8 juin 1998


Communiqué de Presse
AG/766



LES CONCEPTS DE RESPONSABILITE PARTAGEE ET D'ACTION CONCERTEE DEVRAIENT GUIDER LES EFFORTS DE LUTTE CONTRE LA DROGUE

19980608
L'idée de création d'un fonds mondial de lutte contre la drogue a été avancée

L'Assemblée générale a poursuivi cet après-midi son débat général dans le cadre de sa session extraordinaire consacrée au problème mondial de la drogue. Partant du constat que les stratégies nationales de lutte contre le trafic de drogues n'ont pas abouti aux résultats escomptés, les participants ont souligné l'importance d'une nouvelle approche qui dépasse le concept traditionnel de la responsabilité des Etats et qui embrasse une coopération soutenue au plan international. Le caractère transnational de la criminalité liée à la drogue, l'ampleur du phénomène en pleine mutation, la perméabilité des frontières nationales et l'inadéquation des organes de contrôle du trafic de drogues sont autant d'éléments justifiant une responsabilité partagée de la communauté internationale, une stratégie concertée et équilibrée tenant compte de l'offre et de la demande.

Dans ce contexte, les pays de la communauté internationale, en particulier les producteurs, ont suggéré l'annulation de la dette extérieure afin de leur permettre de consacrer les ressources ainsi économisées à des programmes de développement alternatif. Ces pays ont suggéré en outre la création d'un fonds mondial de lutte contre la drogue qui serait financé à l'aide de ressources provenant des saisies de drogues et du blanchiment de l'argent. Ces pays ont également avancé l'idée de financement de projets de cultures de substitution et celle de renforcement des efforts visant la réduction de la demande dans les pays consommateurs.

L'Assemblée a entendu les personnalités suivantes : M. Ernesto Pérez Balladares, Président du Panama; M. Alberto Fujimori, Président du Pérou; M. Arnoldo Alemán Lacayo, Président du Nicaragua; M. Eduardo Frei Ruiz-Tagle, Président du Chili; M. Ernesto Samper Pizano, Président de la Colombie; M. Emomali Rakhmonov, Président du Tadjikistan; M. Emil Constantinescu, Président de la Roumanie; M. Juan Carlos Wasmosy, Président du Paraguay; M. Armando Calderón Sol, Président d'El Salavador; M. Teodoro Obiang Nguema Mbasogo, Président de la Guinée équatoriale; M. Burhanuddin Rabbani, Président de l'Afghanistan; M. Guntars Krasts, Premier Ministre de la Lettonie; M. Hubert A. Ingraham, Premier Ministre du Commonwealth des Bahamas; M. Izzet Rustamov, Vice-premier Ministre de l'Azerbaïdjan; M. Jan-Erik Enestam,

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Ministre de l'intérieur de la Finlande; M. Murat Baseskioglu, Ministre de l'intérieur de la Turquie; M. Karl Schlögl, Ministre fédéral de l'intérieur de l'Autriche; M. Dumiso Dabengwa, Ministre de l'intérieur du Zimbabwe; M. Knight, Ministre de la sécurité nationale et de la justice de la Jamaïque; M. Jaswant Singh, Vice-président de la Commission de la planification de l'Inde et M. Patrick Albert Lewis, Antigua-et-Barbuda.

L'Assemblée générale reprendra son débat général ce soir à partir de 19 heures.

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Débat général

M. ERNESTO PEREZ BALLADARES (Président du Panama) : Les Nations Unies mènent actuellement une véritable guerre contre la drogue. Les succès partiels remportés contre notre ennemi commun sont toutefois très modestes si on les compare aux souffrance causées par la drogue. Chaque vie perdue est une défaite retentissante pour l'ensemble de la communauté internationale. Bien que satisfaits des mesures prises unilatéralement par mon pays, nous nous engageons à oeuvrer collectivement à la tâche qui nous attend. Toutefois l'engagement que nous prenons ici ne doit pas se limiter à des textes ou à un plan d'action. Nous devons tous agir avec détermination et vigueur pour atteindre l'objectif poursuivi. Ce ne sera toutefois pas facile, d'autant que l'Etat de droit accorde des prérogatives et certaines protections que les criminels savent utiliser pour entraver le processus judiciaire. Il faut aller au delà des engagements écrits et développer un effort concerté entre nations. On pourra de la sorte mettre un terme à cette véritable guerre mondiale.

