9 juin 1998


Communiqué de Presse
AG/772



LA DIMENSION SOCIALE DU PROBLEME DE LA DROGUE DOIT ETRE PRISE EN COMPTE AU MEME TITRE QUE SA DIMENSION ECONOMIQUE ET POLITIQUE

19980609
L'Assemblée générale a poursuivi ce soir le débat général de sa vingtième session extraordinaire consacrée au problème mondial de la drogue et a entendu dans ce cadre des représentants qui ont souligné la dimension sociale du problème de la drogue. Ces représentants ont plaidé en faveur de stratégies intégrées qui posent comme préalable l'application de la loi tout en précisant que la criminalisation des consommateurs de drogues ne devrait être invoquée qu'en dernier recours. Les programmes de traitement et de réinsertion sociale des toxicomanes doivent être sur un même pied d'égalité que les mesures de répression. Pour le représentant de la Belgique, il n'est ni possible, ni souhaitable que la justice soit l'unique régulateur social. Des pays ont manifesté leur inquiétude quand aux effets pervers de la mondialisation et de l'intégration des pays au sein du "Village global" qui permettent aux barons de la drogue d'affaiblir les fondements de la démocratie par leur pouvoir de corruption et les structures bancaires par l'introduction d'argent sale. Pour le Ministre de la sûreté et de la sécurité de l'Afrique du Sud, cette intégration aurait permis aux trafiquants de tisser des liens avec les cartels de la drogue en plaçant le pays au sein d'un réseau complexe de points de transit de la drogue. Certains intervenants ont souligné que le problème de la drogue étant de portée mondiale, il faut éviter toute politique consistant à culpabiliser une certaine catégorie de pays. Pour le Ministre de la justice et Procureur de la République du Nigéria, le trafic des drogues obéit à la théorie économique de l'offre et de la demande. Sans consommation, il n'y aurait plus ni production ni trafic de drogues illicites. La réévaluation des questions liées à la drogue doit donc se faire à la lumière des paramètres de consommation.

Les personnalités suivantes ont participé au débat général : M. Konstantinos Gitonas, Ministre de la santé de la Grèce; M. Casimir Oyé Mba, Ministre d'Etat chargé des affaires étrangères et de la coopération du Gabon; M. Gouressy Condé, Ministre de l'intérieur et de la sécurité de la Guinée; M. Abdullahi Ibrahim, Ministre de la justice et Procureur de la République du Nigéria; M. Khalifa Al-Shaali, Ministre de l'intérieur des Emirats arabes unis; M. Sidney Mufamadi, Ministre de la sûreté et de la sécurité de l'Afrique

(à suivre 1a)

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du Sud et M. Abdul Rahman Abdulla Al Awadhi, Directeur exécutif de l'Organisation régionale de Protection de l'environnement marin du Koweït. M. Martin Belinga-Eboutou, Représentant permanent du Cameroun auprès des Nations Unies; M. Sotirios Zackheos, Représentant permanent de Chypre auprès des Nations Unies; M. Matia Mulumba Semakula Kiwanuka, Représentant permanent de l'Ouganda, M. Alex Reyn, Représentant permanent de la Belgique auprès des Nations Unies et M. David Rubadiri, Représentant permanent du Malawi auprès des Nations Unies ont également fait une déclaration.

L'Assemblée générale poursuivra son débat général sur le problème mondial de la drogue, demain, mercredi 10 juin, à partir de 10 heures.


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Débat général

M. COSTAS GITONAS (Ministre de la santé et de l'aide sociale de la Grèce) : Le succès de la lutte contre la drogue exige que toutes les nations, grandes ou petites, riches ou pauvres assument la responsabilité de cet objectif commun et fournissent, aux Nations Unies, espoir de l'humanité, les moyens nécessaires à la mise en oeuvre du mandat que lui ont confié les Etats membres de l'ONU. La victoire sur la drogue ne pourra être remportée sans l'éradication des tares socio-économiques telles que la pauvreté, le chômage, la discrimination raciale, la xénophobie ou encore l'exclusion sociale. A l'initiative du Premier Ministre, la Grèce a créé un comité parlementaire permanent sur les stupéfiants au sein duquel sont représentés tous les partis politiques présentes au Parlement. En raison de sa position géographique, la Grèce souffre des conséquences du trafic illicite et de l'abus des stupéfiants. Du point de vue contractuel, elle a ratifié et mis pleinement en oeuvre toutes les conventions internationales pertinentes. Le Gouvernement a introduit en outre une législation sévère pour combattre la criminalité liée à la drogue comme le blanchiment de l'argent et pour contrôler les précurseurs chimiques et prévenir leur détournement vers la fabrication illicite de stupéfiants et de substances psychotropes.

