les effets de la victimisation, et notamment, lorsque la loi autorise de telles pratiques, les déclarations de la victime concernant lesdits effets;

d) Adopter des lois qui mettent à la disposition des tribunaux toute une gamme de sanctions et mesures pour protéger la victime, les autres personnes concernées et la société contre de nouvelles violences;

e) Veiller à ce que le juge soit encouragé à recommander le traitement de l'auteur des violences lorsqu'il prononce la peine;

f) Veiller à ce que des mesures appropriées soient prises pour éliminer la violence contre les femmes placées en détention pour quelque motif que ce soit;

g) Mettre au point et évaluer des programmes de traitement pour les différents types d'auteurs de violences qui soient adaptés aux caractéristiques personnelles de ces derniers;

h) Assurer la sécurité des victimes et des témoins avant, pendant et après la procédure pénale.

V. AIDE ET SOUTIEN AUX VICTIMES

10. Les États Membres sont instamment invités, selon qu'il convient, à :

a) Communiquer aux femmes victimes de violences des informations sur leurs droits et sur les recours à leur disposition ainsi que sur les moyens de s'en prévaloir et des informations sur la participation aux procédures pénales, les dates fixées pour les audiences, l'état d'avancement des procédures et les décisions rendues;

b) Encourager et aider les femmes victimes de violences à déposer une plainte officielle et à poursuivre l'affaire;

c) Veiller à ce que les femmes victimes de violences obtiennent promptement, par le biais de procédures formelles ou informelles, la réparation équitable du préjudice qu'elles ont subi, et notamment à ce que le droit de réclamer des dommages-intérêts ou une indemnisation aux auteurs des violences ou à l'État leur soit reconnu;

d) Mettre en place des mécanismes et procédures judiciaires qui soient accessibles aux femmes victimes de violences, qui prennent en compte leurs besoins et qui garantissent un traitement équitable de leur dossier;

e) Établir un système d'enregistrement des ordonnances imposant des mesures de protection ou certaines restrictions rendues par les tribunaux, lorsque de telles ordonnances sont autorisées par la loi nationale, de façon que la police ou le personnel des services de justice pénale puissent rapidement déterminer si une ordonnance de ce type est en vigueur.

VI. SERVICES DE SANTÉ ET SERVICES SOCIAUX

11. Les États Membres, en coopération avec le secteur privé, les associations professionnelles compétentes, les fondations, les organisations non gouvernementales et communautaires, notamment celles qui militent pour l'égalité des femmes, et les instituts de recherche, sont instamment invités, selon qu'il convient, à :

a) Établir, financer et coordonner un réseau viable d'installations et de services accessibles pour l'hébergement d'urgence et temporaire des femmes et des enfants qui risquent d'être victimes de violences ou qui l'ont été;

b) Établir, financer et coordonner des services, tels que des lignes d'information gratuites, des services de consultation pluridisciplinaires, des services d'intervention d'urgence et des groupes de soutien à l'intention des femmes victimes de violences et de leurs enfants;

c) Élaborer et financer des programmes de prévention de l'alcoolisme et des toxicomanies, étant donné que l'alcool et les stupéfiants jouent souvent un rôle dans la violence contre les femmes;

d) Établir de meilleurs liens entre les services médicaux, aussi bien privés que d'urgence, et les organismes de justice pénale pour faire en sorte que les actes de violence contre les femmes soient signalés, qu'il en soit gardé trace, et que des mesures d'intervention soient prises;

e) Élaborer des procédures types afin d'aider le personnel du système de justice pénale lorsqu'il a à connaître de cas de violence contre les femmes;

f) Établir, si possible, des services pluridisciplinaires spécialisés composés de personnes spécialement formées pour comprendre, dans toute leur complexité, les problèmes que posent les cas de violence contre les femmes et la psychologie des victimes.

VII. FORMATION

12. Les États Membres, en coopération avec les organisations non gouvernementales, notamment celles qui militent pour l'égalité des femmes, et en collaboration avec les associations professionnelles compétentes, sont instamment invités, selon qu'il convient, à :

a) Mettre en place ou encourager, à l'intention des personnels de police, des fonctionnaires de justice pénale, des praticiens et des professionnels qui travaillent dans le cadre du système de justice pénale, des modules de formations obligatoires portant sur le multiculturalisme et les sexospécificités, qui fassent prendre conscience de ce que la violence contre les femmes est inacceptable, en fassent connaître les effets et les conséquences et favorisent des réactions adéquates face à la question de la violence contre les femmes;

b) Veiller à offrir une formation adéquate, à sensibiliser et à renseigner les personnels de police, les fonctionnaires de justice pénale, les praticiens et les professionnels qui travaillent dans le cadre du système de justice pénale au sujet de tous les instruments pertinents relatifs aux droits de l'homme;

c) Encourager les associations professionnelles à élaborer des normes obligatoires de pratique et de conduite du personnel oeuvrant dans le système de justice pénale, afin de promouvoir la justice et l'égalité des femmes.