M. ALBERTO FUJIMORI (Président de la République du Pérou) : On ne saurait accorder le moindre répit ou espace aux personnes ou aux cartels de drogues. Au Pérou, en 1990, on comptait 120 000 hectares de terres consacrées à la culture de la coca. Grâce à une stratégie antidrogue et de lutte contre le terrorisme, son allié, on a réduit de manière spectaculaire la superficie de terres consacrées à la culture de la coca, qui se situe aujourd'hui aux alentours de 60 000 hectares, ainsi que le nombre de familles vivant de cette culture. Les conditions sont favorables au lancement de programmes d'économie de substitution. Toutefois à cet effet, l'Etat péruvien dispose de ressources insuffisantes. La capacité des pays producteurs à consolider le processus de substitution des cultures est largement entravée par le poids de leur dette extérieure. C'est pourquoi les pays développés devraient entreprendre tous les efforts possibles pour empêcher la résurgence des conditions favorables à la reprise du trafic des drogues. Cela signifie, évidemment, qu'il faut couper à la racine toute possibilité de relance de l'offre. Mais la volonté politique doit également se traduire par des ressources financières permettant aux programmes d'être mis en place de manière durable. A cet égard, il faut trouver des mesures et des mécanismes inédits qui permettraient aux pays en développement de prendre les mesures nécessaires. Dans ce contexte, en octobre prochain, se tiendra, sous les auspices de la Banque de développement interaméricaine et de la Commission interaméricaine pour le contrôle des drogues, une table ronde des pays donateurs. Il s'agira de garantir la provision de ressources financières complémentaires pour permettre la mise en oeuvre du développement alternatif, notamment dans le cadre de politiques de lutte contre la pauvreté. La table ronde devrait permettre en premier lieu d'obtenir des crédits à moindre coût pour lutter contre les drogues. La deuxième formule de financement des activités alternatives s'inspire des programmes d'effacement de la dette en échange de la protection de l'héritage naturel et culturel. Il serait ainsi possible d'échanger la dette extérieure contre la mise en place d'activités de développement alternatif. Une partie

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non négligeable du service annuel de la dette serait alors destinée à des programmes de lutte contre le trafic des drogues illicites. La philosophie de la table ronde des donateurs comme de la stratégie d'échange de la dette contre la culture de la coca est la même et vise à rendre des fonds disponibles pour gagner la guerre contre les drogues.

M. GUNTARS KRASTS (Premier Ministre de Lettonie) : La mise en oeuvre des mesures prises par la Lettonie dans le domaine du contrôle des stupéfiants s'est heurtée à des difficultés engendrées par l'héritage désastreux des cinquante ans d'occupation soviétique. Si selon le PNUCID, la Lettonie ne représente pas une priorité en matière de stupéfiants, il faut souligner sa vulnérabilité croissante face au commerce illicite des stupéfiants. Le pays se situe en effet au croisement du Caucase et des pays d'Asie centrale d'un côté - production du haschich et pavot à opium - et l'Europe - production de drogues synthétiques -. Dans le même temps, la production d'amphétamines et autres drogues synthétiques semble être en augmentation tout comme les crimes liés au trafic illicite de stupéfiants et de substances psychotropes, tels que le blanchiment d'argent, la corruption et la prostitution. La politique de la Lettonie en la matière consiste en une approche équilibrée entre la réduction de la demande et celle de l'offre.

Hôte du Bureau régional du PNUCID, la Lettonie a préparé, sur recommandation de ce dernier, un Programme national de contrôle des drogues et a l'intention d'adopter un Plan national qui devra définir les principaux objectifs et améliorer la coordination entre les ministères concernés. Attachant une importance particulière à la coopération régionale et sous- régionale, la Lettonie se félicite que les premiers ministres des Etats baltes aient adopté, dans le cadre du Sommet du Conseil ministériel des Etats baltes de novembre 1997, une résolution réaffirmant leur intention de poursuivre leur coopération en matière de contrôle des frontières, de lutte contre le crime organisé international, d'immigration illégale et de blanchiment de l'argent. La résolution touche aussi les mesures de lutte contre le trafic illicite des stupéfiants. Cette coopération a déjà porté ses fruits en ce qui concerne le blanchiment de l'argent. Dans le cadre de la coopération entre les pays nordiques et les pays baltes, il faut citer la tenue d'une réunion ministérielle le 19 mai dernier qui a donné lieu à une déclaration commune souscrivant aux objectifs de la session extraordinaire.

M. ARNOLDO ALEMAN LACAYO (Président de la République du Nicaragua) : Conscient de l'importance du thème de cette Session pour l'humanité et les générations futures, le Gouvernement de la République du Nicaragua confirme sa vocation morale, et sa volonté politique inébranlable de s'unir sans réserve aux efforts et actions de la communauté internationale afin de lutter de front et sur tous les terrains contre le trafic illicite de la drogue et les crimes qui y sont associés. Les pays en développement, notamment ceux qui ont connu de récentes guerres civiles comme le Nicaragua, font des efforts importants pour lutter contre la pauvreté et le chômage; ils connaissent des conditions techniques et économiques difficiles pour faire face aux ennemis puissants de

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l'humanité qui opèrent au niveau international, disposent de moyens financiers et techniques très importants et ont recours à la corruption et à la violence. Nous devons définir avec précision les mesures à prendre en vue de lutter de manière concertée contre la production, la vente, la demande, le trafic et la distribution illicite de stupéfiants et autres activités liées à ces délits de nature internationale. Il est également indispensable d'analyser les problèmes liés au transport des stupéfiants, au rôle des pays de transit et aux aspects juridiques, pénaux et de souveraineté nationale qui y sont liés. Les mesures visant à lutter contre ce fléau doivent également occuper une place prioritaires dans les politiques nationales. La drogue est un des problèmes internationaux les plus sérieux, et la progression de délits qui y sont liés contribuent à augmenter les indices de violence, de corruption et de criminalité. Mon pays a pleinement souscrit et appuie avec détermination l'initiative du Président Zedillo et espère que le projet de déclaration politique présenté à cette Session sera voté par acclamation.