Dans le cadre de la coopération avec les pays de la région, le Groupe de Dublin, institution de lutte contre la drogue, a décidé, récemment, de confier à la Grèce, pour une nouvelle période de deux ans, le mandat de Président des régions des Balkans et du Moyen-Orient. En outre, la Grèce dispose d'un coordonnateur national pour les questions de la drogue dont la responsabilité principale est d'élaborer, en coopération étroite avec les autorités compétentes, et de défendre, devant les instances internationales, les positions nationales. Par ailleurs, quatre services indépendants sont chargés du respect de la loi relative à la drogue : la police, les services douaniers, le bureau des délits financiers et économiques et les autorités chargées des ports. Un organe conjoint d'échange de données avec les institutions internationales pertinentes a été créé pour coordonner les activités de ces quatres services et collecter, évaluer et diffuser l'information. Des programmes sont également menés dans les domaines de la prévention, du traitement et de la réinsertion sociale des toxicomanes.

M. CASIMIR OYE MBA (Ministre d'Etat, Ministre des affaires étrangères et de la coopération du Gabon): Combattre la drogue c'est poser les bases d'un monde où régnent la paix, la stabilité et le progrès humain; c'est préserver la sécurité des individus et des peuples; c'est prévenir la criminalité et le terrorisme; c'est garantir le respect de la légalité et des droits de l'homme; c'est assurer à la jeunesse santé physique et morale pour une intégration efficiente dans la vie de la nation. Conscient du danger que pose le trafic des drogues, le Gabon a convoqué, en juin 1989, son premier séminaire national sur les drogues, et en décembre 1980, Libreville a abrité le premier séminaire des pays de la Communauté économique des Etats d'Afrique centrale (CEEAC) sur les problèmes de la drogue.

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Le Gabon a adopté en 1993 une réforme visant à adapter sa législation au problème de la drogue, en y incluant des mesures préventives, curatives et pénales; réforme qui portait à la fois sur la qualification des délits, sur les peines et sur la procédure pénale. L'engagement du Gabon en faveur d'une politique réaliste de lutte contre la drogue s'est manifesté ces dernières années par la création d'un office de lutte anti-drogue; la création d'un laboratoire de toxicologie à vocation régionale, et la création d'une commission interministérielle de lutte contre la toxicomanie. Pays ayant adhéré aux différentes conventions internationales contre les stupéfiants et les substances psychotropes, le Gabon, qui assure la présidence du Comité consultatif permanent des Nations pour les questions de sécurité en Afrique centrale, vient de réunir, du 28 au 30 avril 1998 les Ministres de la défense et de l'intérieur de la sous-région. Ces ministres ont, en particulier, examiné les possibilités de mise en place, dans les meilleurs délais, d'un programme de lutte contre le trafic illicite des drogues dans la sous-région.

M. COURESSY CONDE (Ministre de la sécurité de la Guinée) : La République de Guinée, vu l'ampleur du fléau de la drogue, a ratifié les conventions internationales et a mis en oeuvre une politique de lutte réelle qui s'est concrétisée par l'élaboration, l'adoption et la promulgation d'une série de textes juridiques. L'organisation de conférences de sensibilisation font partie désormais des activités auxquelles les structures nationales de lutte contre la drogue, les médias nationaux, les syndicats, les organisations religieuses et les ONG s'adonnent constamment. La coopération bilatérale et multilatérale dont a bénéficié la Guinée a permis aux structures nationales, notamment le Comité interministériel national de lutte contre la drogue ou l'Office central anti-drogue d'obtenir des résultats probants. Nous ne cesserons d'insister pour qu'à l'échelle mondiale, l'on définisse des moyens permettant d'éviter le recyclage des drogues saisies. La République de Guinée a créé le Comité national d'incinération et de destruction des drogues saisies. Les autorités administratives locales ainsi que celles des administrations décentralisées sont fortement impliquées dans la recherche, la localisation et la destruction du Chanvre indien sur l'ensemble du territoire.

