Transferts de fonds de la diaspora somalienne : une planche de salut

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Transferts de fonds de la diaspora somalienne : une planche de salut

Entretien avec le directeur général d'une société de transferts de fonds
Africa Renewal
AU-UN IST photo/Tobin Jones

Pendant vingt ans de conflit, de famines et d'inondations, l'argent envoyé au pays par les expatriés somaliens, ou « transferts de fonds », a permis de maintenir la Somalie à flot. Selon le Programme des Nations Unies pour le développement, les émigrés somaliens vivant en Amérique du Nord et en Europe transfèrent chaque année 1,6 milliard de dollars vers la Somalie. Abdirashid Duale, directeur général somalien de Dahabshiil, l'une des plus grandes sociétés de transferts de fonds en Afrique, déclare que ces transferts ont été une planche de salut. La sécurité s'étant améliorée à Mogadiscio après l'expulsion des militants islamistes d'Al-Shabaab en Octobre 2012, il estime qu'une forte croissance économique peut aider à apporter la paix. Il a fait part à Jocelyne Sambira, d'Afrique Renouveau, de ses espoirs d'une administration « favorable aux affaires ».

Que pensez-vous de la situation politique actuelle à Mogadiscio ?

La récente élection, qui a été la première tenue à Mogadiscio depuis plus de 20 ans, représente une grande réussite. Ce n'est que le début, et la nouvelle administration a beaucoup de problèmes à traiter. Je suis un homme d'affaires, pas un homme politique, il ne m'appartient donc pas de parler de politique. J'espère, toutefois, que le nouveau gouvernement sera favorable aux affaires.

À mon avis, encourager le milieu des affaires somalien, qui est extrêmement dynamique, favorisera la paix et le développement. La diaspora, en tant que principale source de financement pour les entreprises somaliennes, jouera naturellement un rôle important. Les fonds transférés, dont la majorité passe par Dahabshiil, représentent une grande partie du capital de lancement en Somalie ; ils ont permis au secteur privé d'être le « grand survivant » de ces deux dernières décennies.

La sécurité s'est améliorée dans la capitale, Mogadiscio, et le gouvernement contrôle aujourd'hui Kismayo. Selon vous,  qu'est-ce qui aidera à stabiliser le pays ?

De nombreux défis nous attendent encore. Les relever demandera du temps. Je suis cependant certain que le développement et la création d'emplois aideront, car la croissance économique joue un rôle essentiel dans la promotion et la consolidation de la paix et de la stabilité. Le milieu des affaires, qui constitue à bien des égards une réussite somalienne, peut contribuer à stabiliser la situation. Dahabshiil, par exemple, est présente sur l'ensemble du territoire somalien. Elle emploie des milliers d'habitants, sans tenir compte de leur clan ou de leur appartenance régionale. Nous utilisons également cette approche unificatrice vis-à-vis de nos clients. Nos offrons nos services à tous les Somaliens, peu importe d'où ils viennent.

En tant qu'homme d'affaires, qu'attendez-vous du nouveau gouvernement ?

Je suis d'un naturel optimiste, et j'espère que les récents changements amélioreront la vie de tous les Somaliens. J'espère que le nouveau gouvernement mettra en place des politiques visant à promouvoir le secteur privé. J'espère également qu'il se concentrera sur la nouvelle génération et écoutera les idées des jeunes. Il sera important d'inciter le nombre croissant de personnes revenant de l'étranger à investir et à rester en Somalie. De nombreux membres de la diaspora reviennent avec des compétences utiles, mais il s'agit aussi de former les gens sur place. Le nouveau gouvernement doit travailler d'arrache-pied pour encourager non seulement les investissements somaliens, mais aussi étrangers. Dahabshiil continue à montrer l'exemple en se conformant strictement aux mesures de lutte contre le blanchiment des capitaux et autres règlements, au niveau local et international.

La survie de la Somalie repose en grande partie sur les transferts de fonds. Cela va-t-il durer encore longtemps, ou vous attendez-vous à un afflux d'autres investissements ?

Les transferts de fonds restent un moyen de subsistance pour bon nombre de Somaliens. Ils les aident de bien des façons. Par nature, les Somaliens sont animés par l'esprit d'entreprise, ce qui explique la récente augmentation des investissements à Mogadiscio et dans d'autres parties du pays. Selon moi, cette tendance devrait se poursuivre. Tant qu'il y aura la paix, les gens continueront à regagner leur patrie. Les transferts de fonds devraient continuer à affluer, comme les autres investissements.

Dahabshiil a remarqué que les transferts de fonds affluent encore dans les autres pays africains où nous proposons nos services, notamment le Soudan du Sud, le Rwanda et l'Ouganda. Ces fonds contribuent largement au développement dans bon nombre des 150 pays où nous sommes présents. Ils font partie de l'économie mondiale. Ils font partie de la vie, non seulement dans les territoires somaliens, mais également dans d'autres parties du monde.

Vous vous êtes rendu à Mogadiscio. Quelle est la situation aujourd'hui ?

La sécurité s'améliore à Mogadiscio. La situation humanitaire s'est améliorée pour certains Somaliens, mais de nombreux autres ont désespérément besoin d'aide. Dahabshiil travaille et continuera de travailler avec les organisations humanitaires internationales. L'une de nos dernières actions a été le don de plus de 100 000 dollars pour les communautés victimes d'inondations dans la région de Beledweyne.