M. EDUARDO FREI RUIZ-TAGLE (Président du Chili) : Plus de trente ans après l'adoption de la Convention unique sur les stupéfiants de 1961, nous n'avons progressé que légèrement dans nos efforts de lutte contre les drogues. Nous n'avons pas été en mesure de développer de nouvelles stratégies pour affronter un phénomène en constante mutation qui est doté de moyens considérables. Même si nous avons répété à maintes reprises qu'il est essentiel de lutter de façon conjointe, nous n'avons jamais été en mesure de traduire ce raisonnement dans les faits, ou tout au moins, que dans une certaine mesure. Par conséquent, il est indispensable de prendre des mesures pour développer des politiques de coopération qui reposent sur une nouvelle façon d'appréhender, de comprendre et d'assumer une responsabilité internationale commune. Nous devons agir sur le base de la confiance mutuelle, de la solidarité, de l'assistance mutuelle et horizontale dans le respect du droit national et international. Reconnaître la responsabilité traditionnelle des Etats dans leurs frontières n'est pas suffisant pour lutter contre le trafic des drogues. Dans ce contexte, nous proposons la pleine mise en oeuvre des trois Conventions des Nations Unies ainsi que des traités régionaux et bilatéraux en donnant toute son importance à la coopération judiciaire. Le Sommet des Amériques qui s'est tenu au Chili il y a quelques mois a adopté une stratégie qui souligne l'importance d'un traitement exhaustif et équilibré du phénomène de la drogue. Le Plan d'action a reconnu et souligné l'engagement indispensable de la part de la société civile et la communauté des affaires. Cet effort considérable doit aller de pair avec le renforcement de la démocratie, une plus grande décentralisation de l'autorité et la croissance économique mondiale. C'est la raison pour laquelle nous attachons tant d'importance à la nature exhaustive de la lutte contre la drogue. En même temps, le consommation des drogues exige des actions préventives et en particulier des efforts dans le domaine de l'éducation des jeunes et des groupes les plus vulnérables.

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M. ERNESTO SAMPER PIZANO (Président de la Colombie) : On commence aujourd'hui à comprendre que le problème de la drogue concerne tous les pays du monde et qu'en la matière, personne ne peut jeter la première pierre pour prouver son innocence. Les effets dévastateurs des drogues sur les institutions politiques, le développement économique et la santé et la sécurité des citoyens nous contraignent à entreprendre une réflexion franche sur la façon dont nous pouvons, nous nations du monde, faire face à ce problème. Il y a 20 ans, la Colombie était un pays relativement pacifique et l'arrivée de la drogue a perturbé le destin paisible de la nation colombienne. L'argent de la drogue a contaminé la politique et corrompu les valeurs et il est devenu une source de financement des différentes formes de violence, comme la guérilla et les groupes de justice privée.

Plus d'un milliard de dollars est dépensé chaque année par la Colombie pour lutter contre le trafic des drogues et développer des programmes de cultures de substitution. Les deux plus grands cartels de la drogue ont été démantelés et plus de 9 000 trafiquants sont en prison. De plus, l'extradition des ressortissants colombiens, auparavant expressément interdite par la Constitution, a été rétablie. Mais la communauté internationale doit comprendre que la responsabilité de la lutte contre les drogues ne peut relever d'un seul pays. Dans la mesure où l'on est en présence d'un marché basé sur le principe de l'offre et de la demande, ce n'est qu'en utilisant tous les maillons de la chaîne que l'on pourra imaginer une solution définitive au problème de la drogue, qui doit être guidée par trois principes : celui de la coresponsabilité selon lequel tous les pays du monde, sans exception, sont responsables du trafic de drogues; le besoin d'une action multilatérale et globale, visant chacune des étapes du fléau, de la semence à la consommation. La façon dont la Colombie envisage la lutte contre la drogue a enfin prévalu dans les instances internationales. La lutte ne peut être nationale, ni même continentale, elle demande des efforts mondiaux et les jeunes du monde attendent plus que des déclarations d'intention. Il faut un programme d'action, passant par un accord d'élimination des cultures du pavot, de la coca et de la marijuana, remplacées par des cultures de substitution et contrôlées par un système de surveillance par satellite. Il faut également établir un accord sur le contrôle de la production, du transport et de l'utilisation des substances chimiques, ainsi qu'un accord d'interdiction de la circulation maritime, aérienne et terrestre des drogues par un système de suivi électronique. La confiscation de l'argent de la drogue devrait également être possible et grâce à ces saisies, un fonds mondial de lutte contre la drogue pourrait être créé. Il est également nécessaire de mettre en place des programmes de prévention dans les domaines de la santé, de l'éducation et de la lutte contre le crime, en permettant la participation de la société civile. Enfin, la lutte contre le trafic des drogues demande des accords de coopération judiciaire, assurant les échanges de preuves et d'information. Cette session doit permettre de trouver une stratégie conjointe de lutte contre la drogue, ce que la Colombie n'a cessé de demander, alors qu'elle était devenue la victime de l'application de mesures

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unilatérales affectant sa souveraineté à cause de la drogue. C'est avec optimisme qu'il faut lutter jusqu'au bout contre les drogues et leur pouvoir destructeur, 40 millions de Colombiens attendent le résultat de cette session historique.