Toutefois, l'accueil de plus de 600 000 réfugiés et la gestion économique et sociale de cette situation pendant 7 ans a révélé l'existence de la culture de cannabis et le passage clandestin le long de nos frontières de la drogue. Notre ambition est de couvrir tout le territoire national par une décentralisation progressive de l'Office central anti-drogue et le Conseil interministériel. Malheureusement, nos efforts sont freinés par le manque de qualification des ressources humaines et le manque d'équipement. Dans le domaine de la prévention, il est envisagé de mettre en oeuvre des stratégies conduisant aux cultures de substitution. Pour combler ces insuffisances et rendre plus dynamique la mise en oeuvre de notre politique nationale, il serait souhaitable d'envisager un appui constant de la communauté internationale.

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M. ALHAJI ABDULLAHI IBRAHIM OFR, (Ministre de la justice et Procureur de la République du Nigeria) : Après l'adoption de la Convention de 1988, le Nigéria a créé une agence nationale antidrogues et mis en place en 1993, une agence nationale chargée de contrôler la fabrication et le contrôle de toutes les drogues dans le pays afin de garantir leur caractère licite. Le Nigéria a pris des mesures supplémentaires : l'élaboration d'une politique de contrôle des stupéfiants et du blanchiment de l'argent; la création d'un comité interministériel sur les drogues ou encore l'élaboration d'une stratégie de contrôle des drogues conforme au Programme d'action international des Nations Unies. L'Organe international de contrôle des stupéfiants a salué les efforts du Nigéria et le PNUCID a reconnu que les barons de la drogue et les principaux trafiquants avaient préféré quitté le Nigéria. Pour consolider ses acquis, le Nigéria a mis en place une stratégie de réduction de la demande, convaincu qu'il est plus sûr et moins onéreux de préserver une société exempte de drogues que de traiter des problèmes de traitement et de réinsertion des toxicomanes. Le Nigéria n'a en outre jamais cessé d'explorer le potentiel des efforts sous-régionaux, régionaux et mondiaux dans la lutte contre la drogue. Au niveau sous-régional, il a présidé avec succès à la Conférence des Ministres chargés du contrôle de la drogue dans la région de l'Afrique de l'ouest qui a donné lieu à l'adoption de la Déclaration politique de Praia et du Plan d'action sur le contrôle de l'abus des drogues pour la période 1997- 2001. Le Nigéria a signé et est en train de négocier le Mémorandum d'accord bilatéral sur le contrôle des drogues et des délits financiers avec certains pays.

Il faut dire que la culture du cannabis, répandue en Afrique aux fins d'exportation, affecte la santé publique et la stabilité économique et sociale. Il faut constater avec regret l'accroissement d'un trafic intercontinental de cannabis et d'autres drogues illicites. Le Nigéria estime donc que le PNUCID devrait, dans le cadre de son programme pour l'élimination des cultures des drogues illicites, inclure des activités d'élimination des cultures de cannabis. Le temps est venu de traiter du problème de la drogue avec une meilleure compréhension. Le problème de la drogue étant de nature mondiale, il faut éviter toute politique qui consiste à montrer du doigt certains pays. Comme tout bien et service, le trafic des drogues obéit à la théorie économique de l'offre et de la demande. La consommation des drogues illicites est donc l'origine de la production et du trafic. La réévaluation du problème doit donc tenir compte de la question de la consommation. La session extraordinaire de l'Assemblée générale semble être le forum approprié pour cet exercice de réévaluation.

M. KHALIFA AL-SHAALI (Commandant et Directeur général des forces de police et d'aviation et Ministre de l'intérieur des Emirats arabes unis) : situé entre l'Orient et l'Occident notre pays est particulièrement vulnérable au fléau mortel qu'est la drogue. C'est pourquoi nous avons pris des mesures préventives et élaboré une stratégie nationale compatible avec nos valeurs sociales. Les études sont unanimes pour reconnaître que les syndicats du crime visent en premier lieu les chômeurs pour les impliquer dans des

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activités liées à la drogue, c'est pourquoi nous nous efforçons de trouver un emploi à tous les ressortissants du pays. La collaboration entre les forces de police et la population est renforcée. Les frontières terrestres, maritimes et aériennes sont surveillées de manière étroite et des centres de traitement des toxicomanes ont été créés. Ces nombreux efforts portent déjà leurs fruits et les saisies de substances illicites en tout genre se multiplient. Par ailleurs, des mesures administratives et bancaires ont été prises pour empêcher le blanchiment de la drogue et la distribution des précurseurs chimiques utilisés dans la fabrication des substances illicites est également contrôlée. Les Emirats arabes unis appuient les efforts du PNUCID pour lutter contre les drogues, et particulièrement le plan d'action visant l'élimination des cultures illicites d'ici l'an 2008.