VIII. RECHERCHE ET ÉVALUATION

13. Les États Membres et les instituts composant le réseau du Programme des Nations Unies pour la prévention du crime et la justice pénale, les entités compétentes du système des Nations Unies, d'autres organisations internationales compétentes, les instituts de recherche, les organisations non gouvernementales et les organisations qui militent pour l'égalité des femmes sont instamment invités, selon qu'il convient à :

a) Faire des enquêtes sur la nature et l'ampleur de la violence contre les femmes;

b) Recueillir des données ventilées par sexe en vue de les analyser et de les utiliser, avec les données déjà disponibles, pour évaluer les besoins ainsi que pour la prise des décisions et pour l'établissement des politiques dans le domaine de la prévention du crime et de la justice pénale, et plus particulièrement en ce qui concerne :

i) Les différentes formes de violence contre les femmes, leurs causes et leurs conséquences;

ii) La mesure dans laquelle la pauvreté et l'exploitation sont liées à la violence contre les femmes;

iii) Les rapports entre la victime et l'auteur des violences;

iv) Les vertus correctives (absence de récidive) de diverses formes d'intervention, sur le plan individuel et sur le plan de la réduction de la violence contre les femmes;

v) L'utilisation des armes à feu, et le rôle des drogues et de l'alcool, plus particulièrement dans les cas de violence familiale;

vi) Les liens entre la victimisation et l'exposition à la violence et la propension à la violence par la suite;

c) Publier des rapports annuels indiquant l'incidence de la violence contre les femmes, les taux d'arrestation, la proportion d'affaires classées, le nombre de poursuites engagées et leur établissement;

d) Évaluer l'efficacité du système de justice pénale par rapport aux besoins des femmes en butte à la violence.

IX. MESURES DE PRÉVENTION

14. Les États Membres et le secteur privé, les associations professionnelles compétentes, les fondations, les organisations non gouvernementales et communautaires, notamment celles qui militent pour l'égalité des femmes sont instamment invités, selon qu'il convient, à : 

a) Élaborer et mettre en oeuvre des programmes de sensibilisation et de formation du public pertinents et efficaces en vue de prévenir la violence contre les femmes grâce à la promotion de l'égalité, de la collaboration, du respect mutuel et du partage des responsabilités entre hommes et femmes;

b) Établir dans les entités publiques et privées des approches multidisciplinaires, tenant compte des sexospécificités, qui participent à l'élimination de la violence contre les femmes, en particulier grâce à des partenariats entre les responsables des services de répression et les services spécialisés dans la protection des femmes victimes de la violence;

c) Établir des programmes à l'intention des délinquants ou des délinquants potentiels afin de promouvoir le règlement pacifique des conflits, la gestion et la maîtrise de la colère et la modification des attitudes à l'égard des rôles revenant à chacun des sexes et des relations entre les sexes;

d) Élaborer des programmes de communication avec le public et fournir des informations aux femmes, y compris aux victimes de la violence, sur les rôles des deux sexes, les droits fondamentaux des femmes et les aspects sociaux, sanitaires, juridiques et économiques de la violence contre les femmes afin de donner à ces dernières les moyens de se protéger contre toutes les formes de violence;

e) Diffuser les informations sur les différentes formes de violence contre les femmes, les programmes disponibles pour lutter contre ce problème, y compris ceux concernant le règlement pacifique des conflits, sous une forme adaptée au public visé, y compris dans les établissements d'enseignement de tous les niveaux;

f) Appuyer les initiatives prises par les organisations qui militent pour l'égalité des femmes et les organisations non gouvernementales pour sensibiliser le public à la question de la violence contre les femmes et contribuer à son élimination.

15. Les États Membres et les médias, les associations de médias, les organismes d'autoréglementation des médias, les écoles et les autres partenaires, tout en respectant la liberté des médias, sont instamment invités selon qu'il convient, à élaborer des campagnes de sensibilisation du public et des mesures et mécanismes appropriés, notamment des codes de déontologie et des mesures d'autoréglementation concernant la violence dans les médias, en vue d'améliorer le respect des droits des femmes et de décourager la discrimination et les stéréotypes.