M. EMOMALI RAHKMONOV (Président du Tadjikistan) : L'émergence d'une mafia de la drogue au Tadjikistan s'explique par la lutte d'influence intense que se livrent les différentes factions de la région; les conséquences de la guerre civile; le caractère inadéquat du contrôle de la frontière entre le pays et l'Afghanistan; et le manque de qualification du personnel chargé de contrôler le trafic illicite des stupéfiants. Le Tadjikistan ne peut seul résoudre la question du transit de la drogue sur son territoire. Les efforts en la matière doivent être effectués conjointement par tous les Etats intéressés et les organisations internationales. Cependant, le Tadjikistan a créé un organe spécial sur le contrôle des drogues et adopté un programme national pour 1996-1998. Sur recommandation du PNUCID, il a élaboré un loi sur les drogues et ajouté un chapitre sur la question dans la nouvelle législation pénale. L'élaboration d'un plan général sur le contrôle des drogues pour 1999-2000 est presque terminé.

Etant donné que les pays d'Asie centrale concentrent leurs efforts à contrôler la drogue le long de leurs frontières avec le Tadjikistan, ce dernier se retrouve seul dans ses efforts pour localiser l'origine de la drogue en Afghanistan. Le Tadjikistan estime qu'il faut de toute urgence créer, en collaboration avec les Etats intéressés et les organisations internationales, un filet de sécurité anti-drogues autour de l'Afghanistan. Compte tenu de la position géopolitique et de la situation économique et sociale de l'Afghanistan, qui demeure un des plus grands fournisseurs de stupéfiants dans le monde et un pays de transit important, il est urgent de développer des projets distincts pour les régions de ce pays les plus concernées.

M. EMIL CONSTANTINESCU (Président de la Roumanie) : Dans le contexte spécifique des sociétés d'Europe centrale et de l'Est, aux dangers que représentent le trafic et la consommation des drogues pour chaque Etat du monde, s'ajoute le risque d'une véritable main-mise des réseaux criminels sur les leviers essentiels de la construction des nouvelles démocraties. La rapidité avec laquelle les organisations criminelles se sont lancées à la conquête de l'Europe centrale et de l'Est contraste vivement avec le rythme, forcément plus lent, de leur construction institutionnelle. L'Etat roumain a déclenché une triple action de défense: le perfectionnement du cadre législatif, la réforme des institutions et surtout une intense action éducative, en vue de prévenir l'extension de la toxicomanie. La Roumanie a ratifié toutes les Conventions des Nations Unies relatives au contrôle international des drogues, s'est ralliée à l'ensemble des programmes des Nations Unies en la matière, et va adopter les résolutions de la présente session, car ce n'est que par la coopération internationale que ce fléau mondial de la production, du trafic et de la diffusion de la drogue peut être

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entravé. Après le changement politique de 1996, la Roumanie s'est largement investie à lancer des stratégies de coopération régionale en vue de combattre le trafic de drogue qui risque de transformer l'Europe centrale et de l'Est en zones de transit et de consommation. La Roumanie a notamment signé les accords trilatéraux sur le renforcement de la protection contre le crime organisé avec la Bulgarie, la Turquie, la République de Moldova et l'Ukraine. La Roumanie salue l'initiative que le Président Clinton vient de prendre en matière de répression de la criminalité internationale à laquelle elle va adhérer sans réserve.

M. JUAN CARLOS WASMOSY (Président du Paraguay) : Depuis neuf ans, nous bénéficions d'un modèle républicain après des décennies de régime autoritaire. Nos succès remportés dans la lutte contre la drogue ne seraient que relatifs s'ils n'avaient pas été obtenus par un Gouvernement démocratiquement élu. Il faut souligner la décision adoptée lors du Sommet des Amériques d'avril dernier, sur le fondement de laquelle nous élaborons une stratégie à l'échelle de l'hémisphère sud. Nul doute que le concours des organismes des Nations Unies, dont le fer de la lance est la Commission des stupéfiants, constituera un appui indispensable pour gérer ce problème au niveau international. Mon pays continuera d'appuyer ces institutions et il en veut pour preuve l'adoption d'une stratégie nationale contre la drogue. Cette réunion aujourd'hui témoigne de la volonté de toute la société paraguayenne de s'associer à la lutte contre la drogue. A partir du 15 août prochain, j'exercerai les fonctions de Sénateur à vie et je m'engage fermement à déployer tous mes efforts dans cette lutte contre le fléau de la drogue.

M. HUBERT A. INGRAHAM (Premier Ministre du Commonwealth des Bahamas) : Le fléau de la drogue a volé l'innocence de mon pays, il a fait de la violence un fait commun, et de la crainte de la violence un malaise croissant. Les drogues illicites nous affectent tous. La présente session extraordinaire arrive à point nommé, à l'aube d'un nouveau millénaire et dans un climat de mondialisation et de libéralisation du commerce sans précédent, qui a involontairement aidé les trafiquants de drogues illicites, qui bénéficient notamment de l'expansion du commerce international, de l'amélioration des technologies de production et de la sophistication des méthodes de transport et de vente. Les Bahamas ne sont ni producteurs ni grands consommateurs de drogues illicites, et cependant cela ne les a pas empêchés de souffrir cette calamité que sont les drogues, car ces îles sont devenues l'une des routes de prédilection des mouvements clandestins de ces substances dans les Amériques. Or les Bahamas n'étaient guère préparés à affronter les effets du commerce des drogues et la vague de criminalité qui a suivi l'invasion massive du crime organisé des drogues. Depuis 1987, une vaste contre-offensive a été lancée par le Gouvernement des Bahamas, en coopération avec ses voisins, par le biais notamment de l'accord d'interdiction conjoint avec les Etats-Unis dénommé Opération Bahamas Turks et Caïques, mais les criminels se sont avérés résilients, flexibles et sophistiqués. Il est clair aujourd'hui que le trafic par les Bahamas connaît une reprise. Tous les partenaires de la lutte anti-drogue doivent résister à la tentation de redéployer les ressources; ils