M. SYDNEY MUFAMADI (Ministre de la sûreté et de la sécurité de l'Afrique du Sud): Cette session spéciale revêt une importance particulière pour l'Afrique du Sud car elle intervient au moment où le pays, après avoir mené à bien sa transformation politique, a la volonté d'obtenir des meilleures conditions de vie pour tous. Un des éléments nécessaires à la réalisation de cet objectif et de libérer le monde du fléau de la drogue. Bien que le crime organisé en Afrique du Sud dispose de moyens rudimentaire, la réintégration de notre pays au sein du "Village mondial" offre de nouvelles opportunités aux criminels locaux de tisser des liens avec ceux qui se trouvent au centre de la dimension transnationale du crime organisé. Les trafiquants de drogues trouvent en l'Afrique du Sud un terrain propice pour leurs activités criminelles. Ils ont détourné nos moyens de communication et nos finances à leurs profit. Ils alimentent le trafic de drogues entre les pays de l'Afrique australe et même au-delà. Ils ont intégré notre pays au sein d'un réseau complexe de points de transit pour le trafic de drogues.

En quatre ans et demi, l'Afrique du Sud a tout mis en oeuvre pour traduire dans les faits les instruments internationaux de lutte contre les drogues. Nous réformons notre législation pour l'aligner sur les normes internationales. La communauté internationale a besoin d'un train de mesures équilibrées pour éliminer d'ici à l'an 2008 le fléau de la drogue et à cet égard, nous approuvons pleinement les mesures présentées devant l'Assemblée générale. Le restauration de la primauté du droit est une condition préalable à tous changements dans notre pays. Le trafic de drogues maintient de larges segments de la population "hors-la-loi". La consommation et la production de la drogue crée des couches de population marginalisées par la menace et par l'intimidation. Ce problème est encore plus flagrant dans les démocraties naissantes. Nous accueillons favorablement l'engagement auquel ont souscrit plusieurs pays donateurs d'accroître leurs contributions au PNUCID. Ces ressources supplémentaires permettront d'accroître la capacité du PNUCID de renforcer les institutions chargées d'appliquer la loi, en particulier dans les pays en développement. Le Gouvernement de l'Afrique du Sud a décidé d'accroître sa contribution au PNUCID comme preuve de sa volonté de mener la guerre aux criminels.

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M. MARTIN BELINGA-EBOUTOU (Cameroun): Aujourd'hui, toutes les régions du monde sont affectées par le problème de la drogue. Une action globale et concertée de la communauté internationale qui s'intéresserait aux causes comme aux effets s'avère nécessaire. Les efforts des Nations Unies dans ce domaine doivent être intensifiés. A quoi sert-il de faire la chasse au revendeurs de drogues si les gros producteurs y échappent et prospèrent, si les réseaux tentaculaires de société fictives et de banques mafieuses mettent à l'abri leurs gains illicites et si des paysans n'ont d'autres alternatives pour survivre que la culture du pavot. Les pays en développement qui sont particulièrement vulnérables devraient, en particulier bénéficier, d'une aide accrue, notamment, pour mettre en oeuvre des programmes d'éducation, de formation et d'information de la jeunesse, des programmes de développement de réinsertion sociale des enfants des rues et des jeunes délinquants. Cette aide devrait également permettre d'octroyer une aide technique aux services de police notamment par la formation aux nouvelles techniques de détection, d'aider les paysans travaillant dans les zones de culture de pavot par le développement des cultures de substitution et d'accorder une meilleure rémunération de ces cultures sur le marché international.

M. SOTIRIOS ZACKHEOS (Chypre) : Les efforts de la communauté internationale dans le domaine de la lutte contre la drogue n'aboutiront pas tant qu'ils ne viseront pas les causes du problème. La pauvreté et les déséquilibres socio-économiques, le chômage et l'inégalité des chances devant l'éducation sont toutes des questions qui doivent être résolues de manière urgente afin d'éviter le gouffre de l'abus des drogues. Les actions visant la réduction de la demande doivent être conjuguées aux efforts internationaux tendant à réduire la production des cultures illicites. De même, les programmes de développement alternatif et de culture de substitution doivent être accompagnés de programmes de réinsertion sociale des toxicomanes. Il est également urgent que la coopération policière et judiciaire soit renforcée pour traduire en justice ceux qui tirent profit du commerce des stupéfiants. Pour Chypre la drogue est en quelque sorte une épée de Damoclès. C'est la raison pour laquelle, il a établi une politique de lutte contre la drogue qui consiste à diffuser les informations sur les dangers mortels qu'elle représente. Chypre est déterminé à faire face à cette question avant qu'elle ne devienne un véritable problème. A cet effet, un comité national pour la prévention du trafic et de l'abus des drogues a été créé pour coordonner et fournir des services consultatifs en matière d'information et de prévention.