X. COOPÉRATION INTERNATIONALE

16. Les États Membres et les organes et instituts des Nations Unies sont instamment invités, selon qu'il convient :

a) À échanger des informations concernant les modèles d'intervention et les programmes de prévention qui se sont avérés efficaces pour éliminer la violence contre les femmes et à établir un répertoire de ces modèles;

b) À coopérer et collaborer aux niveaux régional et international avec les entités compétentes afin de prévenir la violence contre les femmes et à promouvoir des mesures propres à garantir que les auteurs de violences soient traduits en justice; par le biais de mécanismes de coopération internationale et d'assistance dans le respect des législations nationales,

c) À contribuer au Fonds de développement des Nations Unies pour les femmes et à soutenir ses activités visant à éliminer la violence contre les femmes.

17. Les États Membres sont instamment invités :

a) À veiller à ce que les réserves qu'ils pourraient faire à la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes soient formulées avec la plus grande précision de façon à avoir la portée la plus étroite possible et ne soient pas incompatibles avec l'objet et le but de la Convention;

b) À condamner toutes les violations des droits fondamentaux des femmes dans les situations de conflit armé, à les considérer comme des violations du droit international relatif aux droits fondamentaux de la personne et du droit international humanitaire et à exiger des mesures particulièrement énergiques contre les violations de ce type, en particulier les assassinats, les viols systématiques, l'esclavage sexuel et les grossesses forcées;

c) S'agissant des États qui ne sont pas encore parties à la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, faire le nécessaire pour la ratifier ou y adhérer de façon que sa vocation universelle soit pleinement réalisée d'ici à l'an 2000;

d) À envisager sérieusement l'introduction dans le statut de la cour criminelle internationale de dispositions insistant sur le sort réservé aux femmes, en particulier les femmes victimes de la violence;

e) À coopérer avec le Rapporteur spécial chargé de la question de la violence contre les femmes, y compris ses causes et conséquences pour l'aider à remplir sa mission, à lui fournir toutes les informations demandées, à répondre à ses communications et à lui donner les moyens d'accomplir sa tâche lors de ses visites.

XI. ACTIVITÉS DE SUIVI

18. Les États Membres et les organismes des Nations Unies, sous réserve de la disponibilité de ressources extrabudgétaires, les instituts affiliés au réseau du Programme des Nations Unies pour la prévention du crime et la justice pénale, les autres organisations internationales compétentes, les instituts de recherche et les organisations non gouvernementales, dont celles qui militent pour l'égalité des femmes sont instamment invités, selon qu'il convient :

a) À encourager la traduction dans les langues locales des Stratégies et mesures concrètes types et à en assurer une large diffusion de façon qu'elles puissent être utilisées dans les programmes de formation et d'enseignement;

b) À utiliser les Stratégies et mesures concrètes types comme base, comme point de référence et comme guide pratique pour les activités visant l'élimination de la violence contre les femmes;

c) À aider les gouvernements sur leur demande, à revoir, évaluer et réformer leur système de justice pénale, y compris leur législation pénale, sur la base des Stratégies et mesures concrètes types;

d) À soutenir les activités de coopération technique des instituts affiliés au réseau du Programme des Nations Unies pour la prévention du crime et la justice pénale en vue d'éliminer la violence contre les femmes;

e) À élaborer des plans et programmes nationaux, régionaux et sous-régionaux concertés pour donner effet aux Stratégies et mesures concrètes types;

f) À élaborer des programmes et des manuels de formation types à l'intention des personnels de police et de justice pénale, reposant sur les Stratégies et mesures concrètes types;

g) À examiner périodiquement, aux niveaux national et international, la mesure dans laquelle les Stratégies et mesures concrètes types ont été à l'origine de plans, programmes et initiatives visant l'élimination de la violence contre les femmes, et les résultats obtenus.

__________

1/Résolution 34/180 de l'Assemblée générale, annexe
2/Rapport de la quatrième Conférence mondiale sur les femmes, Beijing, 4-15 septembre 1995 (publication des Nations Unies, numéro de vente : F.96.IV.13), chap. I, résolution 1, annexe I
3/Ibid., annexe II
4/Documents officiels du Conseil économique et social, 1997, Supplément No 3 (E/1997/23), chap.II.
5/ST/CSDHA/20
6/E/CN.15/1997/11 et Add.1
7/Résolution 48/104 de l'Assemblée générale
8/Rapport de la quatrième Conférence mondiale sur les femmes, Beijing, 4-15 septembre 1995 (publication des nations Unies, numéro de vente : F.96.IV.3), chap I, résolution 1, annexe II.
9/Résolution 34/180 de l'Assemblée générale, annexe
10/Résolution 44/25 de l'Assemblée générale, annexe
11/Résolution 2200 A (XXI) de l'Assemblée générale, annexe


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