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doivent au contraire maintenir et renforcer leurs efforts. Les Bahamas soutiennent pleinement les propositions soumises lors de la présente session, mais ils aimeraient soumettre un plan portant sur la réduction de la demande, l'utilisation efficace des ressources, l'échange d'informations et l'établissement des priorités.

M. ARMANDO CALDERON SOL (Président de la République d'El Salvador) : La République d'El Salvador appuie fermement les travaux des Nations en matière de lutte contre la drogue par l'intermédiaire de la Commission de contrôle des stupéfiants et du PNUCID. La drogue constitue une menace mondiale qui compromet à la fois la santé et le développement des populations, la stabilité des structures sociales et la légitimité politique et économique des Etats. La communauté internationale exige désormais que nous jouions un rôle plus important pour protéger la vie et la santé de nos peuples et la République d'El Salvador adhère à toutes les composantes de la Déclaration politique qui insiste sur la responsabilité partagée des membres de la communauté internationale dans la lutte contre la drogue. Il incombe à tous les pays d'oeuvrer pour coordonner leurs efforts. Dans mon pays des efforts sont faits en ce sens, ce qui prouve notre détermination à combattre ce fléau social, et il nous avons notamment à l'étude un projet de loi sur le blanchiment de l'argent. Nous proposons que les Etats Membres se réengagent à atteindre pleinement les objectifs qu'ils se sont donnés dans le cadre des Conventions des Nations Unies relatives aux stupéfiants, et se donnent tous les moyens pour lutter contre les stupéfiants et le crime. A l'aube du millénaire prochain nous devons saisir l'occasion de faire la preuve de notre détermination politique en ce sens en travaillant ensemble dans le combat contre la drogue.

M. TEODORO OBIANG NGUEMA MBASOGO (Président de la République de Guinée équatoriale) : Cette réunion intervient au moment opportun, alors que tous les gouvernements du monde sont conscients que le trafic des drogues détruit la jeunesse, dégrade l'homme et génère des troubles sociaux et des actes terroristes. L'ampleur du trafic des drogues et des stupéfiants est telle que les gouvernements sont incapables de le contrôler de manière indépendante et isolée. La collaboration et l'action conjointes de tous les pays sont donc indispensables. Il faut aussi procéder à un échange d'expérience, d'information et de technologies pour lutter contre ce fléau. La Guinée Equatoriale a toujours apporté son soutien à la lutte contre les drogues et a multiplié les efforts tant au niveau national, en promulguant en 1993 un décret prohibant la production, la vente, la consommation et le trafic des drogues, qu'au niveau sous-régional en améliorant la surveillance des frontières terrestres, maritimes et aériennes avec les pays voisins. Mais ces mesures ne seront pleinement efficaces qu'en recueillant la coopération et l'aide conjointe de la communauté internationale car les drogues ne connaissent pas de frontières. Il ne fait aucun doute que la pauvreté des populations et la fragilité des structures sociales et économiques favorisent le développement de la culture et du trafic illicites des drogues. C'est pourquoi tout programme de lutte doit s'attacher à combattre la pauvreté,

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l'analphabétisme et le déficit technologique dans le monde et en Afrique, en particulier. Les institutions bancaires impliquées dans le blanchiment de l'argent de la drogue doivent être sanctionnées. En ce qui concerne tout particulièrement l'Afrique, la lutte contre les drogues doit également englober la lutte contre les trafiquants d'armes.

M. BURHANUDDIN RABBANI (Président de l'Afghanistan) : Nous souhaitons réellement que cette session extraordinaire de l'Assemblée générale mène à l'adoption d'un programme d'action exhaustif et complet de lutte contre les drogues. Nous réitérons notre engagement en faveur de la mise en oeuvre de la Déclaration politique et des autres documents pertinents de cette session. La culture du pavot en Afghanistan existait auparavant à petite échelle mais les événements des deux dernière décennies ont mené à la disparition des structures administratives et sécuritaires. L'absence de programmes préventifs et le financement par des sources étrangères d'une guerre de substitution n'a fait que créer les conditions propices à l'expansion de la culture du pavot, en particulier dans les provinces de l'Est et du Sud du pays dirigées actuellement par les Taliban. Ce phénomène, qui a pris des dimensions transnationales, exige une réponse internationale coordonnée, en particulier au sein du système des Nations Unies.