Point de croisement du trafic maritime entre la Méditerranée orientale, l'Europe, l'Afrique et l'Asie, le trafic maritime des drogues illicites est susceptible de toucher Chypre. C'est la raison pour laquelle, le Gouvernement a, en coopération avec d'autres pays, élaboré une politique de contrôle des douanes. Au centre de cette politique, il faut citer la présence d'officiers de liaison de 13 différents pays à Chypre qui travaillent étroitement avec la police et les douaniers chypriotes. Dans le domaine du blanchiment de l'argent, Chypre a créé une unité de lutte contre ce phénomène. Les initiatives chypriotes montrent à suffisance combien une détermination

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affirmée et une coopération renforcée peuvent transformer un centre "off shore" prospère au premier rang de la lutte contre les drogues et le blanchiment d'argent.

M. ABDUL RAHMAN ABDULLA AL AWADHI (Directeur exécutif de l'Organisation régionale de protection de l'environnement marin du Koweït) : les drogues font peser une menace grave sur l'humanité. Elles touchent particulièrement les jeunes, qui courent le plus grand risque de tomber dans la toxicomanie. Ceci est une traduction du néant spirituelle qui touche les sociétés actuelles et c'est une autre manifestation des tentations auxquelles sont exposés les êtres humains. Nous espérons que les présentes délibérations mettront l'accent sur les valeurs de la famille, véritable sanctuaire. La forte participation à la présente session témoigne de l'importance que la communauté internationale attache à la lutte contre le fléau des drogues. Ce problème compromet la sécurité de tous les pays et entrave leur développement économique et social. La facteur religieux peut être utilisé pour combattre les drogues. Il est important que les politiques de contrôle des drogues soient appliquées par les autorités nationales et les institutions internationales concernées, mais tous les secteurs de la société doivent être également mobilisés dans ce combat. La coopération internationale doit être renforcée, en particulier en matière d'échange d'information et de technologie.

Depuis les années 60, le Koweït est conscient de la gravité du problème et a développé des politiques de lutte contre les drogues. Une agence traitant de tous les aspects du problème a été créée et une loi très avancée, où notamment le toxicomane n'est pas considéré comme un criminel mais comme un malade a été mise en place. Les peines contre les trafiquants en revanche sont sévères. Depuis 1989, nous disposons d'une politique nationale contre les drogues, qui coordonne les efforts nationaux et assure le suivi des politiques. Les efforts à la base sont très importants et une commission spéciale a été instituée qui rassemble des hauts fonctionnaires et des personnalités publiques. Dans le domaine de la lutte contre les drogues, nous croyons que la responsabilité est collective. Nous ne devrions pas prendre à la légère des drogues telles que le haschisch, car cela pourrait tenter la jeunesse à consommer des drogues douces. Le problème demeure toutefois un problème individuel et sans une intervention spirituelle, l'individu cédera à ses instincts. Il faut mettre en commun nos ressources dans l'intérêt de l'humanité pour éliminer ce fléau.

M. MATIA MULUMBA SEMAKULA KIWANUKA (Ouganda) : Si l'application de la loi est indispensable dans le processus de lutte contre la drogue, la promotion de programmes de développement alternatif l'est tout autant. Ces programmes devraient contribuer, notamment, au développement social et économique, à garantir l'intégration économique des zones touchées par les cultures illicites, à la participation des communautés, à la promotion de la démocratie et au rejet d'une culture de la drogue. L'Afrique sub-saharienne doit faire face à une production de drogues illicites à grande échelle, comme la cocaïne ou l'héroïne. Des signes montrent que la situation ne fait

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qu'empirer en raison de problèmes politiques, économiques et sociaux et de l'utilisation de la région comme zone de transit des drogues. L'Ouganda a longtemps plaidé en faveur d'une stratégie de lutte contre le trafic de drogue qui repose sur un programme intégré qui renforcerait les efforts de contrôle des drogues des Nations Unies et qui identifierait des activités ciblées qui seraient mises en place par les Nations Unies, les gouvernements et les organisations régionales et les ONG. Nous devons également mettre en oeuvre des programmes de réhabilitation des toxicomanes et de sensibilisation de la société civile. Une solution durable au problème du trafic de drogues doit comprendre une coopération accrue au développement, l'allégement de la dette, des prix raisonnables pour l'exportation des produits de première nécessité. L'adoption de mesures à court terme, qu'elles soient assorties d'un intervention militaire ou pas, ne contribuera pas à régler le problème.

M. ALEX REYN (Belgique) : Nous sommes entrés dans l'ère de la co- responsabilité et de la responsabilité partagée. Nul doute que les Nations Unies, par leur caractère universel, ont contribué à cette approche plus équilibrée de la problématique de la drogue dans sa dimension internationale. La Belgique soutient le renforcement du pôle drogue/criminalité établi à Vienne et se félicite des impulsions positives données par son Directeur exécutif en vue de renforcer et de refinancer les mécanismes de contrôle des drogues des Nations Unies. La Déclaration politique que nous devrions adopter est un excellent outil qui repose sur une approche équilibrée entre des stratégies nationales et internationales complémentaires. Il ne suffit pas cependant de s'en tenir à des déclarations. Les engagements politiques que nous prendront devront être suivis d'actions concrètes. Celles-ci devraient pouvoir reposer sur une base solide permettant d'optimiser les capacités opérationnelles du PNUCID et de l'OICS, notamment par le biais de l'amélioration de leur statut et d'une meilleure coordination au sein du système des Nations Unies.

L'importance de cette session est double. Il s'agit d'aider les Etats membres à appliquer sans réserves les textes des conventions universelles mais également d'envoyer un message clair à l'opinion publique selon lequel la drogue n'est pas une fatalité. En Belgique, une directive récente établit pour la première fois une distinction entre le cannabis et ses dérivés et les autres drogues illicites en fonction de leur degré de nuisance. Parallèlement à une politique sévère à l'égard des trafiquants de drogue, il convient également d'adopter une attitude plus clémente envers les toxicomanes et leurs familles. La politique de la Belgique en matière de poursuite part du constat qu'il n'est ni possible, ni souhaitable que la justice soit l'unique régulateur social. Les consommateurs de drogues doivent pouvoir bénéficier, en premier lieu, d'un vaste éventail de services d'aide. L'approche pénale et l'incarcération doivent être invoquées en dernier lieu.

M. DAVID RUBADIRI (Malawi) : Le problème des drogues a des origines historiques très anciennes et ne peut être résolu que par une action tenace des Nations Unies. Ma délégation salue, particulièrement, le rôle central et

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pivot que les Nations Unies ont joué, ces dernières années, et continuent de jouer dans le domaine de la lutte contre les drogues. Nous savons depuis longtemps déjà la menace sérieuse que posent les drogues illicites à nos sociétés et à notre tissu social. L'élément clef est que dans ce domaine, aucune société n'a été épargnée par l'effet néfaste de ce fléau, d'une manière ou d'une autre. Le Malawi ne fait pas exception. Mon pays est essentiellement un producteur de cannabis et la tendance récente révèle une augmentation de la consommation et également du trafic. Nous sommes aussi devenus un pays de transit de drogues dures et de substances psychotropes. C'est pourquoi la subtile distinction entre pays producteurs, pays de transit ou pays consommateurs n'a plus d'importance pratique pour nous. Les effets socio-économiques des développements récents de ce problème sont notamment l'abandon précoce de l'école et l'augmentation de la petite criminalité. Malgré un cadre juridique et institutionnel approprié, nous nous rendons compte qu'il est impossible de combattre seul et avec succès ce problème. Le Malawi est parti aux principaux instruments internationaux dans ce domaine et, dans le cadre de la coopération régionale, nous nous attachons également à examiner collectivement la question du blanchiment de l'argent. Nous accueillons avec satisfaction le rapport de la Commission des stupéfiants, organe préparatoire de la présente session. Un travail remarquable a été accompli qui permet de maintenir le caractère prioritaire de cette question dans l'ordre du jour de la communauté internationale. Les approches prises sont globales, équilibrées et contiennent une obligation de résultats. Le Malawi soutient tous les documents soumis par la Commission des stupéfiants à la présente session car ils constituent une stratégie globale qui devrait mener à la réalisation, au siècle prochain, d'un monde exempt de drogues.

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