Il est surprenant et consternant d'assister à une aberration de la part d'une institution des Nations Unies et nous ne comprenons pas comment un tel organe exécutif peut conclure un accord avec un groupe de mercenaires. Ce groupe de mercenaires, qui pourrait occuper la moitié du pays, n'est pas un parti politique. Nous ne pouvons pas fermer le yeux devant la symétrie qui existe entre l'accroissement extraordinaire de la production de drogue et la montée en puissance des Taliban. Ceux-ci, en violation complète des normes internationales, lèvent ouvertement un impôt sur la culture et l'exportation du pavot. Nous sommes fermement convaincus que la réduction de la demande et de la consommation est un élément clé de la lutte contre le trafic de drogues. L'ampleur du problème de la drogue et la capacité de la communauté internationale à lutter contre ce problème doivent être coordonnés de façon efficace. A cet égard, l'action du Programme des Nations Unies pour le contrôle international des drogues (PNUCID) et son rôle de coordonnateur est louable.

Sur la base de la responsabilité partagée et d'une approche concertée, nous appelons la communauté internationale et les institutions spécialisées à nous aider dans nos efforts en faveur de la paix et de la reconstruction. Des mesures de développement rurales s'inscrivant dans le cadre d'un développement économique durable, traceront la voie pour l'élimination de la pauvreté et donc contribueront à l'élimination de la culture du pavot. Nous accueillons avec satisfaction les investissement consentis par les institutions financières internationales et des banques régionales de développement et notamment les projets visant à utiliser le sol afghan comme zone de transit pour l'extension des oléoducs. La coopération judiciaire, l'extradition des

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trafiquants de drogue, l'assistance judiciaire mutuelle, le transfert des procédures répressives contribueront aux efforts de la communauté internationale dans sa lutte contre la drogue.

M. IZZET RUSTAMOV (Vice-Premier Ministre de l'Azerbaïdjan) : Le problème de la drogue constitue un danger particulier pour les états qui ont récemment obtenus leur indépendance, y compris l'Azerbaïdjan, et qui rencontrent des difficultés économiques et sociales pendant le période de transition. La situation de l'Azerbaïdjan est d'autant plus compliquée que le pays se situe à la jonction entre l'Europe et l'Asie ce qui le rend intéressant pour les narcotrafiquants qui en ont fait une route de transit de l'est vers l'ouest. Puisque l'Arménie occupe plus de 20% du territoire de l'Azerbaïdjan, 130 km de la frontière sud du pays ne peuvent être contrôlés par les autorités douanières et les gardes frontières. L'Accord de Baku de février 1997 a défini les fondements pour un renforcement de la coopération internationale visant à lutter de manière efficace contre le problème de la drogue dans la région. Il a condamné toute violation des frontières nationales et de l'intégrité territoriale, ainsi que l'occupation étrangère qui compromettent les activités de lutte contre la drogue. Faire face aux problèmes liés à la drogue constitue l'une des priorités de l'Azerbaïdjan qui a créé à cet effet la Commission nationale de contrôle de la drogue et a élaboré un programme national contre les activités liées aux stupéfiants. De plus, l'Azerbaïdjan a souscrit à la Convention des Nations Unies de 1988. Mon pays attache beaucoup d'importance à la réduction de la demande de stupéfiants mais ne dispose malheureusement pas des moyens financiers suffisants pour lui permettre de mettre pleinement en oeuvre les mesures nécessaires. Une assistance internationale plus importante à l'Azerbaïdjan permettrait d'obtenir des résultats tangibles dans la lutte contre le trafic illicite de la drogue à la fois au niveau national et international.

M. JAN-ERIK ENESTAM (Ministre de l'intérieur de la Finlande) : La session extraordinaire souligne l'engagement des Gouvernements réunis ici à combattre le problème mondial de la drogue. Afin de permettre de réduire la demande, il faut davantage utiliser la technologie moderne et mettre en place des programmes de prévention destinés à empêcher la jeunesse de consommer des drogues. Le système des Nations Unies permet de donner un cadre au débat sur la drogue afin d'adopter des mesures communes pour lutter contre ce problème. Le rôle du Programme des Nations Unies pour le contrôle international des drogues (PNUCID) doit être renforcé. La mondialisation de l'économie et l'augmentation des flux de capitaux contribue à offrir aux organisations criminelles internationales des possibilités accrues, notamment en ce qui concerne le blanchiment de l'argent. La valeur totale des ressources provenant de sources illégales, qui sont intégrées dans des marchés financiers légaux, pourrait atteindre entre environ 100 et 500 millions de dollars américains. Les législations nationales continuent à constituer la base des mesures visant à prévenir le blanchiment de l'argent alors que la seule façon efficace de maîtriser ce grave problème devrait être envisagée à l'échelle mondiale. La Déclaration politique qui sera adoptée au cours de cette session

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devrait permettre de renforcer les mesures prises au niveau mondial. La Convention des Nations Unies sur le crime organisé transnational, qui est actuellement en cours de négociation, devrait inclure la question de la prévention du blanchiment de l'argent. La Finlande reconnait le rôle essentiel de la coopération tant régionale qu'internationale. Elle soutient fermement les mesures qui sont prises en vue de renforcer la coopération judiciaire internationale. La Finlande estime par ailleurs qu'il est important d'offrir aux jeunes des alternatives aux drogues. Le développement des technologies de l'information peut jouer un rôle clé dans la lutte contre la drogue. La conférence régionale sur l'information et les technologies de la communication, que la Finlande organisera en 1999, pourrait être considérée dans le contexte de la prévention de la drogue.

M. MURAT BASESGIOGLU (Ministre de l'intérieur de la Turquie) : La déclaration politique qui sera adoptée à la présente session est l'expression d'un engagement universel pour créer un climat politique de plus grande coopération en matière de lutte contre la drogue. La Turquie s'engage à oeuvrer sur les plans national et international, par le biais de la coopération bilatérale et multilatérale, pour réaliser les objectifs équilibrés visés par la déclaration politique. Il faut formuler des politiques plus efficaces pour le contrôle de la demande dans les pays développés. Il ne serait pas réaliste de s'attendre à ce que les mécanismes internationaux de contrôle réalisent leurs objectifs sans réduire la demande. Il faudrait également établir un contrôle plus efficace des précurseurs chimiques comme l'anhydride acétique. Tout en adoptant des mesures globales pour faire face à ce problème, les producteurs devraient être solidairement responsables et déployer tous les efforts nécessaires pour contrôler l'exportation de ces substances. En outre, la coordination au sein du système des Nations Unies concernant les menaces de trafic illicite des stupéfiants, du crime organisé et du terrorisme international, doit être placée au centre des priorités des Nations Unies. Les pays laxistes à l'égard des terroristes devraient prendre en considération l'avenir de leurs sociétés et amender leurs politiques. Depuis 1974, la Turquie a adopté la méthode la plus saine, mais la plus coûteuse, pour la production de graines de pavot. A ce jour, il n'existe aucune diversion de la production licite et la pratique turque est citée en exemple par l'Organe international de contrôle des stupéfiants. Tous les Etats ont une obligation morale à l'égard des générations futures pour leur offrir un environnement exempt de drogues, sain et sûr.

M. KARL SCHLOGL (Ministre de l'intérieur de l'Autriche) : Nous soutenons les efforts internationaux déployés pour lutter contre le trafic illicite des drogues, que ce soit dans le cadre d'une coopération internationale de la police à travers Europole ou Interpole ou que ce soit dans le cadre de l'espace de Shengen ou encore des Nations Unies. Grâce à l'initiative du Secrétaire général des Nations Unies et de son Secrétaire général adjoint, M. Pino Arlacchi, Vienne est devenu la plaque tournante de la lutte que mène les Nations Unies contre les drogues. Néanmoins, compte tenu de l'ampleur et

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de la complexité du problème de la drogue, il est nécessaire d'intensifier la coopération nationale, locale et internationale et de renforcer les organe internationaux de contrôle des drogues.

Le processus de négociation mené sous la Présidence de l'Ambassadeur du Portugal a produit des résultats tangibles. Des objectifs communs, des directives politiques et des programmes d'action ont été fixés. Le problème de la drogue ne peut pas être résolu uniquement par l'application des lois mais doit également tenir compte de l'aspect médical et d'une approche thérapeutique. L'Autriche, qui présidera l'Union européenne à partir de la seconde moitié de l'année en cours, continuera de tracer le chemin pour une stratégie européenne de lutte contre la drogue. Elle aura également l'occasion de tester les nouvelles opportunités offertes par le Traité d'Amsterdam. Nous avons également l'intention d'intensifier la coopération avec les pays d'Europe centrale, ceux d'Europe de l'Est et des pays tiers. Il nous faut également remplir les objectifs fixés pour l'horizon 2003 et 2008 et mettre en oeuvre la Déclaration relative aux principes directeurs en matière de réduction de la demande des drogues grâce à un programme d'action international et pluridisciplinaire.

M. DUMISO DABENGWA (Ministre de l'intérieur du Zimbabwe) : Aucune nation n'est à l'abri du fléau de la drogue et prétendre le contraire serait irréaliste. Aujourd'hui plus que jamais, il est nécessaire de faire face ensemble aux défis posés par le trafic des drogues et des stupéfiants. Si certains pays sont des centres de production tandis que d'autres sont des plaques tournantes pour la commercialisation des drogues ou des marchés de consommation, cela n'a pas beaucoup d'importance en ces temps de mondialisation. L'échec de la communauté internationale à coopérer pleinement ne donnera aux barons de la drogue que la possibilité d'exploiter au maximum une telle faiblesse. Conscient que les trafiquants, cartels et syndicats, ont une influence mondiale et sont devenus des agents destabilisateurs ainsi qu'une menace à l'ordre social, économique et politique, le Zimbabwe, de concert avec les pays du sud de l'Afrique, a pris plusieurs initiatives de lutte contre la production, la distribution et la consommation des drogues et substances psychotropes. Ainsi d'ici à la fin de 1998, il devrait disposer de son propre Plan national de contrôle des drogues. Les cadres régionaux et internationaux de lutte doivent être cependant renforcés. En ce qui concerne le Zimbabwe, le Cannabis représente de loin le plus grand problème de la consommation et du trafic. Il s'agit de la drogue la plus populaire et la moins coûteuse, ce qui permet tant aux jeunes qu'aux personnes au chômage de pouvoir la consommer. C'est pourquoi le Zimbabwe se félicite de la récente décision du Programme des Nations Unies pour le contrôle international des drogues d'inclure le cannabis dans sa stratégie globale d'élimination des cultures de plantes illicites.

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M. K.D.KNIGHT (Ministre de la sécurité nationale et de la justice de la Jamaïque) : Le lien étroit entre les armes et la drogue a conduit à l'escalade de la violence et du crime, ce qui compromet sérieusement la paix, la sécurité et, à terme, la stabilité de plusieurs pays ainsi que la sécurité internationale. Le caractère international des organisations de la drogue, les ressources importantes dont elles disposent, ainsi que les mouvements de drogues et d'armes à travers les frontières ont contribué à rendre le problème de la drogue encore plus complexe. La Jamaïque lance un appel aux pays producteurs d'armes à exercer un contrôle plus sévère sur les exportations d'armes à des fins illicites, à l'image du niveau de contrôle que l'on exige de la part de petits pays, comme la Jamaïque, sur la production, la culture et l'exportation de drogues illicites. La Jamaïque soutient le Plan d'Action sur la coopération internationale et l'éradication de cultures illicites de drogues et le développement alternatif. Nous sommes convaincus que les programmes de développement alternatifs et de substitution des cultures illicites doivent être mis en place en complément à l'éradication des cultures illicites afin de permettre aux producteurs de subvenir légalement aux besoins de leurs familles. Le Gouvernement jamaïcain appelle la communauté internationale à traduire son soutien verbal aux programmes de développement alternatif par un soutien pratique et tangible. A la fois aux niveaux régional et international, nous avons tendance à oublier la dimension sociale du problème de la drogue et, en particulier, les aspects liés à la santé, l'éducation, l'intégration sociale des victimes humaines du trafic de stupéfiants. Les pays en développement ont rarement les moyens nécessaires pour faire face à ces aspects sociaux et ont besoin de l'aide internationale dans ce domaine. La Jamaïque est en faveur de la coopération judiciaire et des mesures contre le blanchiment de l'argent de la drogue et se félicite des progrès réalisés au niveau national dans ce contexte. De plus, les chefs d'Etats du CARICOM ont créé un Groupe de travail intergouvernemental sur les drogues, qui est présidé par la Jamaïque.

M. JASWANT SINGH (Vice-Président de la Commission de la planification de l'Inde) : Le défi posé par la drogue est complexe et constitue un problème mondial qui ne pourra se résoudre qu'à travers la coopération internationale. La production illicite de drogues constitue un danger pour les sociétés de tous les continents indépendamment de leur niveau de développement, et si le Nord ne coopère pas avec le Sud, les deux seront dévastés par ce fléau ce qui explique peut-être que c'est la seule session de l'Assemblée générale dans laquelle il y a un accord complet sur tous les documents proposés. Il faut maintenant traduire ce consensus en action internationale concrète. Historiquement l'Inde a joué un rôle unique dans cette sphère en tant que plus grand producteur et fournisseur d'opium licite pendant plusieurs décennies. Il existe un danger concret pour l'Inde de se transformer en pays de transit pour le trafic illicite de l'opium et de l'héroïne pour les Etats voisins. L'Inde fait face à ce défi grâce à des mesures juridiques, en s'acquittant de ses obligations internationales et en déployant des efforts bilatéraux et multilatéraux de coopération. La législation indienne reflète et partage les inquiétudes contenues dans la Convention des Nations Unies sur ce sujet. Nous

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devons en premier lieu nous engager à appliquer les mesures nécessaires au niveau national et en collaboration avec d'autres pays afin de réduire la demande de stupéfiants en faisant preuve d'une volonté sincère d'appliquer les lois et conventions existantes dans ce domaine. Il est nécessaire que l'on adopte un cadre juridique efficace pour la coopération judiciaire entre les états à travers les échanges d'informations. Pour faire face aux problèmes sociaux liés au problème de la drogue, l'aide internationale, économique ou technique, doit être accordée aux Etats-Membres sur la base de la responsabilité partagée.

M. PATRICK A. LEWIS (Antigua-et-Barbuda) : Les dynamiques de la géographie et de l'offre et de la demande semblent avoir conspiré pour placer les Caraïbes sur la ligne de front du commerce de la drogue en tant que pays de transit. Mais les dommages ne s'arrêtent pas là. De plus en plus, la cupidité des trafiquants de drogue internationaux semble destinée à faciliter l'infiltration de leurs produits dans nos communautés, ce qui risque d'initier un cycle de dépendance. Parmi les tendances les plus inquiétantes, il y a celle à payer les petits fournisseurs de drogue en nature, c'est-à-dire en drogue, plutôt qu'en argent liquide. Le commerce de la drogue dans les Caraïbes est donc passé d'un système mû par la demande à un système mû par l'offre, les fournisseurs cherchant activement de nouveaux marchés pour leurs produits parmi la population des Caraïbes. Or, les moyens de défense dont disposent les petits Etats insulaires en développement sont inadéquats face aux vastes ressources des trafiquants. Nous sommes, en outre, gravement préoccupés par la destruction qui accompagne le trafic concomitant d'armes de petit calibre et de munitions.

Pour ce qui est des politiques de développement alternatif, Antigua et Barbuda et les d'autres pays des Caraïbes ont développé un secteur de services financiers off-shore. Ce choix nous a toutefois valu de recevoir l'étiquette de paradis pour le blanchiment de l'argent et la corruption et des mesures sont prises pour saper nos efforts et limiter l'avantage compétitif dont nous jouissons. Le Gouvernement a signé un certain nombre d'accords d'interdiction et nommé un fonctionnaire chargé de coordonner l'action nationale contre le trafic de drogue et les crimes qui y sont liés.

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( suivre)